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Droit des sociétés commerciales
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Livre électronique973 pages7 heures

Droit des sociétés commerciales

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À propos de ce livre électronique

Instruments juridiques au service du développement économique, les sociétés commerciales font naturellement l’objet d’une initiation pour le juriste débutant, en seconde ou troisième année de licence. Mais la densité et la complexité des règles qui en fondent l’organisation rebutent souvent au seuil de l’étude dont le domaine paraît ainsi réservé aux spécialistes. Une approche adaptée de ces règles permet de lever l’obstacle qui n’a rien d’insurmontable. Elle emprunte à la méthode des comparatistes et fait une large place à la mise en perspective des éléments qui composent les différents régimes des sociétés commerciales. Le présent ouvrage exploite les ressources de cette méthode appliquée à un contenu pédagogique soigneusement sélectionné et illustré. Après une introduction favorisant une immersion progressive du lecteur au coeur de la matière, se trouve placé sous son regard, en chacun des thèmes abordés, l’exposé exhaustif des mécanismes propres aux diverses catégories de sociétés commerciales ordonné selon une construction simple et claire :

   • L’existence de la société commerciale
   • Le fonctionnement de la société commerciale
   • Les mutations de la société commerciale

L’ouvrage est à jour des nombreuses réformes qu’a subies la matière et décrit les chantiers législatifs en cours :

   • loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire ;
   • loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes ;
   • ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014 relative au droit des sociétés prise en application de l’article 3 de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 ;
   • ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014, relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique ;
   • loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives ;
   • projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques considéré comme adopté par l’Assemblée nationale, en nouvelle lecture, le 10 juillet 2015, en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution. 

  Il renferme également les dernières décisions rendues par le juge de cassation sur des questions sensibles.
LangueFrançais
Date de sortie27 oct. 2015
ISBN9782390130697
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    Aperçu du livre

    Droit des sociétés commerciales - François Duquesne

    couverturepagetitre

    En France, la collection « Paradigme » accompagne l’étudiant en droit du début de ses études jusqu’à l’accès à sa profession.

    Paradigme – Manuels

    Rédigés dans un langage accessible, les « Manuels Paradigme » couvrent les différents concepts juridiques enseignés de la Licence 1 au Master 1 en France. Ils sont systématiquement mis à jour chaque année.

    Conformes aux programmes de licence et de master, ils fournissent également une excellente préparation aux concours administratifs (catégories A et B) et aux examens professionnels (ENM, CRFPA, ENSP, EOGN, PJJ, SPIP…).

    Sous la direction de François Fourment, professeur de droit privé à l’Université de Tours et Gilles Dumont, professeur de droit public à l’Université de Nantes, directeur de l’Université numérique juridique francophone.

    Déjà parus :

    Christophe Albiges, Introduction au droit, 2e éd., 2015

    Christian Beaudet, Introduction générale et historique à l’étude du Droit, 2000

    Christian Beaudet, Institutions, vie politique et faits sociaux de 1789 à 1958, 2000

    Vincent Bonnet, Droit de la famille, 4e éd., 2013

    Anne-Sophie Brun-Wauthier, Régimes matrimoniaux et régimes patrimoniaux des couples non mariés, 5e éd., 2015

    Marjorie Brusorio-Aillaud, Droit des obligations, 6e éd., 2015

    Marjorie Brusorio-Aillaud, Droit des personnes et de la famille, 6e éd., 2015

    Olivier Cachard, Droit international privé, 4e éd., 2015

    Michel Drain, Relations internationales, 19e éd., 2015

    Philippe Foillard, Finances publiques, 14e éd., 2014

    Philippe Foillard, Droit administratif, 4e éd., 2015

    Philippe Foillard, Droit constitutionnel et institutions politiques, 21e éd., 2015

    Thierry Fossier, Droit pénal spécial – Affaires, entreprises et institutions publiques, 3e éd., 2015

    François Fourment, Procédure pénale, 14e éd., 2013

    Thierry Garé, Droit pénal spécial – Personnes et biens, 4e éd., 2015

    Franck Héas, Droit du travail, 4e éd., 2015

    Philippe Hoonakker, Procédures civiles d’exécution. Voies d’exécution, procédures de distribution, 4e éd., 2015

    Dimitri Houtcieff, Droit des contrats, 2015

    Olivier Le Bot, Contentieux administratif, 2e éd., 2015

    Christophe Lescot, Organisations européennes : Union européenne, Conseil de l’Europe et autres organisations, 16e éd., 2015

    Gérard Mémeteau, Droit des biens, 8e éd., 2015

    Harold Renout, Droit pénal général, 18e éd., 2013

    Florent Roemer, Contentieux fiscal, 2e éd., 2014

    Marie-Christine Rouault, Droit administratif et institutions administratives, 3e éd., 2015

    Philippe Strickler, Procédure civile, 6e éd., 2015

    Béatrice Thomas-Tual, Droit de la fonction publique, 2015

    Pour toute information sur nos fonds et nos nouveautés dans votre domaine de spécialisation, consultez nos sites web via www.larciergroup.com.

    © Groupe Larcier s.a., 2015

    Éditions Larcier

    Espace Jacqmotte

    Rue Haute, 139 – Loft 6 – 1000 Bruxelles

    ISSN 2294-3323

    Bibliothèque nationale, Paris : août 2015

    Bibliothèque royale de Belgique, Bruxelles : 2015/0031/401

    EAN : 978-2-39013-069-7

    Cette version numérique de l’ouvrage a été réalisée par Nord Compo pour le Groupe Larcier. Nous vous remercions de respecter la propriété littéraire et artistique. Le « photoco-pillage » menace l’avenir du livre.

    Liste des principales abréviations

    Sommaire

    L

    ISTE

    DES

    PRINCIPALES

    ABRÉVIATIONS

    I

    NTRODUCTION

    PARTIE 1

    L’

    EXISTENCE

    DE

    LA

    SOCIÉTÉ

    COMMERCIALE

    Chapitre I – L’acte juridique de société commerciale

    Chapitre II – La personnalité juridique de la société commerciale

    Chapitre III – La constitution de la société commerciale

    PARTIE 2

    L

    E

    FONCTIONNEMENT

    DE

    LA

    SOCIÉTÉ

    COMMERCIALE

    Chapitre I – La vie collective au sein de la société commerciale

    Chapitre II – La gestion de la société commerciale

    Chapitre III – Le contrôle de la gestion de la société commerciale

    PARTIE 3

    L

    ES

    MUTATIONS

    DE

    LA

    SOCIÉTÉ

    COMMERCIALE

    Chapitre I – Les mutations internes de la société commerciale

    Chapitre II – Les restructurations de la société commerciale

    B

    IBLIOGRAPHIE

    I

    NDEX

    T

    ABLE

    DES

    ENCADRÉS

    Introduction

    C. civ., art. 1832

    La société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d’affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l’économie qui pourra en résulter.

