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Oser être: Dialogue entre conscient, inconscient et corps
Oser être: Dialogue entre conscient, inconscient et corps
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Livre électronique270 pages11 heures

Oser être: Dialogue entre conscient, inconscient et corps

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À propos de ce livre électronique

Vous êtes une femme déboussolée, en perte de soi, prise au piège de vos pensées.
Imaginez…
Votre conscient et votre inconscient discutent de votre être. Ils sont formels : vous avez tout, une maison, des enfants, un mari, un travail, une voiture, la santé, mais vous êtes malheureuse. Votre corps porte ce malheur par des kilos en trop. Vous vous infligez des tortures de pensées sombres et vous vivez ce que les psys appellent une dépression.
Porteur d’un esprit intuitif et créatif, votre inconscient semble vous connaître mieux que vous-même. La quête du mieux-être démarre par l’éclairage d’une discussion dans un royaume où règne un Roi, le conscient et un Chevalier servant et vaillant, l’inconscient. Ils vont vous entraîner vers une aventure de connaissance de soi, d’écoute de soi, d’éveil des sens, de saveur et jouissance. Les expériences seront captivantes et vont bouleverser positivement votre vie en vous offrant les clés d’oser être heureuse.

À PROPOS DE L'AUTEURE

Anna Argento est spécialisée en sciences humaines. Ayant fait plusieurs formations dont une en systémique et en tabacologie/alcoologie et l’autre en l’hypnose ericksonienne et PNL, elle est passionnée par la communication inconsciente et le fonctionnement de l’être humain dans ses différentes dimensions. Elle exerce dans son cabinet privé en collaboration avec d’autres professionnels de la santé. Elle est engagée dans la reconnaissance de la santé psychique au sein d’un réseau, Le REDAT-ASBL, et d’un regard holistique. Oser être est la réalisation d’un de ses rêves de petite fille, c’est aussi le début d’un nouveau chapitre sur son propre développement personnel.
LangueFrançais
Date de sortie22 juin 2020
ISBN9791037709721
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    Aperçu du livre

    Oser être - Anna Argento

    Prologue

    Une métaphore

    Quand elle n’était encore qu’une gamine, Rita entendit l’histoire d’une princesse qui avait fait connaissance, sur une île de sérénité, d’un chevalier vaillant et servant. Cette princesse fut invitée à monter à dos du cheval et serra très fort le chevalier bienveillant contre elle. Cette princesse imagina qu’il exaucerait tous ses désirs.

    Rita passa donc presque vingt ans à chercher son chevalier vaillant et servant. Elle explora tout son village, et même les alentours. Son obsession lui valut de ne jamais tisser de liens solides ni de se sentir vraiment heureuse. C’était une femme insatisfaite.

    Un jour, elle fit la rencontre d’un jeune homme, Louis. Il n’avait rien d’un chevalier, mais il était pour elle un sauveur, capable de panser ses douleurs. Elle arrêta de chercher le beau chevalier, mais y pensait constamment, en se torturant l’esprit avec des questions du type : « Pourquoi je me sens si malheureuse ? »

    Vingt autres années passèrent, elle était tombée dans un trou plus bas que terre. Est-ce les ténèbres ? Désespérée, elle était couchée dans son lit, errant dans ses pensées obscures. Elle prit une grande respiration, et se laissa transporter mentalement et corporellement dans la tranquillité. Elle aperçut ce merveilleux chevalier vaillant et servant. Sans bien comprendre ce qu’il était en train de se passer, elle saisit qu’elle était en sa présence. Le chevalier s’approcha, et dit à cette femme : « Je suis venu exaucer tous tes désirs. »

    Souriante, Rita répéta : « Tous mes désirs ? »

