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Quelle pédagogie pour l'étudiant juriste ?: Expérimentations, modélisations, circulation
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Quelle pédagogie pour l'étudiant juriste ?: Expérimentations, modélisations, circulation
Livre électronique685 pages7 heures

Quelle pédagogie pour l'étudiant juriste ?: Expérimentations, modélisations, circulation

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À propos de ce livre électronique

Existe-t-il des pratiques pédagogiques contribuant à la réussite des étudiants de premier cycle en droit ? N’est-ce pas plus difficile d’être bon professeur que fin juriste ? Quelles sont les qualités pédagogiques requises des professeurs du XXIe siècle ? Comment réduire le taux d’échec des étudiants en difficulté et comment aider les meilleurs à progresser ? L’interrogation pédagogique préoccupe-t-elle les universitaires ? Le contexte concurrentiel les influencent-ils ? S’agit-il d’un véritable défi pour les universités d’aujourd’hui et de demain ? Le présent ouvrage apporte des réponses à ces grandes questions au coeur de la recherche de la réussite des étudiants et alimente salutairement un débat peu mené jusque-là.
LangueFrançais
ÉditeurBruylant
Date de sortie17 déc. 2012
ISBN9782802738961
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    Aperçu du livre

    Quelle pédagogie pour l'étudiant juriste ? - Bernard Beignier

    couverturepagetitre

    © Groupe De Boeck s.a., 2012

    EAN 978-2-8027-3896-1

    Cette version numérique de l’ouvrage a été réalisée par Nord Compo pour le Groupe De Boeck. Nous vous remercions de respecter la propriété littéraire et artistique. Le « photoco-pillage » menace l’avenir du livre.

    Pour toute information sur notre fonds et les nouveautés dans votre domaine de spécialisation, consultez notre site web :

    www.bruylant.be

    Éditions Bruylant

    Rue des Minimes, 39 • B-1000 Bruxelles

    Tous droits réservés pour tous pays.

    Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent ouvrage, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.

    Sommaire

    Avant-propos par Bernard BEIGNER

    I. – INTRODUCTION

    Introduction par Magalie FLORES-LONJOU, Céline LARONDE-CLÉRAC, Agnès DE LUGET

    II. – PARTIE I

    LA PÉDAGOGIE UNIVERSITAIRE : ENTRE CONSTATS

    ET EXPÉRIMENTATIONS, UN TERRITOIRE EN JACHÈRE

    Le rôle de l’accompagnement dans la construction identitaire de l’étudiant en sciences humaines et sociales en France par Fadila DIB

    Mieux connaitre les étudiant(e)s pour mieux les accompagner par Alban JACQUEMART

    Étudiants : mode d’emploi par Kathia WARION

    Du forum étudiant à l’espace-cours Moodle : essais de pédagogie appropriative et différenciée par Johan HERVOIS

    Entre stimulation et émulation : la pédagogie des travaux dirigés d’histoire du droit par Arnaud JAULIN

    Faut-il repenser les exercices juridiques ? par Laurent KACZMAREK

    La double formation Droit + École de Commerce. L’exemple des pratiques pédagogiques développées par l’ESSEC avec ses universités partenaires par Hugues BOUTHINON-DUMAS

    Les technologies de l’information et de la communication au service de l’apprentissage du droit par Grégory BEAUVAIS ET El Hassan BEZZAZI

    Une approche pédagogique différenciée : le DUT Carrières Juridiques en alternance par Muriel FALAISE

    Le service d’aide à la réussite de la Haute École de la province de Liège : description et analyse par Florence GUISSE

    III. – PARTIE II

    LA PÉDAGOGIE UNIVERSITAIRE :

    UN ESSAI DE MODÉLISATION

    Approche numérique : modèle d’apprentissage de l’histoire du droit par Jacques BOUINEAU ET Marc DEVEDEIX, Alessandro PALOMBA

    L’école de droit de Lyon : une expérience pédagogique innovante de l’enseignement du droit par Gérald DELABRE

    Le particularisme de l’enseignement du droit à Luxembourg par Elise POILLOT

    L’enseignement et l’apprentissage dans les facultés de droit au Canada par Annie ROCHETTE

    Réflexions d’un universitaire français sur le modèle canadien par Pascal ANCEL

    Décisions et innovations curriculaires dans l’enseignement juridique au Brésil par Maria Cécilia LOREA LEITE

    Le renouvellement des méthodes d’enseignement dans un contexte de concurrence entre établissements d’enseignement supérieur juridique par Sandrine CLAVEL

    IV. – PARTIE III

    LA PÉDAGOGIE UNIVERSITAIRE :

    UN ESPACE DE CIRCULATION ET DE DIFFUSION

    De l’espace scénique à l’espace d’apprentissage : deux expériences pédagogiques différentes liées au théâtre et au cinéma : par Brigitte BASTIAT ET Claudie LANDY

    La culture visuelle dans la formation des juristes en Europe par Barbara VILLEZ ET Leslie James MORAN

    La littérature et le cinéma au service du droit ou vecteur juridique par Lionel MINIATO, Agnès DE LUGET ET Magalie FLORES-LONJOU

    La culture dans l’enseignement du droit par Xavier DAVERAT

    V. – CONCLUSIONS

    Conclusion d’un juriste par Sébastien PIMONT

    Conclusion d’un philosophe par Laurence CORNU

    VI. – ANNEXES

    Annexe 1 : questionnaire mieux connaître les étudiants pour mieux les accompagner

    Annexe 2 : fiche de premier entretien

    Annexe 3 : « étudiants : mode d’emploi » analyse synthetique des 180 réponses

    Annexe 4 : programme de travail du groupe numérique

    Annexe 5 : désignation des responsables et des tâches

    Annexe 6 : décision de la cour d’appel (civile) du 16 mai 2001 « W.R.-K. »

    Annexe 7 : récapitulatif des nationalités – Université du Luxembourg (hiver 2009-2010)

    Bibliographie

    Avant-propos

    par

     Bernard BEIGNER

     Recteur de l’Académie d’Amiens

    Enseignant-chercheur : tel est le titre et la fonction de l’universitaire depuis la loi du 26 janvier 1984 sur l’enseignement supérieur. Mais dans ce double intitulé, un terme l’emporte-t-il ? Empereur d’Autriche et roi de Hongrie : l’Habsbourg tenait d’abord sa légitimité de la couronne impériale ; Roi de France et de Navarre : prépondérance des lys sur les chaînes ; Cardinal-Archevêque : le chapeau sur la mitre ; Député-maire : l’Assemblée avant la mairie.

