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Tours de cou et belles barrettes: Polar
Tours de cou et belles barrettes: Polar
Tours de cou et belles barrettes: Polar
Livre électronique203 pages3 heures

Tours de cou et belles barrettes: Polar

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À propos de ce livre électronique

Germaine n'en pouvait plus de souffrir de vieillesse. Pourtant elle ne s'est pas suicidée ; elle a été étranglée. Bientôt, d'autres la suivent dans la mort...

L’équipe de l’inspecteur Abert du commissariat de Tours, se trouve confrontée à une série inquiétante de meurtres commis sur des personnes âgées dans des quartiers habituellement calmes de la ville. Les enquêteurs se rendent vite compte qu’il existe un point commun entre les victimes. Elles sont soignées par le même cabinet d’infirmières. Le témoignage d’un voisin de l’une des personnes assassinées oriente les enquêteurs sur la piste d’une jeune femme qu’il a aperçue la nuit de l’un des crimes. Une nouvelle enquête tourangelle qui, du Beffroi à Velpeau et du Sanitas à Saint-Symphorien, vous entraîne toujours en chansons sur les traces d’un meurtrier bien singulier.

L'inspecteur parviendra-t-il à mettre la main sur l'auteur des crimes perpétrés à l'égard des aînés de Tours ?

EXTRAIT

Abert interrompt le cours d’histoire de l’art – passionnant mais hors de propos – pour revenir à des détails plus concrets.
— Avez-vous parlé récemment avec votre amie ? Avait-elle évoqué des craintes ?
— Je lui ai rendu visite, la dernière fois, la semaine passée. J’étais restée une partie de l’après-midi avec elle. Je l’avais trouvée fatiguée, il n’empêche que nous avions évoqué les romans de Balzac… Oui, c’était une de nos passions communes, nous nous rappelions la belle visite que nous avions faite au château de Saché. Toutes les deux, nous le connaissions déjà, mais il y avait une exposition sur Balzac et les femmes. Passionnante ! Et la petite chambre de l’écrivain au deuxième étage garde toujours son charme. On ne peut s’empêcher d’imaginer, là, l’auteur écrivant Le Lys dans la vallée.
Cette fois, c’est une conférence littéraire qu’Abert doit couper.
— Oui… pardon… je m’égare. Mais pour revenir à votre question, elle ne redoutait rien, même pas la nouvelle hospitalisation qui s’annonçait. C’était une forte nature, Germaine, elle avait surmonté bien des obstacles dans sa vie.
— Par exemple ?
— Oh ! Ne serait-ce que son mariage : il lui en a fait voir son mari… Joueur, buveur et même, violent. Pourtant c’était un collègue, comme quoi on trouve de tout dans l’enseignement. Le divorce s’est très mal passé, pour la garde de l’enfant notamment. Des procédures à n’en plus finir parce qu’elle avait des biens de famille et qu’il voulait en récupérer. Il a continué de la menacer, même encore quand elle est venue s’installer ici. Elle aurait dû se méfier, c’était ce qu’on appelle… un Levantin.
— Il vit encore ?
— Je ne crois pas, en tout cas elle était tranquille de ce côté-là depuis quelques années.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Jean-Noël Delétang vit à Tours depuis vingt ans où il a enseigné l’histoire et l’histoire des arts. Désormais, c’est l’écriture qui occupe son temps : textes historiques, nouvelles...

Aujourd’hui le polar lui procure un vrai plaisir et ancre dans le paysage de la Touraine les aventures de son héros, fan comme lui de chanson française et particulièrement de Brassens.
LangueFrançais
Date de sortie7 févr. 2020
ISBN9791053508391
Tours de cou et belles barrettes: Polar

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    Tours de cou et belles barrettes - Jean-Noël Deletang

    Couv.jpg

    Tours de cou

    et belles barrettes

    © 2019 – – 79260 La Crèche

    Tous droits réservés pour tous pays

    Jean-Noël DELÉTANG

    Tours de cou

    et belles barrettes

    © Jean-Noël Delétang 2019

    Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé serait purement fortuite.