    « Eh bien, dit le chevalier, pas tout à fait tous tes désirs. Comme tu es déjà maman de deux enfants, et que tu n’as pas le droit de tout lâcher, tu ne vas pas t’enfuir pour aller faire le tour du monde et revenir cinq ans plus tard. Comme tu as déjà un boulot, il est peu probable que tu quittes ce job pour devenir photographe de mode. En outre, ce ne serait pas judicieux que tu convoites le premier pris dans l’équipe de danseuse professionnelle de Tango. Par contre, tu peux te sentir à ta place, dans ton boulot ou un autre job, tu peux voyager, seule ou en famille durant tes congés, et tu peux apprendre à danser et profiter du jeu de séduction qu’apporte la sensualité de cette danse. Alors, oui, je peux exaucer tes désirs au-delà de tes rêves, et je peux aussi t’apporter la paix et la sérénité. »

    D’abord enchantée, Rita fut bientôt en colère. « Pourquoi, arrives-tu dans ma vie seulement maintenant ? Pourquoi m’as-tu laissée sombrer ? Si je t’avais rencontré dans mon enfance, j’aurais pu accomplir tant de choses différemment ! »

    « Rita, dit le chevalier, j’ai toujours été là, juste en toi. Je ne t’ai jamais quittée d’une semelle, je n’étais pas ici sur cette île de sérénité à attendre, j’étais avec toi, à l’intérieur de toi. Et j’ai toujours exaucé le moindre de tes désirs. Souviens-toi, quand tu avais huit ans, tu te sentais seule et tu voulais attirer l’attention de ta mère, pour te sentir aimée. Tu souhaitais que ta mère soit présente dans ta vie. Tu es tombée d’un cheval, ce n’était pas un accident ! Tu as eu une commotion, et tes grands-parents ont contacté ta maman, et ont exigé qu’elle vienne te voir. Elle est venue, avec un ours blanc. Elle t’a prise dans ses bras, et t’as promis, comme elle l’a toujours fait, qu’elle cesserait de boire et que bientôt tout rentrerait dans l’ordre. Tu te souviens ? Il y a eu aussi ta rencontre avec Louis. Tu avais peur qu’il te quitte et que tu sois à nouveau seule. Tu ne cessais de te répéter que, sans lui, tu n’arriverais pas à vivre, et qu’il était ta bouée de secours. Et c’est ce qu’il est devenu pour toi. Il y a eu aussi la prise de kilos. Tu te répétais sans cesse que tu étais grosse et laide, indigne d’un corps en bonne santé, si bien que tu as pris du poids et que tu as détruit ton image de femme. Tu as eu ce que tu voulais… Parce que tu ignorais que j’étais là, et que j’accomplissais tous tes désirs, même les plus sombres. Mais ils t’ont souvent nui. Il t’est même arrivé que les désirs que tu exprimais viennent de l’influence d’une autre personne. Par exemple de ta grand-mère, qui te disait que les hommes étaient tous les mêmes : Ma fille, ne fais pas confiance aux hommes, ils te trahiront… La croyance a été prouvée, puisque tu seras trompée par Louis. Je suis heureux que tu aies fini par me trouver. Il est venu le temps que tu formules tes souhaits de manière réfléchie et correcte, pour toi. Collaborons ! Grimpe sur mon cheval, et partons à la conquête de la bonne santé, la sérénité, la jouissance, l’amour, et le territoire d’une vie enrichissante. D’abord, tu dois savoir et comprendre. Je remets entre tes mains, Rita, ton histoire, tes mauvaises décisions qui t’ont enfoncée dans ton déséquilibre, tes mauvaises expériences, tes croyances bloquantes, tes peurs et tes doutes. Mais aussi les instructions nécessaires à tes prises de conscience, vers l’équilibre de tes rôles, la paix de l’esprit, l’abondance et le bonheur. Rita, lis attentivement ce qui va suivre, car tu le peux, tu le veux, et tu le dois. »

    Signé, ton chevalier vaillant et servant

    Rita au point le plus profond de son mal-être

    « Ce qui n’est pas occupé à naître est occupé à mourir. »