    À l’heure de la recherche de l’excellence – valeur de la plume, ou du clavier – le mérite de l’enseignement – notamment par la parole et le micro – est peut être le plus délicat à être reconnu. Osons cette remarque : n’est-il pas plus difficile d’être bon professeur que fin juriste ? Question qui emporte la réponse.

    Pour autant, s’il est bien dans les facultés de droit – pérennes autant que virtuelles – un débat jamais ouvert, c’est bien celui de la pédagogie. Il est vrai que le principe constitutionnel, voire existentiel, de l’indépendance du professeur des universités soulève, le plus souvent, une fin de non-recevoir commode et péremptoire. Un professeur sait enseigner puisqu’il est professeur. Argument d’autorité que nul ne conteste dans la mesure où il permet de rendre hommage au collègue tout en s’en protégeant.

    Le colloque de la Faculté de La Rochelle constitue donc une hardiesse, sinon une prouesse, puisqu’il permet de s’interroger sur le cœur même de la vie universitaire. Qu’en soient remerciées les trois instigatrices Mesdames Magalie Flores-Lonjou, Agnès de Luget et Céline Laronde-Clérac ; mouches d’un lent coche ou reines de ruches fécondes.

    Les juristes aiment un droit intemporel ; ils cultivent souvent la nostalgie de leurs belles années d’étudiant (un professeur n’a-t-il pas été, presque toujours, un étudiant pour lequel le cursus fut une rivière calme – parfois un morne lac – allant se jeter dans un long fleuve tranquille ?) : pourquoi changer ce qui nous a si bien réussi ? Les générations se dégradent : certes, mais lesquelles ? Les aînés ou les juniors ? La biologie amène à une conclusion sans appel.

    Que faut-il au professeur de nos temps ? D’abord, comprendre un étudiant qui n’a jamais connu ce que fut le franc, ne sait pas tenir une plume, connaît en latin référendum et etc. Mais qui est né avec la mondialisation et l’informatique et qui sait dire autre chose que my tailor is rich. Choc, voire conflits des cultures. Si l’étudiant doit se hisser jusqu’au maître, celui-ci a pour devoir initial de descendre vers lui : il faut étudier l’étudiant et, ensuite, si on aime son métier, l’aimer car enseigner c’est donner : le cœur avant le cerveau.

    Maître d’humilité, le professeur doit, ensuite, susciter du goût envers une matière inconnue, parfois rébarbative. Il faut allier le miel de la justice au vinaigre du droit. Combinaison subtile : mais le vinaigre au miel n’est pas sans saveur.

    Puis, il lui faut apprendre à apprendre : les méthodes avant les connaissances. Du moins, pas de connaissances sans méthodes d’exploitation : pas de vinaigre sans huile. Ces méthodes sont un apprentissage de beaucoup de choses dans la vie. Exercices d’analyse ou de synthèse ; de commentaire de texte ou de construction d’un texte : cette gymnastique de l’esprit servira tout le temps et partout. Le juriste apprend le jeu de la société : il n’y sera jamais perdu. « Le droit mène à tout », d’une certaine manière parce qu’il permet de mieux comprendre un peu tout.

    C’est là, l’ancienne et nouvelle clé du succès des facultés de droit. « Faire son droit », somptueuse expression.

    On demandait un jour à Péguy à quoi sert l’Université et il répondit d’un trait : « À former un peuple ! ».

    Les facultés de droit adjoindront : « Et à faire d’un peuple une nation ».

    Qui pourrait trouver lassante une telle mission ?

    I. – Introduction

    Introduction

    par

     Magalie FLORES-LONJOU, Céline LARONDE-CLÉRAC,

     Agnès de LUGET

     Maîtres de conférences en droit public et en droit privé et sciences criminelles,

     CEREGE LR-MOS et CEJEP, Université de La Rochelle

    I. – Origine

    Si l’ouvrage s’intitule « Quelle(s) pédagogie(s) pour l’étudiant juriste ? » est-il pour autant une interrogation iconoclaste dans une faculté de droit où pour reprendre les catégories du sociologue Georges Felouzis, la conception du métier universitaire est plus proche « d’une culture de profession libérale¹ » que « de la culture de laboratoire² » de nos collègues scientifiques ou de « la culture d’enseignement secondaire³ » de nos collègues des lettres et sciences humaines ? Derrière l’apparente provocation, nous ne pensons pas qu’il s’agisse d’un sujet tabou, nombre de nos collègues nous faisant part de leurs constats, interrogations, solutions quant à leurs enseignements. Sommes-nous dès lors engagés dans un questionnement pédagogique à tout va ? Gardons-nous des généralisations, car n’étant pas formés à la pédagogie mais seulement à la recherche⁴, beaucoup de juristes français – a contrario de leurs homologues d’Amérique du nord et des pays du Nord de l’Europe⁵ – sont rétifs à cette démarche par sentiment d’insécurité⁶. De surcroît, les études sur les pratiques pédagogiques dans les facultés de droit sont rares en sciences de l’éducation⁷.