    Du même auteur chez le même éditeur :

    Collection le geste noir

    Trois petits tours et puis s’en va - 2017

    Fluctuat nec mergitours - 2018

    Collection LA GESTE

    Histoire du Berry - 2017

    Aux bons soins de Jeannie, Marie,

    Géraldine et Marie-Christine,

    entre autres…

    Quand les gendarmes sont arrivés,

    En pleurs ils l’ont trouvée,

    C’est une larme au fond des yeux

    Qui lui valut les cieux.

    Georges Brassens

    L’Assassinat

    L’ASSASSINAT

    — Madame Lourcet ? Madame Lourcet ?… Vous êtes là ? Hou hou… Ouvrez-moi…

    Malgré le bruit de la circulation automobile assez intense en ce début de matinée dans la rue d’Entraigues et le froid qui s’installe dans la cité tourangelle, beaucoup de passants remarquent cette jeune femme qui s’égosille au pied d’un particulier de trois étages à la façade grisâtre. L’infirmière passe d’autant moins inaperçue qu’elle a garé sa voiture à cheval sur le trottoir, feux de détresse en action. Automobilistes et piétons sont forcément gênés par ce stationnement intempestif – espéré rapide par la conductrice – mais que l’absence de réponse de sa patiente risque de faire durer.

    — Madame Lourcet ?!

    Elle a beau laisser son doigt appuyé sur la sonnette, rien ne bouge au premier étage. Pourtant depuis quatre semaines, elle vient régulièrement faire des prises de sang et contrôler le diabète de la vieille dame, charmante et bavarde. Autrefois couturière à domicile, cette octogénaire s’était fait une belle clientèle pour laquelle elle reproduisait des modèles de haute-couture parisienne ; les bourgeoises tourangelles étaient heureuses de s’offrir pour trois fois rien des robes qu’on pouvait admirer dans Jours de France. À chaque visite, Odette Lourcet, veuve et sans enfant, entreprend son infirmière pour lui raconter sa carrière et évoquer ses années d’apprentissage chez le grand couturier Worth.

    Que se passe-t-il ce matin ?… La jeune femme ne veut pas prendre de retard dans sa tournée, mais il faut aussi qu’elle s’assure que tout aille bien pour sa patiente. Elle décide d’alerter le couple de retraités qui habite au deuxième étage et qui s’occupe souvent de la vieille dame. Par l’interphone, Fanny Tripont demande de l’aide : on lui ouvre la porte et elle commence à monter l’escalier tout en entendant le propriétaire du deuxième amorcer sa descente. Elle retrouve M. Deulé sur le palier d’Odette Lourcet et s’excuse du dérangement. Mais c’est le professeur à la retraite qui, montrant sa tenue – peignoir et pantoufles – réclame l’indulgence de l’infirmière. Puis, avec une violence tout à fait inattendue qui fait reculer la jeune femme, il se met à tambouriner des deux poings sur la porte.

    — Elle est de plus en plus sourde… Et même comme ça, quand elle n’est pas prévenue, on n’est pas sûr qu’elle entende.

    — Mais elle sait bien que je passe régulièrement entre sept heures trente et huit heures. Vous avez remarqué quelque chose ce matin ? Elle a fait du bruit ?

    — Oh ! Vous savez, Odette, c’est une petite souris qui trottine, elle dépasse à peine les quarante kilos et comme elle met un casque pour regarder sa télé, on n’entend rien…

    Et il recommence à frapper avec violence. C’est à ce moment-là qu’à l’intérieur…

    — Oui, voilà !… Voilà !… J’arrive…

    Le soulagement se lit sur le visage de Fanny Tripont. C’est une Odette non peignée, les mains toutes mouillées qui vient ouvrir et qui repart aussitôt dans sa cuisine en maugréant.

    — Mon évier est bouché et je suis inondée. Ah ! Quelle poisse… Puisque vous êtes là, monsieur Deulé, pouvez-vous m’aider ?

    — Je viens vous faire votre piqûre, madame Lourcet…

    — Non ! C’est pas l’jour des ordures, on est jeudi !

    — Pour votre diabète ! lui hurle Fanny dans les oreilles.

    Le voisin reprend :

    — C’est votre infirmière, Odette !

