Publier dans une revue savante, 2e édition: Les 10 règles du chercheur convaincant
Par Pierre Cossette
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À propos de ce livre électronique
Ces règles aideront le chercheur à élaborer un projet de recherche et à rédiger le texte rendant compte de sa réalisation de façon à persuader le rédacteur en chef ainsi que les évaluateurs (reviewers) de la valeur de son manuscrit. Elles pourront également guider les évaluateurs dans la préparation de leurs commentaires puisque, en principe, chercheurs et évaluateurs utilisent les mêmes critères pour effectuer leur travail.
Cette deuxième édition, entièrement revue et mise à jour, s’adresse à tous les chercheurs, en formation ou non, qui veulent participer à une conversation savante, de même qu’aux évaluateurs des manuscrits que ces chercheurs soumettent. Bien que son contenu traite principalement du domaine de la gestion, l’ouvrage est susceptible d’intéresser les chercheurs et évaluateurs actifs dans d’autres champs de connaissances (psychologie, éducation, sociologie, etc.), y compris dans les sciences « dures » (chimie, physique, etc.). Ces règles du chercheur convaincant s’appliquent aussi lors de la préparation et de l’écriture d’une thèse ou d’un mémoire.
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Aperçu du livre
Publier dans une revue savante, 2e édition - Pierre Cossette
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Les 10 règles du chercheur convaincant
Plus la «règle d’or»
Pierre Cossette
2e ÉDITION
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Cossette, Pierre, 1949-
Publier dans une revue savante: les 10 règles du chercheur convaincant
2e édition.
Comprend des références bibliographiques et un index.
ISBN 978-2-7605-4430-7
ISBN EPUB 978-2-7605-4432-1
1. Écriture savante. 2. Édition savante. 3. Information scientifique. I. Titre.
LB2369.C65 2016808.02C2016-941105-2
Révision
Catherine Vaudry
Correction d’épreuves
Sandra Guimont
Conception graphique
Richard Hodgson
Mise en pages
Interscript
Image de couverture
Sylvie Demers
Dépôt légal: 3e trimestre 2016
›Bibliothèque et Archives nationales du Québec
›Bibliothèque et Archives Canada
© 2016 – Presses de l’Université du Québec
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
Imprimé au Canada
D4430-1 [01]
AVANT-PROPOS
La première édition de cet ouvrage, publiée en 2009, proposait 10 règles, comptait 130 pages et s’appuyait sur 94 références. Cette seconde édition comprend maintenant une nouvelle règle – agir avec intégrité –, comporte 170 pages et contient 183 références. Les changements apportés ont été nombreux et substantiels.
La nouvelle règle, appelée «règle d’or», porte sur la nécessité pour le chercheur¹ d’être honnête s’il veut être convaincant ou le demeurer à plus ou moins long terme. Tricher ou mentir sur la provenance des idées ou des mots contenus dans un texte ou encore à propos des auteurs d’une recherche ou de leur contribution fait en sorte que le chercheur et ses travaux perdent de leur crédibilité. Il en va de même lorsque le chercheur adopte un comportement considéré comme inacceptable lors de la soumission d’un texte en vue d’une publication ou d’une communication.
Dans cette seconde édition, j’ai apporté des modifications importantes à l’introduction générale et au traitement de la plupart des règles présentées, en raison principalement des lectures et des réflexions que j’ai faites depuis 2009. J’ai aussi tenu compte des remarques et suggestions de nombreux étudiants de doctorat et de maîtrise à qui j’ai enseigné dans des cours où j’utilisais ce volume, sans oublier celles de collègues l’ayant employé dans leurs propres cours.
Comme je l’écrivais dans l’avant-propos de la première édition, j’aurais aimé qu’on insiste davantage lors de mes études doctorales sur la façon d’élaborer un projet de recherche et, surtout, de rédiger un texte en vue d’une publication dans une revue dite scientifique ou savante. On semblait présumer, à tort, qu’en lisant plusieurs articles provenant d’excellentes revues, l’étudiant ferait automatiquement l’acquisition des compétences nécessaires à la production et à la diffusion des connaissances. Les documents susceptibles d’aider l’apprenti chercheur se limitaient alors le plus souvent à des ouvrages de méthodologie qui, bien qu’ayant une visée prescriptive, n’aidaient pas beaucoup à préparer un texte destiné à une revue s’adressant à d’autres chercheurs et éventuellement publié sous la forme d’un article.
