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Le rêve de Mathilde
Le rêve de Mathilde
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Livre électronique105 pages1 heure

Le rêve de Mathilde

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À propos de ce livre électronique

« L’effroi et la stupéfaction avaient saisi Mathilde. C’est moi qui suis patraque et c’est toi qui pars, disait-elle intérieurement à son amie, aimée de si longue date qu’il lui était inconcevable d’imaginer son silence présent et celui à venir. » Mathilde, nous entraine dans le sillon de l’amitié. Partage, confidences, méandres des questionnements existentiels… Portrait sensible et tendre de quatre femmes d’aujourd’hui, à l’aube de la cinquantaine.
LangueFrançais
Date de sortie18 mars 2014
ISBN9782312021409
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    Le rêve de Mathilde - Chantal Duez

    cover.jpg

    Le rêve de Mathilde

    Chantal Duez

    Le rêve de Mathilde

    LES ÉDITIONS DU NET

    22, rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes

    © Les Éditions du Net, 2013

    ISBN : 978-2-312-02140-9

    A Zaza, amie très chère,

    trop tôt disparue

    A mes enfants chéris,

    Caroline, Jérôme, Dorothée

    Remerciements :

    A la MO pour son travail délicat de relecture

    A toutes celles qui m’ont inspiré ce roman.

    Chapitre I

    Elle s’appelait Isabelle, Isa ou Zaza, selon qui la nommait. Elle est morte hier, comme ça d’un coup, sans un bruit, discrètement, tout ça parce que, pour elle, c’était l’heure de partir dans l’au-delà. C’était le début de l’automne, lorsque les feuilles se parent de couleurs allant de l’or pur au rouge vénitien pour tomber plus élégamment avec le vent. Saison languide qui nous met du froid et de la nostalgie au cœur.

    L’effroi et la stupéfaction avaient saisi Mathilde. « C’est moi qui suis patraque et c’est toi qui pars », disait-elle intérieurement à son amie, aimée de si longue date qu’il lui était inconcevable d’imaginer son silence présent et celui à venir. La vie lui avait pourtant donné son lot de deuils, mais, ils étaient plus anciens, à un âge où l’on n’a pas peur de mourir.

    Maintenant, il était plutôt question pour elle de renouer avec la vie que de se laisser fasciner par la mort, comme pour se libérer de ce qu’il reste à accomplir. Tout lui semblait dérisoire, les biens matériels, que l’on veut à tout prix acquérir et que l’on chouchoute toute sa vie, les rides et les kilos que l’on traque, les disputes et les rancœurs, enfin tout ce qui n’est pas de l’ordre du relationnel, du partage du cœur, tant avec l’humain et l’animal qu’avec dame nature qui nous offre tant de beauté.

    Voilà ! Tout était clairement posé. « Qu’est-ce que je vais bien pouvoir faire de tout çà ? », se demandait-elle, découragée. Le temps est un briseur de rêves. Elle se laissait glisser dans la mélancolie. Elle n’avait même plus envie d’écrire alors que c’était son exutoire, sa création. « Je ne suis plus bonne à rien », se disait-elle, vautrée sur son lit, entourée de son chat, de son livre du moment et de ses mouchoirs. Depuis deux ans, elle vivait sous la soumission d’un mal-être dans son corps et, depuis deux mois, sous le joug d’une déprime.

    Mathilde était libraire et adorait son métier. Elle avait repris la gérance d’une vieille échoppe, cachée dans une ruelle du vieux Senlis, à proximité d’un quartier où l’on trouvait plutôt des boutiques de vêtements chics et de chocolats fins. Elle était venue là car elle avait décidé de changer de vie après son divorce, persuadée qu’en fuyant le siège de ses conflits, elle trouverait la paix. Elle avait tracé un cercle au compas autour de Paris et choisi un lieu où résonnait encore l’histoire avec un grand H, celle qui la passionnait et la faisait rêver, celle qui nourrissait les livres qu’elle aimait conseiller.