    Elle peut être instituée, dans les cas prévus par la loi, par l’acte de volonté d’une seule personne.

    Les associés s’engagent à contribuer aux pertes.

    1

    Mise en commun de moyens. La société commerciale est une technique de gestion fondée sur la mise en commun de moyens nécessaires à la poursuite d’une activité économique. À ce titre, elle ne s’éloigne pas d’autres pratiques qui tendent également à la mutualisation des ressources que requiert la réalisation d’un tel objectif. Pour cette raison encore, la société commerciale peut être rapprochée de certaines conventions passées aux fins d’exécution d’une tâche en commun, tel le contrat d’entreprise lorsque la réalisation de l’ouvrage implique, notamment, une cotraitance ¹ et, plus généralement, de l’ensemble des conventions de collaboration. Mais si la société commerciale naît de la contribution de plusieurs personnes à l’accomplissement d’une œuvre collective, ses spécificités ne s’attachent pas à ce seul objet.

    Alors que la collaboration n’implique rien de plus qu’un faisceau d’activités conduisant à un concours de droits sur un ensemble de choses ², la société commerciale s’accompagne, en principe, de la création d’un patrimoine que composent les moyens mis en commun. L’entreprise commerciale à forme sociale désigne ce patrimoine ainsi que les règles de gestion de ce patrimoine. Elle se distingue de l’entreprise individuelle qu’incarne la personne physique du commerçant, lequel enregistre le bénéfice et supporte également seul le risque généré par l’activité économique.

    2

    Partage des résultats et réduction des risques. Le partage du résultat, d’ailleurs, marque de son empreinte le régime de la société commerciale. Il caractérise cette variété de groupements et constitue l’objectif de la mise en commun des moyens qui en fonde l’existence. Il recouvre également une limitation des risques liés à l’activité économique au profit de ses membres. La personnification de la société commerciale prémunit les biens personnels des associés contre ces risques. La société commerciale n’est donc pas seulement un patrimoine. Elle est aussi une technique d’organisation patrimoniale. Mais la description de cet objet appelle de nombreuses nuances, car la société commerciale ne forme pas une catégorie homogène.

    3

    Diversité des profils sociétaires. Les sociétés commerciales empruntent leurs caractères à la diversité de leurs règles d’organisation et de fonctionnement. Certaines sociétés révèlent une personnalité plus forte, ou plus expansive, que les autres. La volonté de leurs membres s’efface, alors, presque totalement derrière celle qu’elles expriment. Ouvertes à l’accueil de nouveaux associés, leur profil est celui d’entités offertes à la croissance et aux mutations économiques. D’autres manifestent une plus grande réserve à l’égard du monde qui les entoure et n’accordent que faiblement leur confiance en dehors de leurs créateurs dont la volonté imprime fortement leurs décisions. D’autres, encore, se concentrent sur la sécurité que leur procure l’autonomie de leur patrimoine.

    Ces profils sont le reflet de finalités qui sont propres aux différentes catégories de sociétés commerciales. La société expansive est un instrument de placement destiné à valoriser l’épargne sur la base d’un risque calculé. Celle qu’anime le lien établi entre ses seuls fondateurs s’oriente plutôt vers la recherche d’un financement abondant. Quant à l’objectif de sécurité, il se réalise au moyen de l’incarnation du patrimoine professionnel par l’être moral, en particulier, lorsque la société n’est composée que d’un seul associé. La diversité de ces profils alimente, d’ailleurs, une discussion classique sur la nature juridique de la société commerciale.

    4

    Contrat ou personne morale ? La société commerciale est-elle un contrat ou une personne morale ? À cette question, il est possible de répondre qu’il existe une étroite intrication entre l’acte et la personnalité juridique sous ce régime de sociétés. Le contrat constitue le fondement nécessaire du groupement qui prend appui sur un faisceau d’engagements conclus entre ses membres et qu’il noue également avec ceux-ci. La personnalité juridique est donc une condition de l’échange des volontés entre la société et les associés. Parallèlement, cette personnalité incarne, à l’égard des tiers, les engagements pris par les associés entre eux.

    Une telle intrication rencontre une exception en présence des sociétés créées à l’initiative d’un seul associé, ce que la loi admet en certaines hypothèses limitativement énumérées. Sous cette réserve, le contrat précède la naissance de l’être moral que la loi conditionne à l’accomplissement d’une formalité de publicité (C. comm., art. L. 210-6) ³. Dès que la société est personnifiée, il n’est plus seul à régir les rapports entre les parties.

    5

    Société institution. Ainsi la société commerciale n’est pas seulement un contrat. Elle est aussi une organisation tournée vers un but. Et la réalisation de ce but commande la mise en œuvre de règles étrangères au régime des conventions. Le principe majoritaire qui sous-tend les décisions collectives nécessaires à cette réalisation exprime avec force l’idée que la préservation des intérêts du groupement prime celle de ses membres.

    Surtout, à l’instar de toute organisation, la société commerciale trouve dans l’exercice des pouvoirs dévolus aux personnes chargées de son administration le moyen de réaliser ses fins. Sous son régime, la délimitation de ces pouvoirs, ainsi que le contrôle de leur exercice, s’opèrent en contemplation de la finalité commune. Il ne dépend donc pas de la volonté du législateur d’accentuer ou d’alléger la nature institutionnelle de la société commerciale qui découle naturellement de la personnification des intérêts qu’elle incarne ⁴.

    6

    Plan. L’examen de la classification des sociétés commerciales (Section I) précédera celui de la justification du recours à cette catégorie de sociétés (Section II).

    Section I

    Classification des sociétés commerciales

    7

    La classification des sociétés commerciales met au jour de grandes catégories que fondent des critères assez divers (§ 1), tandis qu’une place doit être faite à des variétés plus spécifiques (§ 2).

    § 1.   G

    RANDES

    CATÉGORIES

    8

    Origines. De la source, qui irrigue la commercialité de la société, résulte une première distinction entre les sociétés commerciales par la forme ou par l’objet (A), que prolonge l’opposition des sociétés dotées de la personnalité juridique et de celles qui en sont dépourvues (B). Des divisions plus secondaires prennent appui sur certains caractères de la société personnifiée qu’anime la confiance de ses membres, ou la détention d’un capital (C), parfois offert à l’épargne publique (D).

