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Factum: Le désamour
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Livre électronique174 pages2 heures

Factum: Le désamour

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À propos de ce livre électronique

Un roman policier ? Plutôt l’histoire d’une âme et sa détresse.
Un meurtre ? Le début de l’histoire ou la finalité d’une triste existence ?
Certains êtres ont si peu. Si on leur arrache, c’est la cassure.
On a tout enlevé à Émile… Même le peu de bonheur qu’il aura su savourer trop brièvement et trop tard. C’est alors que tout vacilla. C’est là que se produisit l’irréparable. Mais qu’en est-il vraiment ? Rien n’est jamais tout à fait clair. L’enquête mettra certaines choses en perspective, dont le parcours atypique de Madeleine Perreault, la mère d’Émile.
Sandrine Tremblay est nouvellement enquêtrice à la SQ. Robert Fréchette est un vieux de la vieille. La première a ses tics et le second ses manies. Sandrine est aussi ambitieuse que Robert peut paraître blasé. L’un et l’autre, pourtant aussi déterminés à aller au fond des choses. Ils s’appliqueront à brosser le portrait d’Émile. Au-delà de sa culpabilité évidente, ils veulent comprendre les motifs du jeune homme.
Émile Ducharme n’a pas le profil d’un assassin. Il est même plutôt sympathique aux enquêteurs. Pourtant, on le soupçonnera de plus d’un meurtre. Que dévoilera l’enquête ? Découvrez-le…
LangueFrançais
Date de sortie28 nov. 2022
ISBN9782897757113
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    Aperçu du livre

    Factum - Claude Lemay

    FACTUM

    LE DÉSAMOUR

    Claude Lemay

    Conception de la page couverture : © Les Éditions de l’Apothéose

    Image originale de la couverture : Shutterstock 704215264

    Sauf à des fins de citation, toute reproduction, par quelque procédé que ce soit, est interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur ou de l’éditeur.

    Distributeur : Distribulivre  

    www.distribulivre.com  

    Tél. : 1-450-887-2182

    Télécopieur : 1-450-915-2224

    © Les Éditions de l’Apothéose

    Lanoraie (Québec)  J0K 1E0

    Canada

    apotheose@bell.net

    www.leseditionsdelapotheose.com

    Dépôt légal — Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2022

    Dépôt légal — Bibliothèque et Archives Canada, 2022

    ISBN : 978-2-89775-670-3

    ISBN EPUB : 978-2-89775-711-3

    Imprimé au Canada

    Ce livre aurait pu être un roman policier.

    C’est plutôt l’histoire d’une âme et de sa détresse.

    CHAPITRE 1

    LA CASSURE

    (Émile)

    Madeleine dort. Elle tend de plus en plus à faire des sommes en plein jour. Paradoxalement, elle fait de moins en moins de bonnes nuits. Qui sait si c’est de cause à effet ? Bon. Je me surprends à encore philosopher sur mes observations. J’ai toujours trop cogité. C’est une manie chez moi. J’en suis conscient. Ça m’obsède même. Je suis quelqu’un de tourmenté, toujours tiraillé par quelque chose. J’ai jamais eu la quiétude facile.

    Ça fait un bout que j’observe Madeleine. Je la regarde dormir. J’admire son calme. Je jalouse la sérénité qui semble l’habiter. Comment peut-il en être ainsi ? Sa respiration s’allonge. Elle doit verser dans une autre phase de sommeil. Ça fait un certain temps qu’elle s’est assoupie. Elle a passé le stade du sommeil léger. Elle dort plus profondément. On dit que le sommeil du juste est tributaire d’une conscience tranquille ; balivernes. Les énoncés populaires en véhiculent tant. C’est une plaie sur les réseaux sociaux. J’ai envie de vomir chaque fois que je vois un de ces stupides encadrés apparaître. C’est fou le nombre de leçons de vie à cinq cennes qu’on peut voir défiler. Comme si « la » vérité ne s’énonçait qu’en paraboles. C’est comme les expressions que Madeleine a toujours lancé à tout vent. De grandes formules pour ne rien dire. Ces allégories ne sont que du charabia bon à meubler le vide. Comme si parler à outrance pouvait combler la vacuité des vraies choses tues. C’est peut-être la même chose avec toutes les pensées qui m’assaillent sans cesse.

