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Construction et définition du corps
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Livre électronique237 pages3 heures

Construction et définition du corps

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À propos de ce livre électronique

Cet ouvrage est un corps composé de huit contributions, comme huit parties de corps, neuf en fait car l’introduction méthodologique de Bernard Andrieu lui offre une tête généreuse et subtile qui veut déplacer vers tous les sens (à tous les sens du mot) les frontières du corps, réelles ou métaphoriques, sociales, culturelles ou imaginées. Trop souvent, les colloques publiés donnent une impression de désarticulation méthodologique et conceptuelle : chacun y offre sa part, mais le tout ne semble pas « prendre ». Rien de cela ici, l’ouvrage est cohérent (corps et rang), chair faite pour penser - traduction quasi littérale de « food for thought ». Le livre fait corps par sa multidisciplinarité d’abord : sciences humaines et sociales, littérature, philosophie, empruntent les unes aux autres, s’irriguent mutuellement ; Chacun(e) est d’abord anthropologue, historien d’art, sociologue, littéraire, historien, etc… mais chacun (e) sait se confronter à la pensée des autres, en des métissages féconds. […] Annette Becker
LangueFrançais
Date de sortie2 mars 2015
ISBN9782312033808
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    Aperçu du livre

    Construction et définition du corps - sous la direction de Hiromi Matsui, Delphine Mulard et Ken Daimaru

    Couverture_R

    sous la direction de

    Hiromi Matsui, Delphine Mulard et Ken Daimaru

    Construction et Définition du corps

    Cahier multiculturel de la Maison du Japon, numéro spécial

    LES ÉDITIONS DU NET

    22, rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes

    Comité scientifique

    Annette Becker, Claire Barbillon et Estelle Leggeri-Bauer

    Comité de lecture

    Bernard Andrieu, Claire Barbillon, Estelle Leggeri-Bauer, Guillaume Paugam

    et Marianne Simon-Oikawa

    Avec le soutien de

    Institute universitaire de France (IUF)

    Institute Nationale des langues et des civilisations orientales, Centre d’Études Japonaises (CEJ)

    Université Paris Ouest Nanterre La Défense

    École doctorale Milieux, Cultures et Sociétés du passé et du présent (ED 395)

    Université Paris Ouest Nanterre La Défense, Histoire des Arts et des Représentations (HAR)

    Publication

    Centre d’Études multiculturelles de la Maison du Japon, Fondation Satsuma,

    Cité Internationale Universitaire de Paris

    7C Boulevard Jourdan, 75690 Cedex 14, Paris, France

    MAIL : cem.maisondujapon@gmail.com

    TEL : 01 44 16 12 12

    FAX : 01 44 16 12 29

    ISSN : 2111-4048

    ISBN : 978-2-312-03380-8

    Construction

    et Définition du corps

    Remerciements

    Cette publication se base sur le colloque « Construction et définition du corps » organisé le 8 février 2014 dans le cadre du Centre d’études multiculturelles de la Maison du Japon.

    En premier lieu, je souhaite exprimer toute ma gratitude à Madame Annette Becker, Monsieur Bernard Andrieu, Madame Claire Barbillon, Madame Estelle Leggeri-Bauer, Monsieur Guillaume Paugam et Madame Marianne Simon-Oikawa pour avoir participé à notre projet en tant que comité scientifique et comité de lecture, sans qui ce projet n’aurait pu voir le jour. Je remercie également Madame Marie Piéchaud des Editions du Net qui a réalisé cette belle édition. Mes remerciements s’adressent également à l’École doctorale Milieux, Cultures et Sociétés du passé et du présent (ED 395) et le laboratoire d’HAR de l’Université Paris Ouest Nanterre la Défense, au laboratoire du CEJ de Inalco et à l’Institut universitaire de France, pour leur soutien économique.

    Last but not least, je tiens à exprimer toute ma gratitude à Delphine Mulard et Ken Daimaru, leur aide dans la coordination de ce projet.