    Bob Dylan

    Janvier 2018

    L’hiver délivrait la campagne de ses dernières emprises. La nature déployait ses ailes verdoyantes par-delà les sapinières, à travers les prairies et le long des ruisseaux endormis. La soirée était douce et sereine. La lune éclairait les lisières et les prés de sa lueur blanche la plus pure. Au loin, l’ululement de quelques chouettes aux aguets venait troubler le calme du crépuscule. Le vent caressait la cime des arbres et les fenêtres des maisons, tel un souffle de vie annonçant le retour prochain du printemps. Le soleil rougeoyant avait cédé sa place à une obscurité apaisante, plongeant champs et forêts dans une atmosphère silencieuse et mystérieuse. Au cœur d’un décor si paisible, si propice au repos du corps et de l’âme, nul n’aurait pu imaginer un être en souffrance, tourmenté par des pensées obscures et dévastatrices. Allongée dans un bain depuis longtemps refroidi, Rita laissait son esprit s’enfoncer dans les limbes les plus noires de sa douleur. Elle regarda par la petite fenêtre de la salle de bain et vit la nuit envahir son horizon, comme la dépression avait envahi son être. Elle caressa la surface de l’eau froide du bout de ses doigts endoloris. À ses côtés, sur un mur humide, les mosaïques d’un autre temps reflétaient les rayons de lumières émis par l’ampoule faiblarde surplombant le miroir. Rita connaissait ce décor, elle y avait passé toute son enfance. La maison de ses grands-parents, dans laquelle elle vivait à présent avec sa propre famille, aurait pu constituer le foyer idéal, rassurant et chaleureux. Elle n’était à présent que l’antre froid de son existence douloureuse. Rita plongea doucement sa tête sous l’eau glacée, comme pour chasser de son esprit ses pensées les plus négatives. Se redressant, elle écarta ses cheveux mouillés de son visage d’un geste lent. Son regard perdit toute lueur face à la dure réalité de son quotidien qu’elle ne pouvait plus fuir durant ses instants de solitude. Elle se sentait prisonnière d’un malheur interminable. Son avenir semblait aussi sombre que son passé, voire davantage. Seule depuis plus de deux heures, dans cette baignoire froide comme son cœur, elle crut dépérir. Elle pensa à Louis, son compagnon de vie depuis bientôt dix-neuf ans, un allié devenu ennemi. Ses penchants pour l’alcool et la drogue, auxquels il se rattachait désespérément pour ne pas devoir affronter la situation l’avaient à présent éloigné de Rita et détruit le peu de solidarité de couple qui subsistait il y a peu. Pourrait-elle à nouveau le voir comme l’homme qu’elle aimait ? Ne pourrait-elle jamais être encore fière de lui, comme elle le fut auparavant ? L’amour avait-il quitté leur relation à tout jamais, après avoir croulé sous le poids des épreuves difficiles traversées et des blessures que le temps seul ne cicatriserait pas ? Comment pourraient-ils renouer le lien qui les unissait, brisé par les trahisons inexcusables et les non-dits violents qui tapissaient leur quotidien ? Rita sentit des larmes couler le long de ses joues. Elle pensa à ses deux filles, Shannon et Éva. Elle qui avait rêvé d’être une mère de famille aimante et attentionnée, se sentait de plus en plus fatiguée face à ces deux jeunes demoiselles de bientôt quinze et treize ans, leurs exigences, leurs caprices, leurs attitudes d’adolescentes en mal d’un cadre familial solide, en mal de repères parentaux clairs, en mal d’un modèle à suivre pour grandir et s’épanouir dans l’amour. Qu’allaient-elles devenir ? Seraient-elles heureuses ? Rita tentait chaque jour de les préserver, en les rassurant, en les aimant, en les soutenant au mieux dans leur développement, mais son esprit torturé l’empêchait à présent de tenir ce rôle de mère efficacement. Elle ne pouvait dorénavant que s’efforcer de ne pas submerger ses filles par sa propre souffrance. Elle