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L'Ombre rouge - T3 : La Petite Sœur
L'Ombre rouge - T3 : La Petite Sœur
L'Ombre rouge - T3 : La Petite Sœur
Livre électronique422 pages6 heures

L'Ombre rouge - T3 : La Petite Sœur

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À propos de ce livre électronique

France, 1981. L'Ombre Rouge commence à se faire âgée, mais son combat ne cesse pas...
Elle avait vingt ans quand sa sœur a disparu sans laisser de trace. Et alors qu'il est temps pour Camille de partir à la retraite, elle est déterminée : maintenant que le rideau de fer est tombé, elle va aller à la source pour savoir ce qu'il est arrivé à sa petite sœur.
Et alors que ses enfants grandissent et ont leurs propres enfants, nous suivons l'ancienne députée Camille à travers les bouleversements politiques et sociaux de la France pour enfin obtenir la clef de ce mystère vieux de plus de cinquante ans...
« La Petite Sœur » est une fiction historique au réalisme exceptionnel, allant des Trente Glorieuses jusqu'à l'an 2000 via l'histoire fictive de Camille, une Résistance Maquisarde devenue députée du PCF, qui se bat pour connaître le destin de sa petite sœur, Yvonne.
LangueFrançais
ÉditeurSAGA Egmont
Date de sortie14 mai 2024
ISBN9788727063096
L'Ombre rouge - T3 : La Petite Sœur

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    Aperçu du livre

    L'Ombre rouge - T3 - Pierre Louty

    Pierre Louty

    L'Ombre rouge - T3 : La Petite Sœur

    Saga

    L'Ombre rouge - T3 : La Petite Sœur

    Image de couverture : Midjourney

    Copyright ©2012, 2024 Pierre Louty et SAGA Egmont

    Tous droits réservés

    ISBN : 9788727063096

    1ère edition ebook

    Format : EPUB 3.0

    Aucune partie de cette publication ne peut être reproduite, stockée/archivée dans un système de récupération, ou transmise, sous quelque forme ou par quelque moyen que ce soit, sans l'accord écrit préalable de l'éditeur, ni être autrement diffusée sous une forme de reliure ou de couverture autre que dans laquelle il est publié et sans qu'une condition similaire ne soit imposée à l'acheteur ultérieur.

    www.sagaegmont.com

    Saga est une filiale d'Egmont. Egmont est la plus grande entreprise médiatique du Danemark et appartient exclusivement à la Fondation Egmont, qui fait un don annuel de près de 13,4 millions d'euros aux enfants en difficulté.

    AVERTISSEMENT AU LECTEUR

    Ce roman est une histoire de pure imagination.

    Tout rapprochement avec la réalité ne serait que pure interprétation ou simple coïncidence.

    P.L.

    Avant-propos

    Camille était née au cœur des monts d’Ambazac, tout juste au lendemain de la Grande Guerre où son père, Louis Baillot, avait passé quatre années de sa jeunesse et perdu son frère, André, dans la tourmente de Verdun. Le père de Louis ne s’en était jamais remis et lui aussi était allé rejoindre la terre des ancêtres dans le petit cimetière de Saint-Pierre-la-Montagne. En ce temps-là, le cimetière n’était qu’un enclos de pierres sèches où l’on avait creusé les sépultures des défunts. Aux confins du Limousin et de la Marche, Saint-Pierre-la-Montagne s’étageait sur les flancs escarpés de la vieille roche granitique… À vrai dire, dans ce cimetière, on ne trouvait pas que des concessions en pleine terre ; des pierres tombales et quelques monuments funéraires avaient été taillés par les maçons de la Creuse qui avaient fait la renommée de cette contrée… Nous étions ici au pays des grands châtaigniers qui bordaient les chemins creux et où le chêne avait, peu à peu, pris le dessus pour triompher vers les hauteurs célestes. Le chêne avait supplanté le châtaignier et retrouvé son statut de roi. D’ailleurs, les paysans d’ici ne parlaient de lui que sous cette dénomination : le roi… Pourtant ces agriculteurs n’aimaient guère les rois, ils avaient depuis longtemps adopté la République. Ils passaient pour être, quelque peu, réfractaires aux gouvernements successifs de la IIIe République. Pour les punir, on les avait envoyés dans les tranchées de la Grande Guerre : bien malgré eux, ils étaient devenus fantassins ! Cette guerre de 14-18 avait duré et pris au pays près de deux millions d’hommes… Certains étaient revenus blessés dans leur chair, mutilés, meurtris à jamais. Le père de Camille avait eu de la chance : il avait échappé au pire et, au retour, il s’était attelé à l’ouvrage… À la ferme des Cailloux Blancs, il y en avait car le père malade et les femmes restées seules n’avaient pu accomplir la totalité des tâches exigées par un domaine ingrat et difficile à travailler. La trentaine à peine, Louis Baillot avait des forces et il les avait mises au service de sa terre. Il avait pris pour épouse Thérèse, agrandi du coup sa petite propriété et deux filles étaient venues au monde dans cette maisonnée en pierre.