    J’observe toujours Madeleine dans son sommeil. Je ne suis pas bien avec le sentiment qui m’habite. Le mépris a un goût âcre. Cette femme m’aura causé bien des tourments. C’est le cas de toute relation amour-haine. Le paradoxe est troublant. Il me déconcerte plus que je voudrais me l’admettre. J’en suis perplexe. Alors que je la dévisage, le dégoût me submerge. Ce malaise me mine depuis trop longtemps. Ce n’est pas d’hier que je ressens ce tiraillement face à elle.

    Elle est là à dormir alors que je me tourmente. J’écoute son souffle. Je la regarde roupiller. Ses lèvres bougent et laissent échapper des trop-pleins d’air que son nez ne sait pas régulariser. Je me dis que sa quiétude ne peut être absolue. Je l’espère. Ce serait indécent et trop injuste sinon.

    Je l’observe. Je vois un fin filet de bave à la commissure de ses lèvres. Je me réjouis de ne pas avoir une image parfaite d’elle. Sa perfection m’a toujours exaspéré. C’est frustrant d’être constamment confronté à quelqu’un en contrôle. Personne ne peut toujours l’être. De le constater au moment présent est pour moi un soulagement. Ça m’a toujours été une source de frustration. Ce n’est pas que je me cherche une justification. Néanmoins, le cumul d’autant d’affliction en est venu à me peser trop lourd. L’outrance alimente la hargne. J’en suis rendu là. Ça perdure depuis trop longtemps. Ce ressentiment m’est omniprésent. Il est de ceux qui minent. De ceux d’où émerge le mal-être. Trouble qui culmine avec le temps comme l’indigestion qui devient inévitable après trop d’abus. Le malaise plafonne jusqu’à ce qu’il faille vomir ; seul soulagement possible. Cet inconfort ne m’est pas nouveau. Je le réalise. D’aussi loin que je me souvienne, je ne me suis jamais senti totalement bien dans ma peau. Même plus jeune, j’ai jamais su m’accorder l’insouciance de mes semblables. C’est comme si je n’avais jamais eu droit à ça. Probablement le lot de tout être tourmenté.

    Je la regarde encore. Je l’observe. J’écoute son souffle et je vois sa poitrine se soulever au rythme de sa respiration. Inspiration et expiration ; le souffle de vie. J’aurais cru être plus nerveux. Ce n’est pas le cas. Je suis plutôt empreint d’une latente sérénité. Je suis à présent aussi paisible que semble l’être Madeleine. Suis-je à la veille de trouver une certaine quiétude ? J’veux y croire. Je dois m’en persuader. Ma conviction est sûrement sous-jacente à ma névrose. Je me sais neurasthénique. J’aime ce terme qui me ménage. Il m’évite une vérité trop crue. Mon déséquilibre n’est pas moins réel. Ma fragilité m’est trop souvent affolante, comme un cauchemar dont on n’arrive jamais à s’extirper. Il me poursuit inlassablement. C’est exténuant. J’en viens à défaillir. J’ai atteint mon point de rupture. Ma cassure n’est pourtant pas nouvelle. J’ai jusqu’ici pas su me délester de ce poids qui m’oppresse. Je me suis plutôt laissé aspirer par mon malaise ; de là tout mon tiraillement intérieur.

    Tout est si paradoxal. Des sentiments si mitigés m’assaillent depuis trop longtemps. Ce n’est pourtant pas que de la rancœur qui m’habite, ni même de l’amertume. C’est plus trouble que ça. J’ai passé le stade de l’écœurement. J’en ai pourtant profondément souffert. Si longtemps désœuvré j’ai été. J’ai malgré tout su relativement bien composer avec ça. C’est ce que l’on croit avant de casser. Mais ne dit-on pas que c’est en se comparant qu’on se console ? J’ai assez rapidement compris que bien de mes pairs sont tout aussi aliénés que je peux l’être. À chacun ses tares. L’humain n’est pas un être sain d’esprit ; trop compliqué pour pouvoir l’être.