    Si l’Encyclopédie Quillet définit la pédagogie comme « l’action exercée par l’homme adulte sur le non adulte, consistant à aider celui-ci à devenir un homme au sens plein du terme », cette approche rapportée au monde universitaire nous amène à proposer de la pédagogie la définition suivante : une démarche consistant pour l’enseignant à transmettre tout à la fois des connaissances à l’apprenant et à déployer des techniques conduisant l’étudiant vers l’autonomie dans ses propres apprentissages. La pédagogie présenterait alors deux visages indissociables : un accompagnement de l’étudiant par l’enseignant et une réflexion sur les méthodes pédagogiques révélant un processus d’interaction.

    Si le XIXe siècle fut l’âge d’or de la pédagogie⁸, nous formons le vœu que la dynamique générée par l’organisation d’un colloque sur la pédagogie participe à une réflexion d’ensemble sur la pédagogie en droit, au même titre que d’autres expériences conduites dans quelques facultés.

    Pour notre part, nous avons cheminé comme M. Jourdain sur les sentiers pédagogiques avec plus ou moins de bonheur, pratiquant sans le savoir « la métis enseignante à l’université » telle que décrite par Marguerite Altet⁹.

    A. – Une démarche intuitive

    La convocation de souvenirs d’étudiants au service d’un décloisonnement disciplinaire

    Souhaitant ralentir la marche inexorable du temps, nous nous sommes engouffrées dans la mode du jeunisme et alors que nous avions débuté nos enseignements depuis quelques années déjà, nous avons tenté de rassembler nos souvenirs d’étudiantes, afin de les confronter aux constats – parfois désabusés – que nous pouvions opérer, après un cours magistral ou une séance de travaux dirigés¹⁰. Qu’avions-nous apprécié lors de nos années de formation ? Quelles critiques avions-nous formulées ? Quels remèdes pouvions-nous tenter d’y apporter¹¹ ?

    Dépassant nos ancestrales pratiques individuelles d’enseignement et de recherche observées chez les juristes par Georges Felouzis¹², nous avons mêlé nos intuitions de privatiste et de publicistes et ainsi expérimenté des travaux dirigés de méthodologie juridique sans aucun souci de chapelle, puisqu’ont été associés à cette démarche non seulement des privatistes et des publicistes, mais également des historiens du droit et des politistes. Partant d’un constat que le socle des exercices juridiques demandés en France aux apprentis juristes sont le commentaire de texte, la fiche d’arrêt, le commentaire d’arrêt, la dissertation et le cas pratique, il nous est apparu indispensable d’en rationnaliser la présentation pour une meilleure efficience auprès des étudiants, car la littérature offerte en la matière demeure disciplinaire¹³. À titre d’exemple, la fiche d’arrêt, que nous avons d’abord présentée dans une dimension de droit public à chaque nouvelle cohorte d’étudiants de licence 1re année, a été pratiquée dans les séances suivantes dans une logique de droit privé, afin d’accompagner chaque étudiant dans cette découverte au long cours, en démythifiant autant que faire se peut ces nouveaux exercices dont le but ultime n’est que l’apprentissage du raisonnement juridique.

    B. – Un encadrement institutionnel

    Un comportement cuculiforme : l’intégration des expériences dans un habitacle institutionnel

    Ces premières expériences conduites au débotté auraient pu se poursuivre indéfiniment ou s’interrompre aussi vite qu’elles étaient nées, car l’université, accueillant par tradition tous les bacheliers, pratique l’enseignement de masse sans se préoccuper – sauf exception comme à l’Université Bordeaux II ainsi que le relève Jacques Dejean¹⁴ – des pratiques pédagogiques. Nous ne pouvons que savoir gré à l’ancien président de l’Université de La Rochelle Christian Eskenazi de nous avoir conviées à rencontrer d’autres collègues partageant des préoccupations communes et répondant avec lui à un appel d’offres ministériel. En effet, si la socialisation de l’étudiant est un élément de sa réussite¹⁵, que dire de l’isolement de l’universitaire ? Cette exogamie nous fut salutaire ! Nous avons ainsi participé au projet national « Égalité des chances » décliné à La Rochelle en projet APRESS (Accompagnement Personnalisé pour la Réussite dans les Études Secondaires et Supérieures) 2006/07 et en avons tiré un double profit. Non seulement cette expérience nous a permis de renouveler nos propres enseignements, mais également de nous lancer, en 2007, dans une réponse à l’appel d’offres recherches « Éducation, égalité d’accès aux savoirs » de la Région Poitou-Charentes donnant naissance au projet ASAC (Acquisitions des Savoirs et compétences : constat, analyse, modèle pour une plus grande réussite de l’étudiant juriste) qui s’est ponctué par l’organisation d’un colloque international les 20 et 21 janvier 2011, à La Rochelle avec le concours du GIP mission de recherche Droit et Justice.

    Cette préoccupation de la réussite des étudiants étant celle de l’Université de La Rochelle, nous nous sommes crues autorisées à en faire le réceptacle de nos innovations pédagogiques et le Plan Réussite en Licence, une opportunité de poursuivre les expériences déjà conduites et d’en tenter de nouvelles.

    II. – Description

    Les actions conduites obéissent à un processus en forme de chaînons, les actions éparses s’étant progressivement regroupées et ayant ponctué tous les stades de l’immersion de l’étudiant dans l’espace universitaire.

    A. – La structuration progressive d’actions éparses

    Dans le cadre de la responsabilité de l’aide à la réussite¹⁶ que nous avons partagée à la Faculté de droit pendant plusieurs années, nous avons expérimenté diverses actions à destination des étudiants dans le but de favoriser leur intégration et leur réussite. Peu à peu, ces actions éparses se sont structurées afin de constituer ce que Louise Langevin et Louise Villeneuve qualifient de « dispositif d’encadrement des étudiants de leur immersion jusqu’à la sortie de leur 1re année d’étude »¹⁷.

    B. – Un processus d’immersion en plusieurs paliers

    L’immersion est un processus qui débute dès le moment où l’étudiant sélectionne l’établissement d’enseignement auprès duquel il souhaite s’inscrire.