    Paris, le 6 février 2015

    Hiromi MATSUI

    Avant-propos

    Annette Becker

    Cet ouvrage est un corps composé de huit contributions, comme huit parties de corps, neuf en fait car l’introduction méthodologique de Bernard Andrieu lui offre une tête généreuse et subtile qui veut déplacer vers tous les sens (à tous les sens du mot) les frontières du corps, réelles ou métaphoriques, sociales, culturelles ou imaginées. Trop souvent, les colloques publiés donnent une impression de désarticulation méthodologique et conceptuelle : chacun y offre sa part, mais le tout ne semble pas « prendre ». Rien de cela ici, l’ouvrage est cohérent (corps et rang), chair faite pour penser - traduction quasi littérale de « food for thought ». Le livre fait corps par sa multidisciplinarité d’abord : sciences humaines et sociales, littérature, philosophie, empruntent les unes aux autres, s’irriguent mutuellement ; Chacun(e) est d’abord anthropologue, historien d’art, sociologue, littéraire, historien, etc… mais chacun (e) sait se confronter à la pensée des autres, en des métissages féconds. Regarder Les Demoiselles d’Avignon à l’aune de l’intérêt pour la culture physique de Picasso fait beaucoup plus que donner une nouvelle interprétation de l’icône du modernisme cubiste. Il replonge artiste, thuriféraires et contempteurs de l’oeuvre – alors et aujourd’hui – dans un milieu intellectuel très sophistiqué où les Demoiselles sont mises en abyme : corps de femmes « mutilées », corps de prostituées, corps primitifs –celui des masques auxquels elles ressemblent tant et dont Picasso pourtant passionné d’art dit nègre n’avait pas connaissance en 1907, etc… Ou encore, les meubles des salles d’asile ou des écoles sont-ils vraiment conçus pour poser les corps – en relief – ou – en creux – représentations en trois dimensions de l’enfant que l’on veut éduquer? Les personnages des écrivains, des auteurs dramatiques ou des philosophes sont-ils des personnes ou « des personnalités - dotées d’un corps ? »

    On pourrait d’ailleurs subvertir encore un peu plus l’ouvrage : sa composition en deux parties, utile pour établir une table des matières, « Le corps en philosophie et littérature » puis « Le corps en histoire, histoire des arts et des représentations » ferme bizarrement les approches méthodologiques variées initiées par les éditeurs et réussies par chacun des contributeurs. Car littérature et philosophie sont aussi représentations ; comment sans elles classifier, modéliser, voire hiérarchiser, même si c’est pour le pire ? Chacun sait que le beau et le laid, le rapide et le lent, l’être et le paraître, sont vus, imaginés, discutés, qu’ils sont mouvants dans le temps et l’espace, y compris chez un seul individu, de l’enfance à la vieillesse, et ce n’est pas un hasard si les différentes représentations figurées des âges de la vie sont toujours passées par celles des corps, jeunes et à former, à éduquer, à contraindre, puis âgés, déformés, malades, tremblants. Corps sportifs et dansants, corps perclus de douleurs, corps toujours à dominer. Mesurer, soigner ou blesser voire torturer c’est aussi connaître le corps, ce corps si vulnérable, et commencer par le dessiner pour le maîtriser. L’anatomie concerne d’abord les peintres et les médecins, tout comme les techniques issues du xixe siècle, de la phrénologie à la physiognomonie : classer pour mieux rejeter, racismes.

    Enfin, le monde est immense, divers, paradoxal : une atteinte insupportable au corps dans un espace culturel – vêtu, dénudé, scarifié – peut être très désirable dans un autre « modèle des savoirs corporels ». L’historienne qui écrit ces lignes sait bien que l’histoire n’est que chaos et que les sciences humaines - dont l’histoire - et leur volonté d’ordonner les temps et les espaces voire de les modéliser est sans doute voué à l’échec. Mais quand l’imagination des auteurs prend le pouvoir via celle des penseurs et des créateurs étudiés par ces contributeurs, on obtient ce formidable volume, où Merleau-Ponty et Rousseau côtoient les frères Carache, Duchamp, Marivaux, Diderot et tant d’autres. Un grand corpus.

    Introduction

    La construction indéfinie du corps vivant :

    Pour une mobilogie des modèles

    Bernard Andrieu

    « Le corps étant une notion très indéfinie »¹

    Un travail infini

    Dans le Dictionnaire du corps en SHS que nous avons dirigé et publié en 2006 au Editions CNRS, s’est posée la question de la définition du corps. Devions nous le définir définitivement, en fixer son essence, alors même que la 1er édition réunissait plus de 420 articles qui ne parvenait pas en épuiser la richesse culturelle et l’intensité des pratiques ! La réduction à 200 articles en 2008 malgré le renouvellement de plus 80 articles n’a pas suffi. Corps du monde. Un atlas des cultures corporelles que nous avons dirigé avec Gilles Boetsch aux Edition Armand Colin en 2013 réunissait sur 5 continents et 8 thèmes plus de 40 textes qui venaient entériner la disparition d’une essence universel du corps vivant et humain : moins au nom d’un multiculturalisme qui relativiserait tout production du corps.

