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L' ANTIQUAIRE
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Livre électronique362 pages4 heures

L' ANTIQUAIRE

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À propos de ce livre électronique

Une histoire louche… Très, très louche… Ça vous dit ?
L’hélicoptère de l’aventurier Jacques Dupont et de la mannequin internationale Juliette Raymond s’écrase à Yellowstone. Dépêché sur les lieux, l’agent spécial du FBI, Larry Anderson, découvre avec horreur qu’il manque un passager, tandis que d’autres sont morts avant l’écrasement. Y aurait-il, par hasard, un meurtrier qui rôde dans les montagnes Rocheuses?

Un an après le dénouement aussi spectaculaire qu’inattendu de l’enquête que nous l’avons vu mener dans le roman Les Étrangers, l’agent spécial pourra-t-il prouver sa valeur?
LangueFrançais
Date de sortie4 avr. 2024
ISBN9782925371175
L' ANTIQUAIRE
Auteur

Patrick Degrâce

Patrick Degrâce est originaire de la ville portuaire de Caraquet, en Acadie. Enchaînant divers emplois dans le milieu industriel et du commerce en ligne, il se lance dans l’écriture durant ses études à l’Université de Montréal. À présent, il œuvre à titre de chercheur indépendant, tant en archéologie qu’en histoire.

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    Aperçu du livre

    L' ANTIQUAIRE - Patrick Degrâce

    cover.jpg

    Table des matières

    Chapitre 1

    Chapitre 2

    Chapitre 3

    Chapitre 4

    Chapitre 5

    Chapitre 6

    Chapitre 7

    Chapitre 8

    Chapitre 9

    Chapitre 10

    Chapitre 11

    Chapitre 12

    Chapitre 13

    Chapitre 14

    Chapitre 15

    Chapitre 16

    Chapitre 17

    Chapitre 18

    Chapitre 19

    Chapitre 20

    Chapitre 21

    Chapitre 22

    Chapitre 23

    Chapitre 24

    Chapitre 25

    Chapitre 26

    Chapitre 27

    Chapitre 28

    Chapitre 29

    Chapitre 30

    Chapitre 31

    Chapitre 32

    Chapitre 33

    Chapitre 34

    Chapitre 35

    Chapitre 36

    Chapitre 37

    Chapitre 38

    Chapitre 39

    Chapitre 40

      Chapitre 41

    Chapitre 42

    Chapitre 43

    Chapitre 44

    Chapitre 45

    Chapitre 46

    Chapitre 47

    Chapitre 48

    Chapitre 49

    Chapitre 50

    Chapitre 51

    Chapitre 52

    Chapitre 53

    Chapitre 54

    Chapitre 55

    Chapitre 56

    Chapitre 57

    Chapitre 58

    L’antiquaire

    Patrick Degrâce

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    Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

    Titre: L’antiquaire / Patrick Degrâce.

    Noms: Degrâce, Patrick, 1984- auteur.

    Identifiants: Canadiana (livre imprimé) 20230071333 | Canadiana (livre numérique)

    20230071341 | ISBN 9782925371151 (couverture souple) | ISBN 9782925371168 (PDF)

    | ISBN 9782925371175 (EPUB)

    Classification: LCC PS8607.E472 A65 2024 | CDD C843/.6— dc23

    Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada (FLC) pour nos activités d’édition.

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    Conception graphique de la couverture: Jim Lego

    Direction rédaction: Marie-Louise Legault

    ©  Patrick Degrâce, 2024 

    Dépôt légal  – 2024

    Bibliothèque et Archives nationales du Québec

    Bibliothèque et Archives Canada

    Tous droits de traduction et d’adaptation réservés. Toute reproduction d’un extrait de ce livre, par quelque procédé que ce soit, est strictement interdite sans l’autorisation écrite de l’éditeur.

    Imprimé et relié au Canada

    1re impression, mars 2024

    L’or est à l’humain, ce que le sang est au requin.

