Explorez plus de 1,5 million de livres audio et livres électroniques gratuitement pendant  jours.

À partir de $11.99/mois après l'essai. Annulez à tout moment.

L'écho des âmes: Tome 1 : L'appel des ténèbres
L'écho des âmes: Tome 1 : L'appel des ténèbres
L'écho des âmes: Tome 1 : L'appel des ténèbres
Livre électronique629 pages7 heures

L'écho des âmes: Tome 1 : L'appel des ténèbres

Évaluation : 0 sur 5 étoiles

()

Lire l'aperçu

À propos de ce livre électronique

Izarra, jeune surnaturelle de vingt ans, éprouve des difficultés à s’intégrer dans le monde. En effet, issue de parents appartenant à deux castes surnaturelles différentes, celle des métamorphes et des sorciers, sa vie en tant qu’hybride n’est pas de tout repos. Elle a toutefois trouvé un semblant d’équilibre au milieu des humains où elle vit une vie d’étudiante normale. C’était sans compter l’insistance de sa marraine, une louve qui l’a recueillie suite à son retour en France, pour qu’elle s’intègre au sein de la communauté des loups garous. Pour lui faire plaisir, elle finit par accepter de participer au rassemblement annuel de la communauté, faisant fi de ses réticences suite à un malheureux événement survenu quelques années plus tôt.
Elle y rencontre un loup complexe, dont le charme ténébreux et l’aura magnétique ne la laisse pas indifférente.
Embarquée malgré elle dans un complot visant à détruire toutes les communautés surnaturelles, sa vie bascule du jour au lendemain.
Elle se rend rapidement compte qu’elle ne contrôle plus rien de son destin.
LangueFrançais
ÉditeurLes Éditions du Net
Date de sortie8 déc. 2024
ISBN9782312148656
L'écho des âmes: Tome 1 : L'appel des ténèbres

Auteurs associés

Lié à L'écho des âmes

Livres électroniques liés

Fantasy pour vous

Voir plus

Catégories liées

Avis sur L'écho des âmes

Évaluation : 0 sur 5 étoiles
0 évaluation

0 notation0 avis

Qu'avez-vous pensé ?

Appuyer pour évaluer

L'avis doit comporter au moins 10 mots

    Aperçu du livre

    L'écho des âmes - Fanny Peeters

    cover.jpg

    L’écho des âmes

    Fanny Peeters

    L’écho des âmes

    Tome 1 : L’appel des ténèbres

    LES ÉDITIONS DU NET

    126, rue du Landy 93400 St Ouen

    © Les Éditions du Net, 2024

    ISBN : 978-2-312-14865-6

    Chapitre 1 – Izarra

    Le soleil qui a dominé une grande partie de la forêt durant la journée décline petit à petit entre les arbres, faisant place à une douce lumière, propice à la quiétude.

    J’éprouve le besoin de prendre un peu de recul par rapport à ma situation et d’apaiser l’animal qui bouillonne en moi.

    Je m’enfonce entre les arbres, déterminée à trouver le coin parfait pour me ressourcer.

    Je me suis suffisamment éloignée du tumulte des préparatifs de l’événement pour que le silence m’entoure, mais pas trop pour être capable de revenir rapidement sur mes pas en cas de problème.

    Je parcours encore quelques mètres quand soudain il est là, devant moi, ce fameux endroit que j’espérais tant trouver.

    En cette fin d’après-midi de Décembre, enveloppée d’une douce lumière dorée qui commence à décliner à l’horizon, la petite clairière, nichée au cœur des Pyrénées, se révèle être un havre de paix.

    Des arbres se dressent autour de cet espace ouvert, majestueux, parés de leur manteau de neige scintillant, comme des sentinelles silencieuses, créant une atmosphère sereine et presque magique.

    Le sol est recouvert d’un épais tapis de feuilles mortes, saupoudrées de quelques flocons de neige, formant une couche douce sous mes pieds. Des empreintes laissées par un animal, probablement un cerf, ajoutent une touche de vie à ce décor immaculé.

    Je respire enfin à plein poumon. L’air est frais avec un léger parfum de résine émanant des pins, se mêlant à l’odeur terreuse de la forêt.

    À chaque respiration, je ressens une impression de pureté, comme si je venais de pénétrer dans un monde préservé.

    Le murmure lointain d’un ruisseau, à peine audible, offre une mélodie apaisante, invitant à la détente.

    La lumière rasante du soleil couchant crée des ombres dansantes sur les troncs des arbres et un léger brouillard commence à tomber, amplifiant la sensation de mystère et de tranquillité.

    Je soupire d’aise au milieu de cet endroit enchanteur.

    J’avance au centre de la clairière et m’assois en tailleur, le dos bien droit ; je pose mes mains sur mes genoux et détends mes épaules nouées.

    Ah ! Enfin un peu de calme !

    Le bien que me procure la proximité de la nature est indescriptible.

    Alors que je fais le vide dans mon esprit et me concentre sur ma respiration, des bruits de pas, puis des voix viennent troubler ma sérénité. Je grogne d’agacement. Impossible d’être tranquille ne serait-ce que trente minutes ? C’est trop demander ?

    Les voix se rapprochent :

    – Mais si ! Elle est partie par là, je te dis.

    – Bon sang, elle n’a pas pu disparaître comme ça !

    – Transforme-toi, elle sera plus facile à pister.

    Oh ! Pas bon ça.

    Mon sang ne fait qu’un tour. Je me relève précipitamment et me dirige à la hâte dans la direction opposée aux voix, le plus discrètement possible.

