Découvrez des millions d'e-books, de livres audio et bien plus encore avec un essai gratuit

Seulement $11.99/mois après la période d'essai. Annulez à tout moment.

Semences de tromperie: Dénoncer les mensonges de l'industrie agrochimique et des autorités sur la sécurité des aliments transgéniques
Semences de tromperie: Dénoncer les mensonges de l'industrie agrochimique et des autorités sur la sécurité des aliments transgéniques
Semences de tromperie: Dénoncer les mensonges de l'industrie agrochimique et des autorités sur la sécurité des aliments transgéniques
Livre électronique406 pages5 heures

Semences de tromperie: Dénoncer les mensonges de l'industrie agrochimique et des autorités sur la sécurité des aliments transgéniques

Évaluation : 0 sur 5 étoiles

()

Lire l'aperçu

À propos de ce livre électronique

Comment l'industrie agro-chimique et la collusion politique ont imposé les produits génétiquement modifiés dans notre alimentation.

Semences de tromperies retrace les premiers développements de la biotechnologie aux États-Unis, et plus spécialement des organismes génétiquement modifiés (OGM), montrant comment dès 1999 le tout avait été planifié dans le moindre détail et a été depuis appliqué sans faille avec le soutien des politiques et des administrations centrales dont la puissante agence sanitaire, la FDA (Food and Drug Administration).

Ce livre raconte dans le détail en s’appuyant sur des documents scientifiques, et au besoin sur des interviews avec des chercheurs et des journalistes, comment Monsanto, en créant les premières semences génétiquement modifiées, a assuré son empire sur l’agroalimentaire à force de manipulations de données scientifiques, de recherches truquées et d’occultation de résultats alarmants pour la santé. Ce faisant, ce livre dénonce, preuves à l’appui, la collusion des pouvoirs politiques et de l’industrie agroalimentaire.

Cet ouvrage est également un excellent historique des échecs successifs des biotechnologies aux effets dévastateurs sur la vie des consommateurs dont le plus notoire a été le cas du L-tryptophane ayant occasionné une épidémie mortelle qui a frappé des milliers d’Américains en 1989.

Un récit éclairant et richement documenté sur les véritables dangers des OGM.

EXTRAIT

L’influence de Monsanto auprès du gouvernement faisait partie intégrante du plan, gouvernement dont le rôle serait de promouvoir la technologie au niveau international et de faire que les aliments soient rapidement distribués sur le marché, avant que la résistance ne s’organise. Un consultant biotech dira plus tard : « Le souhait de l’industrie est qu’à la longue, le marché soit tellement inondé qu’il n’y a rien que l’on puisse faire. Il ne reste plus somme toute qu’à abdiquer ». La vitesse anticipée de la conquête fut révélée dans une conférence par un intervenant d’une autre compagnie de biotechnologie. Il montra des graphiques projetant années par années le déclin des semences naturelles, estimant qu’en cinq ans, près de 95 % de la totalité des semences seraient génétiquement modifiées.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Semences de tromperies est devenu un best-seller mondial. En contribuant à éveiller les américains à leur triste réalité de cobayes, il est devenu une référence pour les mouvements de résistance aux OGM dans ce pays. Ce livre passionnant nous concerne aussi. - Gilblog

À PROPOS DE L'AUTEUR

Jeffrey Smith est l’un des tout premiers auteurs américains à avoir dénoncé avec vigueur les effets nocifs des OGM sur la santé.
Il milite depuis plus de dix ans dans le domaine des OGM. Il s’est également présenté au Congrès américain où il a proposé une législation pour enlever les OGM des cantines des écoles, et un second projet pour protéger les agriculteurs de la pollinisation des cultures génétiquement modifiées.
Smith est le fondateur et directeur de l’Institute for Responsible Technology. Il a un Master en administration des affaires et vit avec sa femme en Iowa.
LangueFrançais
ÉditeurMyoho
Date de sortie1 déc. 2017
ISBN9782916671208
Semences de tromperie: Dénoncer les mensonges de l'industrie agrochimique et des autorités sur la sécurité des aliments transgéniques

Lié à Semences de tromperie

Livres électroniques liés

Affaires pour vous

Voir plus

Articles associés

Avis sur Semences de tromperie

Évaluation : 0 sur 5 étoiles
0 évaluation

0 notation0 avis

Qu'avez-vous pensé ?

Appuyer pour évaluer

L'avis doit comporter au moins 10 mots

    Aperçu du livre

    Semences de tromperie - Jeffrey M. Smith

    1974.

