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Lumière Fantôme: Ivy Granger Détective Paranormale
Lumière Fantôme: Ivy Granger Détective Paranormale
Lumière Fantôme: Ivy Granger Détective Paranormale
Livre électronique337 pages4 heures

Lumière Fantôme: Ivy Granger Détective Paranormale

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À propos de ce livre électronique

Finaliste du PRG Reviewer's Choice Award pour meilleure série de fantasy urbaine.

Ivy Granger, détective paranormale, pensait avoir tout vu... jusqu'à maintenant.

Avec une lamia vengeresse qu'elle seule peut voir dans les rues de la ville, des rapports de spectres arpentant les cimetières de Harborsmouth et une foule de clients fées en colère à la porte de son bureau, la nuit s'annonce longue. Ajoutez à cela une offense aux cours des fées et des marchés idiots, et une chose est claire : Ivy Granger est dans les problèmes jusqu'au cou.

Ivy Granger est de retour, rassemblant des indices dans les coins les plus sombres du centre de Harborsmouth. Avec les vies de plusieurs clients en danger, elle est en pleine course contre la montre. Ivy a enfin une piste sur l'endroit où se trouve la seule personne pouvant l'aider à contrôler ses capacités de feu follet, mais fera-t-elle passer les besoins de ses clients avant les siens ?

Si Ivy ne trouve pas rapidement une solution, elle pourrait finir par devenir elle-même une fantôme.

Lumière Fantôme est le deuxième roman de la série best-seller primée de fantasy urbaine Ivy Granger par E.J. Stevens. Le monde d'Ivy Granger, incluant la série Ivy Granger Détective paranormale et la série Hunters' Guild, regorge d'action, de mystère, de magie, d'humour noir, de personnages excentriques, de vampires suceurs de sang, de gargouilles sarcastiques, de métamorphes sexy, de sorcières caractérielles, de fées psychotiques et de héroïnes narquoises qui envoient du lourd.

LangueFrançais
Date de sortie22 août 2018
ISBN9781386288534
Lumière Fantôme: Ivy Granger Détective Paranormale

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    Aperçu du livre

    Lumière Fantôme - E.J. Stevens

    Introduction

    Bienvenue à Harborsmouth, où les monstres se baladent dans les rues sans être vus par les humains... sauf ceux ayant la deuxième vue.

    Que vous visitiez notre quartier d’affaires moderne ou exploriez les rues pavées du Vieux Port, nous vous souhaitons un plaisant séjour. Quand vous rentrerez chez vous, n’hésitez pas à parler de notre superbe ville à vos amis, omettez seulement les détails surnaturels.

    Ne vous inquiétez pas, la plupart de nos visiteurs ne font jamais d’expériences sortant de l’ordinaire. Les êtres de l’autre monde, comme les fées, les vampires et les goules, sont plutôt adeptes des ombres où ils se cachent. Bien d’autres sont également doués pour effacer les souvenirs. Il se peut que vous vous réveilliez en criant dans la nuit, mais vous ne vous souviendrez pas pourquoi. Soyez heureux d’avoir oublié, vous faites partie des chanceux.

    Si vous venez à faire une rencontre surnaturelle, nous vous recommandons les services d’Ivy Granger, détective paranormale. Co-fondatrice de l’agence d’investigation Troisième Œil, Ivy Granger est plutôt nouvelle dans notre petite communauté commerciale. Vous trouverez son bureau sur Water Street, au cœur du Vieux Port.

    Mademoiselle Granger a le don remarquable de recevoir des visions rien qu’en touchant un objet. Ce talent est utile pour son travail d’investigation, surtout pour localiser des objets perdus. Que vous cherchiez une broche perdue ou une personne disparue, aucune mission n’est trop insignifiante pour Ivy Granger. Mais il vous faudra sûrement patienter sur sa liste d’attente. Espérons que vous n’aurez pas besoin de ses services en urgence. Suite au rôle qu’elle a joué dans de récents évènements, un rôle crucial pour sauver notre ville, les affaires de Mademoiselle Granger sont florissantes.