    À l’école des Bordes, Camille était allée la première ; Yvonne, la petite sœur, avait suivi… L’école était minuscule : deux classes seulement mais des maîtresses extraordinaires ! Camille et sa sœur étaient des élèves très vives et très intelligentes. Elles ne pouvaient rester bergères au pays des Cailloux Blancs. Elles iraient à l’école primaire supérieure… 1936 : le Front populaire… Camille et Yvonne étaient si brillantes à l’école qu’elles avaient été remarquées par les dirigeants de l’Internationale. À Paris, à Moscou, elles apprendraient le métier passionnant d’agent secret… Louis Baillot n’était pas peu fier : ses filles seraient des agents secrets… Quel chemin parcouru pour ces petites paysannes des monts d’Ambazac : de l’École des Bordes à l’Université de Moscou… Un bel avenir s’annonçait mais, voilà qu’en 1939, le chancelier Hitler déclara la guerre au monde. Alors, les filles de Louis Baillot devinrent des agents secrets de la lutte antifasciste. Camille serait l’Ombre rouge et Yvonne…

    Moins d’un quart de siècle après la Grande Guerre, un autre conflit mondial avait jeté les peuples les uns contre les autres. On se battait sur mer, dans les airs, au cœur du désert et même sur le lointain front soviétique. En 1941, Hitler avait lancé ses divisions blindées contre l’Armée rouge… Le monde retenait son souffle. Allait-on chavirer dans une exploitation éhontée des populations les plus affaiblies ? Des millions de gens seraient déportés, bousculés, terrassés… Les savants nazis mettaient toute leur énergie pour découvrir la terrible bombe atomique qui anéantirait les opposants au IIIe Reich. S’ils trouvaient…

    À mains nues, à pied ou à bicyclette, par les sentiers étroits ou les chemins creux, l’Ombre rouge allait et venait, animant la flamme de l’espérance. Camille avait la certitude de la victoire finale sur le fascisme et son cœur battait pour celles et ceux qu’elle aimait, ses frères et ses sœurs, sa famille et ses voisins… Un combat de titan ! À mains nues, l’Ombre rouge affrontait les démons titanesques de l’impérialisme fasciste. La voici sur les conches du Marais Poitevin, dans les gorges du Tarn, sur le plateau des Combrailles, au cœur du Mont-Mouchet et près du Pont Lasveyras… Déjà, elle filait vers la Charente où elle avait rendez-vous avec le colonel Bernard au château de Pressac… À Oradour, elle passa au lendemain du 10 juin 44… Elle versa une larme et n’eut même pas le temps de s’arrêter pour embrasser les siens au village des Cailloux Blancs. Sa mission était grande et incertaine mais, en fin de compte, le temps de la Libération arriva. Au plus profond de la forêt de la Loubatière, Camille réunit les grands chefs du Maquis pour l’ultime combat. Elle leur demanda d’éviter qu’on vole au peuple sa victoire. Réussirait-elle ? Et où était donc passée sa petite sœur, Yvonne, qu’elle n’avait pas revue depuis ce Noël 43 ?

    En 1945, Camille fut bien récompensée de son travail exemplaire au service de la Résistance. Son parti la choisit pour être parmi les premières femmes à entrer au Parlement. Camille Baillot, Députée de la Seine, était la fille de petits paysans des monts d’Ambazac. On croyait rêver… Jamais, on n’aurait imaginé qu’une fille de la terre qui avait cheminé en sabots de bois puisse prendre la parole à la tribune de l’Assemblée. Le cœur plein d’espérance, Camille entamait une nouvelle carrière sur les chemins de la liberté. Le cœur plein d’espérance ? Oui car elle espérait toujours retrouver sa petite sœur disparue dans la tourmente…

    Pour une fois, Camille se trompait. Vingt-cinq ans allaient passer et elle ne connaîtrait pas encore la vérité. Le père était mort avant de la savoir, il avait emporté dans la tombe des ancêtres le chagrin qui l’étreignait. Désormais, seule Thérèse resterait aux Cailloux Blancs, témoin d’un passé de labeur où il y avait eu bien davantage de larmes que de rires. Les Baillot étaient-ils condamnés à pleurer toute une vie ?

    Tout de même, les parents de Camille avaient eu la joie d’avoir deux petits-enfants : Pierre et Françoise… Des petits-enfants qui marchaient sur les traces de leurs ancêtres… Pierre avait vingt ans, sa sœur dix-sept… À l’école, comme leur mère, ils étaient brillants et de Victor, le père, ils avaient hérité de ce côté poète et musicien qui plaisait tant à la famille…

    Mais quand donc connaîtrait-on la vérité ? Où était passée Yvonne, la petite sœur ?

