Manuel de transgression à l'usage de ceux qui veulent s'épanouir au travail: Pour ne plus souffrir au travail
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À propos de ce livre électronique
" Une procédure ne fonctionne que parce qu'on ne l'applique pas ".
Appliquer la procédure à la lettre, c'est faire la grève du zèle, en s'obligeant à n'exécuter que ce qui nous est strictement demandé : le moyen infaillible de bloquer le système.
A contrario, faire du zèle, c'est tout simplement laisser libre cours à notre envie de création et d'engagement, en développant notre agilité à transgresser les procédures.
Christophe Genthial réunit théories et expériences vécues pour nous montrer comment installer la dynamique vertueuse qui nous permet de garder la main sur notre évolution professionnelle, pour réconcilier nos aspirations les plus profondes avec les enjeux de notre ou de nos métiers.
Nous n'avons qu'une vie. Mais il ne tient qu'à nous d'y faire s'y succéder des vies professionnelles plurielles, évolutives, cohérentes, passionnantes : grâce à nos transgressions.
C'est là le secret de ceux qui ne s'ennuient jamais au travail : parce qu'ils ont rejoint le groupe des travailleurs qui s'y épanouissent, ceux qui n'envisagent plus de travailler moins, mais de s'engager plus.
Christophe Genthial
Christophe Genthial est consultant, psychologue, clinicien du travail et coach certifié. Passionné par les ressources que le travail fournit à ceux qui savent les trouver, il n'oublie pas ses rencontres avec les accidentés de ce même travail, tous ceux qui un jour en sont tombés malades, et qui ont fait le pari - réussi - d'un nouveau départ. Il intervient depuis plus de vingt-cinq ans auprès de directions générales, managers, salariés, représentants du personnel, d'abord comme consultant en organisation et conduite du changement chez Ernst & Young, puis comme consultant / expert en prévention des risques psychosociaux chez Secafi / Groupe Alpha. Parallèlement à ces activités de conseil et de formation en entreprise, par nature collectives, il exerce une activité d'accompagnement individuel.
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Aperçu du livre
Manuel de transgression à l'usage de ceux qui veulent s'épanouir au travail - Christophe Genthial
Christophe Genthial est consultant, psychologue, clinicien du travail et coach certifié. Passionné par les ressources que le travail fournit à ceux qui savent les trouver, il n’oublie pas ses rencontres avec les accidentés de ce même travail, tous ceux qui un jour en sont tombés malades, et qui ont fait le pari – réussi – d’un nouveau départ.
Il intervient depuis plus de vingt-cinq ans auprès de directions générales, managers, salariés, représentants du personnel, d’abord comme consultant en organisation et conduite du changement chez Ernst & Young, puis comme consultant/expert en prévention des risques psychosociaux chez Secafi/Groupe Alpha.
Parallèlement à ces activités de conseil et de formation en entreprise, par nature collectives, il exerce une activité d’accompagnement individuel.
Remerciements
À tous les travailleurs d’exception qui m’ont inspiré, virtuoses dans l’art de la transgression vertueuse, et qui disposent à jamais d’une place à part dans mon collectif de travail... en particulier : Alexis, Bruno, Céline, Charles, Christine, Delphine, François, Gaëlle, Géraldine, Gilles, Hervé, Les Sardines Dynamiques, Olivier, Philippe.
À Flo, Christian, Besma, pour vos précieuses relectures.
À Raymond et Gaby G.
À Sandrine, et au partage confiant de nos boîtes noires.
« Rien ne me fascine plus que le travail : je peux rester assis et le
contempler pendant des heures. »
Jerome K. Jerome
Trois hommes dans un bateau (1889)
« Une société de travailleurs sans travail, dans laquelle plus per-
sonne ne fait œuvre de quelque chose mais où tout le monde
œuvre pour gagner sa vie. »
Hannah Arendt
Condition de l’homme moderne (1958)
Sommaire
Une procédure ne fonctionne que parce qu’on ne l’applique pas
Travailler, ou l’art de faire du zèle
Quand travailler devient un plaisir
Travail et zèle, cet espace entre la consigne et sa réalisation
Débusquer le travail là où il se cache
Il n’y a pas de sots métiers, mais il y a encore des sots qui l’ignorent
Mais pourquoi donc renoncer au plaisir de travailler plus ?
Garder vivant le travail
Les décideurs seraient-ils les seuls à s’épanouir ?
