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Petits arrangements avec la vie
Petits arrangements avec la vie
Petits arrangements avec la vie
Livre électronique203 pages2 heures

Petits arrangements avec la vie

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À propos de ce livre électronique

Morane, une enfant polyhandicapée, vit de façon imaginaire sur une autre planète nommée Carpa. Une double vie commence alors; s'y mèlent les difficultés de son existence sur Terre à la vie rêvée d'une jeune femme.
LangueFrançais
Date de sortie26 nov. 2013
ISBN9782312016474
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    Aperçu du livre

    Petits arrangements avec la vie - Anna Desma

    cover.jpg

    Petits arrangements

    avec la vie

    Anna Desma

    Petits arrangements

    avec la vie

    LES ÉDITIONS DU NET

    22 rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes

    La chose la plus terrifiante c’est de s’accepter soi-même.

    Carl Gustav Jung

    © Les Éditions du Net, 2013

    ISBN : 978-2-312-01647-4

    Paul

    Paul revenait de loin, il ne savait pas très bien d’où.

    Etait-ce ce voyage aux Maldives qui lui avait fait prendre du recul ? ou bien cette conversation à bâtons rompus dans le tram avec un inconnu ?

    Il n’aurait pas su dire pourquoi mais il se sentait différent en marchant à grands pas légers sur la plage de sable blond, ses tennis de toile s’enfonçaient mollement pendant qu’il regardait les voiliers au loin.

    Il avait l’impression de n’avoir jamais eu une telle sensation auparavant et c’était peut-être vrai. Il gravit la dune dorée sous le soleil blanc sans se retourner et la mer disparut aussitôt; il la sentait toute proche, comme une femme aimée, mais inatteignable à ce moment là. Le soleil martelait sa peau, il aurait dû mettre un tee-shirt avant de partir.

    Il songea aux femmes qu’il avait aimées et sourit à la pensée que chacune, à sa façon, pouvait évoquer la mer. Il se rappelait particulièrement la démarche souple et ondulante de l’une d’entre elles, il aimait la voir arriver vers lui. Quand il l’apercevait au loin, au milieu de la foule qu’elle semblait fendre avec légèreté, un sillon se creusait pour lui livrer le passage et elle arrivait vers lui de plus en plus vite comme une grande vague pleine d’écume. Il se souvenait aussi d’une autre femme, qui courait vers lui dans une envolée de robe d’été qui lui faisait penser au soleil quand il se précipite le soir dans l’océan et s’y noie. Il se souvenait aussi de la démarche légèrement androgyne de son premier amour dans un jean moulant ; il avait alors l’impression qu’elle sortait directement de l’eau et cela la rendait très désirable.

    Il se rappela sa mère, quand quelquefois le soir elle venait le chercher à la sortie de l’école, il la trouvait si belle, que seule, cette mer qu’il aimait tant pouvait lui être comparée.

    Puis sa pensée s’orienta vers Lilou qu’il devait retrouver un peu plus tard, Lilou qui avait la grâce des dunes sauvages qui s’étendaient derrière lui.

    La mer lui semblait féminine, même quand elle tempêtait et courbait les voiliers au loin, même quand sa colère était maximale et recouvrait tout sur son passage, détruisant et faisant des morts. C’était une colère de femme puissante, violente et sans concession.

    Puis, les choses ayant été dites à sa façon, elle retrouvait le calme et on pouvait à nouveau admirer sa quiétude, le bleu turquoise de ses eaux, son balancement régulier, le son de ses entrailles qui pouvait faire penser aux battements d’un cœur géant.

    En fait, Paul était un admirateur inconditionnel de la mer; auprès d’elle, il se déstressait, se ressourçait, elle était toujours là quand il en avait besoin.

    Morgane

    Morgane sentit des pensées étrangères aux siennes lui picoter l’esprit mais elle n’arrivait pas à savoir d’où elles venaient, ni à en décrypter le sens. Elle ralentit puis s’assit sur la terre orange et froide de Carpa, sa planète.

    Qui pouvait ainsi communiquer avec elle, de l’autre bout du monde ? L’esprit qui semblait prêt de l’atteindre était très éloigné, elle en était certaine, elle le sentait.

    Elle tenta de se mettre en relation avec le Reg le plus proche, mais cela aussi était difficile, la pensée qui cherchait à l’atteindre prenait trop de place, ne lui laissait pas assez de marge de manœuvre. Elle fit le vide, en fixant un point aveugle sur l’horizon, cela dura bien plusieurs secondes, puis elle récupéra sa liberté de pensée et son autonomie. Elle obtint alors facilement une communication avec Salim, qui était de garde en ce moment.

    Elle lui expliqua qu’elle avait senti un esprit étranger frôler le sien et le pénétrer par inadvertance, il venait de loin et lui était inconnu. Sa formation carpate lui avait permis de couper, mais elle pensait que c’étaient à eux de retrouver ce contact, sans prendre de risque.

    Salim acquiesça et lui proposa de rejoindre le Reg pour qu’ils cherchent comment faire.