    Chapitre 1

    La reine Élisabeth de Belgique et son fils commençaient à souffrir de la chaleur. C’était en novembre, une période habituellement fraîche en Égypte, mais ils étaient entassés dans une tranchée exiguë. La poussière omniprésente, le bruit des pioches et l’odeur de la sueur amplifiaient l’atmosphère fébrile qui régnait au chantier archéologique de Howard Carter. Malgré tout, les invités ne se plaignaient pas. Ils vivaient un moment historique, bien plus excitant que ce que leur offrait généralement le décorum de la cour royale. Lord Carnavon, le commanditaire des travaux, fixait l’entrée du tombeau.

    La sépulture avait été repérée le 4 novembre précédent. L’archéologue parvint devant tous ses hôtes, en date du 26 novembre, à dégager la porte menant à un couloir, puis à un mur en plâtre qui dissimulait un autre passage. Un trou y fut percé. Après s’être assuré qu’il n’y avait aucun gaz toxique à l’intérieur, Howard Carter y jeta un coup d’œil.

    — Voyez-vous quelque chose ? lui demanda lord Carnavon.

    — Oui, des merveilles ! répondit Carter, le souffle coupé.

    C’est ainsi que l’un des plus fabuleux des trésors fut découvert.

    L’inventaire de l’archéologue compterait plus de 5000 objets. Dans l’antichambre et une annexe, il y avait des attributs, des armes, des vêtements, cinq lits, de la nourriture, du vin, de la vaisselle, des cosmétiques, des jeux, des ouchebtis et des instruments de musique. Il s’agissait surtout des mêmes objets que le pharaon aurait utilisés dans sa vie terrestre. La chambre funéraire et la salle du trésor dépassaient l’entendement grâce à la découverte de la momie intacte du souverain, de son sarcophage en plusieurs parties imbriquées, de son magnifique masque funéraire en or, de vases canopes, de bijoux et d’une dague.

    L’exploration de ce tombeau provoqua une frénésie et une fascination toujours d’actualité. La mort prématurée de lord Carnavon, le 5 avril 1923, contribua quant à elle à nourrir la croyance selon laquelle une malédiction venait avec l’extraordinaire découverte.

    Chapitre 2

    De nos jours.

    Le printemps était morose. Même à Denver, le mercure dépassait rarement les vingt degrés Celsius. Dans les montagnes Rocheuses, de vastes bancs de brouillard avaient persisté jusqu’à la semaine précédente. On était en mai, et l’on se croyait encore en mars. Les météorologues prévoyaient certes un été hâtif, mais il faisait toujours frais et seules quelques éclaircies entretenaient l’espoir d’un temps meilleur.

    L’agent spécial du FBI Larry Anderson habitait les lieux depuis un an, officiellement pour des raisons professionnelles. Il était tout de même satisfait d’avoir quitté son Texas natal, dont les politiciens et la violence le dégoûtaient. Comme l’agglomération Forth Worth-Dallas, Denver possédait un bureau du FBI et, surtout, l’une des dix agences régionales du NTSB (National Transportation Safety Board), chargées de la sécurité du transport aux États-Unis. C’est en tant que spécialiste de l’aérospatiale que Larry était fréquemment réclamé par cet organisme lorsque les enquêteurs soupçonnaient des gestes criminels.

    L’agent était monté à bord d’un vol de Delta Airlines en partance de Salt Lake City après avoir été appelé d’urgence par son chef le matin même. Ce dernier ne lui avait transmis que cette information: il devait enquêter sur l’écrasement d’un hélicoptère ayant fait plusieurs victimes, possiblement à la suite d’un acte criminel. Larry n’était pas content de devoir quitter le Congrès international de la sécurité aérienne. Heureusement, il avait fait sa présentation le jour précédent. Il avait même eu le temps d’assister à une table ronde où il était question d’un des sujets qui l’intéressaient le plus: la sécurité du tourisme spatial naissant. De toute façon, les ordres sont les ordres.