    Chapitre I

    Le joli mois de mai

    Le 1er octobre 1967, débutèrent les premières émissions en couleur de la télévision française. Jusqu’alors, les images défilaient en noir et blanc. Louis Baillot n’avait donc pas eu le plaisir de découvrir cette prouesse de la technologie. Quelques jours auparavant, il était parti pour toujours. Cette année-là, il avait eu seulement la chance de voir les belles couleurs de l’automne s’afficher au sommet des grands arbres qui bordaient les prés de la petite montagne limousine. L’automne avait été précoce et les premières gelées blanches avaient surpris tout le monde. Il en va souvent ainsi, chez nous, où les contrastes climatiques sont fréquents. La journée est ensoleillée et la température s’élève jusqu’à devenir insupportable mais, dès que le soleil disparaît à l’horizon, le vent du Nord ramène la fraîcheur et la froidure de la nuit. Louis Baillot avait quitté ce monde à l’instant où les premiers cèpes faisaient leur apparition sur les bords des talus, autour des grands arbres de la forêt… Il avait quitté ce monde à un moment où l’on s’interrogeait sur son propre avenir. Louis Baillot n’aurait pas dû s’inquiéter : ses petits-enfants, Pierre et Françoise, étaient des élèves brillants. L’un était entré à l’École Normale Supérieure et avait pour professeur, Louis Althusser, un maître à penser de la Philosophie qui avait illuminé la vie du vieux paysan. Louis Althusser enseignait le marxisme et avait bousculé cette dialectique qui prétendait expliquer la lutte des classes et le mouvement de l’Histoire. Il avait été l’un des premiers à montrer le rôle primordial de l’Homme dans l’évolution des sociétés. Jusqu’alors, on expliquait les changements politiques, économiques et sociaux par les antagonismes d’intérêts entre les classes sociales. Seulement voilà, Louis Althusser mit au premier plan les activités humaines. Par ce fait, il rétablit dans sa juste dimension la réalité historique. Sans les hommes, rien n’était possible ! L’homme fait jaillir l’étincelle et écarte les vieilles habitudes. L’Histoire n’est pas seulement une mécanique, c’est aussi des sentiments, de l’engagement, de l’inconscience… Ceux qui vont transformer le monde sont justement ceux qui allumeront la mèche de l’explosion… Sans eux, rien ne se produirait. Les hommes sont des catalyseurs des grands mouvements historiques. Louis Althusser avait justement analysé les actions humaines. Pierre était son élève et apprenait à merveille. Avant de quitter ce monde, Louis Baillot s’était entretenu avec son petit-fils et il pouvait maintenant partir tranquille : le grand-père savait que la lignée des Baillot serait maintenue… Quant à Françoise, elle avait été admise au prestigieux lycée Henri IV où elle préparerait l’entrée aux grandes écoles. Françoise n’était encore qu’une adolescente : elle adorait la littérature, la poésie comme son père mais elle avait la rigueur des scientifiques, l’intelligence innée de sa mère… Serait-elle ingénieur ? Le grand-père l’imaginait dans la lignée de Marie Curie, de Paul Langevin et de Frédéric Joliot… La petite-fille d’un paysan des monts d’Ambazac… Ingénieur ? Ce mot était à lui seul une énigme. À vrai dire, Louis Baillot ne comprenait pas très bien ce mot « d’ingénieur »… Il y voyait seulement le génie de l’homme et cela lui suffisait. Après la guerre, il était redevenu un paysan mais, tout au long de ce XXe siècle qui avait maintenant dépassé la mitemps, il avait pu vérifier combien l’intelligence humaine jouait un rôle primordial. Faire confiance à l’intelligence… Ah ! Si les gouvernements d’autrefois avaient pu seulement le comprendre… Inconscients ! Oui, ils étaient inconscients. Ils avaient mis l’intelligence au service de la destruction, des noires ambitions et des aventures les plus inutiles. Si on avait fait confiance à l’intelligence des hommes pour comprendre la société et l’améliorer… Enfin, c’était ainsi… Louis Baillot avait quitté ce monde au début de l’automne 67 et n’avait donc pu contempler les images en couleur de la télévision. Le vieux paysan se méfiait beaucoup de cette invention avec ce petit écran qui vous envoyait, chaque soir, sa propagande au journal télévisé. Louis Baillot avait eu souvent envie de briser cette boîte à mensonges… Il avait été l’un des premiers dans la commune à posséder un appareil de télévision que sa fille Camille, Députée de la Seine, lui avait offert. Camille avait dit :

    – Ainsi, tu pourras me voir à l’Assemblée Nationale…

    – Oui, oui… Je pourrai te voir ; seulement la télévision montrera plus souvent le grand Charles que ma fille !...

