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La montre disparue: Roman historique
La montre disparue: Roman historique
La montre disparue: Roman historique
Livre électronique157 pages2 heures

La montre disparue: Roman historique

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À propos de ce livre électronique

Une montre qui porte malheur...

Abram se remit au milieu du chemin en criant et en agitant les bras : « Saute du char, Jean ! Saute ! Saute ! »
Jean tourna la tête vers lui et le regarda, une ombre de frayeur dans les yeux. Il sentait sur sa figure le courant d’air de la vitesse. Ne sachant plus quoi faire pour retenir son cheval, toutes ses tentatives ayant échoué, il lâcha les rênes et sauta. Après avoir touché le sol sur ses pieds, il fut projeté en avant et disparut dans les hautes herbes. Débarrassé de son conducteur, le cheval continua sa course folle à travers les champs en hennissant et en martelant la terre de ses sabots.
Abram, la bouche ouverte, resta un instant interdit. Le choc passé, il se précipita à la recherche du jeune homme qu’il connaissait bien.

Comme pour La Pendule du souvenir, paru aux Editions Slatkine, succès littéraire en 2012, Thierry Amstutz met en scène des personnages qui ont vécu les débuts de l’horlogerie. De manière claire, fluide et sans temps mort, ce roman nous raconte l’histoire de la famille de Jean Gafner et de la mère d’Evira, condamnée pour des actes de sorcellerie qu’elle n’avait pas commis. Une montre de poche nous fait connaître l’épopée horlogère des premiers horlogers des montagnes du Jura suisse.

Ce roman, qui se termine de nos jours, nous fait remonter au dix-septième siècle. Un voyage dans le temps passionnant !

EXTRAIT

– Jean! Jean! Je viens à ton secours! cria-t-il.
À chaque enjambée, des châtaignes tombaient de ses poches. Essoufflé, croyant que ses poumons allaient éclater, il le trouva étendu sur le dos. Il s’agenouilla et lui souleva délicatement la tête qui avait heurté une grosse pierre plate. Ses mains effleurèrent des creux et des bosses et se couvrirent de sang. Les cheveux blonds de Jean devinrent poisseux et presque noirs ; il avait la bouche ensanglantée et un coude de trop au bras gauche.
– Ne t’inquiète pas, je vais chercher de l’aide ! lui dit Abram d’une voix tremblante tout en reprenant son souffle.
Jean n’eut que le temps de se réjouir du rendez-vous de ce soir sur la place du village, avec sa fiancée Henriette, du moment où il la serrera dans ses bras, puis tout s’effaça. Il poussa un grognement et ses yeux roulèrent dans leur orbite.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Un roman noir palpitant ! - Vincent Bélet, Le Nouvelliste

À PROPOS DE L'AUTEUR

Thierry Amstutz est né le 19 avril 1959 à Neuchâtel. En 1981, il se spécialise dans la restauration de pendules anciennes et modernes et dans la création de pendules avec automate et boîte musicale. Depuis 1995, il est aussi technicien et démonstrateur des automates Jaquet-Droz au Musée d’art et d’histoire de Neuchâtel (MAH).
Son premier roman, La Pendule du souvenir, paru aux Editions Slatkine, succès littéraire en 2012, met en scène des personnages qui ont vécu les débuts de l’horlogerie et une histoire peu commune.
Depuis le 24 mai 2014, Thierry Amstutz est président de l'Association des écrivains neuchâtelois et jurassiens. Un site internet est créé et un Salon des écrivains est organisé annuellement.
LangueFrançais
Date de sortie4 janv. 2017
ISBN9782832108000
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    Aperçu du livre

    La montre disparue - Thierry Amstutz

    roi.

    I

    DANS LEQUEL ON DÉCOUVRE L’HORLOGER LOCLOIS JACOB GEISER ET LA VENTE D’UNE MONTRE.

    Les Montagnes neuchâteloises, beaucoup les imaginaient être un pays froid. Ils disaient que l’hiver se terminait à fin juin pour recommencer au début de juillet. Quand le soleil se montrait, à n’importe quelle saison, il réchauffait les cœurs et faisait oublier la dureté de la vie.