    Juste avant le décollage, son bureau lui fit suivre quelques informations supplémentaires, mais qui ne lui permirent guère d’avancer beaucoup plus. En revanche, ses soupçons furent confirmés: c’est Judith Lopez qui avait réclamé sa présence sur le site. Larry respectait beaucoup le travail de cette enquêtrice. Lorsqu’ils travaillaient ensemble, leurs conclusions ne découlaient jamais de simples intuitions, mais bien de preuves tangibles que cette femme savait exploiter. Ils s’associaient en général deux ou trois fois par an. Larry avait enquêté avec d’autres spécialistes du NTSB, mais c’est avec Judith que les choses se déroulaient le mieux. L’efficacité et la communication couronnaient de succès les enquêtes qu’il menait avec elle. Sauf dans un malheureux cas.

    L’humiliation ressentie tout au long de l’enquête sur les deux disparitions de Burt Hickmore leur était encore difficile à digérer. Larry se réconfortait toutefois en se disant que sa thèse voulant que cet homme d’affaires ait simulé sa mort était la bonne dès le départ. Or, qui aurait pu deviner un dénouement aussi spectaculaire ? Au moins, l’enquête avait pu contribuer à mettre sous les verrous ce bandit de Tomos Davies{1}.

    Larry avait surtout enquêté dans le domaine de l’aérospatiale depuis qu’il avait pu mettre la main au collet du Touriste-bombardier en 2018. Il s’agissait du point d’orgue de sa carrière, l’ayant fait passer du statut d’agent incapable d’utiliser pleinement son savoir et ses ressources à celui de sommité dans son domaine.

    Il recevait d’ailleurs des redevances substantielles pour la série télévisée produite à partir de cette enquête. Sa femme avait adoré, mais elle trouvait que l’acteur choisi, Harold Parker, ne ressemblait pas beaucoup à son mari. Elle considérait aussi que le réalisateur n’avait pas suffisamment mis l’accent sur la peur causée par celui qui avait fait trembler le monde durant six mois. De son côté, Larry avait aimé la finale, qui correspondait presque exactement à ses souvenirs. La remise du terroriste avait été reproduite dans les moindres détails.

    L’agent spécial avait presque terminé la lecture du journal lorsque l’avion se posa à 12h18 à l’aéroport international de Bozeman-Yellowstone, dans l’État du Montana. Le terrain d’aviation se situait au centre d’une grande vallée des Rocheuses. À la sortie du terminal, l’enquêteur n’avait pas de temps à perdre, car il lui restait encore plus d’une heure et demie de route à parcourir avant d’atteindre sa destination. Il se rendit donc immédiatement à un comptoir de location de véhicules. Une fois l’affaire réglée, il emprunta l’Interstate 90 vers l’est et contourna la ville de Bozeman. Il s’aventura ensuite en terrain montagneux, où la route se faisait plus belle. Parvenu à Livingston, il s’engagea sur l’autoroute 89 en direction du Wyoming et de sa destination, le parc national de Yellowstone.

    Le paysage devint rapidement rural. La route ne comptait qu’une voie dans chaque direction. Durant le trajet, Larry ne rencontra qu’une seule bourgade, soit Gardiner.

    Un peu plus d’une heure et demie après avoir quitté l’aéroport, il arriva en vue du parc. Bien qu’il voyageât souvent dans son enfance, il n’avait jamais visité cet endroit. Faisant entorse à son professionnalisme habituel, il gara son auto près de l’entrée et en sortit pour se dégourdir les jambes. Il prit une grande bouffée d’air et regarda autour de lui. Le pays était sec, mais majestueux. Une végétation basse, de l’herbe et quelques arbres tapissaient les flancs de montagne. Exception faite de la route, il n’y avait aucune construction en vue. Un touriste pouvait donc profiter du même panorama qui s’offrait à un Autochtone quelque 11000 ans plus tôt. Deux minutes tout au plus après s’être arrêté, Larry reprit le volant. Il savait que plusieurs jours de travail acharné l’attendaient.