Aujourd’hui encore, il existe peu d’écrits sur les règles à suivre pour réussir à publier dans une revue savante. Le livre de Anne Huff (1999) – Writing for Scholarly Publication – constitue une exception notable. On peut également trouver sur Internet certains guides qui ne sont pas sans intérêt, loin de là (voir, en particulier, Bem, 2003). Sans oublier l’excellente série de sept éditoriaux fournissant des conseils ou suggestions visant à améliorer la qualité d’un texte soumis à l’Academy of Management Journal et parus dans cette revue en 2011-2012. Il y a aussi quelques courts textes portant plus spécifiquement sur les critères d’évaluation de manuscrits soumis aux fins de publication dans une revue savante, dont les éditoriaux de Campion (1993) en psychologie appliquée, de Stewart (2002) en marketing et de Webb (2003) en recherche qualitative. Mais la plupart de ces documents, en plus d’être rédigés en anglais, ne traitent habituellement pas de manière approfondie, complète et documentée du processus dans son ensemble.
Cet ouvrage propose une vision à la fois globale et détaillée des règles à suivre pour celui qui veut être un chercheur convaincant, c’est-à-dire un chercheur qui va persuader le rédacteur en chef d’une revue ainsi que les évaluateurs auxquels celui-ci fait appel que son manuscrit mérite d’être publié dans cette revue. Il a donc pour objectif d’aider les chercheurs, en formation ou non, à préparer un projet de recherche et à rédiger un texte destiné à une revue savante. Du même souffle, il vise à guider les évaluateurs dans la préparation de leurs commentaires et dans la recommandation qu’ils doivent faire au rédacteur en chef étant donné que, en principe du moins, chercheurs et évaluateurs se basent essentiellement sur les mêmes critères pour faire leur travail. Bien que mes propos s’inscrivent principalement dans le domaine de la gestion, ils sont susceptibles d’intéresser les chercheurs et évaluateurs actifs dans d’autres champs de connaissances (sociologie, psychologie, éducation, anthropologie, etc.), y compris dans les sciences «dures» (chimie, physique, etc.).
Bien sûr, ce livre s’appuie sur de nombreux et récents articles ou autres documents pertinents, ainsi que sur l’opinion de plusieurs experts, dont celle exprimée en pages éditoriales par des rédacteurs en chef de revues prestigieuses. Mais il doit d’abord être considéré comme un essai reflétant ma conception personnelle des règles à suivre pour augmenter la probabilité qu’un travail de recherche soit publié et même cité, c’est-à-dire qu’il alimente et oriente la conversation savante. Je reconnais cependant que certaines études, en particulier celle de Gottfredson (1978), bien qu’elle ne soit pas récente, ont montré que la corrélation entre la qualité attribuée à un texte par ceux qui l’évaluent et la quantité de citations dont il fera l’objet lorsqu’il sera publié serait faible.
Les idées présentées dans cet essai ne sont certainement pas étrangères aux leçons tirées de mon expérience de chercheur et d’évaluateur pour de nombreuses revues francophones et anglophones au cours des vingt-cinq dernières années. Cela ne les rend toutefois pas plus objectives… Cela dit, j’ai la conviction qu’il existe dans notre communauté de chercheurs un large consensus, plutôt implicite, à propos de ces règles à suivre, quoiqu’on reconnaisse évidemment qu’elles peuvent être critiquées.
Je remercie chaleureusement Julie Cloutier, professeure à l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal (ESG UQAM), pour ses très pertinents et nombreux commentaires (plus de sept pages à simple interligne) sur la première édition; ils m’ont permis d’enrichir le volume de manière significative. J’ai aussi tiré grand profit des multiples références que m’a fournies Olivier Germain, également professeur à l’ESG UQAM, ainsi que des discussions très stimulantes que j’ai eues avec lui, en particulier sur l’intégrité en recherche. Cela dit, ma gratitude à leur endroit ne les rend pas responsables du contenu des changements et ajouts que j’ai effectués à la suite de leur générosité. Enfin, je salue, encore une fois, le travail remarquable de toute l’équipe des Presses de l’Université du Québec.