    L’homme a perdu sa capacité de réagir par instinct. Il cherche à comprendre. Ça lui devient pernicieux. C’est indéniablement mon cas. J’aimerais pouvoir m’en justifier. Démontrer mon parcours pourrait expliquer bien des choses et bien des gestes posés. Ça pourrait donner de l’acceptabilité au mien. Je n’en fais pas une quête. Je sais qu’il n’y a pas de vraisemblance en pareil cas. Ce n’est jamais aussi simple. Tout est trop tordu. Je comprends que pouvoir se donner bonne conscience puisse être apaisant. On aime se réconforter dans ses choix. Encore faut-il en avoir. J’en ai plus. Ce serait trop simpliste ; du déni même. Je ne choisis rien. Ça m’habite. J’ai du mal à définir ce que je peux ressentir. Le trouble qui émerge de moi me dévore. C’est aussi vil que ça ; c’est moi. La résultante du cumul de mes sentiments, de mes ressentiments surtout. Oui, j’éprouve de la hargne à l’égard de celle que j’observe dans son sommeil. J’ai pourtant la conviction qu’il y a plus que ça. Certes, sa relation avec moi ne peut y être étrangère. Ce sera probablement la conclusion qu’en tirerait un psychiatre appelé à se pencher sur mon cas.

    Paradoxalement, il faut aimer pour en arriver là. J’ose croire que ce sentiment m’habite aussi. On aime si mal quand on n’a jamais su le faire. J’en suis émotionnellement atrophié. Je n’évoque pas la compassion. Je ne crois pas que d’aussi nobles sentiments puissent émerger de moi. Il me faudrait un minimum d’estime pour ça. N’est-ce pas là que prennent racine la plupart des troubles obscurs ? Bien que ce soit plus ou moins conscient, il est déconcertant de réaliser que ceux que l’on cherche tant à aimer sont ceux qui nous le rendent si mal. Ces relations sont nocives ; voire toxiques.

    Il en restera toujours un vide à combler. S’y acharner en vain ne peut qu’être destructeur. On a beau percevoir que ça ne rime à rien, on s’y astreint. C’est malsain et ça mine. On s’accroche à ce qui fait mal. Ça en est d’autant plus morbide qu’on ne sait y résister. De là la complexité d’êtres comme moi.

    Certains réussissent peut-être à émerger. Je n’y aspire plus. À ma relation avec cette femme, j’ai toujours été vulnérable. J’en ai été écorché. C’est ce qu’on évoquera éventuellement. On essaiera de comprendre ; comme toujours après coup. De tels gestes suscitent leur lot de stupéfaction, comme à chaque nouvelle fois. Comment interpréter pareil acte ? Quelles conclusions en tirer ? Je me surprends à m’en questionner. J’y ai beaucoup réfléchi. Je suis un être curieux, mais il y a beaucoup plus. Mes réflexions m’obsèdent. Elles me hantent et ne me laissent jamais de répit. Ça m’obnubile et me tourmente.

    Mon introspection me démontre encore l’absurdité de ma relation avec cette femme. Je ne peux plus nier que je me retrouve en elle. Sa personnalité m’a toujours paru plus qu’atypique. La mienne l’est aussi. C’est indéniable. J’ai souvent eu le sentiment de vivre en parallèle de la normalité. Pas que je me sente si différent ; mais jamais tout à fait comme les autres. C’est ce qui fait que je ne suis jamais parfaitement à l’aise au quotidien. Suis-je mésadapté pour autant ? Probablement. Par contre, qui peut prétendre être totalement à l’aise en société ? Dans les circonstances, je fonctionne assez bien. Je semble vivre une vie quasi normale. Encore faudrait-il pouvoir définir ce qu’est la norme.