    Si le problème est particulièrement sinistre, nous pouvons également fournir, sur demande, une liste de croque-morts des plus talentueux. Si vous avez besoin de leurs services, alors nous vous conseillons également d’aller à l’agence immobilière du cimetière de Harborsmouth. Il n’est jamais trop tôt pour les contacter, car notre marché de « logements » est florissant. La demande est très forte pour un caveau local, il y a tout le temps des gens mourant d’envie de trouver un endroit où se reposer.

    Chapitre 1

    Qu’ont en commun les noms lumière fantôme, lanterne de moine, bougie de cadavre, aleya, lanterne de passion, chir batti, feu de fée, lumière min min, luz mala, fantôme de lumière, ignus fatuus, orbes, boitatá et hinkypunk ? Ce sont tous des noms pour désigner les feux follets. Bougie de cadavre ? Voilà de quoi vous donner des complexes.

    J’avais récemment découvert que j’étais à moitié fée. Ma moitié fée est le feu follet, dont le roi est Will au Tortillon, mon père. Ça faisait beaucoup à digérer.

    Gérer mon nouveau statut de princesse des feux follets était stressant, mais les affaires explosaient et je n’avais pas le temps de faire des crises d’angoisse. Avant, je voyais un thérapeute pour gérer mon anxiété. Récemment, je rendais visite à Galliel à l’église Sacré-Cœur.

    Galliel n’était pas le prêtre de Sacré-Cœur, bien que je m’arrêtais généralement pour saluer le Père Michael quand j’y allais. Le Père Michael m’avait aidée avec de récents problèmes de démons, mais passer du temps avec lui n’apaisait pas mon anxiété, comme c’était le cas avec Galliel. Ce n’était pas la faute du Père Michael. C’était un bon prêtre, de ce que je pouvais voir, mais il n’était qu’humain. Galliel était une licorne.

    Je me délectais de mon plaisir coupable, la tête admirative de Galliel sur mes genoux, tandis que Ceff parlait avec le prêtre. C’était le pur bonheur. Je m’étais toujours demandé à quoi ressemblait le vrai bonheur, mais je n’avais jamais pensé que j’aurais la chance d’en faire l’expérience un jour. Étrangement, lors d’une semaine catastrophique qui avait presque mis ma ville à genoux, j’avais trouvé le mien. Galliel en faisait partie. Ceff aussi.

    Si jamais je cherchais l’amour sur Meetic, mon annonce serait du genre « Doit aimer les licornes ». Bien sûr, je n’avais pas besoin de chercher l’amour en ligne. Mon cœur appartenait maintenant à Ceff.

    Ceffyl Dŵr, ou Ceff, était un kelpie. En fait, c’était le roi des kelpies locaux. Après avoir découvert mon droit de naissance en tant que princesse des feux follets, cela semblait plutôt providentiel. C’était également très dangereux. Le roi kelpie avait beaucoup d’ennemis. Il avait aussi une femme sociopathe et meurtrière.

    Je m’en fichais. Pour la première fois de ma vie, j’avais vraiment l’impression d’être à ma place. Il y avait tant de choses pour lesquelles j’étais reconnaissante : un petit-ami magnifique, une super meilleure amie, partenaire et colocataire, une excellente mentor, de fabuleux nouveaux amis, de nombreux clients et une licorne de compagnie.

    J’aurais dû savoir que quelque chose de mauvais allait arriver. Je l’ai déjà dit et je le redis, le destin est une ordure.

    *****

    La plupart des gens ont des cadavres dans leurs placards. Je n’étais pas née de la dernière pluie et j’étais pleinement consciente que mon petit-ami était né bien plus de pluies auparavant que je ne pouvais en compter. Comme Ceff était âgé de quelques millénaires, je m’attendais à ce que de vieux os poussiéreux se tapissent derrière les chemises repassées, les jeans délavés et les costumes sur mesure, sans chaussures bien sûr. Ce à quoi je ne m’attendais pas, c’était que les cadavres de Ceff sautent des coins sombres de son placard, leurs doigts squelettiques tendus pour m’arracher les yeux.