    Et là, faisant volte-face, elle revient vers ses deux visiteurs en faisant un grand sourire :

    — Ah ! Mais oui, bien sûr. J’avais sorti une jupe écossaise plissée que j’ai faite il y a dix ans et que je voulais vous montrer. Vous allez voir comme je travaillais bien. J’ai même eu Mme Debré comme cliente… Vous vous rendez compte ? Son chauffeur l’attendait en bas et moi, je lui faisais essayer ses tenues de soirée.

    — Excusez-moi, madame Lourcet, mais j’ai déjà pris du retard ce matin et…

    — Ah oui ! C’est sûr que j’travaillais tard, moi, j’comptais pas mes heures…

    M. Deulé intervient en s’approchant de l’oreille gauche d’Odette :

    — C’est l’heure de vous soigner ! Pendant ce temps-là, je vais déboucher votre évier.

    L’infirmière remercie le voisin et réussit à faire asseoir la vieille dame qui continue à bavarder pendant qu’elle reçoit sa dose d’insuline. L’intervention pratiquée d’une main experte est rapidement bouclée et Fanny Tripont inscrit sur une feuille son prochain rendez-vous.

    — Il faut répondre à la sonnette, madame Lourcet.

    Et, dans le même temps, elle aperçoit d’un œil le combiné de l’interphone qui pend lamentablement au bout de son fil. Elle salue sa patiente et lance un « merci ! » très fort en direction de la cuisine où le voisin se bat avec le siphon. Et c’est Odette qui répond :

    — Pourquoi vous criez comme ça ? Je n’suis pas sourde !

    Vite ! Fanny Tripont reprend sa voiture et poursuit sa tournée matinale. Depuis 6 h 30, elle sillonne les rues de Tours comme chaque matin. À la fin de ses études, elle avait intégré l’équipe de Bretonneau mais, très vite, elle a choisi sa liberté et donc… des contraintes. Avec deux collègues, elles ont monté un petit cabinet d’infirmières et maintenant ça marche, même trop. À trois, elles n’y arrivent plus, c’est pour cela qu’elles viennent de recruter une jeune, ce qui devrait les soulager un peu. Elles se répartissent les tournées et, régulièrement, alternent leurs patients. Pourtant, certaines semaines, il faut bouleverser les plannings, car elles ont aussi chacune une vie familiale, ce qui n’est pas toujours simple. Amandine Basc a des jumeaux et pas de compagnon, il lui faut donc jongler avec les horaires de l’école. Marine Davy vient d’avoir son premier bébé et, pendant sa grossesse, il a fallu trouver une remplaçante. C’est justement comme cela qu’elles ont décidé de recruter Sandrine Chonat définitivement. D’autant que celle-ci vit seule et qu’à vingt-cinq ans, elle ne veut pas d’enfant. Heureusement qu’il y a une bonne entente dans l’équipe, cela permet d’aplanir bien des difficultés. Fanny Tripont, elle, a un mari très présent malheureusement, car cloué dans son fauteuil par une maladie orpheline qui, peu à peu, lui ronge les muscles. Il a dû souvent gérer leur petite fille qui maintenant vient d’entrer au collège Montaigne, à Tours-Nord. Comme ils habitent un petit pavillon rue de la Clarté-Dieu, l’adolescente peut se débrouiller toute seule en attendant de poursuivre ses études au lycée Choiseul tout proche.

    Il est indispensable de tenir des réunions hebdomadaires pour gérer l’ensemble de la clientèle et fixer le casse-tête des agendas de chacune. L’arrivée d’une nouvelle nécessite de revoir les tournées des autres et de l’épauler dans sa prise de fonction. Heureusement, Sandrine est tourangelle et connaît bien la ville.