Quand le travailleur devient saboteur
Le travailleur abîmé, victime d’un travail abîmé
Combien d’autonomie faut-il pour s’épanouir au travail ?
Oui… mais j’en connais qui ne supportent que la routine !
Le mirage de la « mesure objective du travail »
Et si nous apprenions enfin à évaluer le travail ?
L’évaluation de la charge de travail sera toujours subjective
Quand les cols blancs découvrent la boîte noire de leurs équipes
Quand les cols blancs découvrent la boîte noire de leurs équipes
La boîte noire du travailleur
Le pillage de nos boîtes noires, ou la mise à mort du travail
Dans nos boîtes noires, à la recherche de nos transgressions
Ce qui ne se trouve pas encore dans nos boîtes noires
Oubliez ce que vous faites, mais plus jamais comment !
Faut-il partager ses « trouvailles » ?
Lorsque la hiérarchie s’approprie nos trouvailles
Partager ses trouvailles : une histoire qui se termine mal. En général.
Le collectif de travail : excipient ou principe actif de notre épanouissement ?
Collectif, collectif, vous avez dit collectif ?
La meilleure des bonnes pratiques ? S’en passer !
Les dilemmes de métier
Le collectif de travail, pour affronter les dilemmes de métier
Et nous, avec qui travaillons-nous ?
Seuls… tous ensemble !
L’autre, partenaire indispensable de notre épanouissement
En conclusion : le secret de ceux qui n’envisagent plus de travailler moins mais de s’engager plus
Une procédure ne
fonctionne que parce
qu’on ne l’applique pas
« — Tu travailles ?
— J’essaie de travailler : c’est bien plus difficile. »
Jules Renard
Journal (29 janvier 1898)
Travailler, ou l’art de faire du zèle
4 mars 2019.
Des dizaines de kilomètres d’embouteillage, pour l’essentiel des poids lourds et leur chargement.
Des milliers de camions parqués en urgence dans des parcs improvisés.
Des donneurs d’ordres paniqués, qui gèrent tant bien que mal et à distance les chargements périssables immobilisés, et leurs chauffeurs dont il faut rendre ces temps de travail imprévus compatibles avec une législation qui, bien que complexe, n’a pas prévu cette crise.
Des autoroutes fermées en catastrophe.
Des frontières bloquées sine die, pour contraindre les poids lourds à faire demi-tour.
Des trains retardés de plusieurs heures, lorsqu’ils ne sont pas tout simplement annulés.
Des files d’attente sans fin dans les aéroports parisiens et régionaux.
Des retards qui se répercutent de vol en vol, jusqu’aux aéroports de destination, à l’étranger.
*
Nous nous trouvons au cœur de ce moment complexe et tendu, lorsque le Brexit continue sans fin de se préciser sans se décider.
Les représentants politiques nationaux européens et français se veulent rassurants. Ils répètent à l’envi que les douanes françaises sauront gérer le Brexit et ses conséquences, sans pénaliser les usagers.
Les agents des douanes – eux – ne partagent pas tout à fait l’optimisme de leur tutelle. Au point d’exprimer de plus en plus fort leur franche inquiétude sur la faiblesse du niveau de maîtrise réelle de la situation par les administrations.
Porteurs d’une mission de service public essentielle, les agents des douanes n’ont pas le droit de faire grève.
Ils peuvent en revanche décider d’appliquer plus strictement leurs consignes. Sans même avoir à tomber dans une exagération caricaturale, qui pourrait leur être reprochée, ils n’ont qu’à engager une démarche de « contrôles plus renforcés ».
Ce qu’ils font.
Ils se mettent à appliquer « pour de vrai » leurs consignes.
Mais faut-il alors comprendre qu’ils ne les auraient – jusqu’ici – pas, ou mal, appliquées ?
Nous pourrions le croire, si nous prenions au pied de la lettre l’instruction donnée par Bercy à l’époque, qui tente ainsi de stopper le mouvement. La voici, telle qu’elle est reprise par les voix syndicales : « Le ministre [des Comptes publics] Gérald Darmanin vient de donner l’ordre officiellement de ne plus lutter contre la fraude sur l’ensemble du territoire ».
Par sa réaction, Bercy aura permis aux syndicalistes de dénoncer une administration qui n’hésiterait pas à agir « au mépris de la sécurité des citoyens »… puisqu’elle leur donne l’instruction de… mal faire leur travail !
*
Avec cet exemple, parfait cas d’école d’une grève du zèle, on ne pourrait mieux illustrer qu’une « procédure ne fonctionne que parce qu’on ne l’applique pas »¹.