    La modélisation des pratiques et expériences corporelles trouvent dans des disciplines fondatrices les concepts. Ainsi l’homme est étudié selon un corps dispersé², chaque discipline contient le mouvement corporel dans les concepts qu’elle y reconnait : la psychanalyse y reconnait les pulsions, l’inconscient, le schéma corporel et l’image du corps, la phénoménologie, le corps propre, le corps vécu, la chair et l’intentionnalité, les sciences cognitives y formuleront la théorie de l’esprit, le connexionnisme, l’intelligence artificielle et le cognitivisme. La réduction des mouvements corporels³ à une science descriptive aura produit une éducation physique normative comme chez Amoros et une application des concepts sur les objets corporels étudiés.

    Chaque chercheur (euse) devrait avant tout reconstituer la question du corps à partir de sa propre construction intellectuelle qui est à l’origine de sa méthodologie pour éviter de la projeter sans connaissance de cause. Sans cette étiologie méthodologique une prétention de chaque discipline à se constituer en paradigme tend à soutenir que son propre modèle pourrait expliquer toutes les pratiques corporelles. Aucune référence souvent la formation corporelle du chercheur(euse) dans la présentation de ses résultats qui devraient être considérés comme proprement extérieur à l’observation et à l’interprétation. La réduction au sexe, à la sexualité, la maladie ou à au milieu social favoriserait un relativisme.

    Le corps dispersé, Une histoire du corps au xxe siècle titre de notre 1er ouvrage en 1993 qui devait être ma thèse de philosophie sous la direction de Claudie Lavaud avant que je ne me tourne vers la critique de la neurophilosophie dace à l’invasion du réductionnisme sous la direction de Dominique Lecourt, cette expression veut dire que des représentations contradictoires du corps ont existé sans parvenir à s’entendre les unes avec les autres et en prétendant contenir chacune en son sein le sens absolu. Deux topiques pouvaient être ainsi distinguées : une topique interne qui porte sur le cerveau, l’étude phénoménologique qui porte sur la chair, ce qui existe entre le corps et l’esprit et la topique externe qui porte sur l’image du corps et la culture. On avait des modèles contradictoires pour penser un même objet.

    Dans les années quatre-vingt, nous avons pris conscience de la pluralité de ces modèles contradictoires. Et nous avons essayé d’y réagir en refusant cette confrontation stérile sans tomber dans la croyance d’une unification totalitaire des sciences en une seule. Il aura fallu choisir d’autres voies que celle des petits pas en vue d’occuper le territoire de l’autre ou la solution radicale qui consiste à nier l’existence de l’autre. Une première tentative a été l’essai d’une autre stratégie qui porta sur les « effets de bordures ». On peut en effet dégager des problèmes communs à deux disciplines apparemment antagonistes en relevant des notions qui présentent des analogies, et on va tenter de faire dialoguer les spécialistes uniquement sur ces points où des convergences peuvent paraître possibles. On eut ainsi l’apparition de divers couples conceptuels aux frontières des trois groupes de disciplines que nous avons précédemment différenciés. Il y eut les couples cerveau-pensée, corps-vécu, inconscient-cognition. L’idée donc selon laquelle il y aurait un double problème apparu dans la confrontation entre disciplines est ce que j’ai appelé « l’effet-bordure ».

    Plus on tirait sur une discipline, plus on voyait les spécialistes appartenant à cette discipline pencher vers le psychisme ou vers le naturalisme selon la discipline en question. Ces personnes niaient l’idée de bordure. Mais elles niaient aussi l’idée d’intersection entre les disciplines. Il n’y avait donc pas d’intersciences. Les personnes qui croient que leur science est paradigmatique pensent également de celle-ci qu’elle peut devenir totalitaire. Lorsque Michel Jouvet publie son livre sur le rêve, un dialogue devient possible avec les psychanalystes mais les hypothèses de départ et les méthodes d’analyse du rêve sont très différentes. Il en est de même pour la mémoire ou le conditionnement. Des intersections n’existent pas spontanément. Et pourtant des philosophes ou des phénoménologues vont travailler sur des représentations, perceptions ou enactions, qui se situent dans l’intersection avec les sciences naturelles. Et des questionnements vont apparaître sur des espaces communs à deux sciences. Se pose alors le problème de la modélisation. Car, dans un premier temps, puisque les concepts, les hypothèses et les méthodes diffèrent, les théories divergent aussi. On peut s’en tirer en disant qu’il y a une différence de point de vue. Cela permet de sauver les apparences disciplinaires.