    Fanny arrive assez rapidement au bout de la rue Michelet après avoir remonté l’avenue Grammont jusqu’au carrefour de la place Vaillant. Devant le numéro 117, elle trouve une place et stoppe sa Clio. C’est vraiment une chance, car la Maison du yoga, toute proche, reçoit beaucoup de pratiquants. Mais il est sans doute encore un peu tôt pour y prendre la position du lotus…

    Dans ce particulier vit au rez-de-chaussée Marguerite Porel, une vieille dame souffrant de sclérose en plaques. Trois fois par semaine, on vient lui faire une injection pour la soulager, mais elle peine de plus en plus à se déplacer et il faudra sans doute songer à une prise en charge en maison spécialisée. Pour l’heure, Fanny frappe au carreau – c’est le signal convenu – et pousse ensuite la porte qui n’est jamais fermée. C’est pratique mais peu sécurisé. La malade gratifie sa visiteuse d’un large sourire :

    — Je vous attendais avec impatience, ma petite fille. Oh ! Qu’est-ce que j’ai souffert toute la nuit…

    — Cela va vous faire du bien, vous allez voir.

    — J’ai de plus en plus mal, vous savez. Et mes jambes ne veulent plus avancer.

    — Après la piqûre, vous irez vous remettre au lit et vous pourrez vous rendormir, vous verrez.

    — Ah ! oui, merci, j’ai l’impression qu’il faudrait que vous veniez plus souvent maintenant…

    — Vous demanderez à votre médecin ce qu’il en pense. Moi, je ne peux rien changer comme ça.

    — Je vais le faire venir cette semaine.

    — Dites, vous savez que la porte d’entrée était encore ouverte. Ce n’est pas prudent.

    — Ah ! C’est les étudiants qui logent dans les chambres de bonne du dernier étage, ils ne font pas attention. Mais moi, je n’ouvre que si on a frappé à mon carreau.

    — Voilà ! Vous allez vous sentir mieux maintenant.

    — Merci… jusqu’à la prochaine fois.

    Fanny Tripont range son matériel dans sa valisette, signe le carnet de soins et serre la main de Marguerite Porel en partant. La Clio grise redémarre rapidement, laissant sa place à un yogi potentiel, et se dirige vers le Sanitas par la rue Galpin-Thiou. Si elle n’avait pas perdu du temps tout à l’heure avec Odette Lourcet, elle aurait fait un saut rue Chalmel au magasin bio pour remplir ses placards mais là, comme elle est déjà en retard, elle file chez sa patiente suivante. Son circuit ce matin est un mamie-trail ! Descendre la rue Blaise-Pascal jusqu’au rond-point Saint-Paul et là, prendre à gauche pour atteindre la rue Christophe-Colomb. C’est l’heure de la rentrée des classes au groupe scolaire Claude Bernard et il y a de l’animation sur les trottoirs. Fanny freine brutalement pour laisser passer, en dehors des bandes piéton, toute une famille noire conduite par une mère en boubou multicolore. C’est vrai que ce quartier est cosmopolite : on y voit toutes sortes de petites frimousses des cinq continents qui crient, qui pleurent, qui s’agitent en tous sens, c’est réjouissant mais dangereux. La Clio parvient à se ranger à l’angle de la rue Pic-Paris, face au numéro 10. Mme Praseux va encore souligner le retard… C’est une râleuse permanente, il y a toujours quelque chose qui ne va pas. Quand elle ne se plaint pas de l’infirmière, c’est du médecin ou du pharmacien… ou des trois à la fois puisque, désormais, c’est son seul univers. Depuis qu’on lui a diagnostiqué une sévère urémie, elle doit régulièrement subir des dialyses en face de la cathédrale et, entre les séances, on lui injecte des doses importantes de produit pour lui purifier les reins. Tout cela l’a aigrie et elle ne voit plus personne alors que toute sa vie professionnelle aux Galeries Lafayette l’avait habituée à rencontrer beaucoup de gens et à bavarder avec eux.

    Fanny sait bien qu’elle est surtout à plaindre. Mais, n’empêche, elle est toujours mal accueillie. Ce matin, Chantal Praseux n’est pas du tout en forme, la preuve : elle ne râle pas ! Elle n’a pas vu l’heure, semble complètement dans le brouillard et ne parle quasiment pas. La jeune infirmière tente bien plusieurs sujets de conversation, mais n’obtient que des borborygmes comme réponse. La dame acariâtre reste prostrée dans son fauteuil et se laisse piquer sans réagir. Les demandes concernant la douleur et la persistance des symptômes ne suscitent pas plus de réaction que l’état de la fièvre. Fanny regarde le nom du médecin traitant et se promet de l’appeler pour savoir ce qu’il en pense.

