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Victor Hugo, la pensée française
Victor Hugo, la pensée française
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Livre électronique240 pages3 heures

Victor Hugo, la pensée française

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À propos de ce livre électronique

Victor Hugo, la Pensée Francaise reprend des thèmes développés par le poète dans Actes et Paroles, avec le souci de leur donner une tonalité moderne. L’ouvrage propose une analyse de la pensée du poète, non seulement pour savoir, connaître et comprendre, mais également pour y puiser, face à nos propres défis, une source d’inspiration.
LangueFrançais
Date de sortie19 févr. 2015
ISBN9782312030616
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    Aperçu du livre

    Victor Hugo, la pensée française - Bernard-M Kaspar

    cover.jpg

    Victor Hugo,

    la pensée française

    Bernard-M Kaspar

    Victor Hugo,

    la pensée française

    Essai

    LES ÉDITIONS DU NET

    22, rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes

    « Vivant esprit de la France,

    où te saisirais-je, si ce n’est en moi ? »

    (Jules Michelet)

    © Les Éditions du Net, 2015

    ISBN : 978-2-312-03061-6

    Présentation de l’ouvrage

    Présentation de l’ouvrage

    Avant-propos

    Le romantisme face aux défis du modernisme

    Révolution française et XIXe siècle

    La misère

    Le rôle de l’écrivain

    République, gouvernement, démocratie

    Le rôle de la France dans le monde

    Justice, magistrature, prison

    Guerre et paix

    La place des femmes dans la société

    La question de l’enseignement

    Épilogue

    Avant-propos

    Il y a quelques années, lors d’une émission télévisée, les Français ont élu Victor Hugo deuxième plus grand Français de tous les temps. Mais sur quoi porte cette grandeur ? Nous avons tous à l’école récité des poèmes, entendu des citations, lu des livres de Victor Hugo, mais comment peut-on expliquer qu’un écrivain, aussi génial fut-il, ait traversé les âges au point d’aujourd’hui encore susciter l’admiration de tous ? Tant d’auteurs se sont posés la question du poète chinois Tou Fou : « Que puis-je écrire qui puisse rendre mon nom illustre ? » Qu’il se soit ou non posé cette question, il est indéniable que Victor Hugo a trouvé la réponse. Rien n’est plus intemporel ou inaltérable que la pensée, non celle de l’instant, capricieuse, mais celle qui puise sa source dans tous les espoirs, toutes les déceptions, toutes les luttes, tous les accomplissements. C’est non seulement l’âme d’un peuple, mais aussi d’un siècle que l’auteur d’Hernani a su incarner, en se présentant, à travers les conflits politiques et idéologiques qui ont émaillé le XIXe siècle, comme le trait d’union entre l’idéal français malmené et l’avènement d’une nation affranchie de l’oppression politique et des injustices sociales. Il a donc fallu pour cela, parce qu’il lui semblait qu’elle était captive, prise en otage tant par une clique illégitime que par une contingence sans frein, s’approprier l’âme de la France, incarner sa pensée et l’exprimer par ses écrits, ses discours et ses prises de position.

    En étudiant Actes et Paroles j’ai décidé de reconstituer la pensée de l’auteur à travers neuf thèmes qui permettent de comprendre l’évolution de la pensée du pays, et comment cette pensée a contribué à modeler les caractères des bâtisseurs du futur. Victor Hugo est le penseur de la France, de ce qu’elle a de plus noble, le guide qui suscite les plus purs engagements et les plus belles ambitions.

    Le romantisme face aux défis du modernisme

    Existe-t-il quelqu’un capable de définir la littérature ? Quelqu’un capable de lui conférer un sens ? Une personne a déclaré que la littérature n’est utile à rien et que pourtant, elle est essentielle.