    – Elle est là !

    Trop tard… Ils m’ont repéré.

    Sans réfléchir, je prends mes jambes à mon cou, désirant éviter la confrontation à tout prix.

    – Arrête-toi ! Tu ne peux pas nous échapper !

    C’est un fait, j’en suis bien consciente. Mais quelle autre solution s’offre à moi. Faire face et les affronter ?

    Mauvaise idée. Je risquerai de perdre le contrôle à cause de ma colère devant cette situation grotesque et de blesser quelqu’un, voire pire.

    À peine ai-je parcouru quelques dizaines de mètres, que je suis déjà à bout de souffle. Mon cœur frappe si fort dans ma poitrine que je crains qu’il ne s’en échappe.

    En général, les métamorphes ont une endurance, une force et une rapidité exceptionnelles, des sens surdéveloppés et une capacité de guérison hors norme.

    Malheureusement, je ne suis qu’à demi louve, alors même si mes capacités sont supérieures à celles d’un humain lambda, sous ma forme humaine je n’arrive pas au jarret d’un loup de sang pur.

    C’est comme ça et je l’accepte. Je fais avec, mais là, tout de suite, je maudis ma condition.

    J’ignore où je vais ni où trouver refuge.

    Je saute par-dessus des arbres couchés, j’essaie tant bien que mal d’esquiver les branches, mais elles me fouettent les bras, le visage, s’accrochent à mes cheveux et déchirent mes vêtements.

    Je sens la morsure des ronces sur mes jambes à travers mes vêtements.

    Ma vue se brouille par l’effort que je déploie pour garder de la distance face à mes poursuivants.

    Combien de métamorphes sont à ma poursuite ? Aucune idée. J’ai entendu seulement deux voix, mais ils pourraient être plus nombreux.

    Ce que je sais en revanche, c’est qu’ils sont à présent sous leur forme animale. Le bruit étouffé de leurs coussinets frôlant à peine le sol ne trompe pas. Ils se sont transformés pour mieux me traquer et se rapprochent inévitablement, gagnant du terrain à chaque foulée.

    Pourquoi je cours ainsi, comme si ma vie en dépendait ? Pour fuir le danger ?

    Non ! Enfin oui, en quelque sorte.

    Je ne crains pourtant pas pour ma vie. Je m’inquiète pour la leur. S’ils me provoquent, j’ignore si je serai capable de prendre sur moi pour rester calme et réussir à contenir le brasier qui brûle en moi.

    L’adrénaline qui circule dans mon corps me pousse à me dépasser et à aller toujours plus vite.

    Alors je cours.

    Je poursuis ma cavale infernale à l’affût du moindre objet pouvant me servir d’arme, à défaut de ne pas pouvoir me servir de mes capacités.

    Impuissante, je les sens se rapprocher. Des crocs éraflent mon mollet et l’haleine brûlante d’un animal souffle contre ma nuque. J’esquive d’un pas sur le côté, entendant les mâchoires se refermer dans le vide avec satisfaction.

    Poussée par mon instinct de survie, j’accélère encore, ma respiration me brûlant les poumons et mon cœur cognant si fort dans ma poitrine que je n’entends plus que lui battant contre mes tympans.

    Soudain, je butte sur une racine, j’essaie de me rattraper mais, c’est peine perdue. Je bascule la tête la première dans la bruyère rêche et odorante. La neige n’étant pas tombée assez abondamment pour amortir ma chute, je m’écrase lamentablement.

    Immédiatement, je reprends mes esprits, je lève le nez et ils sont là.

    Ils sont quatre.

    Quatre loups, imposants, majestueux et dangereux me font face, écumant de rage, leurs iris brillants d’une haine rougeoyante qui me donne la chair de poule. Je frémis comme une souris prise au piège.

    Un voile de sueur coule le long de ma colonne vertébrale.

    Ils me scrutent avec une avidité glaçante. Il me faut puiser profondément dans mon courage pour ne pas me recroqueviller sous l’effet de la panique.

    Je me tiens sur mes jambes fléchies, le cœur battant si fort qu’il va m’exploser les côtes.

    Un liquide chaud coule à l’avant de mon cou. Je passe ma main sur mon menton et sens une entaille profonde, séquelle de ma chute. Zut, saigner ne va pas arranger mon affaire…

    Je me redresse et les fusille du regard, peinant à contrôler mes tremblements de frustration et de colère. Et de fatigue aussi, n’ayons pas peur de l’avouer.

    Dans une dernière tentative d’apaisement, je leur lance :

    – Laissez-moi partir, je ne veux pas d’ennui…

    Ils me toisent mais ne bougent pas. Leurs prunelles nerveuses toujours braquées sur moi.

    Les loups se mettent alors à grogner, dévoilant leurs crocs acérés, excités par l’odeur du sang.

    Un loup s’avance vers moi ; tellement lentement que l’on pourrait croire qu’il n’a pas bougé. Toutefois, je sens son champ électromagnétique enfler et se rapprocher.

    Il est massif et puissant. Clairement, sous ma forme humaine, je ne fais pas le poids.

    Le loup retrousse ses babines, menaçant, un filet de bave coulant de sa gueule meurtrière. Il se rapproche encore et d’un coup, bondit.

    Je ferme les yeux de désespoir, je me concentre pour mettre en place mes défenses, croise mes bras devant moi pour me protéger et attends l’impact.

    Qui ne vient pas…

    À la place du choc que je m’attendais à recevoir, le bruit sourd de deux corps qui se percutent me fait sursauter. Je rouvre les yeux de surprise.