    Pour ne pas rester inactif comme ses ancêtres paysans quand la terre se reposait sous la neige, Jacob était devenu horloger. Dans sa petite chambre au plafond très bas transformée en atelier, assis sur un tabouret rond en bois à trois pieds, il travaillait d’humeur joyeuse à son établi. Il vivait de ce qu’il faisait, à son rythme, sans rien devoir à personne. Il ne subissait plus les rigueurs du climat.

    Devant lui, éclairés par la seule lumière du jour que laissaient passer les carreaux à meneaux, s’alignaient des boîtiers en laiton de montres de poche sans mécanisme à l’intérieur. Posées juste à côté, dans un coffret en bois divisé en petits compartiments, des minuscules roues dentées semblaient attendre d’être mises en place pour s’engrener les unes dans les autres.

    À la flamme d’une chandelle, Jacob bleuissait quelques vis étalées au milieu d’un petit récipient métallique contenant de la limaille de laiton. C’était un travail de patience qu’il aimait bien faire. Avec la chaleur, l’acier passait lentement par différentes couleurs, du jaune à l’orange, puis du violet au bleu. Il devait les retirer de la flamme à ce moment-là, sinon elles viraient au gris.

    Il habitait Le Locle, dans l’une des nombreuses fermes bâties sur une terre peu fertile à fleur de roc, à quelques lieues du Doubs qui marquait la frontière entre la France et la principauté de Neuchâtel. Malgré son calme apparent, la ville débordait d’énergie et d’activité. Elle ne cessait de s’agrandir.

    Au début de sa vie, il avait attrapé tous les rhumes et les refroidissements de la montagne. À l’adolescence, c’est un voisin, horloger, qui lui donna l’envie de faire aussi ce métier. Après, il s’était débrouillé tout seul, apprenant sur le tas. Les mécanismes plus grands des pendules avec leurs différentes sonneries l’intéressaient moins. Il avait l’obsession du minuscule. Travailler sur des montres le passionnait.

    Comme il gagnait plus facilement sa vie à l’établi que dans les champs, il incitait régulièrement les autres membres de sa famille à venir travailler à ses côtés. Il souhaitait transmettre son savoir-faire à ses trois grands frères qui ne voulaient pas en entendre parler. Fils de paysan ils étaient, fils de paysan ils resteraient. Ils élevaient des bœufs et préféraient la liberté que l’enfermement entre quatre murs.

    Il y a quelques années, leur père mourut d’une fluxion de poitrine qui ne lui laissa aucun répit les dernières semaines de sa vie. Le docteur, sans se faire d’illusion sur l’issue de la maladie, lui fit de nombreuses saignées pour calmer les montées de fièvre. Amaigri, le teint cireux comme s’il portait déjà les stigmates de sa mort programmée, il quitta ce monde dans une dernière quinte de toux.

    Leur mère, une jolie femme calme aux yeux bruns foncés, faisait de la dentelle. Son carnet de commandes était si rempli qu’elle peinait à tenir les délais. Du matin au soir, elle travaillait à l’aide de fuseaux sur des cartons piqués de nombreuses aiguilles et créait des mailles fines très serrées de lin noir ou blanc. Elle confectionnait des voiles de mariées, des cravates, des manchettes de chemises ou encore des napperons entourés de très beaux motifs. Son travail était d’une telle finesse qu’il surpassait en qualité celui de beaucoup d’autres dentellières.

    Malgré les demandes de Jacob, elle aussi ne changerait de métier pour rien au monde. Comme elle le lui disait souvent, il y avait plus de dentellières que d’horlogers dans les montagnes. Rares étaient ses amies ne travaillant pas dans ce domaine. C’était aussi un commerce très rémunérateur.