    1. La confortation du choix

    Le programme d’admission post-bac et les relations lycées-université se situant en amont de l’inscription, ils permettent à l’étudiant de conforter son choix, par l’organisation de visites in situ – lors des journées portes ouvertes et spécifiques – lui donnant non seulement l’occasion de découvrir les futurs lieux d’étude (amphithéâtres, salles de travaux dirigés, bibliothèque universitaire), mais aussi de rencontrer les futurs enseignants et d’assister à un cours magistral.

    2. La prise de contact

    L’immersion se poursuit après l’inscription lors de la rentrée universitaire. Les étudiants de première année de licence en droit sont accueillis lors d’une semaine de prérentrée, dénommée SAS, dont l’objectif est de favoriser la transition entre le lycée et la Faculté. Durant ladite semaine, divers ateliers juridiques et non juridiques ont été proposés aux étudiants : un atelier informatique de présentation de la plateforme pédagogique de l’Université pour les sensibiliser aux potentialités de l’Environnement Numérique de Travail, un atelier de méthodologie universitaire dont l’objectif est de leur livrer les premières clés d’organisation dans leurs études, et parfois des ateliers prise de notes et de français juridique destinés à rappeler l’indispensable maîtrise de l’expression écrite dans les études juridiques. Selon les années, jusqu’à trois ateliers juridiques présentant la discipline juridique, les grandes notions et des décisions de justice – avant un premier cours magistral anticipé d’introduction au droit – ont pu être organisés.

    3. L’expérimentation du choix

    Avec le début des cours et des travaux dirigés, chaque enseignant devient l’accompagnant privilégié de l’étudiant pour l’enseignement qu’il dispense. Cependant, les étudiants en difficulté ou décrochage se repèrent plus facilement dans le cadre des travaux dirigés que des cours magistraux. Nous avons ainsi utilisé spécifiquement certains travaux dirigés – volontairement à effectifs réduits en vue d’un meilleur apprentissage, mettant en œuvre sans le savoir certaines des préconisations de Georges Felouzis¹⁸ – ou certains cours pour repérer de manière précoce des étudiants en difficulté afin de leur proposer des remédiations. C’est ainsi que les travaux dirigés de méthodologie des exercices juridiques du 1er semestre de licence – que nous avons longtemps coordonnés et animés – ont été conçus comme des moments privilégiés pour permettre l’intégration des étudiants et le repérage de leurs difficultés. Ce contact avec les étudiants permettait de les orienter ensuite au 2e semestre vers des travaux dirigés dits « d’aide à la réussite ». Dans le cadre de ces deux travaux dirigés, nous avons mis en place un véritable contrôle continu et organisé le travail in situ avec à chaque séance un objectif à atteindre, un exercice à réaliser au rythme de chacun des étudiants par un processus de rétroaction, cher à Duncan Kennedy¹⁹. Après quelques années d’une évaluation classique des étudiants (deux devoirs notés et un exercice final), nous avons pu constater que cette nouvelle méthode leur a permis d’obtenir de meilleurs résultats dans cet enseignement, validant ainsi l’analyse de Marc Romainville²⁰.

    Certains cours magistraux, notamment ceux dépourvus de travaux dirigés révélant un moindre investissement des étudiants²¹, ont également été le lieu d’expérimentations avec le concours des collègues en charge de ces cours ou parce que nous en étions nous-mêmes titulaires. Nous avons ainsi testé des exercices différents (une dissertation puis un cas pratique) à l’examen final du cours d’introduction au droit, sans constater une amélioration sensible des résultats des étudiants. Dans le cadre du cours d’institutions administratives dispensé par l’une d’entre nous, des visites d’institutions (Préfecture, Conseil régional, Conseil municipal, Conseil général, Tribunal administratif par exemple) ont été mises en place. L’expérience des institutions par les étudiants leur a permis une meilleure approche conceptuelle, passant de l’observation de terrain à la théorie enseignée par la rédaction d’un mini-mémoire en binôme²², la visite étant l’occasion de matérialiser le concept en l’ancrant dans une réalité subjective²³.

    Quant à l’accompagnement des nouveaux étudiants, nous l’avons décliné en trois volets : des tuteurs étudiants pour un suivi régulier, des séances de soutien entre les sessions d’examens pour un meilleur entraînement aux exercices juridiques proposés lors des contrôles terminaux et des entretiens bilans, auxquels nous avons été initiées par Grâce Kraska²⁴, pour un bilan personnalisé de chacun des étudiants de licence 1re année.

    Nos expérimentations ne se sont pas cantonnées aux étudiants de licence, elles se sont déployées en master et auprès des étudiants préparant des concours administratifs et des examens professionnels par le truchement de Questions à Réponse Courte (QRC) et de préparation aux oraux de concours intuitu personae.

    Des expérimentations enrichies et améliorées au fil des années est apparu un essai de modèle d’encadrement de l’étudiant en droit à la Faculté de La Rochelle destiné à lutter contre l’abandon des études et à promouvoir la réussite d’un plus grand nombre, révélant ainsi l’utilisation d’un procédé inductif²⁵. Si au début, nous avons privilégié une approche globale par étudiants, nous nous sommes rendu compte qu’elle était insuffisante et qu’il convenait d’avoir également une approche par cours afin de poursuivre l’encadrement dans le programme d’études lui-même avec l’organisation de cours conçus comme des moments privilégiés pour permettre l’intégration, mettant en œuvre sans le savoir les préceptes de Louise Langevin et Louise Villeneuve²⁶.

    Mener ces expérimentations et actions n’a pas toujours été simple. D’une part, les conditions matérielles difficiles du début se sont améliorées notamment avec le Plan Réussite en Licence permettant le financement de certaines actions. Néanmoins, ces actions nécessitant le concours des personnels de scolarité, des moyens humains étaient indispensables, mais ils n’ont pas été pris en compte par le Plan Réussite en Licence. D’autre part, ces expérimentations ne peuvent perdurer que si un certain nombre d’enseignants s’y impliquent, car – comme le notent Mariane Frenay et Cécile Paul²⁷ – si l’innovation est portée par quelques personnes, ce n’est qu’un processus transitoire auquel trois suites peuvent être données : l’institutionnalisation, la disparition ou l’enkystement.

