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La montagne d’os
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Livre électronique326 pages4 heures

La montagne d’os

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À propos de ce livre électronique

Ian est celui qui est parti à la poursuite du majestueux cerf dans la forêt. Sa devise :
agir en premier, penser après. Kendra ne voulait pas être séparée des autres élèves de sixième, mais elle a tout de même suivi Ian, en dépit de ce que son esprit d’analyse lui dictait. PJ l’a suivi également. Bien qu’il fût effrayé, il s’est dit qu’il pourrait tourner
quelques séquences vidéo mémorables avec sa caméra. Ils espéraient tous revenir sur le sentier avant que quelqu’un remarque qu’ils étaient partis. Cependant, la montagne avait d’autres projets pour eux : des projets sombres et sinistres dont seuls les cauchemars sont faits. À présent, ils ne savent pas où il sont. Ils ne savent pas comment rentrer chez eux. Ils ne savent pas quelles horribles créatures se cachent dans l’obscurité. Mais quand ils comprennent que ces effroyables vampires sont en fait des zombies affamés, seront ils capables d’échapper à la montagne vivants? Ce premier livre de la série Les fossoyeurs est une course terrifiante et mystérieuse qui tiendra les lecteurs en haleine jusqu’à la toute dernière page.
LangueFrançais
Date de sortie5 mai 2014
ISBN9782897338237
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    Aperçu du livre

    La montagne d’os - Christopher Krovatin

    livre.

    Un

    Ian

    B on, ça y est, laissez-moi sortir. Je suis en train d’agoniser, ici, les gars !

    Les portes du bus s’ouvrent, et je suis la première personne de l’allée à me retrouver à l’extérieur. Une bouffée d’air chaud de la campagne souffle sur mon visage et, d’un coup, les deux heures ennuyeuses du trajet en bus s’évaporent. J’y suis enfin, dehors dans la nature, à faire partie du décor. Il y a l’autre bus qui évacue lentement les jeunes, il y a les immeubles au rouge écaillé de Homeroom Earth, mais je me dis que ce qui est fait est fait. Je vois les rangées d’arbres qui oscillent, les rochers au relief brun rougeâtre, les montagnes d’un mauve verdâtre sur le ciel bleu sans fin, lointaines mais très faciles à escalader.

    Tout le monde descend du bus, s’étirant, commençant à chercher son sac, mais tout ce que je veux faire à l’instant présent, c’est rester là et en profiter. La campagne du Montana au loin est au-delà de tout ce à quoi je suis habitué dans la périphérie du Wyoming, où les ratons laveurs sont la chose la plus effrayante qu’un jeune puisse rencontrer. Pourtant, ce lieu est fait pour moi, comme si chaque seconde passée dehors était constituée de tout cet endroit, comme si chaque fois que je respirais, je faisais pénétrer les arbres, les montagnes, les rochers, le ciel dans mes poumons, assimilant mon corps à une part d’eux-mêmes. Alors, je m’approprie tout, je ferme les yeux, serre les poings et respire, respire, respire.

    Je suis là ! Je suis prêt ! Allons-y !

    — Salut Ian !

    Sean Cunningham et Mitchell West, mes copains au basket, descendent du bus près de moi. Sean a de larges épaules et un visage aplati. Mitchell est mince et il a de longs membres et des cheveux noirs en épis. Ils sourient tous les deux, faisant craquer leurs doigts et leur cou, et je sais qu’ils ressentent eux aussi toute l’immensité d’être là dehors, toutes les occasions.

    — Mec, dit Sean en pointant les montagnes au loin, on va escalader ça !

    Je crie :

    — Retenez-moi !