    Ceff avait été marié une fois. Pour rester polie, la nana était une putain de salope. J’aurais dit que la pouff’ était une harpie, mais cela reviendrait à insulter toutes les harpies et je ne voudrais pas offenser de potentielles clientes. Mélusine, l’ex-femme et ancienne reine de Ceff, était une pure incarnation du Mal.

    À en juger par les souvenirs dont j’avais été témoin lors d’une vision psychométrique que j’avais eue alors que j’étais à la recherche de la bride de Ceff, cette femme était aussi complètement folle à lier. Venant de moi, ça voulait dire quelque chose. Mais sérieusement, quelle autre raison expliquerait qu’une mère assassine son jeune enfant devant son mari ?

    Leur union, un mariage arrangé basé sur des politiques de fées, n’était certes pas basée sur l’amour, mais Ceff n’avait pas été un mauvais mari. Il était attentif envers sa femme et la couvrait de cadeaux dignes d’une reine. Mais son véritable amour était réservé à ses fils. Malheureusement, cet amour sonnerait le glas.

    Mélusine était devenue tellement jalouse qu’elle se mit à comploter pour retirer son fils aîné de son rôle prisé comme héritier du trône kelpie. Elle le piégea afin de le faire passer pour traître, un crime puni par la mort selon la loi kelpie, et regarda avec délice lorsque son mari exécuta le châtiment. Mais l’exécution publique de son fils aîné ne suffit pas.

    Mélusine voulait l’amour et l’attention indivisibles de Ceff, mais même dans son deuil, il ne se tourna pas vers sa femme. À la place, il inonda d’affection son plus jeune fils qui était encore un bébé.

    Mélusine bouillonna de jalousie pour l’amour qu’elle pensait être sien. Quel genre d’enfant vole l’amour d’un parent envers l’autre ? Folle de rage, elle agita l’enfant au-dessus d’un puits de flamme et regarda Ceff lutter pour le sauver. Ses tentatives de l’implorer, pour le bien de l’enfant, ne la rendit que plus folle. Elle lança leur bébé dans le feu et, en faisant claquer sa queue de serpent, elle disparut dans la mer.

    J’avais espéré que la garce se soit fait manger par un requin ou renverser par un bateau à moteur. Peut-être avait-elle épousé un autre pauvre bougre et déversait sa folie dans son océan à lui. Je m’en moquais, bien que j’avais un faible pour le scénario du requin, tant que Mélusine était hors de la partie.

    Dommage qu’elle n’y fût pas restée.

    Avez-vous déjà pris des photos avec des amis et tout le monde sourit, mais quand vous voyez les photos plus tard, elles sont parsemées d’orbes blanches ? OK, parfois, c’est mon peuple, les feux follets, mais bien plus souvent ils apparaissent comme des fantômes hantant les personnes sur la photo et rendant les sourires plus grotesques que joyeux.

    Mélusine était comme un de ces fantômes photographiques. Elle était de retour, me hantant et tachant la relation presque parfaite que j’avais avec Ceff de souvenirs douloureux et d’une menace de violence. La lune de miel était terminée avant qu’elle ne commence, et ça m’énervait grave.

    J’allais bientôt fêter mes vingt-cinq ans et je n’étais jamais sortie avec quelqu’un jusqu’alors. Je n’avais jamais non plus été intime avec quelqu’un. La seule fois où j’avais été très proche d’une telle intimité était une nuit magique avec Ceff pendant le solstice d’hiver. La Poisse trouvait que j’étais folle de m’être limitée à nous câliner toute la nuit sur le canapé alors que j’avais eu l’opportunité de plus, mais pour moi, être tenue dans des bras était un premier pas de géant. Presque vingt-cinq ans et jamais embrassée. Mais j’étais de plus en plus proche d’atteindre ça avec Ceff, jusqu’à ce que son ex-femme débarque.

    Il valait mieux pour elle qu’elle ait un leprechaun dans son arbre généalogique, car cette garce allait payer.

    Chapitre 2

    Le brouillard venant de l’océan étouffait le Vieux Port et étranglait la Colline. J’avançais péniblement dans la brume fraîche à côté de La Poisse, pestant contre les sacs remplis de chaussures pendus à chacun de mes doigts gantés. Je détestais le shopping. La menace de recevoir une vision non désirée sans la récompense d’une paye était trop élevée, mais ma colocataire et partenaire voulait célébrer notre nouveau succès et je ne résistais pas aux larmes.