    Le loup roux qui m’a attaqué affronte un loup blanc, bien plus massif que lui. Après quelques échanges de coups de griffes et de crocs, il est rapidement maîtrisé et se retrouve immobilisé au sol, son cou dans la gueule de son adversaire. Quand il est enfin libéré, il se redresse péniblement, probablement un peu sonné par la rapidité et l’efficacité de l’attaque.

    Le loup blanc émet alors un grondement sourd et menaçant. Mes poils se hérissent devant la puissance qui se dégage de lui.

    Impossible de quitter cet animal majestueux des yeux, il me fascine. Lorsque j’arrive enfin à détourner le regard, je constate que les autres loups sont couchés, la tête basse, en signe de soumission. Je reste bouche bée devant cette démonstration d’autorité.

    C’est tout simplement fascinant !

    Le loup blanc les fixe encore de longues secondes. L’atmosphère est tendue, personne n’ose émettre le moindre mouvement.

    C’est alors que je sens son champ électromagnétique augmenter. Je suis curieuse de découvrir l’homme qui se cache derrière cet animal.

    L’instant d’après, il est debout devant moi, face aux loups, sous sa forme humaine et complètement nu.

    Quel spectacle ! Je ne sais pas à quoi il ressemble de face, mais de dos, je vous jure que c’est du lourd, du super lourd même !

    Il est grand, très grand. Probablement entre un mètre quatre-vingt-dix et un mètre quatre-vingt-quinze. Il est fin, mais musclé. Ses épaules sont carrées, ses muscles du dos bien dessinés ; ses jambes sont longues, mais solides et ses fesses, n’en parlons même pas !

    Il faut savoir qu’entre métamorphes, la nudité n’a rien de tabou ou de gênant. Au contraire, s’ils pouvaient se balader à poil à longueur de temps, sans risquer de choquer les humains, ils le feraient sans aucun état d’âme. D’ailleurs, je me suis toujours demandé si la communauté nudiste n’avait pas été créée par des métamorphes. Cela expliquerait bien des choses, vous ne croyez pas ?

    Désolée, je m’égare.

    Toujours est-il que, ne craignant ni le froid, ni les maladies, s’il n’était pas question de faire illusion auprès des humains, les métamorphes ne risqueraient rien à vivre nus et cela faciliterait grandement leurs transformations. Ils réaliseraient aussi de sacrées économies sur les vêtements, car souvent, ils ne prennent même pas le temps de se déshabiller avant d’entamer leur transformation.

    Mais je ne suis pas tout à fait comme eux, je suis plus pudique avec mon corps.

    Cela ne m’empêche pas pour autant d’apprécier celui que j’ai devant moi !

    Me rendant compte que je le fixe avec un peu trop d’intérêt, je rougis et détourne les yeux, intimidée par sa beauté, plus que par sa nudité.

    Chapitre 2 – Cyna

    Une fois retransformé, je me redresse de toute ma hauteur et toise les loups quelques instants pour leur faire comprendre qui commande ici.

    Rapidement, ils se soumettent tous les quatre, conscients que me tenir tête n’est pas la meilleure idée du siècle.

    Je les connais bien sûr et je peux vous assurer que ce ne sont pas les plus intelligents de la communauté.

    J’essaie tout de même de comprendre leur motivation pour attaquer ainsi une louve isolée et sans défense, mais à part la stupidité, je ne vois pas où est l’intérêt.

    Je sais, de source sûre, qu’elle ne les a pas provoqués. Alors, pourquoi lui en veulent-ils ? Ce n’est pourtant pas dans notre mentalité de s’en prendre aux plus faibles sans raison.

    Ont-ils été blessés il y a quatre ans et de ce fait, cherchent-ils à prendre leur revanche aujourd’hui ?

    Je l’ignore, mais je ne peux pas les laisser faire.

    – Partez !

    Un simple mot de ma part et les loups tournent les jarrets et prennent la fuite.

    Je me tourne alors en direction de la fille en ronchonnant.

    Je passe à côté d’elle en évitant son regard. C’est de sa faute si j’ai dû user de mon autorité, alors qu’au contraire, j’essaie de la minimiser et de rester discret.

    Merci bien !

    Je n’apprécie pas d’en faire étalage, d’autant plus que je ne suis pas encore légitime dans ce rôle de domination.

    Bon, avec un peu de chance, je vais pouvoir repartir comme je suis venu. C’est-à-dire rapidement.

    Je lui jette tout de même un coup d’œil et je la vois se mordre la lèvre inférieure, sûrement choquée par les événements qu’elle vient de vivre. Pourtant, elle ne m’a pas paru plus émotive que ça. Elle avait l’air calme et résignée face à cette attaque.

    Au moment où elle s’apprête à ouvrir la bouche, je lui jette un regard noir.

    Elle a quelque chose à dire, mais semble se raviser. Soit elle a perdu sa langue sous le coup de l’émotion, soit elle est intelligente et comprend que je n’ai pas envie de discuter.

    Je me dirige vers le buisson derrière lequel j’ai retiré mes vêtements, je les ramasse et me rhabille rapidement. J’ai anticipé et je les ai retirés quand je l’ai vu se vautrer lamentablement. Je sentais que j’allais devoir intervenir.

    Une fois habillé, je lui fais face et l’examine de haut en bas pour m’assurer qu’elle va bien.

    Je constate qu’elle n’a rien de grave, juste quelques écorchures et griffures.

    J’en profite pour l’observer plus attentivement, ma curiosité prenant le dessus malgré moi.