leur souriait, mais ses yeux pleuraient de désespoir à chaque instant. À cet instant précis, en cette sombre soirée de février, Rita sut qu’elle n’arriverait plus à regarder ses filles dans les yeux, avec un regard doux et aimant, pas plus qu’elle ne pouvait à présent contempler son propre reflet sans ressentir une tristesse foudroyante. Elle avait plus de haine et d’aversion pour elle-même que pour quiconque. Elle se sentait lâche, elle se sentait laide. Elle avait trop longtemps ignoré les signaux de son propre corps, les intuitions de son propre esprit, qui l’avertissaient du cercle vicieux et destructeur dans lequel elle s’était enfoncée jour après jour, semaine après semaine, mois après mois. Son déni l’avait plongée dans une situation inextricable de mal-être permanent. La vie était devenue pour elle un véritable enfer sur Terre. Aurait-elle un jour la force de se relever ? Pourrait-elle combattre et terrasser ses démons intérieurs ? Son esprit chavirait, secoué par des pensées obscures surgissant du passé et des perspectives d’avenir douloureuses. La dépression était devenue son quotidien. Rita ne percevait ni échappatoire ni dénouement heureux. Elle pensa à sa situation professionnelle, un poste à mi-temps de secrétaire de direction, ennuyeux et sans la moindre perspective d’avancement ou d’épanouissement. Pouvait-elle trouver du réconfort auprès de sa famille ? Sans père, sa mère l’avait abandonnée à la naissance, tout comme sa petite sœur Laura, qui naviguait entre un égoïsme invivable et des idées noires dévastatrices. Elles avaient été élevées par leurs grands-parents, décédés depuis longtemps à présent. Louis, Shannon et Éva constituaient sa seule famille, et paradoxalement une source d’angoisses et de douleurs. Rita n’avait pas trouvé l’équilibre entre son rôle d’épouse, de mère et de femme. À trop vouloir se sacrifier pour son mari puis pour ses enfants, elle s’en était oubliée elle-même. Il est dangereux de se tourner vers les autres avant d’être en harmonie avec soi-même, et Rita payait au prix fort les conséquences de cette négligence. Elle n’était plus une femme rayonnante, souriante, épanouie. Elle en venait à se demander si elle était encore une femme. D’un désordre latent dans son esprit était née une souffrance durable. Rita ne voyait plus clair dans sa vie. Elle ne savait plus distinguer la moindre intuition. Ses pensées chahutées laissaient des failles béantes dans lesquelles s’engouffraient les réflexions les plus pernicieuses, les idées les plus noires, les visions les plus sombres. Rita était rongée de l’intérieur par un mal invisible qu’elle avait inconsciemment provoqué et laissé prendre possession de son esprit. Elle se détestait, car elle reconnaissait en être la coupable autant que la victime. Une part sombre de son être lui soufflait à l’oreille qu’elle l’avait bien mérité. Après tout, n’avait-elle pas offert son âme au tourment sur un plateau d’argent, en reniant ses ressentis et en s’obstinant à atteindre l’image d’une épouse dévouée et d’une mère courageuse ? Son propre corps était devenu source de complexes et de douleurs. Dans cette eau glacée, elle ne put se regarder sans ressentir du dégoût et de la colère. Ses idées noires avaient dominé son esprit, probablement pour toujours, et elle sombra une fois de plus dans une souffrance insurmontable. Cette douce soirée de février ne constituait que le décor hypocrite de son interminable descente aux enfers, dans les bas-fonds d’une dépression totale. Par sa propre torture mentale, son être ressentit une douleur psychique, une oppressante tourmente, qui lui sembla inégalable. Cette dure lamentation constituait-elle la fin d’un parcours de vie accidenté ? Lorsque l’on contemple l’abîme, espérant ne pas y sombrer, l’abîme nous observe à son tour et nous attire dans ses profondeurs. Rita sombra.