    Après quelques kilomètres de route de plus, il atteignit le fort Yellowstone, qui abritait désormais l’administration du parc et une bonne partie de l’hébergement. Il n’était pas nécessaire de s’y arrêter, puisque les agents du FBI et du NTSB avaient obtenu la pleine autorité sur l’enquête ; l’administration et la sécurité du parc ne faisaient qu’y collaborer.

    Larry emprunta le chemin Grand Loop vers l’est du gigantesque domaine. Ce faisant, il entrevit les sources chaudes Mammoth, mais malheureusement, il n’avait pas le temps de s’y arrêter. Il lui restait en effet environ 40 minutes à parcourir avant d’atteindre le point de rencontre. Heureusement, ce n’était pas encore la haute saison touristique et la circulation était fluide.

    ***

    Ayant presque atteint sa destination, l’agent spécial appela comme convenu son contact peu après avoir gagné Tower Junction.

    — Judith ?

    — Larry ? As-tu trouvé le chemin ?

    — C’est compliqué, cet endroit. Il y a tellement de sentiers ! J’ai hâte que le bureau nous procure des GPS ! Les applications sur les téléphones cellulaires fonctionnent mal par ici.

    — Je comprends. As-tu passé le lieu-dit The Narrows ?

    — Oui !

    — Bon, tu es sur la bonne voie. Tu vas enjamber un pont en pierre et voir un magasin général sur ta gauche.

    — Je suis justement sur le pont.

    — Après l’avoir traversé, prends le premier chemin à droite !

    — Entendu !

    L’automobile de Larry gravit péniblement la route en terre, puis parcourut un terrain de camping avant de virer à droite sur un chemin isolé. Deux minutes plus tard, il aperçut Judith sortir de la forêt en lui faisant signe. Ils ne s’étaient pas rencontrés depuis un an. La dernière fois remontait à l’enquête sur la disparition de Burt Hickmore, une débâcle qu’ils souhaitaient tous deux oublier. Ils avaient bien fait parler d’eux dans les médias et avaient reçu d’alléchants cachets pour leurs entrevues. Au moins, le disparu s’était réconcilié avec eux juste avant sa mort prématurée. Paul Landry les avait également contactés pour obtenir des entretiens avec eux en prévision de la publication de ses mémoires. C’est toutefois le fait d’avoir enquêté sur du vent qui était difficile à prendre pour les deux professionnels{2}.

    Larry sortit de l’automobile. Judith et lui allaient se faire la bise, mais s’arrêtèrent net. Un subalterne de l’enquêtrice l’avait suivie hors de la forêt.

    — Viens, l’épave est tout près d’ici, dit Judith avant de poser le regard sur les chaussures de Larry. Oh ! Tu aurais dû mettre des bottes de randonnée !

    Pour une fois que l’inspecteur était sur son 31 !

    Larry suivit sa collègue et l’autre agent à travers la forêt au sol très irrégulier. Il manqua plus d’une fois de trébucher sur une racine ou une pierre. Le plus difficile était toutefois de passer à travers les branches sans se blesser au visage et d’éviter, au passage, de fouetter la personne derrière soi.

    Ils atteignirent le site où était survenu l’écrasement après trois minutes de marche ; la distance parcourue était très faible, mais il fallait monter une crête avant de redescendre au site. L’humidité de l’air n’aidait en rien. Larry avait à peine entrevu l’épave entre les arbres qu’il sut que quelque chose d’étrange s’était produit. L’hélicoptère, à première vue un Airbus H155 ou un Bell 430, semblait être tombé tout droit du ciel. Normalement utilisé par des armées ou des services de police, l’appareil était massif. Ses patins étaient écrasés et la cellule avait subi des dommages, mais il n’y avait ni cratère ni champ de débris. Le plus insolite était le peu de dégâts aux pales. Elles ne tournaient donc plus lorsque l’appareil avait terminé sa chute. L’épave, en revanche, avait brûlé. On remarquait toutefois des vestiges de sa livrée d’apparence civile, blanche avec des bandes bleues.