    Cette essentialité qui, aujourd’hui plus que jamais, est comprise dans un aspect purement abstrait, puise sa source dans la définition tissée par les Parnassiens. En 1835 Théophile Gauthier rédige son roman Mademoiselle de Maupin, et dans la préface nous lisons : « Il n’y a de vraiment beau que ce qui peut ne servir à rien. Tout ce qui est utile est laid. » Cette exaltation du beau en opposition à l’utile sera le cœur de la pensée parnassienne, notamment après l’échec présumé du romantisme hugolien, et servira de matériau à l’élaboration de la doctrine de l’Art pour l’Art. Cette doctrine exige que le poème tire sa beauté d’un exploit technique, affranchi de l’épanchement lyrique de l’auteur : originalité de la rime, variété du mètre et des figures, adéquation du langage et de la pensée. C’est aussi la neutralité de l’Art quant aux mouvements sociaux et politiques. Le parnassien s’affranchit de la morale pour prôner l’esthétisme.

    L’ascension irrésistible de Théophile Gauthier semble née d’une contestation. Il dénonce l’excès de lyrisme d’un Lamartine, le romantisme social d’une George Sand ou les tentations révolutionnaires d’un Victor Hugo. Cet usage de la littérature à des fins politiques a, selon lui, conduit à l’échec de la littérature. Cette prise de conscience se justifie par l’échec de la révolution de 1848 et donc, de l’idée qu’avaient portée les romantiques. Dans son roman La curée, Émile Zola traduit ainsi le climat des débuts du Second Empire : « Le silence s’est fait à la tribune et dans les journaux (…). La politique épouvantait comme une drogue dangereuse. Les esprits lassés se tournaient vers les affaires et les plaisirs. » Dès lors, la littérature de l’époque semble exclure les héros en désir ou en capacité de changer leur destin ou celui du monde. On entre dans une ère de léthargie où le déterminisme semble guider le sort des individus.

    Donc, si nous comprenons bien, cette littérature naît du sentiment de l’échec du romantisme idéaliste et prométhéen. Mais qu’en fut-il réellement ? Sous l’ère Napoléon III, si la plupart des auteurs se sont soumis, la voix de la résistance a continué de s’exprimer de manière diverse. Ainsi, Noël Parfait (1814-1869) est expulsé en Belgique lors du coup d’état ; Auguste Barbier (1805-1882) demande à être dispensé de la visite à l’empereur lors de son élection à l’Académie française en 1869 ; Victor de Laprade (1812-1883) perd sa chaire de littérature de l’université de Lyon en 1861 pour avoir publié Les Muses d’État, dans laquelle il s’attaque au régime impérial (Dictionnaire des Auteurs, Laffont-Bompiani, Robert Laffond, tome I p. 217, tome III p. 40 ; Victor de Laprade, l’homme, son œuvre poétique, Pierre Séchaud, Paris, 1934). Mais la voix la plus forte résonnera à Bruxelles, à Jersey, puis à Guernesey, par l’intermédiaire de Victor Hugo. Certes, les Français avaient plébiscité le coup d’état du 2 décembre 1851, puis le rétablissement de l’Empire, éteignant ainsi les feux libertaires du Romantisme, mais les événements de 1870 montrent que cet échec n’était qu’apparent : la République est rétablie, cette fois de manière définitive, et Victor Hugo est accueilli triomphalement à Paris au cri de « Vive Hugo ! Vive la République ! » Autrement dit, l’erreur au XIXe siècle, dans le sens de l’Histoire, n’aurait pas été le romantisme idéaliste, mais le refus de cet idéal tel que l’ont exprimé Gauthier et sa lignée, car on s’accorde à prétendre que s’il n’y avait pas eu un Victor Hugo, peut-être n’y aurait-il pas eu de troisième république et, de fait, pas de quatrième ni de cinquième, et ni toutes les valeurs universelles que véhicule la pensée républicaine.

    Et qu’en est-il de nos jours ? Que reste-t-il de l’idéal romantique ? Les échecs successifs du monde post-romantique ne sont-ils pas le résultat de l’abandon de cet idéal ? Lorsque Hugo meurt en 1885, les autorités rétablissent pour lui la devise sur le fronton du panthéon : « Aux grands hommes, la patrie reconnaissante ». Dans son testament il demande ceci : « Je donne cinquante mille francs aux pauvres. Je désire être porté au cimetière dans leur corbillard. Je refuse l’oraison de toutes les Églises, je demande une prière à toutes les âmes. Je crois en Dieu. » (Tiré de Hugo poète, Anne Brunswick, p. 17).