    Louis Baillot ne s’était pas trompé : Camille n’avait eu que quelques secondes d’image à l’écran et le général de Gaulle était entré par cette fenêtre miraculeuse dans toutes les maisons où il avait raconté son grand retour. C’était en 1958… les télévisions étaient encore rares, même celles en noir et blanc. Bien souvent, dans les chaumières, il n’y avait que des postes de radio… Et on avait écouté De Gaulle, le grand retour, les promesses et les promesses toujours… Seulement voilà, la guerre d’Algérie avait duré quatre ans de plus. Le Marché Commun avait ruiné la paysannerie et, déjà, on parlait de fermer les classes, les bureaux de Poste et les petites gares… Déjà, on raccourcissait les lignes d’autobus qui desservaient le département au départ du chef-lieu… Bientôt, la vie n’arriverait plus au fin fond des campagnes. L’équilibre naturel du pays était rompu. En périphérie des villes, on construisait des cités, des tours gigantesques… La misère se concentrait… Allait-on oublier la terre des ancêtres ?

    ***

    En ce début d’automne 67, la mort avait frappé à la porte des Cailloux Blancs. Brutalement, le père avait été arraché à l’affection des siens. Désormais, Thérèse serait seule dans la petite ferme rénovée à attendre le retour de Camille, de Victor et des enfants… Une foule considérable d’amis avait accompagné Louis Baillot à sa dernière demeure. Des gens de la famille, des voisins et d’autres venus de loin : d’anciens syndicalistes agricoles, de ces vieux baroudeurs qui avaient mené les campagnes du Comité de Guéret et barré les routes avec les charrettes dès 1953… Ils étaient nombreux à être venus se recueillir et à saluer, une dernière fois, le vieux paysan qui s’en allait pour toujours. Thérèse avait pleuré tant et tant qu’elle n’avait même plus de larmes à verser maintenant… Seulement, une profonde tristesse emplissait le cœur de cette pauvre femme. Hier, elle avait assisté à la disparition de la petite ferme : les vaches qu’il avait fallu vendre, les quelques moutons… Elle avait seulement gardé quelques volailles et son chien. Et maintenant, elle serait là aux Cailloux Blancs à attendre… Heureusement, il y aurait la télévision… Pourtant Thérèse était un peu comme son mari, elle n’appréciait guère cette boîte à images. Elle y voyait trop de violence, trop de films venus d’ailleurs, des indiens et des cow-boys, le Far-West… et les nouvelles ? Guère plus alléchantes ! Désormais, les journalistes sélectionnaient les informations et ne retenaient, pour le journal télévisé du soir, que les événements les plus frappants, souvent les plus tragiques : des incendies spectaculaires, des accidents où les morts se comptaient par dizaines, des tremblements de terre ou des tempêtes tropicales… Autrefois, les journaux que lisait Thérèse n’évoquaient jamais les catastrophes les plus noires. Les quotidiens racontaient simplement la vie des gens des champs ou des usines… Il y avait bien quelques exceptions : « Ici Paris » ou « France Dimanche ». Les démêlés de Brigitte Bardot ou de Lollobrigida avec les vedettes de cinéma, les mariages princiers les plus outranciers faisaient la Une de ces gazettes qui étaient rares et chères. Pour se les procurer, il fallait se rendre à Ambazac… Ce n’était pas tous les jours que Thérèse allait là-bas. Depuis la Libération, les Baillot étaient abonnés à « l’Écho du Centre » et au journal des paysans « La Terre »… C’était ce dernier le préféré de Thérèse. Le dimanche après-midi, elle s’asseyait à l’ombre du tilleul ou, en hiver, près de la fenêtre de la cuisine et elle lisait « La Terre » du début à la fin. Elle y apprenait de très nombreuses nouvelles sur des sujets les plus divers : la santé, la cuisine, les droits juridiques, les modèles de tricots, le jardinage… « La Terre » était un journal familial formidable qui paraissait chaque semaine et renseignait les paysans sur les cours du bétail. On y trouvait les prix pratiqués à Parthenay, aux Hérolles, aux Halles de Paris… et puis il y avait ces rubriques inoubliables, illustrées de petits dessins humoristiques : « à chacun sa vérité » et surtout les « Coups de pioche »… Thérèse adorait ces articles courts et incisifs qui remettaient les choses à leur place et, en peu de mots, disaient la vérité : la vérité qui fâche les puissants et les riches mais que les gens du peuple apprécient. « La Terre » était un hebdomadaire formidable qui prenait bien une heure ou deux de l’après-midi pour être lu. Un autre journal plaisait énormément à Thérèse. Il aurait pu être un intrus dans une famille de communistes qui n’allaient jamais à la messe et n’entraient guère à l’église. Ce journal était un mensuel paroissial fondé par l’abbé Langlade, curé de Boisseuil et d’Aureil. Ce journal convenait aux paysans parce qu’il s’appelait « Le Sillon » et rappelait, comme « La Terre », la vie rurale si importante autrefois. Tracer un sillon bien droit et bien profond et se retourner en fin de parcours, n’était-ce pas le but de toute une vie ? Se faire honneur avec si peu de choses ?... « Le Sillon » était le journal qui rapportait à Thérèse la vie locale des communes des alentours, les naissances, les mariages et les décès… Louis Baillot n’était pas allé à l’église pour rejoindre la terre des ancêtres mais le curé d’Ambazac avait tout de même tenu à signaler sa disparition à ses lecteurs… Louis Baillot avait refusé les obsèques religieuses mais il avait eu les honneurs du « Sillon ». Monsieur le Curé avait écrit : « Louis Baillot nous a quittés… à son épouse, à sa fille et à toute sa famille, nous présentons nos condoléances émues et nos regrets éternels. » Thérèse ne fréquentait pas les églises mais elle avait décidé d’écrire, tout de suite, une petite lettre à Monsieur le Curé pour le remercier. En 1967, on pouvait bien avoir des idées opposées sans pour autant s’étriper. En ce temps-là, les gens de bonne foi se respectaient, s’aimaient… Chez les Baillot, il y avait un long passé de refus de la religion mais tout de même… Il y avait aussi une certaine idée de la France qui associait les uns et les autres dans un même élan patriotique. Thérèse se rappelait que des prêtres avaient pris des risques pour prévenir les maquisards et éviter le pire, cacher des Juifs et des incrédules, tromper l’ennemi… Des prêtres, des religieuses avaient menti aux Allemands et aux SS pour épargner des vies humaines… Ces hommes et ces femmes avaient une haute idée de la France et forçaient l’admiration de celles et de ceux qui ne croyaient pas au Ciel. « Le Sillon » était ce journal lu dans chaque maison du Limousin que l’on aille à l’église ou que l’on n’y aille point. « Le Sillon » était un trait d’union et il serait maintenant le compagnon de Thérèse. Oui, elle préférait lire « Le Sillon » que regarder la télévision…