    Elle n’est pas d’une beauté classique, mais elle dégage un petit truc avec ses grands yeux de biche couleur caramel où brillent une lueur de défi, ses pommettes hautes parsemées de taches de rousseur et ses longs cheveux blonds aux reflets roux. Ses traits sont fins et délicats et son teint de pêche associé à son allure frêle contraste avec celle des louves qui, en général, sont grandes, athlétiques et bronzées, témoignant de leur vie au grand air. Elle est jolie à sa manière, mais sans plus.

    Elle ne me paraît pas si dangereuse que ça. J’ai du mal à l’imaginer perdre le contrôle, elle a l’air de se maîtriser parfaitement. Elle semble agacée, mais calme. Après tout ce que j’ai entendu sur elle, je m’imaginais une folle hystérique.

    Enfin, depuis l’incident, il est possible qu’elle ait gagné en maturité et donc en stabilité.

    Je m’égare. Je me reprends immédiatement car je n’ai pas que ça à faire. Après tout, c’est mon anniversaire et je devrais être en train de le fêter avec mes potes.

    Eh oui ! Je suis né le vingt et un décembre. Aujourd’hui, j’ai vingt-deux ans et chaque année de plus me rapproche inexorablement de mon destin.

    Ce n’est pas le moment de m’apitoyer sur mon sort.

    Non mais, qu’est-ce qui m’a pris d’accepter cette mission de surveillance ?!

    Je tourne les talons et m’enfonce dans la forêt sans un mot.

    Plus que cette nuit et après, bon débarras ! Je pourrai enfin reprendre le cours de ma vie, sans me préoccuper de la sienne.

    Je l’entends souffler d’indignation et me suivre.

    Au bout de quelques pas seulement, à mon grand désarroi, elle lance :

    – Je vais bien, merci de t’en inquiéter !

    Je m’arrête, irrité et me tourne vers elle, la détaillant à nouveau des pieds à la tête :

    – Tu respires et tu parles, j’en déduis que tu vas bien.

    Je repars d’un pas décidé, pressé de mettre de la distance entre nous.

    On m’a demandé de la garder à l’œil, pas de lui faire la conversation…

    Mais, je dois bien avouer qu’elle m’intrigue et je n’aime pas ça. Alors, je fuis. Je sais, c’est lâche, mais je n’ai jamais su comment me comporter avec les inconnus. Et avec les inconnus qui me perturbent, encore moins.

    Bien sûr, c’était sans compter sur son obstination.

    – Je n’avais pas besoin d’aide ! elle s’exclame de mauvaise foi.

    Je m’arrête brusquement, au comble de l’agacement et elle manque de me rentrer dedans.

    Non mais sérieux là ? Elle va me jouer la carte du « je peux très bien me débrouiller toute seule » ? Ils étaient à deux doigts de la transformer en charpie, bon sang !

    Je dois bien reconnaître qu’elle ne manque pas de culot.

    Je lui jette à nouveau un coup d’œil et devant son air outré, éclate de rire.

    Finalement, elle n’est peut-être pas aussi insignifiante que je le pensais.

    – Oui, tu avais l’air de parfaitement gérer la situation, je réplique, ironique.

    – J’allais riposter quand tu as décidé de jouer les héros !

    – Vraiment ? Tu attendais quoi ? De te faire arracher la tête ? Car c’est probablement ce qu’il serait arrivé si je n’étais pas intervenu !

    Je croise les bras sur ma poitrine, faussement énervé. Les choses deviennent intéressantes. Finalement, si elle a la réplique facile, je ne perds peut-être pas complètement mon temps. Un peu de distraction est la bienvenue après les deux jours barbants que je viens de vivre.

    Je plonge dans ses yeux qui lancent des éclairs et soudain, tout bascule.

    Le temps semble se suspendre et l’univers entier s’efface autour de moi.

    Mon cœur s’emballe et une douce chaleur se répand dans mon corps.

    Brusquement, je reprends mes esprits et me force à quitter son regard captivant. Je secoue la tête et grince des dents face au flot d’émotion qui me traverse, puis je les fais taire.

    Non mais qu’est-ce qu’il me prend ? Depuis quand un simple regard me bouleverse autant ?

    Toutefois, je n’ai pu m’empêcher d’y remarquer une assurance surprenante.

    Elle pense vraiment qu’elle aurait pu s’en sortir seule.

    Le pire, c’est qu’au fond de moi je n’en doute pas une seule seconde. Dès que j’ai commencé à la suivre, j’ai été surpris par l’aura de puissance qui émanait d’elle et par sa capacité à la masquer sous un comportement effacé.

    Je ne comprends pas que les autres ne s’en rendent pas compte, alors que ça m’a immédiatement sauté aux yeux.

    Mais, la jeune femme qui me fait face à cet instant est tout le contraire d’effacée et banale, elle est pleine de hargne et d’assurance. J’avoue qu’elle commence sérieusement à m’intriguer, bien que l’agacement face à ce qu’elle a déclenché en moi prédomine.

    Je ne dois pas oublier que je suis ici contre mon gré à la base, même si je commence à changer d’avis. Enfin, très légèrement, car je maintiens que j’ai autre chose à faire.

    Si je suis dans cette situation, c’est parce que certains membres du Grand Conseil m’ont ordonné de la suivre pour s’assurer qu’elle ne cause pas de problème.