    Introduction

    Le 23 mai 2003, le président Bush proposa une initiative pour en finir avec la faim en Afrique en distribuant des aliments génétiquement modifiés. Il dénonça aussi « les peurs infondées et non scientifiques » de l’Europe concernant ces nourritures car elles contrecarraient les efforts pour abolir la faim. Bush était convaincu que ces aliments génétiquement modifiés augmenteraient les rendements, accroîtraient les exportations américaines, et enfanteraient un nouveau monde. Sa rhétorique n’était pas neuve. Elle est transmise d’un président à l’autre, et servie aux Américains à coup de rapports médiatiques et de publicités de l’industrie agrochimique.

    Le message faisait partie d’un plan directeur manigancé par les corporations déterminées à contrôler les approvisionnements en vivres mondiaux. Ceci a été dévoilé lors de la conférence de l’industrie des biotechnologies de 1999, où un représentant d’Arthur Anderson Consulting Group expliqua comment sa compagnie avait aidé Monsanto à créer ce plan. Ils avaient demandé à ces derniers à quoi ressemblait leur idéal dans les quinze ou vingt prochaines années. Les directeurs de Monsanto décrivirent un monde où 100 % des semences commerciales étaient génétiquement modifiées et brevetées. Anderson Consulting travailla en amont de cet objectif, et développa la stratégie et les tactiques pour l’atteindre. Ils présentèrent les étapes et procédures pour obtenir une place dominante dans l’agroalimentaire dans un monde où les semences naturelles avaient pratiquement disparu.

    L’influence de Monsanto auprès du gouvernement faisait partie intégrante du plan, gouvernement dont le rôle serait de promouvoir la technologie au niveau international et de faire que les aliments soient rapidement distribués sur le marché, avant que la résistance ne s’organise. Un consultant biotech dira plus tard : « Le souhait de l’industrie est qu’à la longue, le marché soit tellement inondé qu’il n’y a rien que l’on puisse faire. Il ne reste plus somme toute qu’à abdiquer »¹. La vitesse anticipée de la conquête fut révélée dans une conférence par un intervenant d’une autre compagnie de biotechnologie. Il montra des graphiques projetant années par années le déclin des semences naturelles, estimant qu’en cinq ans, près de 95 % de la totalité des semences seraient génétiquement modifiées.

    Tandis que quelques membres de l’audience étaient consternés par cette arrogance et ce dangereux manque de respect envers la nature, pour l’industrie, cela représentait de bonnes affaires. Leur attitude était illustrée dans un extrait de publicités de Monsanto : « Ainsi vous voyez qu’il n’y a pas vraiment de différence entre la nourriture créée par Mère Nature et celle produite par l’homme. La seule chose artificielle est la ligne de partage tracée entre elles »².

    Pour faire appliquer leur stratégie, les compagnies de biotechnologies devaient contrôler les semences –aussi commencèrent-elles à faire des acquisitions, prenant possession de près de 23 % des entreprises semencières mondiales. Quant à Monsanto, il parvint enfin à la place dominante avec 91 % du marché des aliments génétiquement modifiés. Mais l’industrie agrochimique n’avait pas encore atteint son objectif de convertir les approvisionnements en semences naturelles. Les citoyens du monde, qui ne partageaient pas ses convictions que ces aliments étaient sûrs et meilleurs, n’avaient pas « somme toute abdiqué ».

    La résistance très répandue aux aliments GM a résulté en une épreuve de force mondiale. Les exportations américaines de maïs et de soja transgéniques sont au plus bas, et les nations africaines affamées n’en veulent même pas comme aide alimentaire. Monsanto est financièrement affaibli et cherche désespérément de nouveaux marchés. Le gouvernement américain est convaincu que la résistance de l’Union Européenne est le principal obstacle et est déterminé à changer ça. Le 13 mai 2003, les États-Unis ont déposé un recours auprès de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) accusant l’Union Européenne de politiques restrictives sur les aliments GM contraires aux accords internationaux.

    Le même jour, le ministre du commerce Robert Zoellick déclara : « Une recherche majoritairement scientifique montre que les aliments transgéniques sont sûrs et sains ». Ceci a été le mantra de l’industrie agrochimique dès le début, et est l’assomption-clé à la base de leur plan directeur, du recours à l’OMC, de la campagne du président pour abolir la faim. Et cependant, c’est faux.