    A) Sociétés commerciales par la forme ou par l’objet

    9

    Double critère. Le caractère commercial d’une société est déterminé par sa forme ou par son objet (C. comm., art. L. 210-1, al. 1er). Dominent ici les sociétés commerciales par la forme dont la loi dresse une liste exhaustive (1), tandis que coexistent, plus modestement, celles dont la commercialité est commandée par la nature de leur activité (2).

    1. Domination des sociétés commerciales par la forme

    10

    Acte de commerce par la forme. Les sociétés qui accèdent à la commercialité sans considération de leur objet entrent dans le champ de la classification légale des actes de commerce. À côté des actes auxquels la loi reconnaît cette qualification en raison de leur nature (C. comm., art. L. 110-1), elles rejoignent la catégorie de ceux dont la commercialité est attachée à la forme qu’ils revêtent ⁵.

    Sont commerciales, à ce titre, les sociétés en nom collectif (C. comm., art. L. 221-1 et s.), les sociétés en commandite simple (C. comm., art. L. 222-1 et s.), les sociétés à responsabilité limitée (C. comm., art. L. 223-1 et s.), ainsi que les sociétés par actions, société anonyme (C. comm., art. L. 225-1 et s.), société en commandite par actions (C. comm., art. L. 226-1 et s.), société par actions simplifiée (C. comm., art. L. 227-1 et s.) et société européenne (C. comm., art. L. 229-1 et s.). Ces sociétés, que réglemente le Code de commerce, sont commerciales indépendamment de l’activité qu’elles développent. Il en résulte qu’elles conservent cette qualité quoique leur objet soit civil.

    11

    Indifférence de la qualité de l’associé. Des professionnels non commerçants peuvent traiter leurs affaires sous leur régime. Il en est ainsi des artisans ⁶, des agriculteurs ⁷ ou des professionnels libéraux ⁸. Le caractère commercial découlant de la forme de l’acte et non de la qualité de ses auteurs, il est indifférent, le plus souvent, que les associés soient commerçants. Le constat vaut pour l’ensemble des sociétés par actions ainsi que pour la société à responsabilité limitée. Seules les sociétés en nom collectif, ou en commandite, s’écartent de cette règle, car leurs membres ⁹ deviennent commerçants au moment où ils acquièrent la qualité d’associés ¹⁰.

    Le statut personnel de l’associé demeure, cependant, sans effet sur la nature juridique des engagements pris par la société commerciale. Les actes qui sont nécessaires à sa création, à l’accomplissement de son objet, ou qui ont été conclus en vue de sa dissolution, sont des actes de commerce. Les litiges qu’ils soulèvent sont soumis au tribunal de commerce (C. comm., art. L. 721-3, 2°). La totalité du régime qui enserre ces actes leur est donc applicable, en principe ¹¹.

    La commercialité des engagements relatifs au fonctionnement de la société s’étend parfois, d’ailleurs, au-delà de ce champ. Il est admis que la convention par laquelle les associés non commerçants cèdent leurs parts a une nature civile, mais qu’elle acquiert un caractère commercial lorsqu’elle affecte la détention du pouvoir au sein de la société ¹².

    E1 Les sociétés commerciales par la forme en un coup d’œil

    2. Subsistance de sociétés commerciales par l’objet

    12

    Sociétés en participation. La catégorie des sociétés commerciales par l’objet n’est représentée que par les sociétés dépourvues de personnalité juridique. Sont exclusivement visées, ici, les groupements en participation dont l’article 1871 du Code civil précise qu’ils sont régis soit par les dispositions applicables aux sociétés civiles, s’ils ont un caractère civil, soit, s’ils présentent une nature commerciale, par celles auxquelles sont soumises les sociétés en nom collectif ¹⁵. Il s’en déduit que le régime des actes passés par ces sociétés dépend de la nature de leur activité.

    Placée sous le statut de la société en participation (C. civ., art. 1873), la société créée de fait est également dépourvue de personnalité juridique. Elle présente donc une nature commerciale lorsque son objet est commercial. Seule la volonté de ses associés la distingue de la société en participation.

    B) Sociétés commerciales avec ou sans personnalité juridique

    13

    Option et incidences. Les associés peuvent convenir que la société commerciale sera immatriculée ou ne le sera point (C. comm., art. 1871, al. 1er). Dans le premier cas, ils acceptent de lui conférer une personnalité qui découle de l’accomplissement des formalités de publicité requises par la loi (C. comm., art. R. 210-1). Dans le second, ils écartent cette importante conséquence, ce qui prive la société, simple groupement en participation, des attributs liés à la personnification ¹⁶. Toute la question est de déterminer les raisons d’un tel choix (1), qui présente de nombreuses incidences au seuil de la création de la société (2), lors de l’accomplissement de l’objet pour lequel elle a été établie (3), ainsi qu’à l’issue de l’activité commune (4).

    1. Justifications de l’option

    14

    Discrétion et simplification. Un premier ensemble de justifications est attaché aux avantages que procure l’absence de publicité donnée à l’activité commune. La volonté de conserver le secret sur l’existence d’un accord explique le recours à la société en participation. Toutefois, depuis 1978 (loi no 78-9 du 4 janvier 1978), les associés sont habilités à rendre leur action ostensible sans renoncer au défaut de personnalité du groupement qui en constitue le support. Il leur suffit, dans ce but, d’agir au vu et au sus des tiers (C. civ., art. 1872-1, al. 2 ; sur les conséquences de ce choix, voy. infra, no 25 ) ¹⁷. Éviter les pesanteurs liées aux formalités de constitution des sociétés commerciales par la forme constitue, de ce point de vue, une importante justification du choix des associés en simple participation. Et cela met au jour bien d’autres mobiles qu’irrigue également le constat de l’inutilité d’une structure organisée sur le modèle des sociétés décrites par le Code de commerce.

    15

    Mise en commun de moyens à titre exclusif. Sous le régime de la société en participation, la personnalité des associés se substitue à celle du groupement, qu’il n’apparaît pas opportun de doter des attributs nécessaires. Il en est ainsi lorsque les participants sont des personnes physiques désireuses d’exploiter des biens destinés à un usage partagé ¹⁸, ou de contourner certaines interdictions que pose la loi dans l’exercice des droits attachés à leur qualité d’associés ¹⁹. Mais le rapprochement de personnes morales illustre mieux encore la destination qui peut être donnée à un groupement en participation.