    Larry était déjà en train de visualiser les causes possibles de ce mystérieux accident. Vraisemblablement un malaise du pilote ou une panne de moteur. Il regarda tout autour de lui avant de se tourner vers Judith, devinant qu’elle avait beaucoup d’informations à lui fournir.

    — Notre chantier semble un peu pêle-mêle, expliqua cette dernière, mais en raison de la densité de la forêt, nous venons à peine de nous frayer un chemin. Nous n’avons eu le temps que de couper quelques arbres et de commencer à installer le matériel.

    — Ne t’en fais pas, je sais que vous êtes des pros. Peux-tu me résumer ce que vous savez jusqu’à maintenant ?

    — Oui. Voilà… Comme tu peux le remarquer, l’hélicoptère s’est écrasé à la verticale. Nous n’avons même pas besoin d’analyser l’épave dans un laboratoire pour le prouver.

    Judith fit une pause. Larry lui semblait anormalement nerveux. Doucement, elle se rapprocha à un mètre de lui et poursuivit calmement.

    — Nous ne connaissons pas encore l’identité des cinq occupants. Un agent du parc nous a mentionné qu’une entreprise floridienne tournait un documentaire. Il pense qu’il s’agit d’eux. Les corps sont toujours dans l’habitacle, les ambulanciers n’ont fait que vérifier s’ils étaient en vie, ce qui n’est manifestement pas le cas. Aucun signal de détresse n’a été lancé. Outre pour ce motif, je t’ai fait venir pour une raison bien particulière. Selon l’immatriculation, l’hélicoptère appartiendrait à l’aventurier Jacques Dupont.

    Larry resta perplexe quelques instants. Au moins, il semblait s’être calmé.

    — Jacques Dupont ? répéta-t-il. Ça me dit quelque chose…

    — Oui, il s’est fait connaître grâce à ses recherches sur l’épave de la Santa Maria de Christophe Colomb. Il a aussi essayé de retrouver des tombes de rescapés de la colonie perdue de Roanoke.

    — Oui, maintenant je le replace. Euh… que faisait-il au Wyoming ?

    — C’est là que nous avons besoin de ton aide. Jacques Dupont documente ses aventures à outrance sur les réseaux sociaux, mais il y a un silence radio depuis deux mois. Cette situation et l’aspect inhabituel de l’accident me font dire que ce n’en est peut-être pas un.

    — Je vois...

    Larry sortit des gants chirurgicaux de sa poche et les enfila. L’avant de l’appareil se trouvait à sa gauche. Il faisait donc face au côté bâbord de l’hélicoptère, c’est-à-dire au côté opposé du siège du pilote. Il ouvrit la portière et jeta un coup d’œil à l’intérieur. La vue des cadavres calcinés lui fit fermer les yeux. Il ne s’était pas préparé mentalement à cette scène, trop préoccupé qu’il fût par les causes possibles de l’écrasement. Il rouvrit les yeux et eut un malaise. Il s’appuya sur le fuselage et en profita pour examiner le plancher de l’appareil. Il y nota les traces de pas laissées par les ambulanciers, un élément perturbateur à toute scène de crime, mais tout à fait acceptable. Il y avait des débris calcinés un peu partout, ainsi que quelques artéfacts identifiables: des boucles de ceinture, des pièces de monnaie, des lambeaux de documents... Larry suivit les jambes du pilote du regard, afin d’éviter de poser les yeux sur son visage. Il crut remarquer une entaille sur le côté droit de son cou, ce qui la rendait donc à peine visible du côté gauche de l’appareil, là même où il se trouvait.

    — Curieux, articula-t-il à voix haute.

    Il observa le pare-brise pour vite constater qu’il était fissuré. Il se retourna vers Judith pour lui demander:

    — Y a-t-il des dommages structuraux importants ailleurs que sur le bas de l’hélicoptère ?

    — Non, l’habitacle est presque intact.

    — Curieux, répéta Larry. C’est un Airbus H155, hein ?