    J’ai d’abord refusé. Bah quoi, je ne suis pas un loup-sitter ! Mais ils ont insisté, en disant qu’elle pouvait être dangereuse pour la communauté et qu’ils avaient plus que confiance en mes capacités pour la maîtriser en cas de problème. Bref, ils ont joué sur la corde sensible, flatté mon ego de mâle dominant et piqué au vif ma curiosité. J’ai donc fini, à contrecœur, par accepter.

    Cela fait deux jours que je la suis. Deux jours d’un ennui mortel.

    Jusqu’à présent, elle s’est comportée de façon exemplaire. La parfaite petite louve bien élevée et bien soumise. Pas le moindre écart de conduite.

    Bref, la louve insignifiante et ennuyeuse à souhait.

    Enfin, c’était ce que je pensais, jusqu’à ce qu’elle se fasse poursuivre sans aucune raison.

    Je ne pouvais consciemment pas les laisser lui faire du mal, alors qu’elle n’avait rien fait pour les provoquer, si ?

    Je ne suis pas un héros, mais j’exècre l’injustice. Dans ces cas-là, mon instinct de protection (déjà bien développé) explose.

    Maintenant que je peux l’observer de plus près, je découvre une louve combative avec un caractère bien trempé.

    Son aura dorée diffuse une douce lumière autour d’elle.

    Je la vois relâcher ses épaules et soupirer.

    – Je suis désolée de m’être emportée. Je te remercie d’avoir pris ma défense.

    À ma grande surprise, elle est également capable de résilience ; j’aime ça.

    Je lui souris pour la rassurer, ma colère fondant comme neige au soleil, puis tends la main vers son visage, soulève son menton et observe sa plaie. Ce contact provoque un influx électrique dans tout mon corps. Je la relâche précipitamment, troublé.

    – Tu ne guéris pas très vite pour une louve.

    Je constate avec soulagement que ma voix est assurée, ne laissant rien transparaître de la sensation étrange que ce contact a déclenchée en moi.

    – C’est superficiel maintenant, dans quelques heures ma peau sera comme neuve, dit-elle en tâtant son menton d’un ton indifférent.

    Je hausse les épaules, étonné. Pour une louve, sa vitesse, sa force et sa capacité de guérison sont bien en-dessous de la moyenne. Cela doit probablement venir de sa double nature.

    Nous reprenons alors notre marche en silence.

    Je la vois trimer pour se frayer un passage entre les broussailles et trébucher tous les trois pas. Elle est d’une maladresse affligeante, je n’en reviens pas !

    Mais que font donc ses gênes de louve ?

    Je n’ai jamais rencontré d’hybride jusqu’à présent, mais une chose est sûre, elle n’a pas hérité de nos capacités à évoluer aisément en milieu naturel. Peut-être que sous forme animale, c’est différent. Mais peut-elle au moins se transformer ? Si ça se trouve, elle n’a de louve que le nom et rien d’autre. J’en suis désolé pour elle car déjà, se faire accepter dans la communauté quand on n’est pas de sang pur c’est compliqué, voire impossible, mais quand en plus on ne partage aucune des aptitudes qui façonnent notre identité, je ne préfère même pas imaginer ce qu’elle peut ressentir.

    Mais bon, il se peut que je me fasse des idées, car que ferait-elle ici, si elle était incapable de se transformer ? Cela n’a aucun sens.

    Finalement, cette louve pleine de surprises et de mystères commence à me plaire malgré moi.

    Je pense qu’elle est bien plus complexe qu’elle ne le laisse paraître…

    Un véritable tourbillon émotionnel m’assaille face à elle ; je suis à la fois captivé et irrité par les sentiments qu’elle déclenche en moi.

    Il y a quelque chose d’intriguant dans sa manière d’être, un éclat malicieux dans ses yeux et une confiance nonchalante qui suscite mon admiration.

    Je suis tiraillé entre l’envie de m’éloigner d’elle le plus possible afin d’échapper à sa présence magnétique pour retrouver ma sérénité et entre une attraction irrésistible qui me pousse à m’en rapprocher encore plus.

    Il faut absolument que je prenne mes distances vis-à-vis d’elle. Elle est trop dangereuse pour ma tranquillité d’esprit.

    Chapitre 3 – Izarra

    J’observe ce loup inconnu du coin de l’œil, me demandant qui il est. Je ne me rappelle pas l’avoir déjà rencontré il y a quatre ans et croyez-moi, on ne peut que se souvenir de lui. Il ne laisse vraiment pas indifférent !

    Il est beau ; d’une beauté virile, dure et froide.

    Sa démarche est assurée, souple et gracieuse. Il respire la confiance en lui.

    Il possède la carrure solide des alphas, ses muscles puissants roulant sous son tee-shirt noir.

    Alors que je suis plongée dans mes pensées, il me demande :

    – Pourquoi n’as-tu pas utilisé ta magie pour te défendre ?

    Ah ! Il est donc au courant de qui je suis. Intéressant…

    Eh oui ! Non contente d’être à moitié louve, je suis également à moitié sorcière. Et dans la communauté surnaturelle française, tout le monde est au courant, bien sûr. Si j’avais eu mon mot à dire, je l’aurais passé sous silence, mais ma très chère marraine qui m’a recueilli, prône une transparence totale et a décidé d’en faire étalage sur la place publique à mon grand désarroi.