    Cela n’était pas arrivé depuis des milliers d’années. Pourtant les infotablets étaient formelles, c’était déjà arrivé, dans des temps très reculés.

    Cependant, ni Morgane, ni Salim, qui étaient pourtant les carpates vivants les plus anciens de la planète, n’avaient encore connu cela.

    Morgane se releva, activa son propulseur perso et se dirigea rapidement vers le Reg; ses pieds ne touchaient plus le sol, elle semblait fendre l’air et cela laissait des marques tangibles de chaque côté du passage de son corps, comme si elle creusait un canyon nouveau dans la roche. Sans y prêter attention, elle fila et quelques instants plus tard, elle était en compagnie de Salim.

    Il avait déjà sorti les infotablets qui étaient dans le Reg, mais il faudrait certainement aller jusqu’à l’Aniram, au cœur de la planète pour avoir accès à toutes les infos connues.

    Le rêve

    Paul ne se sentait pas bien, il avait sous estimé la chaleur, et sa tête était vrillée de pensées étranges, comme si une fenêtre s’était ouverte en lui.

    Il avait l’impression de faire un rêve étrange, d’être lui et de n’être pas lui, d’exister dans ce monde et d’être aussi ailleurs… dans un monde orange, où il était seul, complètement seul, et pourtant il n’était pas seul, ça il le sentait très fort, presque à en trembler. Il avait l’impression de devenir fou, de ne plus être vraiment dans son corps, mais dans une forme souple et translucide qui se déplaçait à toute vitesse et qui le repoussait en même temps.

    Il s’allongea à l’abri d’un palmier, transpirant, presque en transe, et s’endormit d’un coup comme si quelqu’un venait de le frapper brusquement.

    Il eut l’impression que son esprit était emporté dans une spirale transparente qui se transformait en toupie à tête de diamant et tournoyait à la vitesse de la lumière et il ne fut bientôt plus qu’un éclair blanc qui fonçait dans la nuit. En bruit de fond, il entendait la mer, sans savoir d’où cela venait ni où il se trouvait.

    Puis il devint un grand goéland aux ailes dorées qui planait tranquillement dans un ciel transparent et sans nuage; puis un manège ancien qui tournait sans jamais s’arrêter; puis un jet d’eau qui jaillissait de façon intermittente au milieu d’un savant échafaudage de pierres; puis un tableau vivant qu’on montrait à des enfants; puis un rayon laser qui se déplaçait sur une surface invisible… pour n’être plus qu’une goutte de vie infinitésimale au centre de l’univers.

    Les femmes auxquelles il pensait juste avant ressurgirent toutes ensemble, l’une soulevant sa tête et l’enfouissant entre ses cuisses, l’autre le couvrant de baisers, une autre encore lui murmurant des paroles douces, puis il eut l’impression d’être un jouet entre leurs mains et il se mit à hurler pour que tout cela cesse.

    Le Reg

    A l’intérieur du Reg, Morgane et Salim étudièrent attentivement les infotablets qui dataient de plusieurs siècles. Ils s’étaient confortablement installés en lévitation dans la pièce ronde du haut de la tour qui servait de bibliothèque des temps enfouis.

    Morgane avait fermement repoussé l’intrus mais la communication n’était pas coupée comme elle l’avait tout d’abord cru, en fait elle le tenait cloisonné dans un espace mémoire de son cerveau.

    La communication avait été brève, mais claire, et il ne fallait sous aucun prétexte la perdre; cela ne s’était pas produit depuis des dizaines de milliers d’années et cela pouvait ne pas se reproduire avant d’autres dizaines de milliers d’années. C’était le seul moyen connu pour sortir de l’isolement dans lequel ils se trouvaient.

    Sur Carpa, il y avait une dizaine de Regs, très éloignés les uns des autres, et dans chacun, vivait une petite communauté d’hommes et de femmes très âgés. Une fois par année carpate, ils se réunissaient tous à l’Aniram, dans la bulle translucide qui formait le noyau de Carpa. Depuis très longtemps déjà, ils cherchaient un moyen pour renouveler les contacts avec des habitants d’autres planètes. Au moment de la grande dissolution, quand la terre avait explosé, ils s’étaient retrouvés disséminés aux quatre coins de l’univers et ils savaient fort peu de choses sur ce qu’étaient devenus les autres survivants.

    Il s’agissait bien de survivre sur cette planète désertique et froide. Ils avaient développé des modes d’adaptation très particuliers, fonctionnels et pratiques. Ils se déplaçaient rapidement d’un point à l’autre de Carpa, par un système de fusion avec l’environnement qu’ils fendaient littéralement. Ils pouvaient vivre vraiment très longtemps, le vieillissement était extrêmement lent. Ils avaient considérablement réduit les temps de ressourcement énergétique, et d’ailleurs ne mangeaient plus au sens strict du terme; ils pratiquaient des perfusions d’un liquide extrait du sol orange, qui les conservait en forme et en vie. Par contre, bien qu’il y ait des hommes et des femmes en quantité presque égale, très peu d’enfants étaient nés sur la planète depuis leur arrivée. Carpa avait accueilli les hommes, les maintenait en vie de façon spectaculaire mais ne favorisait pas les conceptions.