    Lire serait maintenant l’occupation principale de cette femme demeurée seule après la disparition de son compagnon. Lire serait un réconfort, une joie, une évasion… Lire et comprendre ! Thérèse ne voulait pas seulement lire des romans à l’eau de rose, elle s’intéressait aussi aux livres actuels, ceux qui parlaient de la société de son temps et voilà que Camille lui avait porté le dernier Jean-Jacques Servan-Schreiber : « Le défi américain »… Jean-Jacques Servan-Schreiber vantait les mérites de la nouvelle société que les États-Unis voulaient imposer au monde. « Le défi américain » ? Jean-Jacques Servan-Schreiber prétendait que les dirigeants des États-Unis d’Amérique voulaient le bien de tous et que ce bonheur serait celui du progrès technologique… La télévision en était le plus bel exemple. Thérèse n’était qu’une paysanne ; elle n’avait pas eu la chance, à la fin du XIXe siècle et dans les toutes premières années du XXe , de poursuivre ses études comme ses filles… Elle avait seulement son certificat d’études, celui que l’on passait à 12 ans… En 1967, il y avait déjà cinquante ans qu’elle avait été convoquée à l’école primaire d’Ambazac pour y subir la terrible épreuve. Thérèse avait réussi… Seulement voilà, cela faisait cinquante ans… Thérèse Baillot pensait que Jean-Jacques Servan-Schreiber se trompait avec son « défi américain ». Elle, la paysanne retraitée de Saint-Pierre-la-Montagne, ne pouvait pas imaginer cette société où la technologie remplacerait les sentiments, la fidélité, l’attachement à la terre, le travail, le refus du gain… Jean-Jacques Servan-Schreiber prétendait justement, que c’est l’appât du gain qui mènerait les gens… Ici, sur ces lopins de terre, les Baillot avaient trimé de l’aube au coucher du soleil et ils n’avaient rien gagné… Ils avaient seulement soigné leurs bêtes et pris soin de la terre… L’appât du gain ? Thérèse était convaincue que l’argent ne pouvait faire le bonheur et même que, bien au contraire, il contribuait à semer la zizanie et la misère… Elle avait vu tant de familles où on s’était déchiré pour quelques pièces d’or, une vieille pendule comtoise, une armoire… Heureusement, aux Cailloux Blancs, Thérèse n’avait pas eu à connaître ces affres de succession. Ils avaient si peu et, maintenant, en 1967, elle avait encore moins… Elle avait travaillé toute sa vie depuis l’âge de 12 ans… Oui, cela faisait bien soixante ans qu’elle travaillait pour toucher une maigre pension… Tous les trimestres, le facteur de Saint-Pierre lui portait un mandat de la Caisse d’Assurance Agricole de la Haute-Vienne. La Caisse avait son siège au 70 de la rue Montmailler, non loin de la gare des Charentes… Au décès de Louis, Thérèse avait dû s’y rendre pour régler quelques papiers : une employée qui n’était pas loin de la retraite elle aussi et portait encore une blouse bleu pâle, lui avait parlé de pension de réversion… La réversion ? C’était en réalité une petite somme qui lui revenait au décès de Louis et qui s’ajouterait aux quelques billets que le facteur lui porterait tous les trois mois.