    Je hausse les épaules et lui fais face. De grands yeux gris-verts superbes, sous une cascade de boucles brunes, me fixent, à la fois curieux et perplexes. Son teint est halé, témoin d’une vie en plein air, son nez est droit, un tantinet trop long peut-être. Ses lèvres fines, bien dessinées invitent à la débauche. Son charisme est indéniable. Bref, il est terriblement sexy ! Il doit être légèrement plus vieux que moi. Je dirais vingt et un, vingt-deux ans peut-être. Difficile à dire car les loups garous et les métamorphes en général, vieillissent plus lentement que les humains. En effet, leur métabolisme, qui les protège des maladies et qui leur permet de guérir plus vite, ralentit légèrement le processus de vieillissement normal.

    Ce n’est pourtant pas pour autant qu’ils vivent plus vieux que les humains. Étant donné leur penchant pour la violence, il n’est pas rare qu’ils meurent prématurément de manière brutale, le plus souvent suite à un combat.

    Son aura, blanche, presque argentée, est lumineuse et irradie tout autour de lui telle un phare dans la nuit.

    Je plonge dans son regard et soudain, je perds pied. Mon corps est parcouru de frissons et quelque chose au creux de mon ventre se met à palpiter.

    Sa puissance m’écrase et sa splendeur m’éblouit. Il me fascine et me perturbe à la fois.

    Je tente de me reprendre et lui explique, d’une voix mal assurée, en espérant qu’il attribue mon trouble à ma déclaration et non à ce qu’il déclenche au fond de moi :

    – La dernière fois que j’ai utilisé la magie en présence de loups, ça a dérapé et j’ai été bannie de la communauté. On m’a autorisé à prendre part au rassemblement uniquement si je m’engageais à ne pas me servir de mes pouvoirs. J’ai donné ma parole et je tiens à la respecter.

    Effectivement, il y a quelques semaines, sur les recommandations de Katia, j’ai envoyé un message au Grand Conseil pour solliciter une audience privée. À peine ont-ils reçu ma demande, qu’ils m’ont invité à les rencontrer.

    Je me suis donc rendue à Arambeaux, le village où siège l’alpha des alphas et qui leur sert de quartier général, quelques jours plus tard. Katia ne pouvant malheureusement pas m’accompagner, elle a missionné son fils Tristan comme escorte, refusant que je m’y rende seule.

    J’ai été reçu par Léopold, le président du Grand Conseil en personne ; l’alpha des alphas étant en déplacement.

    Au cours de cet entretien, je suis revenue sur l’incident qui a eu lieu il y a quatre ans et ses conséquences, me confondant encore une fois en excuses et leur expliquant qu’aujourd’hui, je me contrôle parfaitement bien. Bref, je leur ai léché les bottes bien comme il faut. Tout ça pour leur demander l’autorisation de participer exceptionnellement au grand rassemblement de cette année. Après moult discussions et m’avoir fait promettre de n’utiliser la magie en aucun cas, ils ont accepté.

    Voilà pourquoi je suis ici maintenant, entourée de loups.

    – Je comprends, m’affirme mon sauveur.

    Lorsque l’on donne sa parole, ce n’est jamais à la légère chez les loups, c’est un acte sacré, une question d’honneur.

    – Mais ta vie en dépendait tout de même !

    Son ton est outré. Il n’aime pas l’injustice, ni qu’on s’en prenne aux plus faibles.

    Je m’adoucis légèrement en constatant que nous avons les mêmes valeurs.

    Finalement, il se peut qu’on devienne amis. Ou pas… il faudrait déjà qu’il perde son ton condescendant et sa mine renfrognée. Ce n’est pas gagné en fait !

    – J’allais le faire, je le rassure. Lorsque tu es arrivé, je me préparais à lancer un sort de défense. Mais il fallait d’abord que j’aie une preuve physique de mon agression pour justifier l’usage de magie et plaider ma cause auprès du Grand Conseil au cas où il y aurait eu des blessés.

    Mais, c’est surtout que je ne veux pas qu’ils sachent de quoi je suis vraiment capable, je préfère entretenir une part de mystère et surtout me protéger, car si les surnaturels connaissaient l’étendue de mes pouvoirs, ils pourraient vouloir s’en servir à leurs fins et alors, adieu mon libre arbitre.

    Il hoche la tête en signe de compréhension, pensif.

    – Et te transformer en louve ?

    – Ma louve ne fait pas le poids face à des mâles. Ma meilleure défense réside en l’utilisation de ma magie.

    Je n’aime pas mentir, mais ce n’est ni le lieu, ni le moment pour en parler. Je préfère faire croire que je ne suis qu’une pauvre petite femelle sans défense, m’évitant bien des problèmes.

    – Pourquoi s’en sont-ils pris à toi ?

    Bonne question. Est-ce en représailles pour ce qui s’est passé il y a quatre ans ? Je ne pense pas, ils auraient pu se venger bien avant aujourd’hui. Par ennui ? Peu probable, ils ont suffisamment de quoi faire niveau activité ce week-end.

    Je ne vois qu’une seule raison :

    – Est-ce qu’être différente est une raison suffisante ? je réponds.

    – Il est vrai que les gens ont tendance à avoir peur de ce qu’ils ne connaissent pas. Cela peut les rendre irrationnels et donc dangereux.

    Je hausse les épaules. J’ai l’habitude que les gens soient méfiants voire agressifs.

    Toute ma vie, j’ai été malmenée, insultée et rejetée pour ce que je suis.

    Il y a ceux qui me voient comme une menace, car une hybride, c’est contre nature, que les races ne devraient pas se mélanger et d’autres qui me sous-estiment, car pour eux je ne suis qu’une demi-louve et une demi-sorcière, dont les capacités sont divisées par deux.

    Mais ils ont tort. Il est vrai que sous ma forme humaine, je ne dispose pas de toutes les capacités qu’ont les loups en général, mais c’est ma seule faiblesse car sous ma forme animale je suis plutôt puissante.