    Pourquoi donc, forts de cette leçon du XIXe siècle, ne sommes-nous pas parvenus à ériger une société plus juste ? Le XXe siècle a été le plus sanglant de l’Histoire, et le XXIe commence très dangereusement. Partout le cœur des hommes semble s’endurcir. Nous avons basculé dans l’ère du terrorisme, la pollution s’étend, les capitales sont en proie à une crise économique, les contestations sociales se radicalisent et un tiers de la population mondiale vit en-dessous du seuil de pauvreté. Ce résultat était-il inévitable ? Prenons la famine. Si la terre ne produisait pas suffisamment de denrées alimentaires, la malnutrition serait compréhensible. Mais c’est loin d’être le cas. Rien qu’en Belgique 15 kg de nourriture sont gaspillés par personne et par an. Chaque année un quart de la production alimentaire mondiale finit à la poubelle, tandis qu’au même moment 13 % de la population meurt de faim. Si nous nous étions occupés des pauvres comme Victor Hugo le préconisait, la situation ne serait pas aussi alarmante.

    Le politologue Olivier Duhamel soutient que « l’idéalisme politique des Romantiques perdure dans la conscience collective vu les références relativement fréquentes à telle ou telle phrase de Victor Hugo », mais la question que nous nous posons est finalement celle-ci : si l’idéal romantique avait été préservé par les générations post-hugoliennes, le monde d’aujourd’hui serait-il meilleur ? Et certains problèmes sociaux pourraient-ils être résolus à la lumière des théories romantiques ?

    Il y a chez les auteurs romantiques quelque chose de très particulier, quelque chose qui fait d’eux des hommes et des femmes à part. Le poète romantique se distingue de ses prédécesseurs et de ses successeurs en ce sens qu’il porte la poésie dans toute la plénitude de son être. Le poète devient la poésie, la poésie devient le poète, d’où l’emploi du « je » qui fait de lui et le sujet et l’objet du poème. L’intellect, le cœur, le vécu, les convictions, tout ce qui concerne l’homme est impliqué dans l’accomplissement de son art, phénomène qui conduit à l’héroïsation du poète. Alfred de Vigny explique cette distinction dans la Préface à Chatterton (1835) : l’homme de lettres tire son talent des goûts du peuple, il est carriériste et incarne un idéal moral et intellectuel, tandis que le poète, héros de l’échec et du malheur, accède aux sphères supérieures de la beauté et de la vérité. Il est unique en ce sens qu’il est habité par une force et une présence intérieure qui lui permettent de révéler des mondes inconnus. Le romantique considère la poésie comme le plus haut degré du savoir ; atteindre ce savoir, c’est s’élever au-dessus des hommes. Mais cette élévation et donc, cette solitude, ce besoin d’absolu, cette recherche d’un ailleurs, c’est aussi le martyre et la passion du poète : Oberman, de Senancour, René, de Chateaubriand, Adolphe, de Benjamin Constant, sont la matérialisation de cette mise à part du romantique.

    Mais cette position unique semble lui conférer un pouvoir, en particulier la capacité de voir au-delà des évidences. De fait, nombre de romantiques ont été des visionnaires. Prenons Chateaubriand. Chateaubriand est aristocrate et soutient la monarchie, il est d’ailleurs sous la Restauration, ministre de Louis XVIII. Toutefois, dans Mémoires d’outre-tombe, il écrit ceci :

    « A Rome le règne de l’homme fut substitué au règne de la loi : on passa de la république à l’empire ; notre révolution s’accomplit en sens contraire : on incline à passer de la royauté à la république, ou, pour ne spécifier aucune forme, à la démocratie ; cela ne se fera pas sans difficulté. »

    Chateaubriand a achevé la rédaction de cet ouvrage en 1841, alors que la France était sous la monarchie de Louis-Philippe. Pourtant, sept ans plus tard, et de façon définitive en 1870, la république sera rétablie, après les « difficultés » de l’Empire.