    Les chapitres suivants révèlent que c’est l’influence de l’agrochimie, et non pas une recherche scientifique solide, qui a permis la vente de ces aliments. Si, d’ailleurs, la science devait suggérer quelque chose, ce serait que ces produits n’auraient jamais dû être autorisés.

    Tout comme la grandeur du plan était à vous couper le souffle, de même en est-il des distorsions et des dissimulations. Tandis que les histoires dans ce livre révèlent des manœuvres du gouvernement et des corporations dignes d’un roman d’aventures, l’impact des aliments transgéniques est personnel. La plupart des gens en Amérique du Nord les mangent à tous les repas. Ces chapitres non seulement démantèlent la position des États-Unis selon laquelle ces aliments sont sains, mais ils vous informent sur les démarches à suivre pour vous protéger ainsi que votre famille.

    Notes

    1.  Stuart Laidlaw, ‘Starlink Fallout Could Cost Billions’, The Toronto Star, January 9, 2001

    2.  Robert Cohen, Milk, the Deadly Poison, Argus Publishing, Englewood Cliffs, New Jersey, 1998, p. 133

    Supprimer les évidences

    Quand Susan ouvrit la porte, elle fut étonnée de voir plusieurs reporters debout devant elle. Plusieurs d’entre eux sautaient de leur voiture en courant vers elle et elle pouvait voir les autres voitures et les camions des journaux télévisés stationnant le long de la rue.

    « Mais vous savez tous que nous ne pouvons rien dire de ce qui s’est passé. Nous pourrions être poursuivis en justice et – ¹»

    « C’est bon, interrompit le reporter de Channel Four Television, en agitant un journal devant son visage. Ils ont relâché votre mari. Il peut nous parler. » Susan prit le journal.

    « Arpad, viens vite », appela-t-elle son mari.

    Arpad Pusztai, un homme distingué, sexagénaire, approchait déjà. Tandis que sa femme lui montrait le document, le reporter se glissa à l’intérieur de la maison. Mais Arpad ne s’en aperçut pas ; il fixait le journal que sa femme lui avait tendu.

    Il reconnut immédiatement le titre –Le Rowett Institute, Aberdeen, Scotland. Il était l’un des principaux instituts de nutrition dans le monde, et son employeur pendant trente-cinq ans –jusqu’à sa soudaine suspension il y avait juste sept mois. Et c’était là, clairement écrit. Ils avaient cessé leur ordre gag. Il pouvait parler.

    Le document était daté du jour même, le 16 février 1999. En fait, moins de vingt minutes plus tôt, trente reporters étaient à la conférence de presse du Rowett Institute à écouter son directeur, le professeur Phillip James, mentionner en passant que les restrictions de conversation à la presse concernant Arpad Pusztai avaient été levées. Avant même que James n’ait fini sa phrase, les reporters avaient déjà atteint la porte de sortie. Ils avaient sauté dans leur voiture et roulé tout droit chez Pusztai, à Ashley Park North, une adresse qu’ils connaissaient par cœur puisqu’ils y avaient pratiquement campé depuis sept mois. À présent les trente reporters, avec leur caméra et leur magnéto, étaient entassés dans le living-room de Pusztai.

    Arpad Pusztai lut le document –deux fois. Tandis qu’il relevait la tête, les journalistes commencèrent à lui poser des questions tous à la fois. Il sourit, et respira plus aisément qu’il ne l’avait fait depuis un bon bout de temps. Il n’avait pas perdu l’espoir. Maintenant il pouvait enfin communiquer ce qu’il savait sur les dangers des aliments transgéniques.

    L’histoire d’Arpad Pusztai fit la une des journaux en Europe pendant des mois, alerta les lecteurs sur les sérieux risques de santé liés aux transgéniques. Ceci fut, toutefois, à peine mentionné dans la presse américaine ; le groupe de surveillance des médias, Project Censored, le dénonça comme l’un des dix évènements de l’année dont il y a eu le moins de comptes rendus². En fait, les plus grands médias américains évitèrent presque toute la controverse sur les transgéniques jusqu’en mai 1999. Mais ce fut à propos de la protection des papillons monarques contre le pollen du maïs transgéniques, et non pas de la sécurité alimentaire humaine.

    Ce ne fut que lors de l’immense rappel de nourriture occasionné par le maïs StarLink® que les Américains découvrirent qu’ils mangeaient des aliments transgéniques tous les jours. En outre, la presse américaine fut forcée de mener des interrogatoires pour savoir si les aliments GM étaient sûrs. Jusqu’à cet instant, les médias avaient décrit la résistance européenne aux cultures transgéniques américaines comme un anti-américanisme non scientifique. Mais comme l’a montré l’histoire d’Arpad Pusztai, les sentiments anti-OGM (Organismes Génétiquement Modifiés) des Européens s’étaient de loin embrasés à cause des plus grands risques de santé encourus que par les rares réactions allergiques attribuées à StarLink.