    Je dispose non seulement des capacités d’un loup de sang pur, mais ma magie de métamorphe, soutenue par ma magie de sorcière, me rend bien plus puissante qu’eux.

    Et réciproquement, la magie de ma louve renforce ma magie de sorcière.

    Grâce à cette complémentarité, je possède donc une palette de capacités magiques bien plus importante qu’une simple sorcière.

    Mes deux sources de magie se complètent, s’alimentent et se renforcent ensemble.

    Même les humains, malgré le fait qu’ils ignorent ma nature, ont du mal à m’accepter ; inconsciemment, ils doivent sentir ma différence et leur instinct leur souffle de se méfier.

    S’il est vrai que je suis plus à l’aise dans leur monde, je n’ai pourtant pas encore réussi à trouver ma véritable place. La trouverai-je seulement un jour ou suis-je destinée à avoir un pied dans chaque monde ?

    Pour autant, mon sauveur ne semble ni effrayé, ni méfiant à mon égard. Il dégage une telle assurance que c’en est rafraîchissant.

    – Mais pas toi ?

    Ma question a l’air de le désarçonner une seconde, mais il se reprend très vite.

    – Je n’ai pas peur de ce que je ne connais pas, j’ai peur de ce que je connais.

    Je n’ai pas le temps de rebondir sur sa réponse énigmatique, que nous sommes déjà arrivés au campement et qu’un loup se précipite vers nous.

    – Cyna ! Bon sang, ça fait un moment que je te cherche ! On a un problème.

    Se rendant compte de ma présence, l’inconnu me lance un regard méfiant, chargé de mépris, mais je fais comme si je n’avais rien remarqué, trop habituée à ce genre de réaction.

    Alors comme ça, mon sauveur s’appelle Cyna ? J’ai beau fouiller dans ma mémoire, je ne me rappelle pas avoir déjà entendu parler de lui. Après, je ne fréquente pas suffisamment la communauté pour être au courant de tout…

    – Que se passe-t-il ?

    – Joshua et Franck ont un désaccord, ça commence à dégénérer très sérieusement et je pense qu’ils ne vont pas tarder à en venir aux mains.

    Cyna jette un regard à la ronde :

    – Dominique ?

    Dominique est l’alpha des alphas de France. En général, c’est lui qui intervient pour gérer les conflits entre loups.

    – Il est occupé avec le Grand Conseil. Il a demandé de ne pas être dérangé.

    Cyna soupire d’exaspération quand des bruits de bagarre se font entendre.

    Sans se consulter, les deux loups se précipitent vers la foule qui s’est amassée un peu plus loin. Je leur emboite le pas ; pas question de rester à l’écart. Depuis le début du rassemblement, tout est plutôt calme ; alors, pour une fois qu’il se passe quelque chose, je veux y assister.

    À l’arrivée de Cyna, la foule s’écarte immédiatement pour le laisser passer. Je profite de l’ouverture pour m’approcher, moi aussi.

    Deux métamorphes se rendent coup pour coup. La bagarre est violente, le sang gicle, des os craquent. Qu’est-ce que je vous disais sur leur espérance de vie, vous comprenez mieux où je voulais en venir maintenant, j’imagine ?

    Pour l’instant, ils sont sous forme humaine, mais je peux apercevoir des bras qui se couvrent de poils et des museaux qui commencent à apparaître, annonçant une transformation imminente.

    Cyna et son acolyte se lancent dans la mêlée pour essayer de contrôler les loups enragés. Ils esquivent les coups du mieux qu’ils peuvent, mais ils éprouvent des difficultés à les approcher suffisamment pour pouvoir les maîtriser.

    – Stop, crie Cyna.

    Pas de réactions. Les bagarreurs sont aveuglés par leur rage et n’entendent rien de ce qu’il se passe autour d’eux.

    – STOP !

    Brusquement, la bagarre s’arrête. Tous les métamorphes présents se figent, puis baissent la tête, écrasés par l’aura d’autorité de Cyna. Même moi, je sens ma tête lourde et mon corps s’engourdir, bien que ma réaction soit moins prononcée.

    – Vous deux, dit-il en désignant les fauteurs de troubles, vous venez avec moi.

    La tête toujours baissée, ils le suivent sans discuter. Soudain, l’atmosphère s’allège ; il a relâché son pouvoir. Incroyable !

    Pourquoi avoir fait appel à lui, pour remplacer Dominique ? Vu la puissance de son aura, je comprends, mais qui est-il donc pour en avoir autant ?

    Il passe devant moi, s’arrête et me demande :

    – Je peux te laisser retourner à ton campement seule ?

    Je lève les yeux au ciel, mais acquiesce. Il me regarde alors dans les yeux. Ce qu’il y voit doit le rassurer car il reprend sa route et me lance :

    – Prends soin de toi Izarra !

    Chapitre 4 – Izarra

    La nuit commence à tomber. Je me dirige rapidement vers le campement de ma famille en repensant aux événements récents.

    Forcément, je ne peux m’empêcher de penser au loup blanc, partagée entre curiosité et irritation devant son air supérieur et surprotecteur.

    Cyna. Quel drôle de prénom.

    J’avoue qu’il m’a impressionné par son sang-froid et sa capacité à gérer les conflits. On dirait qu’il a fait cela toute sa vie. Il est pourtant si jeune…

    Normalement, la puissance d’un loup grandit avec l’âge ; lui, possède déjà une autorité phénoménale. Je ne peux même pas imaginer ce qu’il en sera dans quelques années, c’est ahurissant !

