Nathan: Battaglia

Par Nadège Reveillon

Le mot de Nathalie Riesen — initiatrice de l'écriture.

J’ai contacté Nadège Reveillon car je voulais mettre en mots mon histoire. Mais je ne voulais pas n'importe quels mots, ni n'importe comment. Je voulais sortir du témoignage de la femme victime, pour que mon histoire puisse mettre en lumière ce qu'est la violence psychologique et ce qu'elle entame en nous de « vivant ». J'ai laissé Nadège écrire en totale liberté, sans autre directive que d'envisager une nouvelle perspective pour la victime que je racontais, inquiète et impuissante à faire entendre les mots de mon enfant. Un jour elle me dit « j'ai terminé, viens à la maison, un ami comédien viendra lire mon travail et dira les mots que j'ai compris de ton histoire. » Nous nous sommes retrouvés chez elle, autour de la table de cuisine, le comédien face à moi et j'ai commencé à prendre les mots de Nadège en pleine figure. J’ai été émue par la force du texte et par le point de vue qu'elle a su envisager en osant la parole du bourreau. Elle a su raconter mon histoire en un récit glaçant qui semble agir comme la dernière clef qui me manquait peut-être encore. Ce projet n'est pas seulement le récit de mon histoire, c'est aussi un témoignage qui va immanquablement faire écho chez d'autres victimes. Il servira de support pour libérer la parole et soutenir les victimes; il sera une caisse de résonance pour leurs craintes et leurs espoirs.

• Langue: Français
• Éditeur: Publishroom
• Date de sortie: 2 juin 2021
• ISBN: 9791023619546

Aperçu du livre

1.

J’allais y laisser ma peau

J’allais y laisser ma peau

Et celle de mon enfant

Je n’avais pas compris

Personne n’aurait pu comprendre

Cela vient insidieusement

Cela s’introduit en vous comme du venin

Un venin charmant

Prévenant

Vous êtes aimée

Vous croyez que vous êtes aimée

Cela vient sournoisement

Cela s’introduit en vous comme du poison

Un poison soyeux

Merveilleux

Vous aimez

Vous savez que vous aimez

Vous sentez que vous vivez

Un amour idyllique

Vous sentez que vous vivez

La passion amoureuse

Le cœur vibre

Le cœur s’emballe

Vous voulez tout vivre

Très vite Trop vite

Vous voulez tout partager

Cela prend toute votre attention

Cela s’introduit chez vous comme une prévoyance

Une prévoyance endurante

Intéressée

Il me parle de vie commune

Très vite Trop vite

La vie commune

Cela prend toute votre existence

Cela s’introduit chez vous comme une évidence

Une évidence

Dans votre vie Dans votre travail

Cela prend la place

Cela prend toute la place

Cela prend tout l’espace

Vous faites la place

Vous ouvrez l’espace

Vous ouvrez la porte

Je n’avais pas compris

Personne n’aurait pu comprendre

Après une dispute

Vous pensez calmer le jeu

Vous ne savez pas pourquoi

Après une dispute

Une voix vous dit de calmer le jeu

Vous n’écoutez pas la voix

Vous êtes aimée

Vous croyez que vous êtes aimée

Vous n’écoutez que Sa voix

Un jour

Il vous parle d’enfant

Oui

Vous ne savez pas pourquoi

Vous dites Oui pour l’enfant

Vous l’aimez

Vous voulez tout partager

Vous dites Oui pour l’enfant

J’ai dit Oui pour l’enfant

En une preuve d’amour

En une marque de confiance

J’ai dit OUI pour l’enfant

En un besoin pressant

En une prière insistante

Je n’avais pas compris

Personne n’aurait pu comprendre

Je tisse ma toile

Je referme le piège

Il se pose

Face à moi

Je me pose

Face à elle

Il exige que le test se fasse

Face à lui

La réponse n’est pas claire

Il exige une réponse claire

J’exige un nouveau test

J’exige une réponse claire

Il se pose

Face à moi

Je me pose

Face à elle

Le test est positif

On ne fêtera pas

Il insinue

J’insinue

On ne fêtera pas

Je doute de SA fidélité

J’interroge MA paternité

J’ai dit OUI pour l’enfant

En un élan adorateur

J’ai dit OUI pour l’enfant

En un élan calculateur

Ma grossesse prend ses racines

Dans l’humiliation

Il tisse sa toile

Il referme le piège

Je ne suis qu’un Ventre

En sa machine de guerre

Je ne veux pas d’enfant

Je n’aime pas les enfants

Les couches