Je dédie cet ouvrage à Camille Carrier, la femme de ma vie. En plus de m’apporter, depuis des années, son indéfectible soutien, c’est elle qui m’a suggéré d’écrire cet ouvrage. Elle en a aussi commenté le contenu des deux éditions, ce qui m’a permis de l’améliorer considérablement. Je n’oublie pas non plus la première conférence que nous avions donnée conjointement – le mot est bien choisi – en 1999 à l’IAE de Lille sur l’invitation d’Alain Desreumaux et de Thierry Verstraete, conférence qui portait sur la construction et la publication d’un texte savant et qui est un peu à l’origine de ce livre. Je remercie Camille d’avoir toujours été aussi présente et aussi stimulante. Je suis vraiment comblé.
Le métier de chercheur est aussi passionnant qu’exigeant, du moins pour celui qui aime l’idée de contribuer à la conversation savante sur un objet de recherche. Mais c’est un métier qui s’apprend et dans lequel chacun peut s’améliorer, notamment à la suite des revers quasi inévitables qu’il va subir s’il veut que ses travaux soient publiés dans des revues de haut niveau. Si ce petit ouvrage pouvait aider un peu certains chercheurs, en formation ou non, à participer au processus de constitution des connaissances, et peut-être même à le faire avec encore plus d’enthousiasme ou de confiance, ce serait tout simplement merveilleux.
1Dans cet ouvrage, j’ai privilégié l’usage de formules neutres ou je me suis limité à l’emploi du masculin uniquement dans le but de ne pas alourdir le texte.
TABLE DES MATIÈRES
AVANT-PROPOS
INTRODUCTION
Conversation, recherche, théorie et contribution théorique
RÈGLE N° 1
Formuler clairement l’objectif général de la recherche, le «problématiser» de façon convaincante et bien mettre en évidence l’intérêt de le poursuivre.
RÈGLE N° 2
Bien justifier les questions ou hypothèses de la recherche et rendre compte de son appareil théorique par un examen de la littérature approfondi, critique et bien structuré.
RÈGLE N° 3
Être très explicite sur tous les éléments du cadre méthodologique de la recherche, procéder d’une manière adéquate sur le plan technique et s’assurer que tout soit en accord avec l’objectif de la recherche et ses fondements théoriques.
RÈGLE N° 4
Présenter très clairement les résultats de la recherche et les analyser rigoureusement à l’aide de techniques appropriées.
RÈGLE N° 5
Discuter de manière approfondie de l’apport théorique des résultats et de ses implications, sans oublier de faire état des limites de la recherche.
RÈGLE N° 6
Attribuer au texte un titre informatif et accrocheur, et construire un résumé représentatif de son contenu et convaincant quant à la valeur de la recherche effectuée.
RÈGLE N° 7
Citer correctement et uniquement les travaux pertinents et publiés dans des documents crédibles, tout en attribuant les idées rapportées aux auteurs qui en méritent la paternité et après les avoir examinées dans le texte d’origine.
RÈGLE N° 8
Rédiger le texte dans un langage très clair, tout en respectant les règles et usages de la langue employée et en adoptant un style vivant et un ton approprié.
RÈGLE N° 9
Soumettre le texte à la critique avant de l’acheminer à une revue savante, bien choisir cette revue et, le cas échéant, réagir constructivement aux demandes de modifications.
RÈGLE N° 10
Persévérer, persévérer et persévérer…
RÈGLE D’OR
Agir en toute intégrité.
CONCLUSION
Formation des chercheurs et des évaluateurs
BIBLIOGRAPHIE
INDEX DES AUTEURS
INTRODUCTION
Conversation, recherche, théorie et contribution théorique
Faire de la recherche, c’est essentiellement s’engager dans une «conversation», une métaphore qui a inspiré Anne Huff (1999) pour décrire le processus de constitution des connaissances dans le champ particulier de la gestion ou de l’organisation. La première étape à franchir pour entrer dans cette conversation peut se résumer à mettre sur pied un projet de recherche en s’appuyant sur les carences, limites ou même ouvertures révélées par les résultats des travaux déjà publiés, puis à réaliser ce projet et, enfin, à soumettre le texte qui en rend compte à une revue savante. Le rédacteur en chef de cette revue (ou le rédacteur associé à qui il délègue cette tâche)¹ fera alors évaluer le manuscrit par des experts qui en recommanderont l’acceptation (avec des modifications mineures ou majeures à lui apporter) ou, beaucoup plus fréquemment, le refus, surtout dans certains domaines comme la gestion et lorsque les revues sont renommées. Notons que, dans la très grande majorité des cas, cette évaluation se fait en double aveugle (double blind review), c’est-à-dire sans que l’auteur et l’évaluateur connaissent l’identité de l’autre. Le rédacteur en chef n’est pas tenu de suivre les recommandations des évaluateurs, ce qui devient évident lorsqu’elles s’opposent (!), mais elles le guident dans la décision qu’il doit prendre. Ce système d’évaluation par les pairs (peer review) est extrêmement important parce qu’il exerce une influence déterminante sur le contenu et sur l’évolution des connaissances dans un champ particulier (Bedeian, 2004).