    Les événements se sont enchaînés si vite que j’en ai encore le tournis. Heureusement, tout s’est bien terminé. Pour moi en tout cas, pour les deux loups en désaccord, je l’ignore.

    Pour ma part, je suis entière, mes blessures sont presque cicatrisées et je n’ai pas fait usage de ma magie. Bref, je m’en sors bien !

    Je dois bien avouer que Cyna m’a sorti d’une situation houleuse.

    J’en suis là de mes réflexions lorsque j’arrive à notre campement. Je loge sur la parcelle réservée à la meute à laquelle appartient ma marraine, Katia. Tout est calme de ce côté-ci, la plupart des loups étant occupés je ne sais où.

    Quand j’arrive à notre tente, Katia est seule, probablement en train de m’attendre ; ses enfants Tina et Tristan sont absents.

    Elle doit m’entendre arriver car elle lève la tête à mon approche, un sourire sur les lèvres. Quand elle remarque mon état, son sourire disparaît instantanément. Elle ouvre de grands yeux et s’affole :

    – Bon sang ! Mais dans quel état es-tu ? Que t’est-il arrivé ?

    Je hausse les épaules en regardant mes pieds. Pour elle, j’ai le chic pour me mettre dans des situations impossibles, où que j’aille. Eh oui ! Je suis un aimant à ennuis. Pour autant, elle en est en grande partie responsable ; c’est elle qui a été transparente sur mon statut d’hybride, ne voulant rien cacher à sa communauté. Je soupçonne surtout le fait qu’elle appréhendait la réaction de Pierre, son chef de meute, s’il apprenait qu’elle lui avait caché cette bombe !

    – Je n’y suis pour rien, dis-je pour me défendre. Je me suis éloignée pour trouver du calme afin de méditer et ils m’ont prise en chasse, sans raison.

    À cette époque de l’année, ma part animale est plus puissante que ma part de sorcière. Ma louve pompe mon énergie, me vidant d’une partie de ma magie, ce qui fait que j’éprouve des difficultés à la contrôler.

    Surtout en ce moment… Depuis quelques mois, j’ai l’impression qu’elle monte en puissance, la rendant difficile à maîtriser. Je la sens de plus en plus imposante et sombre en moi, ma compagne d’ombres.

    Le fait de méditer me reconnecte aux éléments, me permettant de rééquilibrer les deux facettes en moi et d’avoir plus d’emprise sur ma nature animale.

    – Je pense qu’ils m’ont vue partir seule et ont décidé de me suivre. Je me suis enfuie dès que je les ai entendus, mais c’était trop tard.

    – As-tu utilisé ta magie ? me demande-t-elle au bord de la panique.

    – J’allais le faire, mais un autre loup a surgi de nulle part et les a empêchés de me faire du mal.

    Et quel loup ! J’en suis encore toute chamboulée ! Et ce sourire… j’en ai des papillons dans le ventre.

    – C’était incroyable ! Tu aurais dû voir ça. D’un grognement, il les a tous soumis et d’un simple mot les a fait décamper !

    Quand j’y repense, je sens encore sa puissance me percuter. Son aura est belle, puissante et effrayante à la fois.

    Non ! Reprends-toi Izarra ; ce n’est qu’un con arrogant. Du moins, j’essaie de m’en persuader pour oublier ce que j’ai ressenti en sa présence.

    Ma marraine me regarde perplexe.

    – De qui s’agit-il ? m’interroge-t-elle, soudain curieuse.

    – Cyna.

    Une expression de surprise traverse son visage. Elle a l’air… impressionnée, oui c’est ça.

    – Tu le connais, n’est-ce pas ? Qui est-il ?

    – Cyna est quelqu’un de… particulier.

    Sur ce, elle se détourne et je comprends que la discussion sur ce sujet est close et que je n’en obtiendrai rien de plus, ce qui attise ma curiosité. Mais qui est-il donc ?

    Ma tante coupe court à mes pensées en me rappelant à l’ordre :

    – Va faire un brin de toilette et t’habiller, s’il te plaît. Il ne s’agit pas de te faire davantage remarquer en arrivant en retard au grand dîner !

    Oh ! Le fameux dîner des meutes, je l’avais oublié avec toutes ces émotions. Je lève les yeux au ciel et file me rendre présentable.

    Et dire que je ne devrais même pas me trouver là !

    Chaque année, au mois de décembre, toutes les meutes de France se rassemblent, afin de fêter le solstice d’hiver.

    Les loups étant des créatures nocturnes et sous l’influence de la lune, ils célèbrent la nuit la plus longue de l’année. C’est le symbole du passage de la lumière à l’ombre, qui influence le rythme de la nature sur notre fonctionnement physiologique.

    Un grand rassemblement est alors organisé une fois par an. Dans un endroit différent à chaque fois afin de ne pas attirer l’attention des humains. Cette année, il a lieu dans les Pyrénées-Atlantiques, au pays de Quint, plus exactement, à environ trois heures de Bordeaux, où je vis. Les loups se retrouvent, en profitent pour nouer des alliances, faire du commerce ou entretenir les amitiés.

    Le dernier soir, un grand dîner est organisé. Les loups sont sur leur trente et un, la nourriture est abondante, l’alcool coule à flot, les langues se délient, les rancunes s’apaisent et les désaccords sont relégués à plus tard. Tous sont unis autour d’un même but : profiter de ce

    Vous aimez cet aperçu ?
    Page 1 sur 1