    Je me précipite en avant, et ils s’empressent d’attraper mes bras pour m’empêcher de me lancer la tête la première dans la forêt. Je souris si fort que cela en est douloureux. Ces deux dernières années, j’ai pu m’amuser avec les autres garçons de mon équipe seulement à l’entraînement, principalement parce qu’ils habitent tous à l’autre bout de la ville et que maman veut que je traîne tout le temps avec PJ, mais à présent, enfin, mes coéquipiers et moi pouvons faire quelque chose de sympa ensemble, nous éclater ici en pleine nature.

    — On doit garder l’œil quand même, dit Mitch, pointant un doigt vers moi pendant que nous marchons péniblement vers notre classe et dégageons nos sacs. Souviens-toi : les danseurs de Pine City.

    Sean hoche catégoriquement la tête.

    — Quand sont-ils venus ici ? demande-t-il, paumé.

    J’ai toute l’histoire en tête depuis que Jeremy Morris de secondaire 1 nous l’a racontée à la cafétéria la semaine dernière, mais je joue le jeu pour entendre Mitch la raconter de nouveau.

    — Ils ont disparu l’année dernière, dit Mitch d’une voix profonde et basse.

    — Toute la troupe de danse de Pine City, au Montana, en camping, bang, simplement disparus.

    — Qu’est-ce que tu crois qui leur est arrivé ?

    — Personne ne sait, dit Mitch.

    — Un an plus tard, ils n’ont encore retrouvé aucun des corps.

    Sean et moi échangeons un regard : les corps. Dément.

    — Le camp a établi une histoire officielle nulle pour dire pourquoi ils ont dû annuler le Homeroom Earth l’année dernière et pourquoi il y avait des flics et des officiels de la santé grouillant un peu partout.

    — La peur d’un empoisonnement de la nourriture, c’est ça ? dit Sean.

    — Je crois que c’était une invasion d’insectes, lui dis-je.

    — Que des mensonges, dit Mitchell, l’air sournois. Ils sont là quelque part. Dans une grotte, leur chair pourrissant, probablement dévorés par des animaux sauvages…

    Sean met ses doigts sur sa bouche et gonfle ses joues, et nous faisons tous les trois des bruits de vomissements entrecoupés de rires.

    — Faisons un pari, dit Sean. Si je trouve le premier cadavre, vous, les gars, me devez un mois complet de desserts.

    — Mec, tu es un vrai petit gros, dit Mitch. D’accord. Si je trouve le premier corps, vous, les gars, devrez m’appeler « papa Mitch » pendant deux semaines.

    Nous acquiesçons. Ça paraît équitable.

    — Ian ?

    Oh bon sang, est-ce que j’ose ? Je l’ai eu sur le bout de la langue pendant toute la saison. C’est peut-être trop, mais hé, mes passes se sont améliorées au basket le mois dernier, alors pourquoi ne pas tenter ?

    — D’accord, si je trouve le premier corps, vous devrez raconter tous les deux à l’entraîneur Leider que je devrais commencer comme meneur de jeu à la place de Kyle.

    Sean et Mitchell se regardent et sifflent, mais ensuite Sean dit :

    — Entendu.

    Nous mettons tous nos poings au milieu, les heurtons en formant un triangle et lançons un unanime « BOUM ! ». Maintenant, c’est décidé : je dois trouver le premier cadavre.

    — Premier jour de Homeroom Earth : Ian Buckley, notre perpétuel protagoniste, prend part à un rituel entre hommes.

    « Oh, super. »

    Je regarde par-dessus mon épaule et voilà que je l’aperçois, celui qui fait tache avec son gros caméscope noir collé à son visage. Immédiatement, Sean et Mitch se mettent à maugréer.

    PJ Wilson se fond mal en pleine nature. Il est mince, petit, pâle, et a des cernes sous les yeux. Par-dessus le marché, il y a ce qu’il porte — un t-shirt vert avec un ours dessus, une minuscule paire de shorts cargo et de vieilles baskets — et ce qu’il sent — la crème solaire, l’insecticide, le savon, les médicaments — qui font de lui une cible ambulante. Oh, et la caméra, bien sûr. Impossible de l’oublier. Même si j’essayais.