    Après avoir redressé ses coussins, elle salue Chantal Praseux sans avoir pu obtenir plus de réaction.

    Il est 9 h 15 quand la Clio quitte le Sanitas pour gagner le quartier Velpeau. Il suffit pour cela de poursuivre la rue De-Gaulle jusqu’à la Rotonde. Et après être passé sous le pont du chemin de fer, de remonter la rue Jolivet jusqu’au croisement avec celle de la Tour-d’Auvergne. C’est là que l’attend le couple Fourrier pour son vaccin antigrippe. Eh oui ! En octobre, il y a toujours un pic de rendez-vous, car beaucoup de personnes âgées ne veulent ou ne peuvent plus se déplacer et il faut porter la piqûre, comme la bonne parole, à domicile.

    C’est M. Fourrier qui vient ouvrir, mais sa femme n’est pas loin. Elle surveille son mari qui fait toujours le joli cœur devant l’infirmière. Pourquoi a-t-il revêtu son costume pied-de-poule marron alors qu’il faut se déshabiller pour l’injection ? Toujours à jouer les don Juan et à faire des plaisanteries galantes…

    — Bonjour, mademoiselle, lance M. Fourrier.

    — Voyons, Pierre, tu sais bien que madame est mariée et qu’elle a une fille, elle te le dit à chaque visite…

    — Je salue la jeunesse et la beauté qui, enfin, font escale chez nous !

    — Bonjour m’sieur-dame. Toujours en forme à ce que je vois ? Ça fait plaisir…

    — Nous nous en remettons à la fille d’Esculape et offrons notre chair à ses mains expertes.

    — Pierre, calme-toi, tu n’as plus vingt ans et tu vas nous faire une attaque…

    — S’il vous plaît, Fanny, soyez charitable, piquez-la en premier ! Faites-le pour elle… mais aussi pour nous !

    — Je vais chercher les vaccins dans le frigo. Si, en plus de la grippe, vous pouviez le soigner contre la bêtise…

    — Je n’ai pas ce produit, madame Fourrier, mais croyez-moi, c’est une preuve de bonne santé, votre mari garde son esprit jeune.

    — J’ai bien du mérite, vous savez, car nous venons de célébrer nos noces d’or.

    — Vous avez fait la fête ?

    Depuis la cuisine, on entend Gisèle qui répond :

    — Oui, oui, on était une quarantaine avec les enfants et les petits-enfants. C’était très bien.

    Pierre ajoute :

    — On avait mis les petits plats dans les grands, c’est le traiteur Hardouin qui nous a régalés. Grandiose… surtout la note !

    — On ne le refera pas de sitôt… ajoute Gisèle.

    — Eh bien, dis donc, heureusement, nous attendrons notre centenaire maintenant.

    Chacun se soumet à la vaccination et Pierre Fourrier tente de retenir Fanny en lui offrant un petit café qu’elle refuse, puis un petit chocolat – de chez Bellanger, précise Gisèle – qu’elle décline également, prétextant la suite de sa tournée.

    Après avoir salué ce couple décidément sympathique, elle remonte dans sa voiture et vérifie sa prochaine halte. Mme Guido l’attend rue du Rempart dans un grand immeuble. Il suffit de remonter toute la rue Jolivet et de bifurquer rue Plantin pour aboutir à la Résidence Médicis, au numéro 119.

    La visite risque d’être moins gaie, car Germaine Guido souffre d’une leucémie depuis plusieurs mois. Régulièrement, on la transporte à Trousseau pour des transfusions et, dans l’intervalle, on lui prescrit des perfusions en surveillant l’état de ses globules. Comme elle refuse l’hospitalisation ou le séjour en maison médicalisée, on vient chaque jour lui changer son flacon. Avec l’âge qui avance et la perte progressive de sa mobilité, il va falloir prendre des dispositions plus raisonnables. Mais elle a encore toute sa tête, vit seule sans enfant et peut décider de tout. Elle ne s’en prive pas.

    Fanny sonne à l’interphone au moment où un occupant de l’immeuble sort pour promener son chien. Elle en profite pour se glisser dans le hall et gagne le palier du

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