    – Signez là ! disait le préposé.

    Thérèse signait le mandat, recomptait les billets et laissait les pièces au facteur. C’était le pourboire de l’employé de la Poste. C’était l’habitude encore en 1967…

    – C’est pour vous, facteur ! disait Thérèse. Vous boirez bien un verre ?...

    Thérèse ouvrait la porte du buffet, sortait un verre qui avait contenu de la moutarde et qui portait encore de jolis dessins des fables de La Fontaine… Elle tirait du placard la bouteille et disait au facteur :

    – Servez-vous ! On n’est jamais mieux servi que par soi-même… Regardez facteur ce qui est écrit sur votre verre : on ne prête qu’aux riches… Ce n’est pas moi qui le dis, c’est Jean de La Fontaine !

    Le facteur, qui n’était pas allé beaucoup à l’école, ne se souvenait pas de Jean de La Fontaine. Un jour, il demanda à Thérèse :

    – Ce Jean de La Fontaine… vous l’avez connu ? Où habitait-il donc ?... Il n’y a plus de maison qui porte ce nom…

    – Mon pauvre homme ! Ne le cherchez point ! Jean de La Fontaine ? Il vivait au XVIIe siècle…

    – Au XVIIe siècle ? Tonnerre de Dieu !... ça ne doit pas être hier ! Comme le temps passe vite… et je me laisse aller… Allez Thérèse, au revoir !

    Et le facteur ressortait, enfourchait sa bicyclette et disparaissait. En 1967, il était encore des facteurs qui allaient à bicyclette mais déjà quelques préposés étaient motorisés ; ils avaient des mobylettes et même des 4 L… Oui, des 4 L de la Régie Renault que le général de Gaulle avait nationalisée en 45 pour punir Louis Renault de sa collaboration avec l’Allemagne hitlérienne. Thérèse se souvenait de tout cela, elle ne pouvait imaginer que les Français auraient la mémoire si courte et, qu’un jour, le Centre de la Mémoire d’Oradour serait condamné pour avoir voulu afficher une photographie de la compromission…

    À l’horloge des Cailloux Blancs, le tic-tac continuait et, chaque semaine, Thérèse remontait les poids de fonte qui assuraient imperturbablement le mécanisme. Malgré la disparition de Louis, le temps continuait à s’écouler. On avait seulement arrêté l’horloge deux ou trois jours… La vieille pendule était repartie. La roue du temps tournait… André Malraux s’était mis à rédiger ses mémoires. L’Ombre rouge aurait pu rappeler à l’auteur de « La condition humaine » quelques vérités… André Malraux était ministre de la Culture du général de Gaulle. Dans les années 30, il avait montré un goût certain pour la Culture et le patrimoine archéologique des temples du pays du Mékong. Là-bas, au plus profond du Cambodge, André Malraux avait mené des fouilles pour son propre compte… Il avait été condamné pour les vols d’œuvres d’art et d’objets anciens… Une pacotille ! Un voleur devenu Ministre ! Jean de La Fontaine n’avait point écrit cette fable mais elle aurait été la bienvenue en couleur et en relief sur les verres qui contenaient la moutarde de Dijon. La moutarde serait peutêtre montée au nez du ministre si on lui avait dit, qu’en Espagne aussi, il avait chapardé des tableaux et des sculptures dans les églises à l’heure où Franco serrait à la gorge la République du Front populaire. Le Front populaire ? André Malraux s’en moquait bien… La guerre d’Espagne et celle qu’Hitler ferait à la France lui convenaient parfaitement pour organiser son trafic vers Monte-Carlo… Là-bas, derrière le rocher qui surplombe la baie, il pourrait négocier le fruit de ses « exploits »… L’Ombre rouge avait connu Malraux dans ces années de guerre en Corrèze et en Dordogne. Elle l’avait surpris menant la belle vie au grand jour… Elle avait moins apprécié quand l’homme de lettres avait rompu avec son épouse, une Juive… et festoyé avec les hautes autorités allemandes de Paris… Quand le colonel Berger avait soudainement fait son apparition, Camille avait bondi et organisé son arrestation, son enlèvement… À l’heure où Étienne Fajon tenait une réunion en septembre 44 à Limoges, le commandant Soleil et ses hommes avaient pris livraison du faux colonel Berger et l’avaient conduit au plus profond des bois du Périgord. Seulement voilà, un caillou s’était trouvé sur le chemin et avait donné l’ordre de relâcher le magouilleur. Ce caillou, Camille le connaissait aussi et n’avait jamais compris pourquoi il siégeait encore à ses côtés à l’Assemblée Nationale… Malraux écrivait ses mémoires et Thérèse avait émis l’idée de les lire. Camille avait dit doucement à sa mère :