    Maintenant, je jouais les sherpas accro au shopping alors que La Poisse grimpait Joysen Hill sur des escarpins à plateforme avec des talons de quinze centimètres. Je m’étais dit que porter les sacs était mieux que de devoir porter une meilleure amie blessée. La Poisse était la personne la plus à même d’avoir un accident que je connaissais. Rien que de la voir chanceler sur ces chaussures, tout en trébuchant sur les pavés, me faisait mal aux chevilles et me faisait grincer des dents.

    J’essayai de frotter ma mâchoire avec mon épaule, mais j’abandonnai en grognant. Mon cou et mes épaules étaient crispés et j’aurais pu me claquer un muscle. Marcher dans Joysen Hill me rendait toujours nerveuse, même en plein jour. L’obscurité oppressive du brouillard faisait siffler mes oreilles, comme si quelqu’un m’observait.

    Je pivotai sur la pointe des pieds, soudain sûre que quelqu’un approchait dans le brouillard, mais quand je parcourus du regard la rue derrière nous, je ne vis que des passants inoffensifs venus faire du shopping par une fraîche après-midi de printemps. Je regardai vers le bas de la colline à travers la soupe de pois, mon regard passant des porches ombragés aux étroites allées, mais je ne pus repérer la source de mon malaise.

    Les alarmes se déclenchant dans ma tête auraient pu être de la simple paranoïa, mais s’inquiéter d’être chassée dans cette partie de la ville ne venait pas nécessairement de mon imagination. Les gros vilains de Harborsmouth, surnaturels et humains, se terrent dans les dédales de Joysen Hill depuis des décennies. C’est un fait qu’à Harborsmouth de vilaines choses se passent chaque jour sur la Colline. Des marchands de sommeil vampires qui drainent leurs locataires à sec, des djinns qui offrent des faveurs à ceux qui... frottent leurs lampes et des fées carnivores qui trouvent des moyens créatifs d’attirer les humains dans leurs terriers.

    C’était l’autre raison pour laquelle j’avais accepté d’aller faire du shopping. La Poisse avait accès à du baume de fée qui lui permettait de voir au travers d’un envoûtement de fée basique, mais c’était cher. Elle préférait dépenser son argent pour des chaussures, plutôt que pour les potions que mon amie sorcière préparait. Alors, je m’étais joint à elle pour m’assurer qu’elle ne rencontre pas de problèmes. La Poisse ne verrait que des marchands présenter leurs marchandises, mais moi, je verrais les crocs et les mandibules derrière les sourires brillants.

    J’éloignai La Poisse d’une vitrine de bols de poterie qui, sous un voile d’envoûtement brillant, s’avéraient être des crânes vidés, et nous entrâmes dans la boutique voisine. L’odeur de cuir emplissait l’air et un hoquet retentit de derrière la caisse. Je souris et laissai la tension se relâcher de mon cou et de mes épaules. Nous étions dans un magasin de cuir de cluricaune.

    Mes mains étaient actuellement protégées par une paire de gants fabriqués par un cluricaune, un cadeau de Noël de Marvin. Je souris et fis fléchir mes doigts, tout en essayant de ne pas faire tomber les sacs que je portais. Marvin s’était donné du mal afin de marchander avec une de ces fées ivres en permanence, mais j’étais ravie qu’il l’ait fait. Les gants étaient magnifiques, m’allaient à merveille et ne m’avaient donné aucune vision terrifiante.

    Les cluricaunes, cousins des célèbres fées cordonnières, sont tout le temps en état d’ébriété. Autrement dit, les petits soûlards sont trop joyeux et leurs esprits trop déconcentrés pour passer des visions déplaisantes. Marvin m’avait trouvé un cadeau parfait. Je souris, pensant à la chance que j’avais que le jeune troll soit entré dans ma vie. Il faudrait que j’achète du miel pour le gamin avant de rentrer.