    Parées de l’autonomie patrimoniale que leur confère leur personnalité, ces entités n’éprouvent aucun besoin de reconnaître celle-ci à leur regroupement ²⁰. Une telle pratique s’observe fréquemment sur des chantiers où différentes entreprises collaborent à la réalisation d’un ouvrage. La mutualisation des moyens, dans ce contexte, porte sur l’application de diverses réglementations et parfois, plus précisément encore, sur la mise en œuvre de l’obligation de sécurité de résultat dont se trouvent investis les employeurs présents sur le site à l’égard de leurs salariés. Elle conduit à la désignation, parmi les associés en participation, d’une entreprise dont un préposé est chargé de veiller au respect des règles et auquel incombe la responsabilité pénale des manquements observés à celles-ci ²¹.

    16

    Société en participation et société créée de fait. À la différence des associés en participation, ceux de la société créée de fait n’ont exprimé aucun choix en faveur de la soumission de leurs relations au régime des sociétés dépourvues de personnalité. Ce n’est qu’au terme de ces relations qu’ils revendiquent la qualité d’associés afin de bénéficier des règles de partage du patrimoine qu’ils ont édifié en commun (C. civ., art. 1873 ; voy. infra, no 28 ). Une telle revendication se justifie, le plus souvent, par l’absence de tout cadre juridique permettant la répartition des créances et des dettes attachées à leur activité. Il en est ainsi, par exemple, de simples concubins ²². Elle peut encore résulter de l’évolution de ce cadre juridique fondé sur une mise en commun de moyens. Tel est le cas lorsque s’établit, dans la durée, un rapport d’égalité entre les parties ²³ (voy. infra, no 28 ). À cet égard, la société créée de fait, simple société commerciale par l’objet et dépourvue de toute personnalité juridique, ne doit pas être confondue avec la société commerciale par la forme qui a été immatriculée et dont un vice de constitution affecte la régularité (voy. infra, no 143). Sa transformation en une société de droit dotée de la personnalité juridique entraîne la création d’une personne morale nouvelle ²⁴.

    2. Constitution de la société en participation à objet commercial

    17

    Liberté contractuelle. Les associés en participation conviennent librement de l’objet et des conditions de leur activité commune (C. civ., art. 1871, al. 2) ²⁵. Cette liberté s’exerce, cependant, sous condition de licéité de cet objet en application du régime général des conventions (C. civ., art. 1833 ; sur cette condition, voy. infra, no 126). En outre, s’imposent à eux certaines dispositions impératives du droit des sociétés relatives, notamment, à l’exigence de pluralité d’associés et de réalisation d’apports, ainsi que de participation aux résultats (C. civ., art. 1832). À défaut de satisfaire ces règles essentielles, la société est exposée à la nullité qui atteint les contrats irréguliers ²⁶.

    Le groupement en participation à objet commercial réunit, au minimum, deux personnes physiques ou morales ²⁷. De son caractère occulte, ou ostensible, découlent certaines conséquences à l’égard de la capacité requise de ces participants. Lorsque ceux-ci demeurent hors de la vue des tiers, seule la personne chargée de la gestion de la société doit jouir de la capacité que commande l’exercice d’une activité commerciale. Dans le cas contraire, tous les associés sont soumis à cette exigence.

    Quant aux apports, ils sont imposés aux associés en participation comme à tout membre d’une société commerciale par la forme (C. civ., art. 1871-1, al. 1er). En contrepartie de leur réalisation, ceux-ci disposent d’une créance à l’encontre du groupement qui peut être matérialisée dans un titre, lequel n’est pas susceptible de faire l’objet d’une offre au public ou de prendre la forme d’un titre négociable, à peine de nullité (C. civ., art. 1841). L’absence de personnalité du groupement présente des conséquences sur la composition du patrimoine social.

    18

    Spécificités liées à l’absence de personnalité. Les apports des associés sont effectués en numéraire (en espèces), en nature (meuble ou immeuble) ou en industrie (travail ou prestation exécuté au profit de la société). Mais il ne saurait être procédé à aucun transfert de propriété de ce numéraire ou de ces biens au groupement, puisque celui-ci n’est pas personnifié ²⁸. Il en résulte que la pratique de l’apport en industrie est fréquente sous le régime des sociétés en participation. Il en découle, surtout, que chaque associé demeure propriétaire des biens qu’il met à la disposition de l’activité commune (C. civ., art. 1872-1, al. 1er). Seule la jouissance de ces biens est donc transmise.

    La loi, cependant, offre aux membres du groupement la possibilité de convenir que l’un d’eux est, à l’égard des tiers, propriétaire de tout ou partie des apports qu’il acquiert en vue de la réalisation de l’objet social, ce qui contribue au caractère occulte de la société (C. civ., art. 1872-1, al. 4). À l’opposé, une mise en indivision de tout ou partie des apports, également autorisée, serait susceptible de renforcer sa nature ostensible (C. civ., art. 1872-1, al. 3 ; voy. aussi, infra, no 26).

    19

    Participation aux résultats. L’affectation à l’entreprise commune des biens ou de l’industrie des associés est exécutée en vue de partager les fruits qui pourront en résulter. Chaque membre du groupement est donc appelé à prendre part aux bénéfices ou aux pertes, toute clause contraire étant réputée non écrite (C. civ., art. 1844-1 ; sur les clauses léonines, voy. infra, no 114). À défaut de précisions statuaires, cette participation est proportionnelle aux apports.

    3. Accomplissement de l’objet commercial de la société en participation

    20

    Emprise du contrat. La société en participation à objet commercial peut être conclue avec ou sans limitation de durée (C. civ., art. 1872-2, al. 1er), ce qui marque une première différence avec les sociétés commerciales par la forme (voy. infra, no 179). La liberté dont jouissent les associés dans la fixation des conditions de fonctionnement du groupement en est une seconde. Il leur est seulement demandé de respecter, à ce titre, un certain nombre de règles impératives qui constituent le socle de l’organisation sociale :

    droit de chacun des associés de participer aux décisions collectives (C. civ., art. 1844, al. 1er) ;

    interdiction d’augmenter leurs engagements sans leur consentement (C. civ., art. 1836, al. 2) ;

    interdiction de rompre leur égalité au moyen de stipulations contractuelles (C. civ., art. 1844-1, al. 2).