    C’est pourtant le barème ultime. De là, on trouve les gens bizarres ou non. Qui ne l’est pas à ses heures ? Cette notion est si abstraite ; plus une question de perception qu’autre chose. Je n’essaie pas de vous convaincre de quoi que ce soit. Je sais que tout ne tourne pas rond chez moi. J’exprime seulement ce mal de vivre qui me ronge et qui couve en une pernicieuse latence au plus profond de mon être.

    Mon malaise a toujours pris des allures d’anxiété ; une inquiétude omniprésente. Tant de préoccupations et de tourments me tenaillent. Pas que je sois si oppressé, mais je n’atteins jamais une totale quiétude d’âme. J’ai toujours l’impression de passer à côté de quelque chose. J’ai souvent le sentiment de nager en eaux troubles. Je ne saurais identifier précisément ce qui ne va pas. J’ai du mal à définir ce que je ressens. Je ne sais l’exprimer clairement. Ça ne s’explique pas. C’est plutôt une sensation qui m’habite, tel un malaise qui couve en moi. C’est en moi ; c’est moi. Ça m’est d’autant plus malsain et difficile à assumer. Je ne peux qu’en faire un constat, aussi triste soit-il. Difficile de prendre sur soi devant pareil bilan. Pas facile de se retrouver ainsi face à soi-même. Ce sont d’intenses passages. Des moments où mes angoisses culminent, comme en ce moment, alors que je me retrouve confronté à moi-même et au geste que je m’apprête à poser.

    Je la regarde. Son sommeil est profond, pas pour autant paisible, sa respiration maintenant moins régulière. Sa torpeur semble aussi creuse qu’un abime. Je sais qu’elle abuse de ses calmants. Est-ce par mégarde ou pour se réfugier dans le gouffre de l’oubli ? Je me suis parfois posé la question. J’opterais pour la seconde hypothèse. Je suis convaincu que mes doutes sont fondés. Cette femme aussi est un être profondément tourmenté. Je le sais. Nous nous ressemblons tellement.

    C’est clair qu’il faut être tordu pour en arriver là. Poser pareil geste ne peut résulter d’un parcours serein. Exécuter pareil acte, c’est ne plus contenir sa démence. Exécuter… Je bute sur le terme. C’est si cynique dans les circonstances. C’est quand même fou tout ce qui peut me passer par la tête dans un moment pareil. Je m’accroche à des détails. Des détails ? Vraiment ? Plus maintenant.

    Je la regarde. Je fixe sa lèvre qui tressaille. C’est fascinant d’observer les mouvements de son visage. Je ne l’ai jamais autant regardée ; jamais de cette façon. C’est subjuguant d’observer l’autre dans son sommeil. Certains l’ont plus agité que d’autres. Je la regarde encore. Je ne cesse de le faire. Elle respire profondément, sans ronfler. Son souffle n’en est pas moins bruyant et irrégulier. Souffre-t-elle d’apnée du sommeil ? Quoi qu’il en soit, sa léthargie est profonde. A-t-elle toujours eu un bon sommeil ? Non… Je me souviens de périodes insomniaques. Ses nuits étaient agitées et nuisaient aux miennes. Ma quiétude nocturne en était dérangée. Elle a souvent bossé sur différents quarts de travail. Difficile de bien dormir avec un horaire aussi irrégulier. L’horloge biologique en est inévitablement perturbée.

    Pourquoi m’en préoccuper maintenant ? Pourquoi en ce moment précis ? Parce que soudainement le temps s’éternise. Il s’arrête même. Il y a eu un avant. Puis, il y aura après. Qu’adviendra-t-il alors ? Je ne peux être certain de rien. Je ne l’ai jamais été. Ce n’est pourtant pas parce que je n’y songe pas. Plus d’un scénario me vient à l’esprit.

    Je me suis demandé comment je réagirais au moment fatidique. J’ai cru que la nervosité me gagnerait. J’ai craint qu’elle ne me paralyse. Ce n’est pas le cas. J’en suis soulagé. Je ne me sens ni anxieux, ni même angoissé. Au contraire, un calme profond m’habite.

    Je soulève l’oreiller. Je ne la quitte pas des yeux. Lucidement, je le presse contre son visage. J’applique

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