Respecter la procédure, autrement dit la consigne (ou la prescription, l’instruction, l’ordre, le mode opératoire, la règle, la fiche de poste...), à la lettre, c’est faire la grève du zèle.
Et faire la grève du zèle, comme le savent les douaniers et comme le subissent leurs usagers, bloque le système. Inévitablement. Parce que la consigne ne pourra jamais tout prévoir.
Se limiter strictement à l’application de ce que commande la procédure, c’est s’assurer de l’incompatibilité de notre travail avec la réalité telle qu’elle se présente à nous.
Pour « bien » travailler, il va donc falloir prendre des initiatives, le plus souvent dans l’instant immédiat de l’action.
Il va aussi s’agir de prendre des libertés avec la consigne, inévitablement, donc de la transgresser.
La réalité nous conduit à sans arrêt l’interpréter, de manière originale, ou à la compléter, à chaque fois qu’elle se trouve prise en défaut, sans réponse adaptée.
C’est dans ces moments que nous travaillons, en faisant du zèle, pour rendre la consigne compatible avec la réalité.
C’est grâce à ce travail, à ce zèle, que nous atteignons nos objectifs, tels que les prévoient les consignes.
Le terme de zèle² est particulièrement bien choisi, car il renvoie à la notion de créativité, de spontanéité, et de singularité. Car effectivement, lorsque je fais du zèle et que je travaille, j’invente, je m’engage volontairement : je fais à ma manière, toujours fondamentalement différente de celle d’un autre, même si je peux souvent être persuadé du contraire.
C’est ça, travailler : faire du zèle.
Et c’est ça, le travail : le zèle.
*
Malheureusement, plutôt que cette définition très pragmatique du travail, élaborée et formulée par la psychologie clinique du travail et l’ergonomie, le langage courant nous oblige à composer avec une somme d’usages du terme « travail », aussi imprécis que divers et éloignés de cette réalité.
On entend parler de travail comme d’une quantité (j’ai beaucoup travaillé), d’un résultat (quel beau travail), d’un emploi (je recherche un travail), d’un lieu (j’ai oublié mes clés au travail), d’un processus (ça me travaille), d’une utilité (ce travail n’aura servi à rien), d’une satisfaction (j’ai bien travaillé)... et cette liste n’est sûrement pas exhaustive.
Cette pluralité d’usages n’est pas anodine, elle reflète tout simplement la place essentielle qu’occupe le travail dans notre vie, dans notre société et dans nos échanges.
Dans ce pêle-mêle sémantique se dessine l’image d’un travail comme clé d’un possible épanouissement autant que d’un possible épuisement.
On y voit aussi un travail au cœur des subordinations entre employeurs et employés, fournisseurs et clients… et plus généralement entre celui qui produit le travail et celui qui en est le destinataire.
*
Signe de la place centrale qu’occupe le travail dans notre vie, les sociologues soulignent avec justesse que notre profession est la caractéristique qui nous décrit le mieux.
Énoncer son métier convoque immédiatement un cadre social précis, et nous y installe : « je suis avocate », « je suis plombier », « je suis startuper », « je suis syndicaliste », « je suis directrice », « je suis prêtre », « je suis pompier », « je suis infirmier », « je suis comptable », « je suis gardien de prison », « je suis psychologue », « je suis directeur d’agence », « je suis travailleur social », « je suis commercial », « je suis enseignant-chercheur »...
Les données que nous associons à ce cadre sont probablement fausses... ou vraies... Peu importe, elles s’imposent instantanément, et deviennent les nôtres pour un temps, en attendant – peut-être – une validation ou une invalidation ultérieure.
Ce livre reconnaît cette place centrale du travail dans notre vie. À ce titre, il veut lui redonner son rôle d’instrument de réalisation de soi et d’épanouissement, par une synthèse d’apports choisis de la psychologie clinique du travail et de l’ergonomie, confrontés à l’expérience de plus de vingt-cinq années d’accompagnement de femmes et d’hommes au travail, où certains s’épanouissent, quand d’autres y souffrent.
Au fil de toutes ces années, au contact du travail sous toutes ses formes, et de ceux qui le réalisent, après des milliers d’entretiens, individuels ou collectifs, des milliers d’observations du travail aux côtés et avec les travailleurs eux-mêmes, je reste toujours stupéfié par ces fractures, si difficiles à réduire :
- Entre le monde des chercheurs et le monde de l’entreprise ; entre les démonstrations scientifiquement