    Je dois maîtriser cette situation. Je ne peux pas laisser mes coéquipiers dire trop de bêtises sur PJ. Il est mon plus vieil ami, nos parents se connaissent depuis toujours, et c’est un bon gars dans le fond, mais il ne me rend pas les choses faciles. Mettez une brochette de garçons dans la forêt, ils deviennent un peu dingues, et la première chose qu’ils vont faire c’est chasser l’intrus hors du groupe.

    — Peut-être que PJ peut venir avec nous, dis-je à Sean. Qu’est-ce que t’en dis, mec ? Tu veux avoir des films des cadavres ? Tu te souviens quand j’ai parlé des danseurs de Pine City…

    L’objectif de la caméra s’arrête sur mon visage.

    — Tu te moques de moi. Tu crois vraiment à cette histoire de fantômes de Jeremy Morris ? Allons, les gars, utilisez vos cerveaux !

    Je regarde Sean et Mitch, qui sourient comme pour dire « est-ce que tu crois en ce type ? ». Mais j’interviens trop tard. Sean est en train de s’accroupir, ramassant quelque chose dans ses mains, puis il s’avance et met la plus grosse araignée faucheuse que j’ai jamais vue directement sur l’objectif de la caméra.

    Bien sûr, PJ devient barjo, tourne sur lui-même, tape sur sa caméra et lance un cri perçant alors que Sean et Mitch rient en se moquant et que j’ai le feu aux joues. Quand il est finalement certain que l’insecte est parti, PJ lève ses grands yeux abattus vers nous, et sa mine si affligée fait ressembler tout son visage à un U à l’envers.

    C’est PJ quand la caméra est éteinte — triste, effrayé, hypersensible, totalement incapable d’être normal. Je crains qu’il ne se mette à faire une de ses typiques crises de panique, mais n’y pensons pas, il est simplement furieux.

    — Imbéciles ! hurle-t-il. Et si cette chose m’avait mordu ? Et j’aurais pu lâcher mon caméscope ! Vous savez combien ça coûte ?

    — Ça m’est bien égal, dit Mitch.

    — Mec, ton pote a besoin de se maîtriser, dit Sean, roulant des yeux.

    Mes coéquipiers partent d’un pas raide, haussant les épaules et gloussant pendant que je reste avec mon piètre ami qui marmonne dans sa barbe et inspecte chaque parcelle de sa caméra pour s’assurer qu’elle n’est pas abîmée. Une partie de moi veut lui dire que ces types sont des cons, mais une autre partie veut lui arracher la caméra des mains et la frapper violemment comme un ballon de football afin de voir sept millions de ses pièces coûteuses voler dans toute la forêt. PJ tire un bout de papier de sa poche et l’examine.

    — Comment s’appellent ces araignées déjà ? Je veux voir si elles sont marquées.

    — Les faucheuses ? Elles sont inoffensives, mec. Qu’est-ce que c’est que ce papier ?

    — Mes parents m’ont fait une liste des choses auxquelles je dois faire attention pendant que je suis ici, dit PJ.

    Il jette un œil dans les bois, l’air plus faible et effrayé que jamais.

    — Tu ne crois pas qu’il y a des spores dans l’air, non ? Ma mère m’a donné un masque, comme un de ces masques de chirurgien. Elle a lu ce truc sur les spores dans le Growing Boy Magazine, et a vu que si tu portes un masque…

    PJ continue au sujet des spores, des abeilles tueuses et des grizzlis, mais je regarde de nouveau notre environnement, appréciant mon séjour en pleine nature. Au loin, l’entraîneur nous appelle pour un rassemblement autour du feu, et je cours presque vers lui.

    Heureusement que PJ et moi sommes dans des groupes d’activités différents. Non pas que je n’aime pas PJ, mais cela nous laissera occuper notre temps à notre rythme, vous voyez ? Et je ne serai pas filmé tout le temps.