    Mais une autre voie est possible. On peut aussi travailler ensemble pour redéfinir les concepts afin de créer un langage commun et nouveau. Et là se pose, par exemple, la question des hypothèses sur le fonctionnement du corps vivant. Or quand on reprend les textes qui présentent les fondements théoriques des disciplines, psychiques ou matérialistes, on a des surprises. Chez Descartes, comme l’a démontré Denis Kambouchner, il n’y a pas que le dualisme puisqu’il y a aussi, dans plusieurs textes, communication entre le corps et l’esprit. On ne peut pas faire de Descartes un dualiste pur et dur.

    Qu’est ce que la relecture de ces textes, autrefois peu analysés, pourrait donner ? On peut produire, si on accepte ces relations, des concepts nouveaux. Par exemple, les idées de neurocognition, de biocognition, de chair du cerveau ou de cerveau psychologique peuvent naître. On aura ainsi des sciences nouvelles qui s’occuperont de ces objets hybrides nouveaux qui peuvent naître de la contestation du dualisme rigoureux. On peut en citer quelques-unes : les sciences de la phénoménologie cognitive, de la phénoménologie transcendantale, de la neurophénoménologie ou de la naturalisation du cognitivisme. L’intérêt de notre époque sera sans doute d’essayer de produire une synthèse qui ne soit pas totalitaire. La différence sciences dures et molles existe toujours pour ce qui est de la méthodologie. Mais des idées consistantes apparaissent dans les sciences dites molles. On cherche donc à articuler conceptuellement l’interscience et à fonder cette idée.

    Tout cela renvoie à une reformulation des disciplines fondamentales. On se trouve dans un moment où on voit apparaître des disciplines qui sont à la fois traditionnelles, mais qui essayent de se qualifier en examinant quelque chose qui relève de l’intégratif. On peut citer la neurobiologie, le développement intégratif, la bioéthique, les thérapies corps-médecin, les médecines interculturelles ou ethnopsychiatries, les théories de l’action, la philosophie du corps pensant, l’anthropologie biomédicale, la neuroendocrinologie, la psychopathologie cognitive, la phénoménologie biocognitive. Ce qui fait bouger les choses, c’est que les cas cliniques montrent des fonctionnements qu’on ne percevait pas auparavant. On peut donc créer des liens dynamiques.

    L’indéfinition du corps vivant

    Le corps vivant est un sujet mobile dont l’objectivation paraît cristalliser ses mouvements dans des concepts. Une « épistémologie des savoirs corporels » (Attali, M., Saint-Martin, J. 2014, Ottogalli-Mazzacavallo C., Liotard P., 2012) découpent encore l’objet en fonction des disciplines physiques. Comme organisme vivant et matière bioculturelle, le corps change (Vanpoulle Y., 2011 ; Quin G., Bohuon A., eds., 2013) selon sa situation et son milieu au fur et à mesure des relations et des incorporations. L’étude du corps vivant humain par les sciences dites humaines et sociales prend-elle en compte cette mobilité et ce mouvement ? La tentation de la cristallisation ontologique dans une définition substantielle voudrait contenir le corps dans une universalité. Ainsi le droit universel à disposer de son propre corps serait une des structures transculturelles : or l’anthropologie structurale a p. démontrer combien les universaux, comme la parenté, la filiation, la relation au cosmos, la communication avec les morts ou les rituels de passage sont des constantes variables culturellement.

    Le corps est bioconstruit culturellement par les interactions avec ses milieux naturels et sociaux. Cette délimitation s’effectue par l’incorporation de normes qui viennent activer et spécialiser telle ou telle fonction. Jean-Pierre Warnier, au nom de la culture matérielle, précise comment « l’extériorité sujet/objet s’est réduite au bénéfice d’une incorporation dynamique, une synthèse corporelle » (Warnier J.P., 1999, 111). Nous pourrions avoir un autre corps si nous avions été éduqués dans un autre milieu, une culture différente ou une orientation de genre singulière. Croire que son corps est limité est la conséquence d’un enfermement psychologique, le confort sinon le conformisme, dans l’état actuel de notre corps vécu. Cette croyance en la permanence de son identité et en sa dégénérescence progressive nous prouve de la compréhension des processus du vivant de notre corps. Comme forme stabilisée d’un corps en équilibre, la conscience du corps vécu pourrait satisfaire celui ou celle qui confond l’image actuelle de son corps avec son corps vivant : « la croyance est aussi devenue une tentative pour s’accrocher à la vie, la saisir et la garder pour soi-même » (Watts A.W., 1951, 26).

    Il faudrait consentir à perdre la conscience en étant envahi par le corps vivant si nous pouvions abandonner la conscience du corps vécu pour nous laisser éveiller par le vivant

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