    Tant que leur carrière sera conditionnée par leur seule activité de recherche, la pédagogie n’apparaîtra pas forcément comme une priorité²⁸. Malgré nos efforts²⁹, nous n’avons pas su entraîner avec nous la communauté universitaire de notre Faculté afin de passer d’un essai de modèle à un modèle voulu et partagé par tous – à l’inverse des réalisations conduites dans certaines facultés de droit³⁰ – le processus transitoire dans lequel nous nous étions engagées se soldant par une disparition pure et simple.

    III. – Présentation des axes de l’ouvrage

    Contractuellement tenues d’organiser un colloque terminal nous avons été enthousiastes à l’idée de relever un défi et de placer l’enseignement juridique français au cœur de cette démarche, mais de ne pas s’y enfermer.

    Placer l’enseignement juridique au cœur de la démarche résulte du constat que l’on a pu tracer d’un territoire en jachère, et pourtant à quelles autres nécessités que celles de la pédagogie et de l’amour du droit répondait l’ouvrage du professeur Cornu Linguistique juridique³¹ ? Alors pourquoi ce constat de terre en déshérence ? Nous avons la naïveté de penser pouvoir y remédier.

    Ne pas se limiter à l’enseignement juridique – est-ce l’ombre du doyen Carbonnier qui nous a inspirées ? Doyen Carbonnier pour lequel « le droit est plus petit que l’ensemble des relations entre les hommes³² ». Toujours est-il que la volonté de décloisonnement nous a guidées tant dans l’organisation de l’appel à communications – dont le principe même est emprunté aux sciences humaines et sociales – que dans la sélection des communications dont il nous a paru nécessaire qu’elles obéissent à quatre impératifs. Impératifs qui irriguent le plan de cet ouvrage :

    – qu’elles soient aussi le fait de jeunes enseignants ou futurs enseignants-chercheurs, et l’expression de leurs recherches, inquiétudes, solutions face à la question pédagogique ;

    – qu’elles portent témoignages des expériences conduites en droit mais aussi ailleurs. Un ailleurs géographique avec la présence de représentants des universités canadienne, luxembourgeoise ou belge. Un ailleurs scientifique par la présence de représentants en sciences sociales ;

    – qu’elles soient l’expression d’innovations dans le déroulé d’un colloque juridique ou d’expériences pédagogiques innovantes ;

    – qu’elles ne réduisent pas la pédagogie à l’instruction qui, à elle seule, ne peut constituer toute l’éducation. Certaines communications révélant l’importance de la culture dans l’enseignement. Nous ne pouvons là encore que nous situer sous l’aile tutélaire du Doyen Carbonnier³³ soulignant l’importance de la culture générale dans la conception, l’apprentissage et la pratique du droit.

    Ainsi les articles de cet ouvrage s’ordonnent autour de trois axes.

    La première partie associe des contributions relevant de l’analyse sociologique (F. Dib, A. Jacquemart) ou factuelles (K. Warion) destinées à permettre de mieux connaître le public étudiant et des retours d’expériences relatifs soit à des pratiques pédagogiques spontanées (J. Hervois, A. Jaulin), soit à des interrogations pédagogiques (L. Kaczmarek) ou des exposés s’attachant à diffuser des pratiques plus institutionnelles (H. Bouthinon-Dumas, M. Falaise, F. Guisse).

    La deuxième partie poursuit la réflexion pédagogique à travers des contributions qui peuvent sembler disparates mais dont le point commun est en réalité de s’interroger sur le renouvellement des méthodes d’enseignement. Que la question se pose au plan français (J. Bouineau, G. Delabre, S. Clavel) ou international (E. Poillot, A. Rochette, M.C. Lorea Leite).

    La troisième partie s’attache à démontrer la pertinence d’un décloisonnement des disciplines pour une meilleure appréhension de la matière enseignée (B. Villez et L.J. Moran, L. Miniato, M. Flores- Lonjou et A de Luget) susceptible d’induire un renforcement de la culture générale de l’étudiant (B. Bastiat et C. Landy, X. Daverat) dans l’objectif de consolider ses aptitudes à la vie professionnelle.

    Alors la pédagogie : luxe pour les universitaires³⁴ ? Vanité d’enseignants-chercheurs en mal de public étudiant dans un contexte concurrentiel³⁵ ? Véritable défi pour les universités d’aujourd’hui et de demain³⁶ ?

    Il est trop tôt pour trancher. Il reste que nous souhaitons être des passeurs de métier et que l’interrogation pédagogique nous a semblé en constituer un pont.

    1- G. FELOUZIS, La condition étudiante. Sociologie des étudiants et de l’université, Paris, PUF, 2001, coll. « Sociologie d’aujourd’hui », p. 252.

    2- Ibid., p. 255.

    3- Ibid., p. 259.

    4- Voy. M. ROMAINVILLE, « Entre l’écorce et l’arbre : principes et modalités de la formation pédagogique des enseignants universitaires », p. 264 ; BEDIN (dir.), L’évaluation à l’université. Évaluer ou conseiller ?, PUR, 2009, coll. « Des sociétés ».

    5- À ce sujet voy. F. CROS, préface D. BEDARD et J.-P. BECHARD (dir.), Innover dans l’enseignement supérieur, Paris, PUF, 2009, coll. « Apprendre » ; D. KENNEDY, L’enseignement du droit et la reproduction des hiérarchies. Une polémique autour du système, Montréal, Lux éditeur, 2010, coll. « Lettres libres » ; « L’enseignement du droit au début du XXIe siècle, perspectives critiques », p. 87-214, Jurisprudence. Revue critique, (1), 2010.