    Premier choc

    Arpad Pusztai était plus que bon dans son job. Dans d’autres milieux, on l’aurait déclaré excellent. Mais dans le monde conservateur et astreignant de la biologie expérimentale, l’éloge que l’on lui accordait était « consciencieux ». La minutie de Pusztai pendant plus de cinquante ans l’avait placé au sommet de sa discipline. Il avait publié près de 300 articles scientifiques, écrit ou édité douze ouvrages, et collaborait régulièrement avec d’autres chercheurs de renommée mondiale.

    En 1995, Arpad, sa femme Susan –scientifique senior elle aussi–, et des collègues du Rowett Institute, l’Institut écossais de recherche agricole, et l’université de biologie de Durham, furent récompensés d’une bourse de recherche d’un montant de 1.6 millions de livres par le Département de l’Agriculture, de l’Environnement et de la Pêche. Choisis parmi plus de vingt-sept concurrents, ce consortium de scientifiques, avec Arpad Pusztai comme coordinateur, fut désigné pour créer un modèle testant les aliments génétiquement modifiés, et vérifiant qu’ils étaient sains à manger. Leur test de vérification devait devenir la méthode standard utilisée en Grande-Bretagne et adoptée à travers l’Union Européenne.

    À l’époque de la bourse, aucune recherche n’avait été publiée sur la sécurité alimentaire des OGM, et la communauté scientifique mondiale très concernée se posait de nombreuses questions. Par conséquent, Pusztai et ses collègues avaient été chargés d’élaborer un test de régime pour créer la confiance et, bien sûr, être minutieux.

    La recherche était engagée depuis près de deux ans quand, en avril 1998, le professeur Phillip James, le directeur du Rowett Institute entra dans le bureau de Pusztai et plaça une énorme liasse de documents sur sa table. Il appela Susan dans la pièce voisine.

    Il dit aux Pusztai que les ministres européens étaient sur le point de se rencontrer à Bruxelles pour voter sur la législation à adopter concernant les organismes génétiquement modifiés. Les documents étaient des soumissions des compagnies de biotechnologies cherchant l’approbation de leurs variétés de soja, de maïs et de tomates transgéniques. Le Ministre britannique de l’Agriculture, des Forêts et de la Pêche (MAFF) assistait à la conférence et avait besoin d’une base scientifique avec laquelle les recommander.

    Le professeur James était l’un des douze scientifiques qui composaient le Comité Consultatif sur les Nouveaux Aliments et Process (ACNFP) chargés d’évaluer les aliments transgéniques mis en vente en Grande-Bretagne. James s’occupait des analyses nutritionnelles.

    Pusztai jeta un coup d’œil à la pile de documents. Il y avait six ou sept dossiers présentant chacun une requête différente pour approbation – près de 700 pages en tout. Il savait que James et les onze autres membres du Comité ne liraient jamais euxmêmes ces documents. Ils étaient tous très occupés. Le professeur James, par exemple, était membre d’une douzaine de pareils comités et intervenait dans de nombreuses conférences internationales. Il était tellement souvent absent de l’Institut que Pusztai l’accueillait régulièrement dans les couloirs d’un « Salut, étranger ». En outre James et la plupart des autres n’étaient pas de vrais scientifiques. Ils étaient des hommes de comités –engagés à se procurer des fonds, à établir des règlements, et s’occupant de la politique des sciences. De l’autre côté, Arpad et Susan avaient travaillé depuis plus de deux ans sur l’élaboration de méthodes pour l’approbation des aliments génétiquement modifiés. Et, comme faisant partie de leur bourse, ils effectuaient sur de nouvelles variétés de pommes de terre transgéniques que le ministre écossais espérait commercialiser. Non seulement en connaissaient-ils la théorie, mais encore en avaient-ils une expérience pratique. Les Pusztai étaient par conséquent les scientifiques parmi les plus qualifiés au monde pour lire et évaluer la pile de documents que leur avait tendus James.

    « Dans combien de temps vous faut-il cette recommandation ? » demanda Pusztai.

    « Deux heures et demie », répondit James.