    — C’est bien ça.

    L’inspecteur changea aussitôt de sujet, sans se retourner vers l’appareil.

    — Si tu le remarques bien, le pilote a une entaille au cou. Le verre n’aurait pas pu causer cette blessure, si l’on se fie à la direction de la force d’impact.

    Sans laisser le temps à Judith de réagir, l’agent spécial poursuivit son inspection visuelle, en se concentrant cette fois-ci sur les autres passagers. Son malaise s’atténuait s’il ne regardait pas les visages. Il compta bien cinq corps. Les deux sièges derrière celui du pilote étaient vides. Curieux. Il se déplaça vers sa droite pour mieux voir l’arrière de l’appareil. Il tenta d’ouvrir la porte arrière gauche, mais celle-ci était coincée. Pas grave, la vitre brisée lui permettait de bien voir à l’intérieur. La cabine des passagers de ce modèle comportait différentes configurations, dont celle qu’il avait sous les yeux: deux sièges pivotants faisant face à l’arrière et une banquette de trois places faisant face à l’avant. Trois cadavres se trouvaient sur ladite banquette. Larry ne put s’empêcher de regarder leurs visages.

    Sa nausée revint sans crier gare. Il fixa le plancher pour se changer les idées. Il y vit plusieurs objets fondus ou brûlés aux pieds des passagers, dont ce qui ressemblait à un sac et à une caméra de télévision. L’agent spécial porta ensuite son regard sur les bancs pivotants. L’un était vide, mais l’autre était rempli de matériel. Pourquoi ces gens déposaient-ils du matériel à leurs pieds alors qu’il y avait un siège vide ?

    — Judith, tes hommes ont-ils photographié l’intérieur de l’appareil et le plancher ?

    — Oui.

    Larry se précipita à tribord, donc côté pilote, suivi de sa collègue. Là, il parvint à ouvrir la porte sans problème, ce qui lui permit de se faufiler dans l’appareil. Il ferma les yeux et prit une grande inspiration, pour immédiatement le regretter. L’odeur était horrible. Il rouvrit les yeux et scruta le sol, puis dirigea son regard vers le siège pivotant vide. Il y trouva des débris qui avaient presque complètement résisté à l’incendie. Il s’approcha. L’un des restes était un morceau de manteau de pluie, facilement reconnaissable. L’autre siège pivotant, lui, était jonché de cendres et de fragments de toutes sortes, difficilement identifiables à première vue. Il y avait toutefois une pelle, une truelle et d’étranges tiges en métal, toutes pêle-mêle. Après une brève hésitation, Larry jeta un coup d’œil au pilote. Ce n’était pas le fruit de son imagination, l’homme avait bel et bien une entaille à la gorge. Il ressortit de l’appareil et annonça:

    — Judith, je crois qu’il y a eu au moins un meurtre dans cet hélicoptère. Peux-tu demander à tes agents et aux autres personnes présentes de se regrouper ? Je dois leur donner des instructions.

    Cinq minutes plus tard, tout le monde était attroupé tant bien que mal dans l’espace étroit aménagé à la hâte entre l’épave et la forêt. Le sol regorgeait de copeaux et de bran de scie. Leurs odeurs parvenaient presque à dissimuler la puanteur immonde de la carcasse juste à côté. Larry se racla la gorge et commença.

    — Bonjour à tous. Comme vous le savez peut-être, je suis l’agent spécial du FBI, Larry Anderson. Vous avez sûrement constaté que cet écrasement est assez étrange. Mon rôle est d’effectuer la liaison entre nos deux services, dans le cas où une enquête criminelle s’avérerait nécessaire. Je vous demanderais donc trois choses. Premièrement, tout élément inhabituel doit m’être rapporté immédiatement. Par inhabituel, j’entends la moindre chose qui ne semble pas à sa place ou qui vous rend mal à l’aise: arme à feu, traces de combat, preuve de sabotage, et ainsi de suite. Deuxièmement, je vois que plusieurs d’entre vous portent des gants. Aussi, je vous demanderais d’éviter à tout prix de toucher l’appareil et tout ce qu’il contient sans en porter. Troisièmement, tentez de vous déplacer dans un rayon de seulement dix mètres autour de l’appareil, ainsi que dans le sentier que vous avez emprunté pour venir ici. Le respect de ces règles sera bénéfique pour tous les aspects de l’enquête. Avez-vous des questions ?