    Finalement, il n’insista plus auprès de sa famille, se disant qu’il valait peut-être mieux travailler seul dans son petit univers de rouages. À chacun son chemin. Âgé de dix-neuf ans et petit de taille, sa barbe commençait à lui noircir les joues. Il avait le nez un peu long et ses cheveux, attachés par un ruban grisâtre, tombaient entre ses omoplates.

    Il était heureux car il avait fait, il y a quelques jours, la connaissance d’une jeune demoiselle vêtue d’une robe claire allant jusqu’au sol. Elle était arrivée en calèche de La Chaux-de-Fonds, la ville voisine. Lorsqu’il l’avait vue la première fois, la journée se terminait et il avait éprouvé le besoin de sortir de son atelier pour se dégourdir les jambes. De surprise, tant elle était belle avec sa silhouette fine et ses cheveux châtains tirés en arrière, il resta figé sur place. Elle, éblouie par les rayons du soleil couchant, ne l’avait pas vu noyé qu’il était dans la lumière. Après être descendue de la calèche et fait quelques pas dans sa direction, elle le remarqua et eut le sentiment d’avoir rencontré quelqu’un qui aura une influence sur sa vie.

    Quand elle passa près de lui, il se présenta un peu maladroitement en fléchissant un genou.

    – Jacob Geiser, mademoiselle. Je vous souhaite une belle soirée.

    – Marie-Claire, murmura-t-elle dans un souffle en s’inclinant légèrement. Marie-Claire Mairet, de La Chaux-de-Fonds. Belle soirée à vous aussi.

    Elle continua son chemin et il la vit remonter une petite pente pour se diriger vers la ferme des Jacot.

    Cette rencontre le plongea dans une grande émotion comme il n’en avait jamais connue. Des pensées se bousculèrent dans sa tête et il eut envie de la revoir. De retour chez lui, il trempa sa plume dans son encrier et griffonna sur un bout de papier le nom de la jeune demoiselle.

    Le lendemain, il descendit par un petit sentier en zigzags jusqu’à la grande place de la ville. Arrivé essoufflé vers une diligence attelée de quatre chevaux en partance pour La Chaux-de-Fonds, il donna au cocher, avec quelques sous pour sa peine, un courrier à transmettre à Marie-Claire Mairet.

    Maintenant, il attendait une réponse à son courrier et la vie qui s’offrait à lui était belle. Le matin en se réveillant et le soir en s’endormant, il se sentait bien.

    Le dos droit et les avant-bras avancés sur son établi, il retira du petit récipient métallique les quelques vis parfaitement bleuies sous la chaleur de la flamme à l’aide d’une brucelle qu’il tenait dans la main droite. Devant la ferme, le grincement familier d’une roue de brouette troublait le silence. Il ajusta sur une petite plaque ronde le barillet avec son ressort à l’intérieur qui fera fonctionner la montre. Toutes les pièces en contact avec d’autres devaient être lubrifiées. Beaucoup d’horlogers utilisaient de l’huile d’olive, mais il avait remarqué qu’il y avait des inconvénients causés par la chaleur de l’air.

    La lubrification le préoccupait beaucoup. A l’aide d’un pique-huile, il déposait dans l’huilier, au centre du petit trou percé dans le laiton où le pivot de la roue tourne, des huiles, des graisses animales ou végétales, plus ou moins visqueuses selon les fonctions du mécanisme. Pour étudier les phénomènes d’usure il faisait des essais, des comparaisons qu’il analysait. Ses expériences prenaient du temps car il ne pouvait pas les stimuler par des procédures accélérées. Il avait beau se creuser la cervelle, il ne trouvait pas de formule permettant d’expliquer les frottements.

    Ses montres, assez rudimentaires, n’avaient qu’une aiguille sur leur cadran. Remontées deux fois par jour à l’aide d’une petite clef, elles montraient l’heure avec un peu de fantaisie par rapport à la réalité. Pourtant, avec ses recherches, elles devenaient toujours plus précises. Il commençait à se faire une petite place parmi les nombreux autres horlogers du Locle.