    Arpad et Susan se dépêchèrent de se mettre au travail. Ils divisèrent les soumissions et se concentrèrent droit sur l’évidence la plus substantielle des documents –le plan de recherche et les données.

    Tandis qu’Arpad Pusztai consultait une soumission, puis une autre, il fut sidéré.

    « En tant que scientifique, j’étais vraiment choqué, dit-il. C’était la première fois que je réalisais quelles pitoyables évidences étaient présentées au comité. Il manquait les données, le plan de recherche était presqu’inexistant, et les tests trop superficiels. Leurs cas n’étaient pas très convaincants. Et une partie du travail très mal faite. J’insiste, c’était un vrai choc. »

    Alors qu’Arpad et Susan avaient d’abord pensé que deux heures et demie seraient juste assez pour donner au ministre des recommandations préliminaires sur les soumissions, il s’avéra qu’ils eurent beaucoup plus de temps pour lui donner une réponse définitive. La recherche présentée était inadéquate pour démontrer que les aliments génétiquement modifiés décrits étaient sains à la consommation humaine ou animale. Ils avaient tous échoué à produire des évidences suffisantes. Pusztai appela le ministre.

    « Je lui dis, sur la base de ce que j’avais lu jusqu’à maintenant, même après deux heures et demie de vérification, qu’il valait mieux être extrêmement prudent et ne pas l’accepter. Et il répondit quelque chose que je trouvai absolument surprenant : ‘Je ne sais pas pourquoi vous me dites ça, puisque le professeur James l’a déjà accepté.’ »

    Pusztai était stupéfait. Il s’avéra que non seulement le comité avait entériné les soumissions des aliments transgéniques établies sur de pitoyables évidences, mais que les approbations avaient déjà été accordées deux ans auparavant –James voulait simplement des confirmations scientifiques pour le ministre. Et ni Pusztai, ni les autres scientifiques travaillant dans cette spécialité, ou encore les 58 millions de Britanniques ne savaient qu’ils mangeaient déjà des tomates, du soja, et du maïs transgéniques –et cela depuis près de deux ans. Les approbations avaient été faites sous le sceau du secret.

    L’incident fut un moment décisif pour Pusztai. Jusqu’à cet instant, il avait cru que le comité scientifique et régulateur examinerait soigneusement et minutieusement cette nouvelle technologie. Mais maintenant il était inquiet. Très inquiet.

    Après cet appel téléphonique, Pusztai s’entretint avec le professeur James et lui fit savoir pourquoi il pensait que l’approbation des aliments transgéniques par le comité était une erreur. Il révéla que certains éléments critiques du dossier manquaient et décrivit comment le modèle mis en place par son équipe de chercheurs était bien plus rigoureux et détaillé que ce qui était présenté par les compagnies de biotechnologies. Il décelait déjà dans les pommes de terre qu’il étudiait des indices de danger qui n’étaient pas pris en compte dans les recherches superficielles des tomates, soja, et maïs transgéniques.

    Le professeur James ne défendit pas la décision du comité. En fait, il soutenait les conclusions de Pusztai avec enthousiasme. Si des chercheurs de son institut avaient créé une meilleure façon de tester les OGM, réfléchit-il, ceci pourrait résulter en de très lucratifs contrats –des millions de livres afflueraient.

    « Il pensait que ce serait une bonne opportunité pour obtenir davantage de fonds pour la recherche, remarqua Pusztai. Vous comprenez, nous sommes tous attachés à l’argent, tous les chercheurs. Il croyait que nous allions poursuivre nos recherches et aboutir à d’excellents résultats. »

    D’un autre côté, Pusztai n’était pas très enthousiaste. Il était très inquiet au sujet des tomates, soja, et maïs transgéniques non testés, vendus dans les épiceries. Ceci était aggravé par le fait que le soja et le maïs, et leurs dérivés, entrent dans la composition de 70 pour cent des aliments préparés.

    À mesure que Pusztai continuait ses recherches, ses appréhensions augmentaient.

    Patates chaudes

    Le groupe de scientifiques de Pusztai modifiait l’ADN d’une pomme de terre pour réaliser ce qu’aucune pomme de terre n’avait réalisé auparavant. Il s’agissait de la faire produire son propre pesticide, une lectine, trouvée normalement dans les perceneige pour les protéger des pucerons et autres insectes. L’objectif de l’industrie agrochimique était de fabriquer en masse cette combinaison pomme de terre/insecticide, en soulageant l’agriculteur du fardeau de la pulvérisation de ses champs. Et en plus de cette recherche, Pusztai et son équipe devaient tester les effets de la pomme de terre sur les rats.