    Je déplaçai le poids des sacs dans mes mains et le cluricaune derrière le comptoir renifla et tomba de son tabouret avec fracas. La Poisse resta bouche bée et je me dépêchai d’aller voir. La fée au nez rouge se releva en titubant, secoua la tête, se frotta le visage et afficha un large sourire. Je me demandai, et pas pour la première fois, comment la créature aux yeux troubles pouvait fabriquer d’aussi beaux objets en cuir. Je haussai une épaule. C’était un autre mystère de fée.

    La Poisse, qui ne s’inquiétait plus du vendeur, fouillait dans un panier de ceintures en cuir.

    – Celle-là est superbe, dit-elle en levant une ceinture rouge. Vous avez des chaussures qui vont avec ?

    La Poisse se tourna vers l’homme derrière le comptoir et je grimaçai. Les leprechauns font des chaussures, les cluricaunes tout le reste. C’était un point sensible entre les deux races de fées.

    Le rouge du nez du cluricaune se répandit sur son visage et son cou. Je m’attendais presque à voir de la fumée sortir de ses oreilles. Bien sûr, c’était idiot. Ce n’était pas un phœnix.

    Le cluricaune sortit de derrière le comptoir en titubant et secouant un poing.

    – Laissez-moi vous dire... commença-t-il.

    Le petit homme s’arrêta devant La Poisse, la bouche grande ouverte. Son sourire bête revint et la chaleur montant sur son visage se posa sur ses joues roses. Les cluricaunes ne restent pas longtemps en colère et celui-ci était de toute évidence frappé par la vue de ma colocataire. Bien sûr, à sa hauteur, il regardait sous sa jupe.

    – Les cluricaunes sont des maîtres tailleurs et des artisans du cuir, pas des cordonniers, dis-je pour remplir le silence inconfortable.

    Je tendis la main vers la ceinture que tenait La Poisse et l’éloignai de la fée captivée.

    – Pas de chaussures ? demanda La Poisse.

    – Non, pas de chaussures, répondis-je.

    La Poisse soupira et laissa retomber la ceinture dans le panier. Avec de dangereux pas en zigzag, le cluricaune apporta un haut dos-nu en cuir bordeaux. Je me déconnectai de la conversation alors que la fée essayait d’y apporter du charme. Le cluricaune utilisait la marchandise comme excuse pour regarder la poitrine de ma colocataire. La Poisse se pencha et se mit à négocier le prix.

    Je fis rouler mes épaules, repositionnant les sacs et les boîtes, et me tournai pour regarder dans la rue. Là, à côté d’un lampadaire sur le trottoir d’en face, Mélusine était dressée sur sa queue de serpent enroulée. Ici, sur la terre ferme, je pouvais voir que la moitié inférieure de son corps était couverte de peau de serpent, pas d’écailles de poisson comme j’avais présumé quand je l’avais vue dans ma vision.

    Elle me fixait du regard.

    La haine brûlait dans les yeux de Mélusine et une langue fourchue darda de sa bouche. Ses crochets s’allongèrent alors qu’elle s’agitait dans un mouvement en zigzag et me lançait des poignards avec ses yeux entre les voitures qui passaient.

    Je réprimai un hoquet de surprise, fis tomber les sacs de La Poisse et courus vers la porte. Je n’avais aucune envie de me frotter à un serpent de mer enragé, mais mes chances de survie augmenteraient si j’avais de la place pour bouger. Si Mélusine venait à entrer en trombe par la vitrine, nous serions des proies faciles.

    – Gardez-la en sécurité, lançai-je par-dessus mon épaule.

    Je fouillai dans mes poches et lançai quelques billets et notre carte de visite au vendeur saoul.

    – Envoûtez mon amie, continuai-je, et emmenez-la dans votre refuge jusqu’à mon retour. Si vous le faites, je vous devrai une dette. L’agence d’investigation Troisième Œil s’occupera d’une affaire de votre choix gratuitement.

    Pour un accord de fée, ce n’était pas très solide, mais c’était ce que je pouvais faire de mieux dans l’urgence. J’espérai juste vivre assez longtemps pour regretter toute faille laissée dans l’accord.

    Le cluricaune attrapa les objets et regarda notre carte d’un air curieux. L’argent disparut dans une de ses nombreuses poches.