    L’entraîneur Leider se trouve près du feu de camp, un trou cerné de pierres et plein de cendres devant le réfectoire. Il est habillé d’une chemise de camouflage, de pantalons de camouflage, d’un chapeau de camouflage et, ouah, il a réussi à trouver des bottines de camouflage. Les autres professeurs se tenant près de lui — M. Harder, histoire ; Mme Brandt, français ; la Señora Alanzo, espagnol ; Mme Dean, biologie — paraissent tout petits et pas du tout « nature ». L’entraîneur est tout en muscles saillants, les poings sur les hanches.

    — Calmez-vous tous ! aboie l’entraîneur. Bienvenue à Homeroom Earth. Pendant les trois prochains jours, vous aurez une formation pratique sur la survie dans la nature. Vous vous baladerez. Vous respecterez la nature. On est clair là-dessus ?

    Tout le monde marmonne en approuvant. Près de moi, PJ fait un salut, puis regarde pour voir si j’ai remarqué. Je reste silencieux. D’ici quelques minutes, l’entraîneur nous conduira, les copains et moi, à notre chasse aux cadavres en nature.

    — Bien, je sais que vous, élèves de sixième année, étiez censés suivre ce programme l’année dernière, mais cela n’a pu être fait en raison d’une invasion de punaises de lit.

    Je jette un œil à Sean et Mitch, et ils se mettent tous les deux les mains à la gorge en faisant des gestes d’étouffement.

    — D’abord, je veux que vous sachiez que nous avons été assurés que toutes les couchettes ont été parfaite-ment nettoyées pour en chasser toute punaise de lit. Deuxièmement, j’ai besoin que vous soyez tous attentifs aux animateurs de Homeroom Earth, compris ? Ils ont besoin de votre entière collaboration durant les prochains jours. Vous faites une erreur ici, vous manquez de respect à mère Nature, et BANG.

    Il lève un doigt et un pouce comme un pistolet.

    — Elle vous aligne. Alors, restez vigilants, et ça devrait être amusant. Les professeurs sont ravis.

    Il regarde Mme Brandt, qui sourit et se frotte les mains.

    — D’accord. Maintenant, laissez-moi vous présenter votre professeur responsable du programme, le professeur Randy.

    L’entraîneur se met sur le côté, et le type mince avec une barbe négligée et une grosse casquette marron de Ranger s’approche devant nous.

    — Salut, les enfants, bienvenue à Homeroom Earth ! Très heureux de vous avoir ici ! À partir de maintenant, vous êtes mes petits adjoints !

    Je regarde PJ et roule des yeux. PJ pointe un doigt sur sa tête et fait semblant de faire sauter son cerveau. Vous voyez, parfois, il assure.

    — Cependant, avant que nous nous amusions et nous échauffions, dit le professeur Randy, je dois vous énoncer les quatre règles de Homeroom Earth, d’ac ? Règle numéro un : ne pas quitter le site et ne pas s’écarter du chemin. C’est une réserve naturelle, et il y a plein d’animaux qui ne seront pas très contents si vous vous aventurez dans leur antre. Compris ? Super !

    « Beurk, ce type est nul. »

    — Règle numéro deux : aucun appareil électronique personnel n’est autorisé. Cela comprend les téléphones portables, les lecteurs MP3, les systèmes GPS, tout cela. Les caméras sont tolérées, mais quoi que ce soit de plus compliqué doit rester dans votre tente et hors de vue.

    Quelques jeunes de la ville grommellent.