    La direction des affaires est confiée à un gérant collectivement désigné ou nommé par les statuts ²⁹. Dans le silence de ces derniers, l’organisation de la gérance du groupement en participation à objet commercial est empruntée aux sociétés en nom collectif (voy. infra, nos 467 et s.) ³⁰. À défaut d’indications statutaires, tous les associés sont donc gérants ³¹ tandis que leur rémunération est fixée de manière collective. Quant au régime de la révocation du ou des gérant(s), il est défini par les statuts ou obéit aux règles de la société en nom collectif (C. civ., art. 1871-1 et L. 221-12 ; voy. infra, nos 478 et s.). L’essentiel réside dans les pouvoirs que détiennent le ou les titulaires des fonctions (a), sous le contrôle des associés (b).

    a) Pouvoir du gérant de la société en participation à objet commercial

    21

    Centralisme de la gestion. C’est à l’organe dirigeant le groupement que revient la conduite des affaires. Des pouvoirs lui sont dévolus à cet effet. La loi en définit très largement le champ sous condition de respecter la finalité commune. C’est ainsi que le gérant est habilité à accomplir tous actes dans l’intérêt de la société (C. civ., art. 1871-1, et C. comm., art. L. 221-4, al. 1er). Il doit veiller à ne pas commettre de faute à cette occasion ³². Il est tenu, en outre, de se soumettre aux prescriptions de la loi ainsi qu’aux stipulations statutaires. Et puisque l’exercice de ses pouvoirs est étroitement finalisé, il lui appartient de rendre compte de sa gestion en présence des associés ³³.

    En pratique, il est fréquent que les statuts de la société fixent des limites à ses prérogatives ³⁴. Leur violation expose sa responsabilité vis-à-vis des membres du groupement ³⁵. Surtout, elle a pour effet de soustraire les associés à leurs devoirs. Ceux-ci ne sont donc pas tenus par les actes que le gérant accomplit au mépris des restrictions qui s’imposent à lui en vertu des statuts. De ce point de vue, l’absence de personnification du groupement expose beaucoup plus lourdement le dirigeant aux affres de la gestion sociale ³⁶. Des conséquences identiques résultent de la violation de l’objet de la société.

    22

    Exclusivité de la représentation. Le gérant engage les biens mis à sa disposition par les associés en exécution des seuls actes qui entrent dans cet objet (C. civ., art. 1871-1, et C. comm., art. L. 221-5, al. 1er). Hors de ce champ, il est tenu personnellement par les engagements qu’il prend. En cas de pluralité de gérants, ceux-ci détiennent séparément le même pouvoir de représentation (C. civ., art. 1872-1, al. 1er, et C. comm., art. L. 221-5, al. 2). Il est cependant loisible à l’un d’eux de s’opposer aux actes d’un autre. Une telle opposition demeure, en principe, sans effet à l’égard des tiers. Mais il pourrait être établi que ceux-ci en aient eu connaissance, ce qui limiterait l’engagement social.

    Les clauses statutaires réduisant les prérogatives du gérant leur sont inopposables, peu important, alors, leur bonne ou leur mauvaise foi et, là encore, sans immunité pour le gérant auteur de l’acte (voy. supra, no 21).

    23

    Concentration de la responsabilité. Il est fréquent que le gérant expose sa responsabilité pénale à l’occasion des actes de gestion qu’il accomplit. Une telle responsabilité demeure exclusivement attachée à la personne physique, en l’occurrence, puisque la société n’est pas personnifiée (C. pén., art. 121-2). Elle peut être imputée aux gérants ainsi que, le cas échéant, aux associés en tant que coauteurs ou complices. Toutefois, la désignation du responsable se trouve parfois infléchie en considération de l’objet du groupement en participation.

    Lorsque, par exemple, celui-ci tend à une mutualisation des moyens à l’égard de l’application de la réglementation, la faute pénale incombe à un délégataire commun spécialement désigné à cet effet. Cela ne signifie d’ailleurs pas que la responsabilité n’est jamais imputable à un être moral. Si le délégataire est le préposé d’une société membre du groupement en participation, il expose sa responsabilité personnelle ainsi que celle de l’entité qui emploie ses services en cas de manquement à la réglementation dont le respect lui incombe ³⁷. Et, en matière d’accident du travail, il a été jugé que ce manquement engage la responsabilité de la société dont la victime est salariée ³⁸.

    b) Vie collective au sein de la société en participation à objet commercial

    24

    Délibérations communes. Qu’elle soit ou non extériorisée, la société en participation abrite une activité collective qu’animent ses membres à l’occasion de leurs délibérations (C. civ., art. 1844, al. 1er). Il revient au pacte social de déterminer les conditions de ces délibérations dont rien n’impose qu’elles soient adoptées en assemblée. La loi fixe, sur ce terrain encore, quelques prescriptions minimales. Elle dispose que les décisions qui excèdent les pouvoirs du ou des gérants sont prises à l’unanimité des associés ou à une majorité que fixent les statuts (C. civ., art. 1871-1 et L. 221-6, al. 1er). Ces derniers peuvent également prévoir que les décisions sont adoptées par voie de consultation écrite, si la réunion d’une assemblée n’est pas demandée par l’un des associés.

    Seule est exigée, tous les ans, une délibération sur le rapport de gestion, l’inventaire ainsi que les comptes de l’activité présentés par le gérant (C. civ., art. 1871-1 et C. comm., art. L. 221-7, al. 1er).

    25

    Engagements personnels. La société étant dépourvue de patrimoine propre, chaque membre du groupement en participation contracte en son nom personnel (C. civ., art. 1872-1, al. 1er) ³⁹. En pratique, seuls le ou les gérants s’engagent à l’égard des tiers. Mais cette règle rencontre des exceptions. Si les participants agissent explicitement en qualité d’associés, chacun d’eux supporte les conséquences des engagements pris par les autres (C. civ., art. 1872-1, al. 2). Et cette responsabilité est indéfinie et solidaire, puisque l’objet du groupement est commercial. Une conséquence identique découle du comportement de l’associé qui, par son immixtion, a laissé croire au cocontractant qu’il entendait s’engager à son égard, ou dont il est prouvé que l’engagement a tourné à son profit (C. civ., art. 1872-1, al. 2). Dans tous les cas, la révélation de la qualité d’associé est l’expression d’une volonté personnelle. Elle ne saurait résulter d’une désignation par un autre participant ou par un tiers, ou encore de quelque autre circonstance ⁴⁰.