    Les pommes de terre génétiquement modifiées étaient déjà vendues et consommées aux États-Unis. Leur ADN était collé à un gène de bactérie du sol identique au Bacillus anthrax. Le gène ajouté causait la création dans la pomme de terre de son propre pesticide appelé toxine Bacillus thuriengensis ou Bt. Si, par malheur, un insecte mangeait une de ces merveilles transgéniques, le Bt, fabriqué par chaque cellule de la plante, le tuait immédiatement. Le même Bt, créateur de gènes, avait été placé dans l’ADN du maïs et des plants de coton, vendu et consommé aux États-Unis, et aussi officiellement classé comme pesticide par l’Agence américaine de la Protection de l’Environnement (EPA). Toutefois, la Food and Drug Administration (FDA, l’agence sanitaire américaine) avait affirmé que selon elle, les aliments génétiquement modifiés ne présentaient aucun danger et offraient les mêmes apports nutritionnels que leurs homologues naturels. Cette assomption est la pierre de touche de la politique américaine, permettant ainsi que des millions d’hectares de cultures transgéniques soient plantées, vendues et consommées sans aucun test sanitaire préalable.

    L’équipe de Pusztai modifia un plant de pomme de terre créant un pesticide différent –une lectine, un insecticide naturel que produisent certaines plantes pour se protéger des insectes. Arpad Pusztai avait passé près de sept ans à étudier les propriétés de cette lectine. Il en était l’expert mondial et il savait que celle-là particulièrement était propre à la consommation. En fait, dans l’une de ses publications, il nourrissait des rats de l’équivalent de 800 fois la quantité de lectine que produisaient les pommes de terre transgéniques, et il n’y avait eu aucun dégât. Aussi, lorsqu’il nourrit les rats avec ses pommes de terre fabriquant cette lectine, il ne s’attendait à aucune complication.

    Ce que lui et son équipe découvrirent fut un vrai choc. Tout d’abord, le contenu nutritionnel des pommes de terre transgéniques était considérablement éloigné de leurs semblables non-GM, bien qu’elles aient poussé dans des conditions identiques. Par exemple, une rangée de pommes de terre transgéniques, contenait 20 pour cent de protéines en moins qu’une rangée de non transgéniques. Ensuite, même le contenu nutritionnel de pommes de terre parentes génétiquement modifiées, descendant d’une même pousse plantée dans des conditions identiques, était typiquement différent.

    Si les résultats de Pusztai étaient limités à ces faits, ils auraient pu, à eux seuls, saper tout le processus régulateur des aliments transgéniques. La législation de la FDA reposait sur l’assomption que les produits génétiquement modifiés étaient stables. Les niveaux des nutriments n’étaient pas censés varier.

    Mais ces résultats furent complètement éclipsés par l’autre découverte encore plus inquiétante. Pusztai s’aperçut que les rats nourris avec les pommes de terre transgéniques souffraient de troubles du système immunitaire. Leurs globules blancs [leucocytes] répondaient moins bien que ceux de rats nourris avec des pommes de terre non-GM, ce qui les rendait plus vulnérables aux infections et aux maladies. Les organes reliés au système immunitaire, le thymus et la rate, étaient endommagés. Comparés aux autres rats, ceux nourris de transgéniques étaient plus petits, avaient un cerveau, un foie et des testicules moins développés. D’autres avaient des tissus élargis, incluant le pancréas et les intestins. Certains souffraient d’une atrophie partielle du foie. Quoi d’autre, des changements structurels significatifs et une prolifération de cellules dans l’estomac et les intestins des rats nourris de pommes de terre transgéniques signalaient une augmentation potentielle de cancers.

    Les rats développèrent ces sérieux problèmes de santé après seulement dix jours. Certains de ces changements persistèrent après 110 jours, ce qui correspond à une période de dix ans chez les humains.

    En préparant le régime, Pusztai avait été particulièrement minutieux. Des comparaisons avaient été établies entre des rats nourris de pommes de terre transgéniques, de pommes de terre naturelles, et de pommes de terre naturelles piquées de petites quantités de lectine pure comme dans les pommes de terre génétiquement modifiées. Les chercheurs continuèrent avec des préparations variées, des pommes de terre crues, bouillies, au four, et en différentes quantités. Ils firent varier le contenu total de protéine du régime et testèrent ces variations au bout de périodes de 10 et de 110 jours. Ces protocoles de test avaient tous été soigneusement scrutés et acceptés à l’avance par le bureau des fonds du gouvernement et compatibles avec plusieurs publications.