    Alfred de Vigny également fait montre d’une grande clairvoyance quant à l’avenir. Dans Les Destinées, on trouve une strophe prophétique annonçant l’effet qu’auraient nos machines modernes (« un taureau de fer qui fume, souffle et beugle ») sur les moyens de communication :

    La distance et le temps sont vaincus. La science

    Trace autour de la terre un chemin triste et droit

    Le Monde est rétréci par notre expérience

    Et l’Équateur n’est plus qu’un anneau trop étroit.

    Plus de hasard. Chacun glissera sur sa ligne

    Immobile au seul rang que le départ assigne,

    Plongé dans un calcul silencieux et froid.

    « La Maison du Berger »

    Le TGV, le téléphone et Internet confirment qu’aujourd’hui « la distance et le temps sont vaincus ». Mais comme il le laissait également entendre par le lexique employé (triste, silencieux, froid), ces progrès de la science ne rendraient pas les rapports humains plus chaleureux, bien au contraire. Dans La Colère de Samson, il annonçait que les rapports entre couples se compliqueraient :

    Bientôt, se retirant dans un hideux royaume,

    La Femme aura Gomorrhe et l’Homme aura Sodome,

    Et, se jetant de loin un regard irrité,

    Les deux sexes mourront chacun de son côté.

    Ces prédictions ont été avérées. Aujourd’hui en France, un mariage sur trois se solde par un divorce et un sur deux en région parisienne. Le déferlement de sites de rencontres, d’agences matrimoniales, et le nombre sans précédent de célibataires et de familles monoparentales montrent à quel point les rapports hommes-femmes sont devenus compliqués.

    Victor Hugo nous fournit un autre exemple de cette capacité des romantiques à percevoir l’avenir. Dans Les Contemplations nous trouvons ces vers écrits en 1846 :

    Les révolutions, qui viennent tout venger,

    Font un bien éternel dans leur mal passager.

    Notons bien les deux aspects de cette révolution :

    Elle provoque un mal passager

    Elle apporte un bien éternel

    Deux ans plus tard se produit la révolution de 1848 instaurant la Deuxième république. Mais le 2 décembre 1851 Louis-Napoléon Bonaparte déclenche un coup d’état, puis rétablit l’empire. Il est très significatif qu’à chaque fois, il demande au peuple français d’approuver ou de désapprouver son action par référendum, et à chaque fois les Français le plébiscitent. C’est ainsi que sept millions cinq cent mille voix approuvent le coup d’état contre à peine six cent mille (Les châtiments, Introduction, Guy Rosa, p. XXXV), de sorte que, comme nous l’indiquions plus haut, le pays s’installe dans une sorte d’indolence face au pouvoir. Mais Hugo reste ferme dans ses convictions, et il va décrire avec une parfaite clairvoyance la réalité de la situation :

    « Vous ne voyez donc pas que c’est tout cela qui est chimère ! Vous ne voyez donc pas que le Deux-Décembre n’est qu’une immense illusion, une pause, un temps d’arrêt, une sorte de toile de manœuvre derrière laquelle Dieu, ce machiniste merveilleux, prépare et construit le dernier acte, l’acte suprême et triomphal de la Révolution française ! » (Napoléon le Petit, Conclusion II, 2 ; t. VIII P. 537).

    Donc, à contre-courant de la pensée générale, Hugo soutient que le Second Empire n’est qu’« une illusion, une pause, un temps d’arrêt », et que par son entremise sera parachevée l’action de 1789. Et les faits vont lui donner raison. Le Second Empire ne durera que 18 ans et aboutira au rétablissement de la république.