    La lourde responsabilité qui pèse sur les associés de la société en participation à objet commercial justifie que des droits importants leurs soient reconnus dans le contrôle de la gestion des biens communs. À cet effet, ils peuvent, deux fois par an, obtenir communication des livres et documents sociaux. Ils sont également habilités à poser par écrit des questions sur la gestion sociale, auxquelles il doit être répondu également par écrit (C. civ., art. 1871-1 et C. comm., art. L. 221-8 ; au sujet du droit de solliciter une assemblée, voy. supra, no 24).

    26

    Emprise de l’indivision. Les biens acquis par emploi ou remploi de deniers indivis pendant la durée de la société et ceux qui se trouvaient indivis avant d’être mis à la disposition de la société sont soumis aux règles de l’indivision. Tous les associés sont, sauf convention contraire, réputés gérants de l’indivision (C. civ., art. 1872-1 in fine). Aucun d’entre eux ne peut demander le partage des biens tant que la société n’est pas dissoute, à moins qu’il n’en soit autrement convenu (C. civ., art. 1872-2, al. 2).

    4. Sort de la mise en commun des moyens à l’issue de la société

    27

    Issue de l’activité. La dissolution de la société en participation à objet commercial est soumise au régime commun des sociétés commerciales de personnes (C. civ., art. 1871-1, et C. comm., art. L. 221-15 ; voy. infra, no 186). Le décès d’un associé ou la révocation du ou des gérants statuaires est donc susceptible de la justifier. Des spécificités doivent être notées. La première découle du fait que le groupement peut être créé sans limite de durée. Dans ce cas, sa dissolution résulte, à tout moment, d’une notification adressée par l’un des associés à tous les autres. Une telle notification produit effet à condition d’avoir été exécutée de bonne foi et non faite à contretemps (C. civ., art. 1872-2, al. 1er). Surtout, en l’absence de patrimoine propre, aucune liquidation des biens communs ne s’impose. Le règlement des comptes entre associés donne lieu simplement à une reprise des apports confiés en jouissance ou mis à disposition ainsi qu’à un éventuel partage du bénéfice (ou du boni) après apurement du passif ⁴¹. Quant à la répartition des biens indivis, elle est soumise aux règles successorales.

    28

    Extension des règles : la société créée de fait. Ces règles ont vocation à s’appliquer aux sociétés dont l’absence de personnalité morale est étrangère à toute manifestation de volonté des associés. Une telle unité de régime ne porte, cependant, que sur les dispositions relatives au partage des biens communs, puisque, par hypothèse, les participants à la société créée de fait n’ont eu conscience de la nature de leurs rapports qu’au moment de la répartition de ces biens. À ce moment, seule doit être apportée la preuve de la qualité d’associé. Celle-ci repose sur la mise au jour des éléments du contrat de société (C. civ., art. 1832, voy. supra, nos 17 et s.) qui est affectée d’un net particularisme.

    Si la présence des associés, ou l’existence des apports ⁴², ne se heurte pas à des obstacles majeurs, la contribution aux résultats, en revanche, constitue souvent une source de difficultés en l’absence de volonté explicite des participants d’agir en commun sur un pied d’égalité. La décision du juge repose, en l’occurrence, sur la simple considération d’un regroupement de moyens prolongé dans le temps. C’est ainsi, par exemple, que l’intention de s’associer en vue d’une entreprise commune ne peut se déduire de la seule participation financière à la réalisation d’un projet immobilier, ou de la mise en commun d’intérêts inhérents au concubinage ⁴³. Elle est susceptible de découler d’un travail collectif accompagné de la participation, à la mesure des moyens respectifs des associés, au développement d’une activité commune ⁴⁴. La preuve de ces éléments est administrée par tous moyens (C. civ., art. 1873, et C. civ., art. 1871, al. 1er). Lorsqu’elle incombe aux tiers, elle est nettement allégée, puisqu’une simple apparence de nature à accréditer, de bonne foi, l’existence d’un rapport de société suffit ⁴⁵.

    La société créée de fait ayant vocation à disparaître au moment précis où elle est constatée, ce sont les règles de liquidation du groupement en participation à objet commercial qui la régissent. Les associés conservent la propriété des biens qu’ils détenaient au seuil de l’activité commune, tandis que les résultats de cette activité sont partagés proportionnellement au montant des apports ou par parts égales.

    C) Sociétés de personnes ou sociétés de capitaux

    29

    Dualité de régime. Parmi les sociétés commerciales, une autre division oppose les sociétés de personnes et les sociétés de capitaux. Cette distinction est importante, car elle prend appui sur le régime de responsabilité qui sous-tend les devoirs des associés. Alors que les sociétés de personnes font peser sur leurs membres le poids des pertes, mais aussi des dettes qui leur incombent, et ce, de manière indéfinie et solidaire, les sociétés de capitaux circonscrivent l’engagement des associés au montant de leurs apports. Les sociétés en nom collectif, ce qui inclut les sociétés en participation à objet commercial, ainsi que les sociétés en commandite simple, relèvent de la première catégorie ; les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés par actions appartiennent à la seconde.

    La considération de la personne fonde la responsabilité des associés en nom ou commandités. Du fait de son caractère indéfini et solidaire, cette responsabilité requiert une totale confiance entre les associés. En revanche, lorsque ceux-ci ne sont personnellement exposés que dans la limite de ce qu’ils ont apporté à l’œuvre commune, cette considération est secondaire. La garantie représentée par le capital constitué par ces apports est alors prépondérante. La société en nom collectif et la société anonyme illustrent parfaitement cette opposition fondamentale. Si la constitution de la première repose sur le lien personnel qui unit chaque participant à l’activité commune, celle de la seconde n’appelle qu’une simple contribution au capital de la part d’associés qui ne se connaissent pas. De ce point de vue, il a pu être affirmé que la société à responsabilité limitée emprunte ses caractères aux sociétés de personnes. Toutefois, cette assertion ne résiste plus aujourd’hui à l’examen des règles qui l’enserrent.

    30

    Force du contrat : sociétés de personnes. La considération de la personne façonne le modèle de la société en nom collectif ⁴⁶. L’identité des associés qui ont échangé leur volonté y occupe une place déterminante. Sous le régime de cette société, la justification de la qualité d’associé découle directement des statuts revêtus de la signature des parties. On conçoit alors que le groupement n’existe que sous condition d’une implication effective de ses membres dans l’activité commune. Que l’un d’entre eux disparaisse et c’est la société elle-même qui est exposée à la dissolution. Et si le niveau de participation de l’un d’eux évolue, sa survie se trouve encore menacée. Ceci justifie que l’immixtion de nouveaux associés commande l’accord des fondateurs, à l’instar de l’acquisition de parts supplémentaires de l’un d’eux auprès des autres. Ceci justifie également que des droits étendus soient accordés à tout associé, notamment, en matière d’information ou de participation aux décisions collectives.