    6- Voy. J. DEJEAN, « Les réticences à l’évaluation de l’enseignement en France, signe de la culture professionnelle des enseignants-chercheurs ou trait de la culture française ? », p. 76-79, N. REGE COLET et M. ROMAINVILLE (dir.), La pratique enseignante en mutation à l’université, Bruxelles, De Boeck, 2006.

    7- J. CLANET, « Que se passe-t-il en cours ? Éléments de description des pratiques enseignantes à l’université », p. 93-94, E. ANNOOT et M.-F. FAVE-BONNET, Pratiques pédagogiques dans l’enseignement supérieur : enseigner, apprendre, évaluer, Paris, L’Harmattan, 2004, coll. « Savoir et formation ».

    8- Pour reprendre l’un des titres de D. HAMELINE, « Pédagogie – le statut », http://www.univresalis(e)du.com.gutenberg.univ-lr.fr/encyclopedie/p…

    9- M. ALTET, « Enseigner en premier cycle universitaire : des formes émergentes d’adaptation ou de la Métis enseignante », p. 37-52, E. ANNOOT et M.-F. FAVE-BONNET, Pratiques pédagogiques dans l’enseignement supérieur : enseigner, apprendre, évaluer, Paris, L’Harmattan, 2004, coll. « Savoir et formation ».

    10- Voy. C. CHENE, « Enseignement du droit », spéc. p. 625, D. ALLAND et St. RIALS (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, Lamy, Paris, PUF, 2003.

    11- Voy. H. CROZE, « Les perspectives de l’enseignement du droit par internet », p. 217, Études offertes à Jacques Béguin, Litec, 2005, p. 217.

    12- G. FELOUZIS, op. cit., p. 253.

    13- Les ouvrages étant pour la grande majorité commis par des privatistes, voy. par ex. D. BONNET, L’essentiel de la méthodologie juridique, Ellipses, 2006, coll. « Méthodologie et exercices juridiques » ; J. BONNARD, Méthodes de travail de l’étudiant en droit, 4e éd., Hachette supérieur, 2008, coll. « Les fondamentaux en droit » ; S. BROS et F.-X. GRIGNON-DERENNE, Méthodes d’exercices juridiques, éd. F. Lefebvre, 2007, coll. « Dossiers pratiques » ; I. DEFRENOIS-SOULEAU, Je veux réussir mon droit. Méthodes de travail, Dalloz, 8e éd., 2012 ; F.-J. PANSIER, Méthodologie du droit, 5e éd., Litec, 2009, coll. « Objectif Droit » ; J.-E. RAY, Les épreuves de droit, Seuil, 1997, coll. « Mémo ». Pour quelques rares exemples d’approche publiciste, D. CHAGNOLLAUD, ABC des études de droit, Dalloz, 1999 ; J. MEUNIER, Commencer son Droit. Conseils et méthodes, 2e éd., Dalloz, 1999. A contrario, C. LARONDE-CLÉRAC, A. DE LUGET et M. FLORES-LONJOU, Méthodologie des exercices juridiques, Montchrestien, coll. « Cours », 2012.

    14- J. DEJEAN, op. cit., p. 70-72, N. REGE COLET et M. ROMAINVILLE (dir.), La pratique enseignante en mutation à l’université, Bruxelles, De Boeck, 2006.

    15- Voy. G. FELOUZIS, op. cit., p. 201 et s.

    16- Voy. M. ALTET, M. FABRE et P. RAYOU, Hétérogénéité et réussite dans le premier cycle universitaire. Enseignants et étudiants. Représentations, pratiques et adaptations des métiers, Rapport de recherches, INRP, CNCRE, 1999.

    17- L. LANGEVIN et L. VILLENEUVE (dir.), L’encadrement des étudiants. Un défi du XXI e siècle, éd. Logiques, 1997.

    18- G. FELOUZIS, op. cit., p. 283.

    19- D. KENNEDY, op. cit., p. 38-39.

    20- M. ROMAINVILLE, « Quand la coutume tient lieu de compétence : les pratiques d’évaluation des acquis à l’université », p. 23, N. REGE COLET et M. ROMAINVILLE (dir.), La pratique enseignante en mutation à l’université, Bruxelles, De Boeck, 2006.

    21- Ce que confirment les analyses de B. BOURASSA, F. SERRE et D. ROSS, Apprendre de son expérience, PUQ, 2003, p. 7 ; R. BOYER et Ch. CORIDIAN, « Réussir en première année d’université », p. 143-166, E. ANNOOT et M.-F. FAVE-BONNET, Pratiques pédagogiques dans l’enseignement supérieur : enseigner, apprendre, évaluer, Paris, L’Harmattan, 2004, coll. « Savoir et formation » ; D. BEDARD, « Enseigner autrement, oui mais pourquoi et comment ? Le cas d’un cours universitaire de premier cycle », p. 83-101, N. REGE-COLET et M. ROMAINVILLE (dir.), La pratique enseignante en mutation à l’université, Bruxelles, De Boeck, 2006.

    22- Voy. M. FLORES-LONJOU, C. LARONDE-CLERAC et A. DE LUGET, « Des visites institutionnelles préalables à la professionnalisation : analyse d’un dispositif », Questions de pédagogie dans l’enseignement supérieur. Le courant de la professionnalisation : enjeux, attentes, changements, VI° colloque, Université d’Angers 8-10 juin 2011.

    23- Voy. sur cette question de l’apprentissage par l’expérience B. BOURASSA, F. SERRE et D. ROSS, op. cit. et L. MANDEVILLE, « Une expérience d’apprentissage significatif pour l’étudiant », p. 125-138, D. BEDARD et J.-P. BECHARD (dir.), Innover dans l’enseignement supérieur, Paris, PUF, 2009, coll. « Apprendre ».

    24- Ingénieur d’études à la cellule @ctice de l’Université de La Rochelle.

