Les poètes de langue d'oc: Les troubadours périgourdins et limousins
Par Michel Dupuy
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À propos de ce livre électronique
Michel Dupuy
Né en 1933, il est retraité des travaux publics. Il a déjà publié plusieurs ouvrages, notamment "Sur les traces de Jean Galmot", "La guerre de cent ans en Périgord", "Quand j'étais bidasse"
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Aperçu du livre
Les poètes de langue d'oc - Michel Dupuy
C’est des troubadours que viennent les premiers élans poétiques qui puisèrent dans les thèmes de l’amour courtois un sentiment d’émotion dont l’intensité et la profondeur ne cesseront de s’épanouir.
Encyclopédie Bordas
… trésors de cette Grèce humaine et chantante, de ce haut langage ancien roulant d’Italie à l’Espagne, du pays Maure au Poitou, une poésie dont secrètement je m’enivrais…
Aragon
Sommaire
Introduction
Arnaut Daniel
Arnaut de Mareuil
Aymeric de Sarlat
Bertran de Born
Elias Cairels
Elias de Fonsalada
Gausbert de Puycibot
Guiraut de Borneilh
Guilhem de La Tor
Guilhem de Salignac
Peire de Bragairac
Pierre de Bussinhac
Salh d’Escola
Arnault de Tintihac
Bernartz de Ventadour
Ebles lo Chantador
Gaulcem Faidit
Gui de Glotos
Joan d’Albusson
Les quatre troubadours d’Ussel
Ebles d’Ussel
Peire d’Ussel
Gui d’Ussel
Elias d’Ussel
Marie de Ventadour
Peire d’Alverhe
Peire de Vic
Uc de la Bacalaria
Postface
Introduction
Le troubadour ! Appellation issue de l’occitan trobador, celui qui trouve, qui compose, qui invente.
En créant une poésie lyrique bien spécifique, un genre littéraire inconnu jusqu’alors, les troubadours firent leur apparition vers l’an 1100 en Périgord et en Limousin, régions où le commun des mortels communiquait alors avec ses semblables en langue d’oc, l’occitan, dialecte considérée comme langue vulgaire et que l’on appelait « linga limosina », langue limousine. La langue noble était le latin employé par les intellectuels de l’époque, les clercs qui, seuls, savaient lire et écrire, le nom de clerc venant du latin cléricus qui signifie qui est instruit. A noter qu’il exista également des troubadouresses, on les appelait Troubaïritz.
Par opposition à oïl dans le nord de la France, oïl venant du gallo-roman o-il (celui-ci), dans le sud, le mot oc vient du latin hoc qui signifie cela. Ces deux mots sont devenus le oui utilisé dans toute la France La langue d’oïl était également nommée linga gallicana et les poètes qui l’utilisaient étaient appelés trouvères.
Au Moyen Age, durant longtemps la langue d’oc fut la langue vulgaire en Occitanie, mais, du fait sans doute qu’elle devint largement employée et notamment dans les cours par les seigneurs, elle fut alors une grande langue de civilisation utilisée bientôt, non seulement par les lettrés, mais également sur le plan juridique et administratifs et elle se dégagea complètement du latin. Ce n’est qu’en 1539, après l’ordonnance de Villers-Cotterêts, édictée par François 1ier, qu’elle sera remplacée par le français. Devenu langue officielle, le français venait de la langue d’oïl et du proto-français parlé en île de France et désigné par le terme francien qui s’était enrichi des langues du nord de la France.
De nos jours, depuis le début du XIXe siècle, avec le félibrige et Mistral, la langue occitane connaît un nouvel essor, toutefois le provençal qui lui est largement apparenté se rapproche un peu plus de l’italien. On peut dire que, si elle fut la langue d’une ethnie qui n’a jamais pu se constituer en nation, son histoire est la quête persévérante d’une prise de conscience que des difficultés diverses ont sans cesse remise en question.
Donc c’est à partir de 1100 que, généralement d’anciens clercs ou des personnages lettrés désirant s’exprimer par des poèmes, souvent mis en musique, décidèrent, en abandonnant le latin, de s’exprimer et de chanter en langue occitane, ceci sans doute pour être entendus de tous. Leurs chansons, des cançons, mots qui se prononcent cançous, composées en vers, utilisant la rime et découpées en strophes, étaient élaborées avec des règles rigoureuses et elles traduisaient fort bien l’expression de la pensée de leurs auteurs. Leur contenu étant appelé « razon » (raison), elles étaient écrites de trois façons : selon le « trobar lèu », style simple que l’on comprend aisément ; le « trobar clus » texte hermétique qui joue sur l’ambiguïté, mais dont la manière calculée dévoilait leur sens à partir de certains termes quelquefois difficilement appréciables ; et le « trobar ric », écriture riche dont la qualité réside dans la difficulté vaincue. On peut y ajouter le trobar planh qui est une complainte funèbre, le mot planh venant du latin planctus qui signifie plainte, gémissement. En fonction de leur finalité, ces poèmes étaient appelés différemment, soit : sirventès, (mot venu du latin sirvent, serviteur), qui était moral ou satirique et souvent inspiré par l’actualité politique ; salut qui chantait l’amour courtois ; ensenhamen (enseignement) qui s’adressait aux nobles, aux bourgeois et aux clercs afin de leur enseigner leurs devoirs et le savoir-vivre ; tenson ou partimen (jeu-parti), poème dialogué, généralement avec un ou plusieurs autres troubadours et où les interlocuteurs s’opposaient sur un sujet donné ; descortz, poème dont les vers étaient de forme discordante et souvent utilisé pour exprimer le désaccord ; cobla, poème d’une seule strophe. Ces chants furent généralement un bel exemple de réussite à la fois esthétique et idéologique et c’est ainsi qu’ils furent élevés au rang des belles-lettres.
En outre, venant en partie du chant grégorien, mais influencées par des rythmes arabes, leurs mélodies, bien entendu profanes, étaient nettement plus raffinées que les ritournelles des amuseurs et des saltimbanques qui se produisaient jusqu’alors.
On peut donc considérer que dans le sud de la France, au même titre que les trouvères dans le nord, les troubadours devinrent les intellectuels du Moyen Age, prenant place à côté des universitaires et des théologiens de l’époque. Par ailleurs, il semble que ce soit grâce au développement des villes dans lesquelles les troubadours ainsi que les trouvères se produisaient que cette vie culturelle put s’épanouir. Néanmoins, l’activité littéraire de ces poètes ne pouvait être envisagée sans l’aide d’un mécénat, c’est pour cela que chacun d’entre eux se mit au service d’un prince ou d’un puissant pour lequel il exécutait des commandes. En effet, la plupart des grands seigneurs n’étaient souvent ni frustes, ni incultes, se piquant d’élégance, de belles manières et de beau langage, ils aimaient à s’entourer de lettrés dont ils faisaient leurs écrivains attitrés et leurs hagiographes. Ainsi les troubadours furent appelés à jouer un grand rôle dans le divertissement des cours aristocratiques où le public féminin tenait la première place. D’une manière générale, ils chantaient surtout l’amour courtois, le fin’amor, qui aspirait à l’absolu et favorisait le progrès moral, véritable culte de la femme, qui, sans écarter l’adultère, évoquaient des sentiments fins, délicats, soit l’allégeance à la fille d’Eve, le chevalier possessif et violent prenant une attitude soumise devant elle. La mythologie de la dame hautaine et inaccessible vécue par les