    *

    Affalé dans le canapé du salon, devant une émission de télévision qu’il ne regardait pas, Louis inhalait les dernières bouffées du joint qu’il tenait mollement entre ses doigts. Déposée sur la table basse, la bouteille de vodka était aussi vide que son regard perdu. Il ne ressentait aucune émotion, ni solitude, ni joie. Il n’était animé par aucun désir, aucun instinct, aucune réflexion. L’alcool achevait de noyer sa tristesse face à la réalité, tandis que le cannabis chassait toute force de révolte ou élan d’espoir. Ses filles étaient au lit depuis longtemps, sa femme n’était pas sortie de la salle de bain depuis plus de deux heures. Louis se leva et se rendit dans la cuisine. Son esprit revint, vif et lucide. Il fit chauffer de l’eau, sortit une tasse du placard et dénicha de quoi préparer une bonne tisane. Il souhaitait adresser cette attention à Rita, pour qu’elle le regarde ne fut-ce qu’un instant. Il avait compris qu’elle ne l’aimait plus, que leur couple était en perdition. Il ne pouvait pourtant pas se résoudre à baisser les bras. Il devait la reconquérir, l’aider à se reconstruire. Quoi qu’il ait pu se passer entre eux, il devenait urgent d’affronter la situation, et Louis le savait. Il ajouta du miel dans la tisane. « Elle a raison, j’ai beaucoup trop de violence qui sommeille en moi… » pensa-t-il. « Mais on ne peut quand même pas laisser tomber un lien comme le nôtre ! Merde, je dois réagir ! » Il s’arrêta un instant, la tasse chaude entre les mains. Il laissa son esprit vagabonder quelque peu. À quoi fallait-il revenir ? Que devait-il reconstruire ? La situation ne lui paraissait pas limpide, mais il sentait qu’il était temps d’aller de l’avant. Rita et lui n’avaient que trop souffert. Il monta les escaliers, déterminé à bâtir un avenir meilleur, avec la femme qu’il aimait. Il se sentait en grande partie responsable de la situation qu’ils traversaient ensemble. Il s’accusait de n’avoir pas donné le maximum pour la rendre heureuse, il ne s’était pas investi dans son mariage autant qu’il l’aurait dû. Il était de son devoir d’homme de reprendre les choses en main. Il sentit son cœur battre d’une motivation nouvelle. Aurait-il le courage d’affronter la vérité et de redresser la situation ? Il entra dans la salle de bain et fut saisi par la froideur ambiante.

    Tiens, je t’ai préparé une tisane.

    Il tendit la tasse chaude à Rita, la regardant à peine. Il entendit le souffle saccadé et le claquement de dents de son épouse. Cela le remplit d’une grande colère. Pourquoi se laissait-elle submergée par ses souffrances ? Louis ne reconnaissait pas la femme qu’il avait aimée. Ses pensées redevinrent agressives.

    Pourquoi tu t’infliges encore la torture d’un bain glacé ? Tu vois bien que ça ne t’empêche pas de rester grosse !

    Ses mots claquèrent dans l’air et dans l’esprit de Rita, tel un coup de fouet. Elle resta figée, muette, pétrifiée. Louis regretta immédiatement ses paroles. Il n’avait pas eu l’intention de la blesser. Il était fermement décidé à l’aimer, à l’aider, mais devant l’image triste et sombre de Rita baignant dans un bain froid au milieu d’une pièce sombre, illustrant à merveille l’état actuel de leur relation, voire même de son esprit, il ne put contenir sa rage. Comme souvent dans ces cas-là, il perdait toute volonté positive et son esprit se réfugiait dans la violence, échappatoire misérable pour éviter de sonder la réalité de la situation. Louis n’osait alors plus admettre qu’il était en partie responsable d’un tel désastre, et il déversait sur Rita la haine issue d’une culpabilité mal contenue. Il attendit une réaction de sa femme, mais celle-ci restait silencieuse, tentant de contenir ses larmes. L’horloge rompit le silence, les informant de l’heure tardive. Louis fixa les seins de Rita, abîmés par deux grossesses. Les mamelons durcis par l’eau froide ressemblaient à présent aux petits bouts de gomme rose de ses crayons d’écolier. Sous l’effet retrouvé de l’alcool et du joint, les pensées de Louis s’échappèrent à nouveau. Il se remémora la sensation de plaisir qu’il éprouvait, étant petit, à mâchouiller le bout de ses crayons. Cette idée l’excita et le fit sourire. Son attitude bouleversa Rita. Elle fut secouée de longs frissons. Elle déposa la tasse fumante, contint un sanglot et lui hurla :

    Laisse-moi ! Dégage de cette pièce ! J’en ai marre que tu te moques de mon corps, que je déteste déjà moi-même…