    Tout en laissant vagabonder son esprit, il avançait dans son travail car il voulait présenter quelques montres au marché d’été de Fontaines, une petite paroisse nichée au cœur du Val-de-Ruz. Ce sera la première fois qu’il s’y rendra. Comme il était jeune et en bonne santé, il comptait y arriver en quatre heures de marche. Avant d’y aller, il ira faire reclouer les semelles de ses chaussures chez le cordonnier.

    Le clocher venait de sonner deux heures de l’après-midi. Les rayons du soleil semblaient faire onduler les carreaux des fenêtres et il faisait trop beau pour rester à travailler à l’intérieur. Jacob rangea ses outils dans l’un des petits tiroirs de sa layette et quitta son établi. Dehors, la clarté du ciel l’éblouit. D’un pas leste, il se dirigea vers les clapiers où des lapins attendaient d’être nourris. Les portes ouvertes, il vida un panier en osier rempli de feuilles de dents-de-lion.

    Paul, l’un de ses grands frères, poussait une brouette pleine de fumier. Sous l’effort, la sueur coulait dans ses yeux et il battait des paupières pour la chasser.

    – L’air du dehors te manque ? lui dit-il avec un large sourire.

    – En tout cas pas celui que dégage ta brouette !

    – Si tu as besoin d’exercice, tu peux aller remplir le panier en osier de dents-de-lion !

    – Je vais chercher un autre panier à la remise. Celui-ci me semble trop petit.

    – Si tu reviens à ce métier, tu verras finalement qu’il est honorable, dit Paul en déchargeant son fumier près du potager.

    Maintenant, Jacob était libre de bouger. À chaque pas, des sauterelles vertes ou brunes s’élançaient par bonds successifs devant lui. Les pissenlits, cette belle fleur d’un jaune d’or, recouvraient les champs ; leurs feuilles avaient de remarquables propriétés diurétiques. Comme chaque année, la famille avait fait sa cure de potage pour épurer les organismes après l’hiver.

    L’endroit semblait abandonné à quelques vaches en quête de verts pâturages. On était entre le monde civilisé et le monde sauvage. Seul le piaillement des oiseaux et le bourdonnement des insectes troublaient le silence. Quand le soleil se mit à décliner, le panier en osier débordait de feuilles dentelées et c’est en chantant que Jacob retourna à la ferme.

    Le jour suivant, le temps était maussade. Des nuages bas recouvraient la montagne. Au fil du temps, les citernes commençaient à manquer d’eau ; il était urgent que la pluie les remplisse.

    À nouveau installé à son établi, concentré sur son travail, il faisait les derniers réglages d’une montre de poche ou de gousset. Elle s’attachait au gilet par une chaînette ou une châtelaine et devait avoir certaines qualités, comme l’exactitude et la fiabilité.

    Pour régler la marche du mécanisme, il lui suffisait de modifier le spiral en augmentant sa longueur si la montre avançait, à cause des oscillations trop rapides, ou en la diminuant si la montre retardait, à cause des oscillations trop lentes. Il accordait une grande importance à la finition des pièces de ses mouvements. En appuyant de l’index un petit tournevis et en le faisant tourner entre le majeur et le pouce, il vissa un levier sur un pont.

    Sa rencontre avec cette jeune demoiselle mettait son cœur en folie. Elle devait avoir reçu son courrier depuis six jours et il n’avait pourtant toujours pas reçu de réponse. « Peut-être ne sait-elle ni lire ni écrire ? » pensa-t-il.

    Dans une semaine, il ira au marché d’été de Fontaines et fera un détour par La Chaux-de-Fonds pour se renseigner sur elle. D’ici là, il avait bien le temps de terminer ses montres.

    Délicatement, avec l’aide d’une cheville de bois, il fit engrener quelques minuscules roues et protégea le mouvement terminé sous une cloche en verre.

    * * *

    Levé dès potron-minet, Jacob avait revêtu une veste verte très ajustée aux épaules ; son pantalon noir, serré sous ses genoux, rejoignait ses bas blancs. Le long des sentiers herbeux, ses chaussures reclouées se mouillaient dans

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