    À la fin, seuls les rats alimentés avec des pommes de terre transgéniques souffrirent de sérieux effets négatifs. De toute évidence, il était clair que les lectines n’étaient pas la cause principale de troubles de santé. Il semblait plutôt que la cause de détériorations d’organes et de dysfonctionnement chez les jeunes rats provenait du process transgénique lui-même. « Nous avons utilisé exactement les mêmes méthodes de bio-ingénierie que les compagnies agrochimiques », expliqua Pusztai.

    Il savait que ces résultats indiquaient clairement que les aliments transgéniques déjà adoptés et consommés chaque jour par des centaines de millions de personnes pourraient créer des problèmes de santé similaires chez les humains, surtout les enfants.

    Pusztai était dans une terrible situation. Il n’ignorait pas que si ses pommes de terre avaient été soumises aux mêmes études superficielles et processus d’approbation que le soja, le maïs, et les tomates transgéniques, elles seraient passées à travers le processus d’approbation du Comité Consultatif sur les Nouveaux Aliments et (aliments) Préparés (ACNFP) sans problème. Et elles auraient fini sur les rayons de supermarchés et les casseroles du monde entier.

    Et Pusztai savait que les recherches superficielles menées sur le soja, le maïs, et les tomates transgéniques n’auraient pas pu relever ce genre de problèmes sérieux qu’il avait rencontrés. En outre, si les humains développaient des complications similaires aux rats, ça prendrait des années pour se manifester et ce serait extrêmement difficile pour quiconque de suspecter les aliments transgéniques.

    « J’avais en main les preuves qu’il existait de sérieux dangers avec les aliments transgéniques, dit Pusztai. Et il fallait deux ou trois ans pour être publié alors que ces produits étaient déjà sur le marché sans test biologique rigoureux comme ceux que nous avons réalisé sur nos pommes de terre GM. » S’il attendait aussi longtemps, pensa-t-il, qui sait quel genre de préjudice pourrait être infligé aux consommateurs qui ne se doutaient de rien.

    Tandis qu’Arpad Pusztai examinait ces ramifications et compilait ses résultats en vue de les publier, il fut contacté par un show télévisé britannique « Le Monde en action ». Ils étaient très désireux de présenter l’opinion d’un scientifique sur la sécurité des aliments transgéniques, et particulièrement la sienne. Ils savaient que son équipe était la seule au monde à mener des tests minutieux sur ces produits.

    Leur demande jeta le trouble en Pusztai. Le code traditionnel de sa pratique dicte au scientifique de taire ses résultats jusqu’à ce qu’ils soient présentés lors d’une conférence ou d’une publication. Mais son code éthique lui dicta de prévenir immédiatement le (public) au sujet de ses découvertes.

    Pusztai fut aussi encouragé à les dévoiler par le fait que la recherche était soutenue par des fonds publics. « Les contribuables britanniques ont dépensé 1.6 millions de livres pour cette recherche. [Ils] ont payé pour ça, se dit-il. Il savait aussi que l’interview lui permettrait de faire un résumé de deux ou trois minutes. Par conséquent, il ne dévoilerait pas le contenu plus détaillé qu’il réservait à la publication³.

    Il demanda la permission à James, qui l’encouragea. Ils furent, toutefois, d’accord que l’intervention de Pusztai ne révèle pas à l’avance le détail des données qui serait plus approprié dans son article de recherche. James lui enjoignit l’attaché de presse du Rowett Institute pour qu’il l’enregistre.

    L’interview de Pusztai dura à peu près deux heures et fut éditée pour une émission de 150 secondes. La scène finale incluait Pusztai disant que l’effet expérimental des pommes de terre transgéniques sur les rats « était un léger retard de la croissance et un effet sur le système immunitaire. Une pomme de terre génétiquement modifiée, après 110 jours, les rendait moins réactifs ».

    Interrogé pour savoir s’il mangerait des aliments transgéniques, il répondit : « Si j’avais le choix, je n’en consommerais pas à moins d’avoir des évidences expérimentales comparables à celles qu’il produisait pour ses pommes de terre génétiquement modifiées. Je crois vraiment que cette technologie peut marcher. Et si l’on arrive à démontrer que ces aliments peuvent être sûrs, alors nous aurons rendu un fier service à nos concitoyens. J’y crois dur comme fer, et c’est la raison pour laquelle je demande de resserrer les règles et les standards ».