    Dans un sourire cynique, son mari détourna le regard et s’apprêta à quitter la salle de bain. D’un geste de rage, Rita envoya de toutes ses forces la tasse de tisane brûlante dans sa direction, l’explosant contre le mur carrelé. Louis sursauta, se retourna pour la fixer d’un regard de glace et lui lança un « salope ! » empli de haine, d’agressivité et de mépris. Il redescendit les escaliers lentement, et retourna s’avachir dans le canapé du salon. Il entreprit de se préparer un second joint, nécessaire s’il désirait trouver un tant soit peu de sommeil, triste routine de laquelle il ne percevait aucune échappatoire. Il n’avait su maintenir une quelconque emprise sur les évènements, il avait perdu le contrôle de sa propre attitude. Il avait préféré battre en retraite, comme chaque soir, comme chaque jour, comme chaque nuit, comme chaque instant depuis maintenant bien des années. Chaque élan de motivation se heurtait immanquablement au brise-lame implacable de la dure réalité. Fixant ses doigts tremblants, Louis se dégoûtait. Il était devenu un monstre, dominé intérieurement par une violence coupable, paravent de ses propres peurs et doutes. Il aimait Rita, il ne voulait pas la perdre. Il ne se sentait pourtant plus capable de la retenir. Elle détestait l’homme qu’il devenait petit à petit, elle le lui avait souvent dit auparavant. À présent, elle se réfugiait dans une froideur et un éloignement progressif à son égard. Louis ne parvint même pas à lui en vouloir, car il savait au fond de lui qu’elle en souffrait énormément. Il aurait voulu l’aider, la soutenir, l’aimer comme avant, lorsqu’elle acceptait son amour sincère. Cette époque était révolue, il avait abandonné la femme de sa vie, il avait laissé partir Rita dans les limbes de son esprit féminin torturé. Il ne la reconnaissait plus à présent. La jeune femme joviale, entreprenante, idéaliste et pétillante n’était plus à ses côtés. Il avait bien tenté, au début, de la retrouver, sans trop savoir comment. Mais il avait fini par abandonner, se réfugiant dans le déni, noyant sa peine dans l’alcool et la drogue, comme il le faisait encore ce soir de février, allumant son joint comme pour imposer le silence à son esprit aux abois. Face aux durs problèmes du quotidien, amplifiés par les blessures non cicatrisées du passé, ils n’avaient pas réussi à se montrer solidaires et complices. Ils avaient chacun adopté une approche radicalement différente. Louis usait d’agressivité, de colère et de terreur pour dompter sa peur que Rita parte, pour l’obliger à rester à ses côtés, tandis qu’elle-même se réfugiait dans la soumission et la peur pour y survivre. La situation était devenue insupportable.

    Louis, je dois te parler…

    Fous-moi la paix !

    Louis… Comment peux-tu encore me supporter ? Comment peux-tu encore supporter notre relation ?

    Rita se tenait dans l’embrasure de la porte du salon. Elle tentait de transformer sa douleur, sa torture psychologique en détermination à aller de l’avant, à affronter la réalité, à faire face aux douloureuses vérités. Elle n’y parvenait pas, se sentant sombrer davantage dans la peur, terrassée par les démons qui la pourchassaient depuis son enfance. Elle grelottait, coinçant ses cheveux mouillés derrière ses oreilles rougies par le froid. Louis sembla l’ignorer, la laissant meurtrie par la dépression et la tristesse. Elle insista :

    Réponds-moi !

    Je ne sais pas, répondit-il mollement.

    Il leva les yeux, se retourna et posa sur elle un regard sombre.

    Est-ce que tu m’aimes, Rita ? Dis-moi que tu m’aimes.

    Louis, je… Je ne sais pas. Je ne sais plus !

    Il se leva et se plaça face à elle. Rita s’était emmitouflée dans une robe de chambre qui la réchauffait à peine. Des sillons de larmes parcouraient ses joues, balayées par des mèches humides qui tressautaient à mesure que ses sanglots s’amplifiaient. Sous le regard agressif de son mari, Rita croisa ses bras devant sa poitrine, serra ses jambes

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