    25- Voy. M. FLORES-LONJOU, C. LARONDE-CLERAC et A. DE LUGET, « Recherche pédagogique en science juridique », p. 413-422, Questions de pédagogie dans l’enseignement supérieur. Enseigner, étudier dans le supérieur : pratiques pédagogiques et finalités éducatives, colloque co-organisé par TELECOM Bretagne, l’ENSIETA, l’École Navale et l’Université de Bretagne Occidentale, Brest 18-20 juin 2008.

    26- L. LANGEVIN et L. VILLENEUVE (dir.), op. cit..

    27- M. FRENAY et C. PAUL, « Le développement de projets pédagogiques : reflet ou source de l’engagement de l’enseignant universitaire dans ses activités d’enseignement ? », p. 103-127, N. REGE-COLET et M. ROMAINVILLE (dir.), La pratique enseignante en mutation à l’université, De Boeck, 2006. Voy. aussi F. CROS dans son introduction, p. 15, D. BEDARD et J.-P. BECHARD (dir.), Innover dans l’enseignement supérieur, Paris, PUF, 2009, coll. « Apprendre ».

    28- Même si des évolutions sont attendues dans le métier d’enseignant-chercheur, J. DEJEAN, « Les réticences à l’évaluation de l’enseignement en France, signe de la culture professionnelle des enseignants-chercheurs ou trait de la culture française ? » N. REGE-COLET et M. ROMAINVILLE (dir.), op. cit..

    29- Faute de réunir les cinq déterminants indispensables selon C. LAURIJSSEN, A. GILIS, M. CLÉMENT, H. BUELENS et St. HUYGHE, « Leadership pédagogique : une vision à développer », p. 95-99, D. BEDARD et J.-P. BECHARD (dir.), Innover dans l’enseignement supérieur, Paris, PUF, 2009, coll. « Apprendre ».

    30- Voy. « La conférence des doyens. Révolution dans les méthodes d’enseignement du droit. Thomas Clay, doyen de la faculté de droit et de science politique de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines », J.C.P., (18), 3 mai 2010 ; C. LAURIJSSEN, A. GILIS, M. CLÉMENT, H. BUELENS et St. HUYGHE, ibid.

    31- Montchrestien, 3e éd., 2005, coll. « Domat Droit privé ».

    32- J. CARBONNIER, Flexible droit. Textes pour une sociologie du droit sans rigueur, LGDJ, 5e éd., 1983, p. 22.

    33- J. CARBONNIER, ibid.

    34- Voy. D. BEDARD et J.-P. BECHARD (dir.), op. cit..

    35- Voy. D. BEDARD, « Enseigner autrement, oui mais pourquoi et comment ? Le cas d’un cours universitaire de premier cycle », p. 83-101, N. REGE-COLET et M. ROMAINVILLE (dir.), La pratique enseignante en mutation à l’université, Bruxelles, De Boeck, 2006.

    36- Voy. « L’enseignement du droit au début du XXIe siècle, perspectives critiques », p. 87-214, Jurisprudence. Revue critique, (1), 2010 ; N. REGE-COLET et M. ROMAINVILLE (dir.), La pratique enseignante en mutation à l’université, Bruxelles, De Boeck, 2006.

    II. – Partie I

     La pédagogie universitaire :

     entre constats et expérimentations,

     un territoire en jachère

    L’identification des besoins de l’étudiant juriste, de ses attentes conduit le pédagogue à la résolution d’une équation complexe, à plusieurs inconnues et dont le résultat s’avère souvent incertain.

    C’est à la fois la manière d’enseigner le droit qui importe et le destinataire de cet enseignement : l’étudiant juriste devient alors un sujet/objet d’étude qui se révèle tout aussi complexe que l’étude même des théories du droit.

    Dorénavant, et même si implicitement cela devait aller de soi, l’enseignant devra prendre en compte l’étudiant apprenti juriste, désarmé face à la complexité du droit.

    Préparer l’étudiant à l’apprentissage du droit, nécessite préalablement d’identifier ses besoins, ses attentes, appréhender l’environnement dans lequel il évolue, déterminer les raisons de ses échecs, mais aussi de ses réussites, anticiper ses difficultés, et là n’est sans doute exprimée que la face apparente de l’iceberg.

    Les constats et expériences qui ont été dressés et suivis révèlent l’étudiant juriste dans une phase d’apprentissage souvent douloureuse.

    Le rôle de l’accompagnement

     dans la construction identitaire de l’étudiant

     en sciences humaines et sociales en France

    par

     Fadila DIB

     Doctorante en sciences sociales, spécialité sciences de l’éducation, Université

     Paris VIII, Équipe Experice

    « Entre ce que je pense, ce que je veux dire, ce que je crois dire, ce que je dis, ce que vous voulez entendre, ce que vous entendez, ce que vous croyez en comprendre, ce que vous voulez comprendre, et ce que vous comprenez, il y a au moins neuf possibilités de ne pas se comprendre, mais il faut quand-même essayer ».

    Bernard WERBER

    Problématique :

    Le parcours universitaire en sciences humaines et sociales (SHS) ainsi que ses différentes formes est l’un des sujets les moins étudiés en France. Pourtant, le nombre toujours croissant des étudiants orientés vers ces disciplines dans les établissements d’enseignement supérieur en France, la constante évolution des caractéristiques démographiques et économiques de cette population, les réformes successives du système universitaire et social ainsi que la problématique de l’insertion professionnelle des diplômés dans ces filières, constituent des raisons qui justifient la nécessité et l’urgence de porter un regard réflexif sur ce sujet. Notre contribution se veut donc une participation au champ des recherches sur la pédagogie universitaire et plus spécialement aux pratiques ainsi qu’aux formes que peut prendre la formation universitaire en sciences humaines et sociales en France. À travers cette dernière, nous souhaitons apporter un éclairage théorique anthropologique sur certaines zones d’ombre qui sous-tendent les questionnements suivants : quelles sont les formes d’accompagnement existant à l’université ? Quels en sont les acteurs ? Quels sont les facteurs qui permettent à l’étudiant d’évoluer dans sa formation universitaire en SHS ou au contraire de ne pas avancer ? Quelles sont les formes d’apprentissage dans ce même contexte ? Et enfin comment agit l’accompagnement dans la construction identitaire de l’étudiant ?