    Un enquêteur s’apprêtait à lever la main, mais un autre le devança.

    — Oui, j’en ai une. Ou plutôt une observation.

    L’homme était l’un des employés du parc qui avait accompagné l’équipe. Il était étonnamment grand et mince.

    — Bien sûr. Quel est votre nom ?

    — Allan Green. J’ai vu un morceau de parachute dans un arbre.

    Cinq passagers pour sept sièges, se dit aussitôt Larry.

    — Quoi ? lâcha l’agent spécial plus fort qu’il ne l’aurait voulu. Si vous permettez, l’un de vos collègues avait aussi une question, mais évidemment, je vais aller vérifier votre trouvaille. Pourrez-vous m’indiquer l’endroit ? demanda-t-il avec un ton de voix plus approprié.

    — Oui, bien sûr.

    — Monsieur Anderson ? intervint Peter Thornton, l’autre enquêteur qui souhaitait obtenir le droit de parole. Je viens à peine de dégager l’espace autour du boîtier de la balise et comme c’est l’un des éléments les plus importants dans une telle enquête, je l’ai aussitôt évaluée. La balise a été désactivée. Ou du moins, elle était en position OFF. Soit elle n’a jamais été activée avant le vol, soit elle a été désactivée après l’écrasement.

    Judith était aussi stupéfaite que Larry.

    — Il y aurait normalement eu quelques émissions de signaux de détresse après l’écrasement si elle avait été en position ARM, expliqua l’enquêtrice. Malheureusement, aucun signal n’a été émis. Ce sont d’ailleurs les rares campeurs qui ont informé la sécurité du parc de l’écrasement. Il se peut aussi qu’un signal ait été émis, mais qu’il n’ait pas été capté en raison de la topographie. Ou, explication plus plausible, la balise était défectueuse. Une analyse plus poussée nous le dira. Mais le plus important est de déterminer pourquoi elle était fermée.

    — En effet, renchérit Larry. Il arrive parfois que les pilotes oublient d’actionner la balise avant le décollage.

    Après avoir remercié Peter Thornton pour cette précieuse information, l’agent spécial se retourna vers Judith.

    — Je sais que l’appareil est petit, mais est-ce qu’il y avait un enregistreur audio ?

    — Nous n’en sommes pas encore certains.

    Larry fit une discrète grimace avant de se tourner vers l’agent du parc.

    — Monsieur Green, montrez-moi où se trouve le parachute, s’il vous plaît.

    Larry et Judith suivirent l’homme sur une distance d’environ trente mètres, dans une prairie qui surplombait un torrent.

    — J’avais un appel urgent à prendre, expliqua l’agent, et je me suis égaré. Personne ne l’aurait sûrement trouvé autrement. Voyez, c’est ici.

    Allan Green pointa un petit bout de tissus blanc en haut d’un arbre. Des branches avaient été cassées, certaines étaient éparpillées sur le sol, d’autres pendant encore au tronc.

    — En fait, je ne suis pas certain qu’il s’agisse d’un parachute, mais le tissu m’en donne l’impression.

    — Avons-nous un escabeau ou une échelle ? questionna Larry.

    — Oui, nous avons une échelle dans le camion, répondit Judith.

    — D’accord. Judith, Monsieur Green, assurez-vous de ne pas vous approcher de l’arbre ; il y a certainement des traces de pas.

    Dix minutes plus tard, avec quelques éraflures de plus, Larry était retourné au pied de l’arbre avec le nécessaire. Il remarqua des empreintes au sol.

    — Allan Green devait rentrer au

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