Dans cette perspective, la connaissance doit être vue comme un produit socialement construit au fil des recherches de chacun, comme l’avait bien exprimé Astley (1985) il y a un certain temps déjà. En ce sens, du moins pour l’étude de la réalité sociale, le chercheur serait «un constructeur de connaissances et non un découvreur de vérités cachées» (Cossette, 2012a, p. 8) qui auraient toujours été là, devant nous, n’attendant que d’être mises au jour. Toute connaissance serait plutôt la conséquence du succès obtenu par le chercheur dans ses efforts pour persuader un groupe de deux, trois ou parfois même quatre experts anonymes, en plus du rédacteur en chef, de l’intérêt de sa recherche. Faire de la recherche devient alors fondamentalement une entreprise de rhétorique – au sens noble du terme – où le chercheur s’efforce de convaincre ceux qui, au départ, détiennent entre leurs mains le sort de sa recherche. Il le fera en misant évidemment sur le contenu ou la substance de son travail, mais également en employant des techniques ou des procédés associés à la forme plutôt qu’au fond, bien que les deux soient intimement liés, comme on le verra dans cet ouvrage.
S’il y parvient, c’est-à-dire si le texte est publié² à la suite de son évaluation par les pairs et, très important, après que le chercheur lui a apporté les modifications demandées, une étape cruciale a assurément été franchie, mais la conversation n’en est tout de même qu’à ses premiers balbutiements. Ce sera maintenant au tour des autres chercheurs de décider si la contribution apportée peut les aider à faire avancer leurs propres idées, à problématiser l’objectif d’une nouvelle recherche, à justifier les questions précises ou les hypothèses auxquelles cet objectif donne lieu, ou encore à discuter les résultats de leur recherche. Ainsi, lorsqu’ils citeront le travail en question, de façon appropriée devrait-on ajouter, ces chercheurs se trouveront de facto à reconnaître la qualité et l’utilité du travail accompli. C’est un peu comme s’ils acceptaient que le chercheur se joigne à la conversation sur cet objet de recherche et qu’il contribue à l’orienter. L’important à retenir ici en ce qui concerne particulièrement le processus de constitution des connaissances, c’est qu’un texte non publié est un texte mort et qu’un texte non cité est un texte qui agonise³. Latour (1987) soutient même que d’être ignoré «est pire que d’être critiqué voire d’être cité à tort et à travers par des lecteurs peu attentifs⁴» (p. 62), ajoutant que «l’un des principaux problèmes à résoudre est d’intéresser quelqu’un suffisamment pour être lu; lorsque l’on mesure la difficulté d’intéresser quelqu’un à un argument, celle de convaincre paraît relativement mineure» (p. 63).
Mes propos ne visent certainement pas à décourager celui qui veut pratiquer le métier de chercheur. Mais personne n’a jamais dit que prendre part à une conversation savante était de tout repos. D’autant plus que, comme nous le rappelle Latour (1987), ce sont les autres qui, dans une large mesure, décident de la valeur de la contribution qu’on apporte en s’en servant ou non. Cela nous rappelle que c’est uniquement le temps qui permet vraiment d’apprécier l’ampleur de la contribution d’une recherche (Smith, 2008). Les revers sont monnaie courante, ce qui, dans de nombreux cas, est terriblement frustrant. Par ailleurs, faire de la recherche pose des défis que plusieurs trouvent très stimulants et même très agréables à relever. Et en suivant certaines règles, souvent implicites, le chercheur augmente ses chances d’être considéré comme un interlocuteur intéressant. Ce livre est consacré aux règles importantes à respecter pour y arriver.
Bref, le chercheur s’appuie sur les travaux existants pour entrer dans une conversation ou même pour en faire émerger une toute nouvelle lorsqu’il propose un point de vue radicalement différent et, si tout va bien, il contribue à la façonner. C’est comme si les connaissances déjà produites constituaient le contexte théorique dont le chercheur ne peut pas se libérer mais qui lui permet en même temps de donner vie à une nouvelle recherche qui, à son tour, enrichira ce contexte,