Vous dénoncez dans votre ouvrage l’opposition traditionnelle entre la littérature et les sciences sociales. En quoi cette partition est-elle obsolète?
Cette opposition repose la pseudo-théorie des vases communicants: plus c’est littéraire, moins ce serait scientifique, et réciproquement. Au contraire, c’est en disant « je », en assumant sa position de chercheur-témoin, en racontant son enquête, en faisant comprendre grâce à des émotions rationnelles, qu’on devient plus objectif. À mon sens, un texte de sciences sociales est d’autant plus scientifique qu’il est littéraire. Mais ne confondons pas l’écriture littéraire et le roman qui, lui, implique la fiction. Or les sciences sociales ne seront jamais fiction, pure construction verbale, ni ce grand n’importe quoi postmoderne. La seule invention que tolère une discipline comme l’histoire,