    L’objectif sera de démontrer que la formation universitaire, notamment celle en SHS, est complexe, qu’elle peut prendre plusieurs formes (formelle, non formelle et/ou informelle engageant plusieurs acteurs) ; qu’elle est multidimensionnelle impliquant plusieurs facettes de la vie de l’étudiant, qu’elle engage plusieurs facteurs et qu’elle est non linéaire puisqu’elle n’évolue pas suivant une trajectoire fixe et prédéterminée allant dans un sens unique.

    I. – Première phase de l’étude : caractéristiques de la population étudiée

    Telle que représentée dans le tableau 1, la population d’étude est très hétérogène. Cette étude n’est donc pas quantitativement représentative. Les variables retenues serviront de repère dans notre analyse, comme nous l’expliquerons ultérieurement.

    Les 25 étudiants que nous avons interrogés ont été recrutés dans plusieurs espaces des trois universités franciliennes : Paris VIII-Saint Denis, Paris X-Nanterre Ouest et Paris XIII-Villetaneuse. Ces espaces sont : les bibliothèques universitaires, les cafétérias, les couloirs inter salles (à la sortie des cours), les halls d’entrée.

    Le premier recrutement des participants à cette étude qui n’était ni financée ni rémunérée, s’est déroulé du 3 au 15 mai 2009. Cette période correspond à une fréquentation importante due à la préparation des examens de fin d’année et des cours intensifs.

    A. – Outil de recueil de données

    Au contact des participants qui ont accepté de contribuer à cette étude, nous présentons un guide d’entretien qui contient trois thèmes : les données sur le sujet et sa formation, le type d’investissement dans la formation, le type d’investissement dans les activités de la vie intra et extra-universitaires non liées à la formation.

    Les réponses recueillies ensuite retranscrites, ont été soumises à une analyse psychosociologique.

    B. – Traitement des données recueillies

    Le regroupement des réponses a permis de distinguer trois grands groupes d’étudiants :

    Le premier est caractérisé par :

    – Un isolement et un sentiment de solitude et de perdition ;

    – Une perte du goût du suivi des cours : « environnement qui manque d’humanité… » ;

    – L’absence d’activité associative ;

    – L’absence ou la très faible fréquentation des centres de documentation intérieurs ou extérieurs à l’université.

    Le deuxième groupe se caractérise par :

    – Une assiduité et une autonomie dans la formation ;

    – Une grande fréquentation des bibliothèques et autres centres de documentation à l’intérieur et à l’extérieur ;

    – Un manque de motivation pour assister aux cours ;

    – Une assiduité non constante aux cours ;

    – Une participation plus ou moins active à la vie associative.

    Le troisième groupe présente quant à lui :

    – Une grande assiduité aux cours ;

    – Une fréquentation abondante des centres de documentations universitaires mais très peu à l’extérieur ;

    – L’absence d’activité associative ou collective.

    C. – Analyse des résultats

    Le croisement des réponses recueillies avec les caractéristiques de la population, n’a révélé aucun lien particulier avec les catégories d’étudiants identifiées précédemment. Néanmoins, ces trois catégories nous renseignent sur l’existence de différents types d’engagements dans la formation universitaire, en tout cas dans le domaine des SHS.

    Le manque de représentativité quantitative de notre étude, ne nous permet pas de considérer ces catégories comme exhaustives, néanmoins cette étude nous révèle différentes formes d’implication. Ces formes ont été abordées par plusieurs études, à l’exemple de celle réalisée en 2001 par Marie-Pierre Trinquier et Joël Clanet¹. Cette dernière a démontré l’existence de sept catégories d’étudiants, classées suivant les représentations que les étudiants en premier cycle universitaire ont de ce parcours et les répercussions de ces représentations sur la nature et la fréquence de leur participation aux différentes activités universitaires pédagogiques et sociales. Les sept types sont : « les peu ou pas organisés », « les mobiles », « les individualistes », « les lecteurs décalés », « les coopérants conviviaux », « les coopérants bûcheurs », « les mobilisés ». D’autres typologies ont été élaborées pour classer, par exemple, les étudiants suivant leur présence physique dans l’institution universitaire ou à travers leurs résultats annuels. Une étude a fait ressortir de la masse étudiante des étudiants « fantômes ».² .

    Ces études ont toutes été employées pour définir les facteurs d’échec et de réussite des étudiants en premier cycle universitaire. Plus tard, en 2008, un dispositif d’accompagnement pédagogique a été mis en place dans le but de lutter contre le décrochage lors du premier cycle de l’enseignement supérieur dans les universités françaises. Ce programme, nommé « Objectif réussite », vise à remédier à la problématique du décrochage, développée notamment, dans un ouvrage dirigé par Philippe Carré et André Moisan sur les aspects psychologiques et pédagogiques de la formation autodirigée³. Il repose sur un processus d’accompagnement et de tutorat.

    Cependant, et en observant de plus près la population étudiée, nous avons constaté qu’il y avait une variable, celle du nombre d’années passées à l’université, qui aurait pu être en cause dans notre typologie. Un croisement des réponses recueillies avec cette dernière variable a été effectué.

    Ce croisement isolé a permis de constater, même si ce n’était pas le cas de l’ensemble de la population étudiée, que le nombre d’années passées à l’université avait une influence nette sur la nature de l’engagement. Certains étudiants ayant passé plus d’années à l’université que leurs collègues, ont une vie sociale plus riche à l’intérieur ainsi qu’à l’extérieur de l’université. Certains intègrent des

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