    – Ce ne sont pas vraiment des mémoires ! Ce sont plutôt des anti-mémoires… Tu vois, ma chère Maman, Malraux est un traître et il souhaite ardemment que le temps efface la vérité. Je crois qu’il aura gain de cause mais je pense aussi que l’Histoire est têtue et qu’elle aura sa revanche. Un jour viendra où les Français sauront la vérité et comprendront que celui qui avait eu le prix Goncourt n’était qu’un voleur et qu’un magouilleur. Oui, la vérité triomphera : le colonel Berger a bien existé mais ce n’était pas André Malraux, c’était Roland, son demi-frère… Je l’ai bien connu ! C’était un gars valeureux. Seulement, il a été abattu… dans des circonstances troubles. Si on savait la vérité…

    – Oui, si on savait la vérité, ma fille ! répondit doucement Thérèse. Si on savait la vérité… Nous pouvons bien demander à la connaître… Yvonne ? Où est-elle donc passée ta petite sœur ?...

    – Je te promets, petite mère, que je la chercherai et j’espère que je la trouverai enfin…

    – Seulement, je ne serai plus là ! rétorqua Thérèse. Ton père est parti avant de savoir… Il aurait tellement aimé…

    – Je sais Maman ! J’aurais aimé lui dire mais je le jure sur la tête des enfants : je n’ai rien trouvé encore. Je chercherai…

    Louis Aragon avait lui aussi, de son côté, cherché à savoir davantage sur ce qui se passait de l’autre côté du rideau de fer. Le rideau de fer ? C’était désormais l’appellation que l’on donnait à la frontière qui séparait les pays de l’Est du monde occidental. Le rideau de fer… c’était tout de même une curieuse dénomination ! Un rideau… du fer ! Le monde était divisé en deux blocs et, pourtant, ceux qui croyaient détenir la vérité se trompaient… Louis Aragon commençait à deviner ce qui n’allait pas chez les siens et voilà qu’il publiait en cette fin d’année 67 : « Blanche ou l’oubli ». Un roman-vérité ! Les premières confessions… Une fidélité à toute épreuve à l’idéal socialiste mais, avant tout, à l’humanisme que l’on n’aurait jamais dû perdre de vue ! Thérèse adorerait ce livre et le relirait maintes et maintes fois. Ainsi les livres combleraient les jours tristes de la vie qui s’écoulait… Au village des Cailloux Blancs, jamais plus on n’entendrait la voix de Louis Baillot ni ses sabots ferrés sur les pierres et les rochers qui avaient porté ses pas.

    ***

    Louis Baillot était donc parti pour toujours et le village des Cailloux Blancs avait perdu un peu de son âme. Dans la petite ferme qui avait vu naître Camille et Yvonne, demeurait désormais Thérèse, la compagne fidèle de Louis. Il était très dur d’admettre qu’elle serait désormais une veuve et, pourtant, Thérèse avait connu tant de veuves dans sa jeunesse ! En effet, elle avait côtoyé toutes celles vêtues de noir qui avaient perdu un époux dans les atroces combats de la Grande Guerre. Elle avait eu finalement de la chance : elle avait épousé Louis au lendemain du 11 novembre 1918 et ils avaient, ensemble, construit une vie bien longue et bien droite… Thérèse avait marché dans l’ombre de Louis et maintenant, elle se retrouvait en plein soleil !

    Au lendemain de l’enterrement de son père, Camille était restée quelque temps aux Cailloux Blancs. Il y avait des démarches administratives à entreprendre et Thérèse n’en aurait pas eu le courage. Naturellement, Camille s’était occupée de tout… Seulement voilà, la rentrée parlementaire approchait et son Parti l’appelait à Paris. À regrets, Camille avait dû embrasser sa mère en lui promettant de revenir bientôt et elle lui avait fait le plus beau des cadeaux que l’on puisse faire dans ces circonstances très difficiles : elle lui avait confié Pierre et Françoise pour quelques jours de vacances. C’était sa façon à elle de consoler sa maman en lui laissant ses petits-enfants.