    31

    Effacement du contrat : sociétés de capitaux. En application des règles des sociétés par actions, seule compte la contribution au capital de l’associé dont le décès, ou l’incapacité, est sans conséquence sur l’existence du groupement. Les titres détenus sont librement négociables et cessibles, sans restriction, à des tiers. Et si l’associé jouit de droits particuliers, c’est en contemplation du volume de sa participation au sein du capital.

    La société à responsabilité limitée ne s’éloigne pas de ce modèle sous quelques réserves. Ni le décès, ni l’incapacité de ses associés ne met fin à son activité. Et ceux-ci ne sont pas prisonniers de leurs parts dont ils peuvent, en principe, se séparer. Toutefois, les conditions auxquelles la loi ainsi que les statuts soumettent cette décision s’inspirent du régime des groupements de personnes.

    32

    Reflux de la distinction. Sous l’effet de la loi, mais également de la volonté des associés, un affaiblissement des principaux caractères des sociétés de personnes et de capitaux peut être observé. Certaines formes nouvelles de groupements transcendent parfois la distinction. Il en est ainsi des sociétés par actions simplifiée qui entrent dans la catégorie des sociétés de capitaux et dont le régime fait la part belle au contrat. La généralisation de l’option en faveur de l’impôt sur les sociétés (C.G.I., art. 206 3. et art. 239), longtemps réservée aux sociétés par actions, établit également une passerelle entre les différents types de sociétés commerciales ⁴⁷.

    Les statuts peuvent sensiblement modifier les caractères du groupement en favorisant son ouverture à de nouveaux associés ou, au contraire, en procédant à son repli sur ses fondateurs. C’est ainsi qu’il est loisible aux associés en nom d’écarter les conséquences de leur décès ou de faciliter l’accès de leur activité commune à de nouveaux membres. À l’opposé, rien n’interdit aux actionnaires des sociétés anonymes de limiter les effets de la libre cessibilité des titres par la voie de stipulations contractuelles (clauses d’agrément).

    33

    Impact sur le statut des associés. L’appartenance de la société à la catégorie des sociétés de personnes ou de capitaux rejaillit sur le statut de ses membres. L’engagement indéfini et solidaire de l’associé en nom, à l’égard des dettes du groupement, implique que cet associé revête la qualité de commerçant (C. comm., art. L. 221 –, al. 1er), à l’instar du commandité (C. comm., art. L. 222-1, al. 1er). Ces personnes sont donc soumises au statut professionnel que définit le Code de commerce et, en particulier, aux conditions de capacité ainsi qu’aux incompatibilités qu’il renferme ⁴⁸. À ce titre, leur identité doit être clairement indiquée au registre lors de l’immatriculation de la société (C. comm., art. R. 123-34). Sur le plan social, elles bénéficient du régime de protection des travailleurs indépendants et, fiscalement, sont imposées sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société en tant que personnes physiques ⁴⁹. À la différence des précédents, les associés que réunissent les autres sociétés commerciales par la forme ne sont pas des commerçants. Ils ne sont bénéficiaires d’aucun régime de protection sociale et sont soumis à l’impôt sur le revenu des capitaux mobiliers ⁵⁰.

    D) Sociétés commerciales avec ou sans offre au public

    34

    Option. Certaines sociétés sont habilitées par la loi à offrir leur titre à l’épargne publique. On dit qu’elles peuvent faire offre au public de ces titres (C. mon. et fin., art. L. 411-1). La notion d’offre au public, qui s’inspire d’une directive européenne ⁵¹, est issue d’une ordonnance du 22 janvier 2009 (no 2009-80). Elle a été substituée à celle « d’appel public à l’épargne » que renfermait la loi jusqu’alors (art. 74 et s.) (1). Elle ne concerne qu’un petit nombre de sociétés commerciales de capitaux (2).

    1. Notion

    35

    Double objet. L’offre au public de titres financiers recouvre deux opérations que décrit l’article L. 411-1 du Code monétaire et financier : la communication d’une offre à des personnes présentant une information suffisante sur ses conditions ainsi que sur les titres à offrir et leur placement. La communication peut être adressée sous quelque forme et par quelque moyen que ce soit, publicité et démarchage, mais aussi Internet, SMS, etc. L’essentiel porte sur l’information qu’elle renferme afin de permettre à tout investisseur de décider d’acquérir, ou de souscrire, les titres financiers en pleine connaissance de cause ⁵². Quant au placement, il est réalisé par des intermédiaires financiers.

    L’offre au public s’apparente à l’ancienne notion d’appel public à l’épargne, à ceci près qu’elle élargit le champ des modalités d’accès au public et concentre la qualification sur le contenu de l’information délivrée au moyen de ces modalités. Surtout, elle n’implique plus l’admission des titres sur un marché réglementé, c’est-à-dire, en pratique, la cotation en Bourse. Seule une telle admission est désormais génératrice d’un statut spécifique. Les sociétés qui se contentent de faire offre au public de leurs titres ne sont donc pas soumises à ce statut.

    36

    Cas d’exclusion. Ne constitue pas une offre au public celle qui s’adresse exclusivement à des investisseurs qualifiés ou à un cercle restreint d’investisseurs (C. comm., art. L. 411-2, II). Par investisseur qualifié, on entend une personne, ou une entité, disposant des compétences ainsi que des moyens nécessaires afin d’appréhender les risques inhérents aux opérations sur instruments financiers. Un décret établit une liste des catégories reconnues comme qualifiées ⁵³. Le cercle restreint d’investisseurs est composé de personnes, autres que des investisseurs qualifiés, dont le nombre est inférieur à cent cinquante (C. com. et fin., art. D. 411-4).

    2. Applications

    37

    Caractère limitatif. Seules le sociétés, qui sont autorisées par la loi, procèdent à une offre au public de leurs titres financiers (C. civ., art. 1841). En dehors de ce périmètre, la règle est celle de l’interdiction absolue sous la menace de la nullité des contrats conclus ou des titres émis. Certaines sociétés par actions sont concernées par l’habilitation légale : la société anonyme (C. comm., art. L. 225-2), la société en commandite par actions (C. comm., art. L. 226-2, al. 1er) et la société européenne (C. comm., art. L. 229-1, al. 2). En revanche, la société par actions simplifiée (C. comm., art. L. 227-2) ainsi que les autres sociétés commerciales par la forme se voient interdire de manière formelle de recourir à l’épargne publique en vue de leur financement.