    Elle avait toujours aimé les livres, leur odeur, leur couleur, leur texture. Pour elle, ils étaient les gardiens du temple du savoir, des mystères de la vie. Drôles ou tristes, moralistes ou dévergondés, poètes, fidèles compagnons. Lorsqu’elle franchit le pas de la vieille boutique, l’émotion qui la saisit l’emplit de la certitude que c’était là qu’elle devait s’arrêter. L’atmosphère feutrée de la petite ville aux vieilles ruelles pavées l’avait ramenée en un bond vers le passé. Derrière les portes closes se cachaient sans doute des trésors, des bâtisses et des jardins, des secrets et des vies. Son imagination avait été immédiatement embrasée.

    Après avoir réfléchi sur la prolifération exponentielle de la production littéraire romanesque, autobiographique et politique, elle avait opté pour trois orientations thématiques, l’art, l’histoire et l’ésotérisme. L’ésotérisme donnait à son lieu un petit parfum de soufre qui dérangeait les esprits conservateurs très nombreux qui habitaient la ville. Pierres semi précieuses, encens et cartes divinatoires venaient compléter sa vitrine et, pour ceux qui le souhaitaient, elle proposait des consultations de tarot dans l’intimité d’un petit bureau en arrière-boutique.

    En d’autres temps, on l’aurait regardée comme une sorcière. Aujourd’hui, il subsiste encore une forme de méfiance à l’égard de ceux qui s’écartent du monde matériel. Attirance et peurs mêlées pour certains. Les superstitions sont toujours vivantes au cœur de l’inconscient collectif, et chacun les reçoit à sa manière.

    Pour le moment, ses projets étaient noyés dans les larmes et dans les regrets. Pour compléter ses idées noires, elle voyait arriver la cinquantaine à grands pas et s’imaginait déjà très vieille. « Miroir, miroir, qui est la plus moche ? », s’amusait-elle à lui demander avec dérision en contemplant, avec une complaisance morbide, ses quelques rides et, surtout, ses kilos en trop. Ils l’accompagnaient depuis quelques années, remplaçant une vieille amie abandonnée, la cigarette. Elle avait fait, une nuit d’automne, un rêve impressionnant où, une voix caverneuse, telle la voix de Dieu condamnant Caïn, lui ordonnait d’arrêter de fumer. Elle avait joué le jeu bon gré, mal gré. Installées en compensation, de disgracieuses bouées la garantissaient des relations amoureuses.

    Impossible d’envisager de me montrer nue, affirmait-elle à ses amies qui tentaient de la rassurer sur son potentiel de séduction. Elle avait rejoint le clan des Européennes qui n’aiment pas leur corps trop rond et s’énervent de trouver plus de vêtements en taille 38 qu’en 46. Elle enviait le port de tête des Africaines plantureuses, et fières de l’être, dans leurs beaux boubous colorés, parées de brillants bijoux… en tout cas, elles ne remettent pas en question leur féminité. Bien au contraire, elles l’affirment quel que soit leur tour de taille !

    Mathilde avait fermé le magasin quelques jours et, du fond de son lit, s’enlisait dans la peur de l’insécurité matérielle liée au manque conséquent à chaque jour de fermeture. « Zaza, aide-moi », implorait-elle, partagée entre espoir et remords. Depuis la mort de son amie, une simple pensée vers elle la connectait avec la sensation de sa présence. Elle entendait alors sa voix la rassurer affectueusement.

    Ses convictions sur l’après-mort l’aidaient à accepter l’inacceptable de cette disparition prématurée. Disparition est le bon mot que nous impose la mort. D’une seconde à l’autre le silence terrestre s’impose définitivement avec le dernier souffle. Quelle belle expression que le dernier souffle, songeait Mathilde, dont l’esprit vagabondait toujours entre plusieurs considérations.

    Lorsqu’elle était toute petite fille, elle avait une conscience aiguë de la mort et cela la plongeait dans une peur panique accompagnée de sueurs froides. Elle se terrait au fond de son lit, complètement paniquée, sans jamais l’exprimer à quiconque. Elle avait alors plus peur des esprits que des vivants. C’était sans doute pour cela qu’elle s’était passionné pour tout ce qui touchait l’ésotérisme. Le monde parallèle de l’irrationnel était celui où elle avait l’impression d’avoir sa place. Ressenti et intuition, rêve et imagination étaient plus ses outils que calcul et réalité.

    La réalité, pourtant, était incontournable. La librairie végétait, elle était seule et déprimée. Tous

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