    Pierre et Françoise connaissaient bien la maison des Cailloux Blancs… Seulement voilà, ils ne l’avaient jamais fréquentée en l’absence de leur grand-père. À l’âge de ces jeunes et, en ce temps-là, il était très difficile d’admettre la disparition d’un être cher. La jeunesse ne comprenait pas le décès brutal d’un grand-père, d’une grand-mère… On la tenait encore éloignée de la mort ! Pierre et Françoise avaient cependant bien compris qu’ils ne reverraient jamais Louis Baillot, ce paysan limousin en sabots de bois et en pantalon de velours. L’homme avait disparu pour toujours… Alors, ils allaient essayer de le retrouver avec Thérèse, la grandmère et pour celle-ci, ce serait une belle aubaine. Combien de fois elle aurait pleuré et éclaté en sanglots si les petitsenfants n’avaient point été là ? Comment aurait-elle pu faire son deuil toute seule dans cette maison profondément silencieuse des Cailloux Blancs ? Camille avait été reprise par ses obligations de Députée du Val-de-Marne et, bien sûr, elle téléphonait chaque soir à sa mère pour lui parler gentiment et prendre des nouvelles. C’était un rituel qui allait maintenant s’instaurer pour longtemps. La fille et la mère avaient des relations très spéciales que personne ne pouvait percer. Elles étaient les seules à se souvenir d’Yvonne la petite sœur. Victor et les enfants n’avaient point connu Yvonne, ils en avaient seulement entendu parler… La jeune agent de liaison, disparue au cours de la seconde guerre mondiale, était bien de la famille mais ils n’avaient jamais pu l’embrasser, la serrer dans leurs bras et entendre sa voix, son rire… Seules Thérèse et Camille se souvenaient encore. Le drame avait voulu que Louis Baillot parte de ce monde avant le retour de la petite fille qu’il avait confiée à Jacques Duclos. Jacques Duclos était présent le jour des obsèques de Louis Baillot mais il n’avait pas dit un mot à Thérèse de cette curieuse disparition. Avait-il oublié ? Ignorait-il la destinée de la jeune agent de liaison qu’il avait lui-même recrutée ? Dans la clandestinité, le triangle de direction du Parti Communiste savait tout…

    Le départ de Camille avait causé un grand vide dans la maisonnée des Cailloux Blancs mais la présence de Pierre et de Françoise avait opéré comme un miracle : Thérèse était enchantée d’avoir ses petits-enfants pour elle toute seule ; elle désirait ardemment les choyer. Ce désir si profond avait tout simplement essuyé les larmes qui avaient inondé ses joues déjà ridées à l’heure où elle avait appris la disparition de Louis. Le beau visage de Thérèse s’était soudainement illuminé à l’idée de garder pour elle ses « petits ».

    Les « petits » : c’étaient en Limousin les enfants, les êtres chers auxquels on tient par-dessus tout et qu’on se doit de protéger. Thérèse avait conscience du beau cadeau que lui faisait sa fille en lui laissant les petits pour quelque temps. Alors, elle les gâterait… N’allez pas imaginer qu’elle allait les abîmer comme on pourrait le comprendre. Gâter des enfants : c’est leur offrir quelques délices de la vie, une très bonne cuisine ou des histoires du temps passé… Thérèse s’employa à mijoter les bons produits de son jardin : des légumes et des fruits frais proprement lavés. Un poulet rôti… un lapin sauté au vin blanc… Il y avait aussi ces œufs que Françoise adorait dénicher. En réalité, les poules de Thérèse pondaient toujours dans le même nid sur la paille fraîche qu’elle avait disposée en n’oubliant pas d’y cacher un charbon de bois conservé de la bûche de Noël… Chez les Baillot, on était communiste depuis la Révolution d’Octobre mais on croyait encore aux anciennes pratiques du Limousin. Survivre et aller de l’avant !

    Françoise adorait découvrir les œufs frais de la journée et les apporter avec une certaine fierté à la grandmère dans ce petit panier d’osier que le grand-père avait tressé jadis. Un petit panier garni d’œufs… Une omelette qui rissolerait longtemps dans la mémoire de ces adolescents qu’étaient Françoise et Pierre ! L’omelette de la grand-mère cuite dans la grande poêle sur le trépied posé au dessus du brasier… Une omelette à l’ancienne, onctueuse, savoureuse, baveuse… Une omelette de grandmère qui régalait les petits-enfants !

    Ainsi allait la vie aux Cailloux Blancs après le grand départ de Louis Baillot. Françoise ramassait les œufs et Pierre s’occupait au jardin. Le jardin du grand-père… c’était presque un champ car Louis avait été un vaillant ! Un champ potager où il y avait de tout ! Louis Baillot savait cultiver toutes sortes de légumes et connaissait les diverses variétés qui poussaient dans son jardin. Si Pierre avait dû apprendre tout cela en une ou deux journées, sa tête aurait éclaté ! Lui qui venait d’entrer à l’École Normale Supérieure prenait ainsi conscience de l’immense savoir de son grandpère et pourtant celui-ci n’était qu’un paysan, un modeste paysan du Limousin qui avait emmagasiné une somme colossale de connaissances en matière d’agriculture et

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