    – Marché conclu, dit-il en hochant la tête.

    Je titubai, l’étourdissement troublant ma vision alors que la dette entre nous se posait sur mon âme. Les serments de fées étaient contraignants, surtout entre fées. Mon sang de feu follet répondait à l’accord et au poids des multiples dettes que j’avais accumulées. Je n’aurais sûrement pas dû demander de l’aide à une autre fée si rapidement. Dommage que n’avais pas d’autres options.

    Je secouai la tête pour éclaircir ma vision. J’étais habituée à voir double, mais c’était là plus qu’apercevoir un envoûtement sur la vraie forme d’un monstre. Je clignai rapidement des yeux, essayant de retrouver ma vision normale et courus vers la porte.

    Je luttai contre une nausée et courus dehors, gardant mes yeux sur la lamia. Le visage à crochets de Mélusine passa une nouvelle fois devant moi. L’étourdissement passa et ma vision revint à la normale alors que l’accord de fée s’installait pour de bon. Ce que je vis n’était pas vraiment mieux. Mélusine avait l’air vénère.

    Enfin, l’image se solidifia et la lamia n’avait plus qu’une seule tête. Merci Mab pour la petite faveur. Dommage que je n’eusse pas le temps de me détendre et d’apprécier la vue améliorée.

    Mélusine sauta du trottoir et glissa à une vitesse étourdissante sur la route, le trafic de l’heure de pointe étant la seule chose me séparant de ses crochets gouttant. Je courus vers le bord du trottoir et sortit un flacon de verre rempli de copeaux de fer d’une de mes poches.

    Il était temps de voir comment la garce trouvait notre météo. Mes lèvres dessinèrent un rictus. J’allais faire pleuvoir le fer sur la tête de Mélusine. Je levai le bras, prête à lancer le flacon, dès que j’aurais une ouverture entre les véhicules.

    Je descendis sur les pavés de la route, mais un bus de la ville klaxonna deux fois, le klaxon retentissant dangereusement près de mon oreille. Je reculai d’un pas en sautant, évitant de peu de finir comme une crêpe. Les talons de mes bottes touchèrent le trottoir en béton, mais je ne quittai pas Mélusine des yeux alors qu’elle attendait une chance de frapper. Dans un courant d’air chaud et de gaz d’échappement, le bus passa à quelques centimètres de mon visage. Agrippant fermement le flacon dans mon poing ganté, je clignai des yeux à cause du tourbillon de poussière.

    Une fois le bus passé, j’avançai, mais Mélusine avait disparu.

    Une voiture fit une embardée pour m’éviter, mais les jurons du conducteur furent perdus sous le rugissement dans mes oreilles. Mon cœur essayait de fuir ma poitrine par ma gorge.

    Où diable était Mélusine ?

    Je tournai sur moi-même, mais il n’y avait aucun signe de la lamia. Mon bras tremblait sous l’effort de tenir le flacon en l’air alors que je cherchais ma cible. Il ne devait pas être difficile de repérer un serpent de mer dans une rue animée, mais Mélusine avait complètement disparu dans le brouillard qui avançait.

    Des tentacules de brume s’enroulaient autour de mes pieds et étouffaient les bouches des allées voisines. La lamia aurait-elle invoqué le brouillard pour couvrir sa fuite ? Cela semblait être plus qu’une simple coïncidence.

    Mais pourquoi avait-elle fui ? Si Mélusine était revenue avec quelque rancune contre moi parce que je sortais avec son mari, pourquoi ne pas se venger ? J’étais seule et peu armée à seulement quelques mètres de sa prise écrasante. J’inspirai profondément et soupirai. Tout ce que j’avais, c’était plus de questions.

    Je baissai le bras et glissai le flacon de copeaux de fer dans ma poche. Rien de tout cela n’avait du sens. Je remontai sur le trottoir et me retournai vers la boutique du cluricaune. Ce fut alors que je remarquai le mur de gens murmurant et pointant du doigt. Je regardai par-dessus mon épaule, m’attendant presque à voir Mélusine se matérialiser devant le brouillard, mais la circulation continuait de passer. Une boule de glace se créa dans mon estomac quand je me tournai pour faire face à la foule. Ils ne regardaient pas quelque chose dans la rue.