    La solitude et le froid étaient les épreuves les plus difficiles; ils étaient si peu nombreux, qu’ils devaient sans cesse se déplacer, le plus souvent seuls, pour recueillir le précieux liquide de vie. Leur corps était devenu aussi translucide et orangé que l’Aniram elle-même. Ils faisaient complètement partie de la planète.

    Morgane et Salim étaient les plus anciens. Pourtant, ils n’avaient pas connu les communications avec d’autres hommes dans l’univers, dont les infotablets parlaient. En fait, ils se sentaient très isolés sur leur monde et rêvaient depuis toujours de retrouver d’autres êtres avec qui partager.

    Dans les infotablets à leur disposition, ils remarquèrent que la plupart de ces communications avaient été très brèves, comme une sensation, un sentiment fugitif, et s’étaient enfuies sans pouvoir être récupérées. Trois vraies communications seulement avaient été établies au cours des siècles et aucune n’avait permis un rapprochement autre qu’une fusion mentale et ce que voulait Morgane aujourd’hui, c’était de pouvoir s’unir avec un homme d’une autre planète, qui la féconderait et relancerait la vie sur Carpa. C’était peut-être de l’ordre du fantasme, mais elle le voulait et Salim partageait cette idée, il fallait tout mettre en œuvre pour arriver à un vrai rapprochement, quelque chose qui ne soit pas seulement virtuel.

    Penchée sur l’infotablet laissée par Elie, l’un des trois à avoir vraiment communiqué avec un autre survivant terrien, Morgane, à la fois songeuse et déterminée, comprend qu’elle a réussi la première manche en captant l’esprit de cet autre lointain mais que tout n’est pas gagné pour autant. Salim est assez excité de ce qui arrive, il est à la fois heureux que cette opportunité se présente et ravi que ce soit Morgane, et non lui même, qui soit directement concernée.

    L’infotablet qu’ils possèdent au Reg ne répond pas à toutes leurs questions ; ils y avaient pensé dès le début, ils doivent partir pour l’Aniram. Ils ont le temps, puisque Morgane peut garder cette pensée étrangère pendant plusieurs mois dans son compartiment cervical. Par contre, beaucoup d’éléments leur échappent du côté de celui qui a été capté, a t’il la possibilité de s’extraire du cerveau de Morgane sans qu’elle puisse rien faire ? a t’il senti lui aussi cette captation ? et quelles sont les sensations que cela lui procure ? a t’il besoin, comme Morgane, de cette communication ?

    Les questions se bousculent dans leurs esprits et ils ne trouvent aucune réponse dans l’infotablet. Ils décident donc de partir le plus vite possible pour l’Aniram. Malgré leur mode sophistiqué de propulsion à travers la planète, aller à l’Aniram est long et difficile car il ne s’agit pas de rester à la surface mais d’aller au plus profond de la planète; de plus, il faut que l’Aniram soit d’accord pour les accueillir. L’Aniram est ce lieu magique où toutes les expériences vécues par des êtres vivants, quels qu’ils soient, et ayant vécu sur Carpa, sont conservées et consultables. Il s’agit en fait d’un centre d’archives vivant qui délivre toutes ses informations si on les lui demande, il répond à toutes les interrogations dont il a la réponse, mais ne met jamais sur la voie; il faut d’abord se poser les questions. Dans chaque Reg, une infotablet a été faite au fur et à mesure par ceux qui ont posé des questions à l’Aniram, ainsi cela permet de ne pas repartir à chaque fois de zéro. Mais la consultation de l’Aniram est complexe et difficile pour les habitants de Carpa.

    Il y a l’infotablet d’Elie, puis celle de Kim et enfin, la plus proche d’eux, celle de Lyv, les deux premiers étaient des hommes et la dernière, une femme. Elie avait réussi à capter l’esprit d’une femme, qu’il avait nommée Slav; une sorte de fusion s’était produite entre leurs esprits et Elie en était ressorti à moitié fou, avec des céphalées violentes et fréquentes. Il avait pourtant enregistré le plus minutieusement possible comment cela était arrivé.

    Il avait pris l’habitude de lancer son esprit dans le vide, à la recherche d’autres esprits, profondément décentré, un peu hors de lui- même. Pendant des dizaines d’années cela n’avait rien donné. Une fois ou deux, il avait perçu un frôlement étranger, rien de plus et cela le désespérait vraiment de ne pas y arriver. Puis un soir, alors qu’il regardait les trois lunes bleues s’allumer dans le ciel de Carpa, il l’avait sentie, elle était là, près de lui, en lui et leurs esprits ne faisaient plus qu’un. C’était comme un léger murmure, un bruissement de fontaine lointain et proche, agréable, persistant et lui semblait-il, dangereux. Alors même qu’il

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