    Victor Hugo avait vu juste. Si la révolution de 1848 a amené un « mal passager » qui a conduit le peuple à plébisciter le retour à l’empire, elle a aussi apporté un « bien éternel » puisque aujourd’hui, XXIe siècle, nous sommes encore et sans doute pour toujours sous la république. Mais pour Hugo, ce n’est pas une fin en soi. Il prédit que les révolutions se poursuivront tant qu’un idéal de justice ne sera pas définitivement instauré. Dans William Shakespeare (1864), il établit une corrélation entre la révolution et le sens même de l’Histoire : « Ce mot, Révolution, sera le nom de la civilisation, jusqu’à ce qu’il soit remplacé par le mot Harmonie. »

    Oui, l’une des caractéristiques du poète romantique fut la capacité à déborder son espace temporel au point, parfois, de lire le livre de l’avenir. Parlant de Hugo, Paul Eluard déclare :

    « Victor Hugo, dans la poésie française, est un astre unique. Il n’a pas seulement l’éclat et la dimension de tout un siècle et de tout un pays, mais la grandeur et la lumière de l’universel et de l’avenir. » (Hugo, poète vulgaire, 1950). Selon Paul Claudel : « Victor Hugo est un inspiré, on peut même dire qu’il fut l’Inspiré par excellence, et son œuvre est la meilleure démonstration qui soit de ce phénomène étrange, et si embarrassant pour la disposition critique, que l’on appelle l’inspiration. ». Et Gaëtan Picon ajoute : « Ouvert à la fois aux signes mystérieux du monde et à ceux de l’événement temporel, Hugo apparaît comme un visionnaire cosmique qui a tenté d’accorder sa révélation de l’énigme universelle à une interprétation optimiste et rationaliste de l’histoire humaine. »

    Mais les romantiques étaient aussi des avant-gardistes qui, à court ou à long terme, ont impulsé des avancées sociales. Ils sont à l’origine d’un certain nombre de progrès accomplis par la société. Avant de revenir sur Victor Hugo, nous évoquerons d’abord les exemples de Madame de Staël et de Lamartine.

    Germaine de Staël, fille de Necker, va, durant toute sa vie, revendiquer une originalité de pensée qui déroutera nombre de ses contemporains. Dans ses œuvres, telles que De la littérature (1800), Delphine (1802), Corinne (1807), elle défend le droit des femmes à l’indépendance, le droit au divorce, et un rôle actif dans la société, idées ô combien révolutionnaires à cette époque.

    « L’existence des femmes en société est encore incertaine sous beaucoup de rapports (…). Il arrivera, je le crois, une époque quelconque, où les législateurs philosophes donneront une attention sérieuse à l’éducation que les femmes doivent recevoir, aux lois civiles qui les protègent, aux devoirs qu’il faut leur imposer, au bonheur qui peut leur être garanti ; mais, dans l’état actuel, elles ne sont pour la plupart, ni dans l’ordre de la nature, ni dans l’ordre de la société. » (De la littérature II, 4). L’Histoire lui a donné raison. Mais elle exprime aussi sa haine du tyran, le rejet de l’obscurantisme religieux au profit de la Raison, et le droit à la liberté de pensée, près d’un siècle avant que les délits d’opinion ne soient supprimés du droit français. Ces prises de position courageuses lui vaudront d’être condamnée à l’exil en 1803, et ce pendant dix ans.

    Alphonse de Lamartine aussi s’illustre par son avant-gardisme. Arthur Rimbaud a écrit de lui : « Lamartine, quelquefois voyant, mais étranglé par la forme vieille. » Il a été l’un des premiers à plaider pour l’abolition de l’esclavage. Après la révolution de février 1848, il nomme Victor Schoelcher sous-secrétaire d’état au sein du gouvernement provisoire. Le 27 avril 1848 un décret abolissant l’esclavage est ainsi publié, impulsant par ailleurs le mouvement abolitionniste aux États-Unis et qui verra son accomplissement sous Abraham Lincoln. En 1845, il s’exprime en faveur de la séparation de l’Église et de l’État, soixante ans avant que la loi de la laïcité ne soit votée ; dans Les Harmonies poétiques et religieuses, il écrit le poème « Contre la peine de mort » ; en 1846 il se prononce pour l’élaboration d’un système de retraite pour les travailleurs. Ce système sera mis en place quatre ans plus tard et reste à ce jour l’un des piliers de l’infrastructure socio-économique française.

    Mais le bilan le plus fameux en matière d’avant-gardisme et d’avancées sociales est certainement celui de Victor Hugo :

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