    — Désolé, les gars. Vous nous remercierez plus tard quand un oiseau ne construira pas son nid avec les pièces de votre iPad. Règle numéro trois : boire beaucoup d’eau tout le temps. L’air est rare et sec, et la déshydratation est un problème grave. Et cela nous conduit à notre quatrième et plus importante des règles : si quelqu’un était en difficulté, même si l’on vous demande de ne rien dire, s’il vous plaît, dites-le à l’un de vos professeurs ou à un membre du personnel. Rien ne gâche davantage de bons moments qu’une crise d’appendicite. Est-ce que les règles sont claires pour tout le monde ? Fantastique.

    Droit devant, je peux voir Sean et Mitchell riant pendant qu’ils rejoignent leurs couchettes, mais PJ est comme une ancre à côté de moi, pesant sur moi. Je dois me montrer patient. Une fois que nous serons séparés par groupe d’activités, je ne le reverrai pas avant le dîner. Ce sera super. PJ est le genre d’ami qui est d’accord pour décrocher, pour autant que ce n’est pas pour tout le temps.

    — On partage toujours une couchette, hein ? demande-t-il avec inquiétude.

    — Bien sûr, lui dis-je. Je ne vais pas m’endormir tout d’un coup sur toi. Non pas que l’idée ne m’ait pas traversé l’esprit…

    — Buckley ! Devant et au milieu !

    L’entraîneur Leider surgit à côté de moi, tout en muscles et en camouflage, un large sourire sur son énorme menton. Il renifle l’air et agite sa main devant son visage.

    — Beurk, Wilson, tu es sûr que tu as mis assez de produit insecticide ? Personne n’est jamais mort d’une morsure d’insecte, fiston.

    — Inexact, dit PJ. Je viens de voir l’Horrible invasion, avec William Shatner, et ça raconte comment…

    — Tu vois ce que je veux dire, grommelle l’entraîneur. Avance, tu veux ? Je dois parler à ton copain.

    PJ m’adresse un regard nerveux, mais continue à marcher. L’entraîneur et moi ralentissons pour nous arrêter. Il s’agenouille et baisse la voix.

    — Comment ça va, Ian ?

    Euh… L’entraîneur n’utilise pas les prénoms d’habitude. J’ai toujours juste été « Buckley ». Il se passe quelque chose.

    — Bien, entraîneur. Excité de passer à l’action. Nous allons faire une randonnée, n’est-ce pas ?

    — Justement, dit l’entraîneur. Michael McDermott a de l’asthme, et je suis le seul professeur ici avec une formation RCR. Cela signifie que je dois échanger une personne de mon groupe d’activité contre une personne de celui de Mme Brandt. Tu me suis ?

    J’acquiesce. Il me fixe pendant une seconde, l’air presque triste, et dit :

    — Je sais que tu étais très excité de faire partie de mon groupe, Ian…

    « Oh, maintenant, je comprends. »

    — Moi ? Pourquoi moi ? Sean, Mitch et moi, on a ce pari en cours. Je voulais… On allait… Pourquoi MOI ?

    Il hausse les épaules.

    — PJ Wilson est dans le groupe de Mme Brandt, et vous deux, vous êtes comme larrons en foire. Exact ? Je me disais que je te mettrais avec un de tes amis.

    — Nous ne sommes pas…

    Les mots n’arrivent même pas à sortir de ma bouche tellement ils semblent minables. Nous ne sommes pas amis. C’est un mensonge mais, à l’instant présent, à l’idée de passer à côté de trois journées de pur plaisir avec mes coéquipiers de basket, j’aimerais que ce soit vrai. Gloups. Et voilà que je vais être filmé tout le long de cette sortie.

    — D’accord.

    — Ça ira ? dit l’entraîneur Leider.

    « Pfff. Ne suis-je pas cool ? »

    — Oui, peu importe, lui dis-je, espérant qu’il entende combien c’est naze.

    — Bien.

    Il siffle entre ses dents.