    Ils me fixaient tous.

    Je grimaçai et mes épaules s’affaissèrent, prête à marcher dans le brouillard et attendre que la foule se disperse. Je pourrais revenir sur mes pas pour La Poisse après m’être enfuie. Je fis un pas vers la droite, évitant un lampadaire, mais le trottoir était bloqué par un mur de badauds curieux.

    Malheureusement, les passants de l’après-midi n’étaient pas seuls. Un homme en uniforme me lançait un regard noir sous son chapeau bleu marine. Génial, j’avais attiré l’attention de la police de Harborsmouth. Est-ce que cette journée pourrait encore empirer ?

    Question stupide, bien sûr que oui. Ma poitrine se serra et j’inspirai en tremblant. Plus d’une douzaine paires d’yeux étaient fixées sur moi, faisant brûler ma peau. Je n’avais qu’une envie : courir et me cacher de leurs regards désapprobateurs. Est-ce que je réussirais à traverser la rue en un seul morceau si je plongeai dans la circulation filant dans mon dos ?

    Le flic secoua légèrement la tête, ce qui répondit à la question. Mon désir de fuite devait être inscrit sur mon visage. Sa main se dirigea vers sa hanche, où pendaient une matraque et un pistolet. Fuir était clairement hors de question.

    – Ne bougez pas, Mademoiselle, dit le flic en redressant les épaules. J’ai plusieurs témoins qui affirment que vous êtes descendue du trottoir dans la circulation, mettant potentiellement en danger les automobilistes et vous-même. Certains disent que vous avez levé la main comme si vous alliez lancer quelque chose sur la route. Un témoin dit que vous avez lancé quelque chose. Pouvez-vous expliquer votre comportement, Mademoiselle ?

    Le flic, Officier Hamlin d’après son uniforme, était doux et mielleux, mais sa main planait au-dessus de la crosse de son pistolet. À son autre hanche, pendait une paire de menottes brillantes, me menaçant de leur froide étreinte. Je devais trouver une explication raisonnable pour passer devant un bus qui n’incluait ni tentative de suicide, ni vandalisme, ni le fait de pourchasser un serpent de mer vengeur, et de trouver aussi un moyen de convaincre le flic que je n’étais ni dangereuse, ni destructrice, ni folle. Si je ne trouvais pas rapidement quelque chose, je finirais à l’arrière d’une voiture de patrouille avec ces bracelets étincelants autour des poignets.

    J’étais sûre que les menottes me frapperaient avec une avalanche de visions. Il serait difficile de convaincre un juge que j’étais saine et n’étais pas un danger pour la société tout en étant sous l’emprise d’une vision.

    J’essayai de déglutir, mais ma langue resta coincée contre mon palais. Je forçai la salive et les mots à revenir, mais tout ce qui sortit fut un couinement quand quelque chose frôla ma jambe.

    Je baissai le regard vers les yeux bien trop intelligents d’un cat sidhe. La fée ressemblait à un chat de gouttière défiguré, mais les yeux et la façon dont certaines parties de son corps semblaient faites de fumée et d’ombre dévoilaient sa nature de fée. Pas que quiconque d’autre puisse voir la différence.

    – Lance ton envoûtement ! cracha le chat.

    Les mots semblaient venir du cat sidhe, mais sa bouche ne bougeait pas. Comme la foule ne resta pas bouche bée devant le spectacle d’un chat parlant, je me dis que la créature devait être télépathe. Il ne me manquait plus que ça, un chat-fée autoritaire dans ma tête.

    – Va-t’en. Tu vois pas que je suis en plein milieu de quelque chose, là ?

    Je pensai les mots vers le chat. Avec de la chance, la télépathie fonctionnait dans les deux sens.

    Mon rythme cardiaque s’accéléra quand l’animal colla son corps poilu contre ma botte. Avec seulement une fine couche de cuir entre le cat sidhe et ma peau, la fée devenait un autre problème potentiel. Le flic se racla la gorge, attendant de

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