    La pratique de l’offre au public affecte les conditions de constitution et de fonctionnement de la société anonyme ainsi que des sociétés par actions auxquelles ce régime est applicable (C. comm., art. L. 225-2 ; voy. infra, nos 259 et s.). Au seuil de la création de ces sociétés, la loi impose des formalités renforcées, souvent dissuasives ⁵⁴. Et des contrôles approfondis sont exercés sur les opérations qu’elles accomplissent (au sujet des contrôles pratiqués par l’A.M.F., voy. infra, nos 746 et s.). En revanche, cette pratique ne présente plus aucune conséquence sur le statut des sociétés en cause ⁵⁵.

    E2 Société commerciale par l’objet ou par la forme ?

    § 2.   C

    ATÉGORIES

    SPÉCIFIQUES

    38

    Régime ou finalité. Parallèlement au modèle des sociétés commerciales par la forme décrit par le Code de commerce ont pris naissance d’autres variétés de sociétés qui en dérivent, tout en acquérant une spécificité découlant soit des règles de leur constitution, ou de leur fonctionnement, soit de la finalité pour laquelle elles ont été conçues. Cette adaptation du régime commun a permis de mettre au jour de nouveaux groupements personnifiés répondant aux besoins de certaines activités (A) et, parfois, aux exigences issues de l’internationalisation de la vie des affaires (B).

    A) Adaptations du régime imposées par l’exercice de certaines activités

    39

    Inflexions ou adaptations. La poursuite d’une activité professionnelle sous le régime de la société commerciale par la forme nécessite souvent l’aménagement de quelques règles ⁵⁶. Il impose, en certains cas, une adaptation plus profonde de ce régime en raison de l’objectif que se sont fixé ses associés ou lorsqu’est en jeu l’exercice d’une profession déterminée. Au titre des spécificités de la finalité sociale, on peut évoquer les sociétés coopératives qui tendent, au moyen d’un accomplissement direct d’une activité par leurs membres, à la réduction des coûts, à l’amélioration de la qualité des produits ou services offerts, etc. (loi no 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, art. 1er) ⁵⁷. Les sociétés coopératives jouissent d’un statut qui leur est propre. Mais elles sont également soumises aux règles particulières qui découlent de leur appartenance à une catégorie déterminée (art. 2) ⁵⁸. Elles tendent vers une égalité absolue de leurs membres ⁵⁹ dont la qualité prend appui sur l’activité qu’ils poursuivent en commun dans le champ de l’objet social (au sujet de la variabilité de leur capital, voy. infra, no 287).

    De profondes adaptations du régime des sociétés commerciales par la forme découlent encore de la profession exercée par les associés. Il convient ici d’évoquer l’autorisation légale d’exercice des professions libérales en sociétés commerciales (1) ainsi que l’organisation d’une activité de prise de participations financières à ce titre (2).

    1. Société d’exercice libéral

    40

    Commercialité par la forme. Il peut être recouru à des sociétés d’exercice libéral (SEL) pour l’exercice d’une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire, ou dont le titre est protégé. Ces sociétés s’inspirent du régime des commerciales par la forme, ce qui ne constitue pas le moindre des paradoxes en considération de l’incompatibilité des statuts de commerçant et de professionnel libéral résultant de la coutume ⁶⁰.

    La catégorie recouvre (loi no 90-1258 du 31 décembre 1990, art. 1er) :

    la société à responsabilité limitée (SELARL) ;

    la société d’exercice libéral à forme anonyme (SELAFA) ;

    la société d’exercice libéral par actions simplifiée (SELAS) ; ou

    la société d’exercice libéral en commandite par actions (SELCA) ⁶¹.

    Si l’on excepte les dispositions relatives aux sociétés de personnes, exclues de ce champ, les sociétés d’exercice libéral sont donc soumises aux règles du Livre II du Code de commerce. Cependant, d’importantes réserves doivent aussitôt être émises ⁶².

    41

    Considération de la personne. Pour l’essentiel, elles découlent de l’objectif d’implication des membres de la profession dans l’organisation ainsi que le fonctionnement de la société. C’est ainsi, par exemple, en vertu d’une règle d’ordre public économique, que plus de la moitié du capital social et des droits de vote de la SEL doit être détenue par des professionnels en exercice au sein de la société (art. 5) ⁶³. Une détention supérieure à la moitié par des personnes exerçant la profession constituant l’objet social en dehors de la société est possible sous certaines conditions (art. 6 et 7). Dans cette logique, s’imposent encore des restrictions à tout associé désireux de se séparer de ses titres, y compris lorsque la société est à forme anonyme (art. 10, al. 4 ; au sujet de l’exclusion de l’associé, voy. infra, no 117). L’implication des membres de la profession est, en outre, garantie dans l’exercice des fonctions de gestion de la SEL (art. 12). Elle s’accompagne d’une responsabilité solidaire de la société à l’égard des actes accomplis par l’associé à l’occasion de l’exercice de sa profession (art. 16). Il est d’ailleurs veillé au respect des règles de déontologie propres à la profession afin de prévenir les risques de conflits d’intérêts. Est imposée l’obligation de fournir annuellement un état de la composition du capital à l’ordre ou aux ordres professionnels dont relève la société.

    La SEL ne peut exercer l’activité constituant son objet social qu’après agrément par l’autorité compétente ou son inscription sur la liste ou au tableau de l’ordre professionnel (loi no 90-1258 du 31 décembre 1990, art. 3). Son immatriculation n’intervient qu’à compter de ce moment. Tout litige relatif à sa création, son fonctionnement ou sa dissolution relève des tribunaux civils (C. comm., art. L. 721-5) ⁶⁴, ce qui manifeste encore l’emprise de la profession sur son régime.

    2. Sociétés de participations financières de professions libérales

    42

    Intégration et consolidation. La constitution de sociétés de participations financières ayant pour objet la détention des parts ou d’actions de sociétés d’exercice libéral (S.P.F.P.L.) marque une étape supplémentaire dans l’extension de règles, à première vue, étrangères à l’exercice de l’activité de leurs membres (art. 31-1). Elle favorise le rapprochement des professionnels ainsi que le renforcement de leurs moyens dans un contexte de vive

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