    — Il y a autre chose. Ne t’en fais pas, mais… J’ai entendu dire que tu as une histoire avec quelqu’un d’autre dans le groupe de Mme Brandt, alors je devrais probablement te parler d’elle. Apparemment, vous avez eu une altercation dans la classe de Mme Dean…

    Oh, non. J’ai mal à l’estomac, et mon cœur fond. Au loin, marchant vers les tentes des filles, je vois sa grosse masse de cheveux bruns, et c’est terrible, pire qu’un million de PJ.

    N’importe qui, n’importe qui, mais pas elle.

    Deux

    Kendra

    S elon mon Guide pratique de la faune et de la flore du Montana , il y a quinze espèces de hiboux qui sont originaires des types de montagnes au pied desquelles nous campons actuellement, les Bitterroots. Et alors qu’ils ne chassent que pendant la nuit, quelques hiboux sont connus pour sortir le soir et effrayer des proies qui sont dérangées par la faible lumière, mais qui profitent de la chaleur du soleil couchant. Cependant, le soir est le moment où je dois être la plus vigilante. C’est un de mes buts pour cette sortie, voir un hibou en plein vol, plus précisément le Petit-Duc nain, qui ressemble particulièrement à Yoda, de La guerre des étoiles .

    Il y a quelque chose dans les hiboux qui me fascine, peut-être parce qu’ils sont historiquement les symboles de la sagesse ou parce qu’ils paraissent plus imposants que la plupart des oiseaux avec leurs yeux immenses et leurs poitrines gonflées. Je peux juste espérer que lorsque je verrai un hibou, le hibou verra en moi une quelconque sagesse. Nous reconnaîtrons l’intelligence de chacun. Et ce qui ne gâche en rien, ils sont extrêmement jolis.

    Mais je suis en train de conceptualiser (c’est sur trois ; encore deux fois, et j’aurai rempli mon quota de vocabulaire pour la semaine).

    Une fois toutes nos affaires déposées près de nos couchettes — il semble que je sois l’unique fille qui n’a pas apporté son brillant à lèvres ou des accessoires pour les cheveux (bien que je m’en soucie) —, nous prenons le déjeuner dans le réfectoire, ses murs de bois couverts de projets artistiques qui consistent en des branches et des feuilles collées sur du papier construction. Je profite de mon temps pour écrire un texto à Jutta et David, du forum de braintrustfund.org, sur la quantité de DEET (N,N-diéthyl-3-méthylbenzamide) dans les répulsifs pour insectes qu’ils ont employés, et quelles baies ils ont mangées au cours de leurs précédentes excursions en camping. David me dit qu’il utilise habituellement des vaporisateurs sans DEET — ses parents préfèrent les produits biologiques — et qu’il emploie généralement des ronces parviflores, mais que ma sortie est peut-être dans une région trop montagneuse pour en trouver. Rien de Jutta, mais c’est compréhensible. David est de Portland, en Oregon, alors que Jutta est de Hambourg, en Allemagne. Elle est probablement en train de dîner.

    Après le déjeuner, nous retournons tous au feu de camp, où nous nous séparons par groupe et sommes conduits aux côtés de notre professeur attitré. Mme Brandt nous coche sur la liste de présence, souriante. En classe, Mme Brandt est excessivement rigide — voir sa silhouette petite et ronde près de son bureau est inquiétant —, mais les élèves de secondaire 1 et de secondaire 2 auxquels j’ai parlé disent qu’elle était naturiste à Homeroom Earth — « naturiste » dans le sens ici de quelqu’un qui adore la nature et non de quelqu’un qui se promène nu. Du moins, je suppose.

    Quoi qu’il en soit, son visage rayonne d’un large sourire, et elle frotte ses mains aux doigts potelés d’excitation. Certains des autres jeunes trouvent cela drôle et gloussent, mais la voir revêtir ce personnage si différent de la classe me réchauffe le cœur. Aujourd’hui, nous pouvons être des pionniers !