    Il ajouta, « On nous garantit que : ‘C’est absolument sûr. Nous pouvons en manger tout le temps. Nous devons en manger tout le temps. Il n’y a aucun risque, rien ne peut nous arriver.’ Mais en tant que scientifique, travaillant activement dans ce domaine, je pense qu’il est injuste, très injuste de se servir de nos concitoyens comme cobayes. Nous devons trouver les cobayes dans les laboratoires⁴ ».

    Pusztai était conscient que ses commentaires allaient faire sensation, mais il n’avait pas imaginé l’étendue de la controverse que ça avait soulevée.

    Irruption dans les médias

    Contrairement au manque complet d’informations sur les OGM (Organismes Génétiquement Modifiés) aux États-Unis, la controverse se développait à petit feu en Grande-Bretagne. La Monsanto Corporation, le géant de la biotechnologie, achetait des pages entières de publicité dans les journaux pour vanter les bienfaits des aliments transgéniques et essayer de séduire un public sceptique. D’un autre côté, les plus grands magazines publiaient des articles et éditoriaux accusant ces publicités de tromper les citoyens avec leurs fausses déclarations. Les scientifiques citaient des articles exprimant des doutes sur la sécurité de ces produits. Et le public était déjà échaudé par la crise de la vache folle, qui avait causé la mort de plusieurs personnes, en dépit des garanties précoces du gouvernement. C’est dans ce terrain fertile qu’éclata la bombe de Pusztai.

    Le dimanche 9 août 1998, le jour avant l’émission « Le Monde en action », la station diffusa des annonces de l’interview de Pusztai, en soulignant certains passages et en priant les auditeurs de rester branchés le lendemain. À minuit, la station envoya un communiqué de presse aux journaux britanniques. Certains journalistes commencèrent immédiatement à appeler Pusztai, ce qui le garda éveillé une bonne partie de la nuit.

    Lorsqu’il arriva au bureau, « l’institut était déjà bombardé par toutes sortes de questions de la presse et du Ministère de l’Agriculture à Londres », raconta Pusztai.

    Mais en fin de journée, le téléphone resta muet. Au départ, Pusztai crut que l’agitation s’était calmée, et qu’il pouvait retourner à son travail. « Je découvris plus tard que l’on m’avait, en quelque sorte, fait taire à onze heures du matin, se souvint-il. Le directeur avait pris en main la totalité des déclarations à la presse, en faisant basculer mes appels sur son téléphone et en interceptant les fax et les emails, tant et si bien que pas même notre fils ne pouvait me contacter. »

    Entre-temps, le professeur James jouissait d’une popularité sans précédent. « Il passait à la télé toutes les dix minutes ou à peu près. Il donnait son interprétation de la valeur de ce travail –une immense avancée scientifique, se rappela Pusztai. Il essayait d’exploiter chaque instant de cette publicité. » Il diffusa même ce jour-là un communiqué de presse sur le groupe de chercheurs sans demander l’avis de Pusztai. Celui-ci disait : Pour plus d’information, contacter le Docteur Phillip James.

    « Il pensait que c’était quelque chose d’extraordinaire qui allait le rendre célèbre », dit Pusztai.

    James avait raison d’être ambitieux. Tony Blair, le Premier ministre britannique, lui avait demandé de dresser les plans pour une nouvelle Agence Alimentaire Standard –une sorte de version britannique de la FDA américaine, mais qui ne s’occuperait que d’aliments. Ce devait être une agence prestigieuse avec, à la clé, l’embauche de 3.000 agents. Et tout le monde pensait que le professeur Phillip James, docteur en médecine, en serait le premier directeur –une nomination politiquement significative.

    A ce moment, James semblait vouloir en rajouter et peut-être impressionner son futur patron Tony Blair. Aussi réquisitionna-t-il la publicité et commença-t-il à donner des informations sur la recherche de pommes de terre transgéniques.

    Toutefois, le problème était le suivant : il avait tort. Les informations qu’il donnait à la presse, qu’il écrivait dans le communiqué, dont il parlait à la télé étaient fausses. Il ne s’était pas soucié de vérifier les faits avec Pusztai ou l’un des membres de son équipe.

    La plus flagrante de ses erreurs concernait le type de lectine utilisée par l’équipe de chercheurs. Ils avaient manipulé une pomme de terre pour qu’elle produise une lectine des perce-neige, appelée GNA, connue pour son innocuité auprès des rats et des humains. Toutefois, celle que décrivait

    Vous aimez cet aperçu ?
    Page 1 sur 1