    — D’accord, bafouille-t-elle. À droite, Kendra. Jones, Leslie. Todd, Barbara. Dylan, Jenny. Richter, Tom. Wilson, Peter Jacob…

    Regardant sa liste, elle cite les noms des jeunes autour de moi, puis regarde vers l’entraîneur Leider, qui lève le pouce en signe d’approbation.

    — Parfait. Et Buckley, Ian.

    « Pardon ? »

    Hélas, ce n’est pas une erreur de sa part. Il y a bien Ian Buckley, filiforme et les cheveux blonds en bataille, croisant ses bras et paraissant totalement malheureux alors que l’entraîneur Leider le conduit vers notre groupe. (À noter que la tenue de l’entraîneur Leider est incroyable. Je ne posséderai jamais autant de vêtements de camouflage). Le sang monte instinctivement à mon visage quand je l’aperçois. C’est un véritable garçon, un petit garçon sexiste totalement stupide, dégingandé et méchant.

    — Tu n’étais pas censé être dans le groupe de l’entraîneur Leider ? demande Tom Richter.

    — Eh bien, dit Ian, je n’étais absolument pas censé être ici avec…

    Il s’interrompt. Je dis :

    — Allez, Ian, avec qui ?

    Il rit et secoue la tête, mais refuse de me regarder.

    « Relaxe, Kendra. Bon, oui, je suis dans un groupe d’activité avec une grande gueule de sportif dont le premier objectif dans la vie est de se jeter d’une falaise pour voir l’effet que ça fait. C’est peut-être malencontreux (et de deux avec malencontreux, il m’en faut un troisième), mais ce n’est en aucun cas la fin de ma mission ici.

    » On dirait que Ian ne semble pas non plus tout à fait ravi d’être dans le groupe de Mme Brandt, puisqu’il n’y a pas un seul joueur de basket parmi nous, juste de pitoyables ‘‘intellos" comme moi, comme Ian m’appelait en cours de science avant que je ne le frappe en plein visage avec mon manuel, si fort qu’il a dû être renvoyé chez lui et que j’ai dû passer mon premier et unique après-midi en retenue.

    » Bon. Peut-être que le fait qu’il se retrouve seul le fera se tenir tranquille et que je pourrai travailler en paix. Il faut que je l’oublie, que je respire profondément l’air frais de la montagne et que je décompresse. Les hiboux. Je dois bien ouvrir les yeux afin d’apercevoir les hiboux. »

    Le professeur Randy se met devant Mme Brandt et dit :

    — Tout le monde est là ? Merveilleux ! Les enfants, j’aimerais que vous fassiez connaissance avec Maris, votre enseignante de plein air pour la journée.

    Une pâle jeune fille avec de l’acné et un rouge à lèvres noir apparaît à côté du professeur Randy et nous salue frénétiquement de la main.

    — Elle va s’assurer que vous passez un heureux moment lors de votre première activité !

    Comme il regarde au loin, je prends une photo du « professeur » Randy avec mon téléphone et envoie un courriel à mes amis du forum. Sujet : « Ce gars est notre professeur ???? » De nombreux mdr s’en suivent.

    — Bien, tout le monde, notre première activité est… la flore ! annonce Maris.

    Chaque garçon de notre groupe ronchonne de concert.

    — Je sais à quoi vous êtes en train de penser, les garçons, « les fleurs, c’est pour les filles », mais, en fait, la flore du Montana est aussi fascinante et diverse que ses nombreuses espèces animales.

    — Mais deux fois plus ennuyeuse, grommelle Ian Buckley.

    — M. Buckley, dit sèchement Mme Brandt.

    Quelques-uns de mes camarades ricanent, alors je le regarde de travers pour lui faire comprendre que son commentaire n’est pas apprécié. Il me dit du bout des lèvres :

    — Quoi ?

    Mon visage rougit, et mes mains se crispent. Si seulement j’avais un manuel dans le coin…

    Maris nous conduit hors des bâtiments principaux du campement pour nous faire monter un large sentier

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