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Élégie
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Livre électronique589 pages8 heures

Élégie

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À propos de ce livre électronique

Dans un monde effroyable de magie noire et de beauté sauvage, deux soeurs sont sur le point de découvrir que l’amour est l’arme la plus puissante de toute. Ne manquez pas le dernier tome de la fascinante série la Mélodie de l’eau! Une ancienne malédiction prive Gemma Fisher de tout ce qui compte le plus pour elle; ses amis, sa famille et le garçon qu’elle aime. Mais maintenant qu’elle a découvert le rouleau qui assujettit la malédiction, elle a enfin la chance de retrouver son ancienne vie. Elle doit seulement détruire le rouleau et elle redeviendra humaine, mais ce n’est pas aussi facile qu’elle l’espérait. Protégé par une magie ancienne, le rouleau semble complètement indestructible. Pour empirer les choses, Penn est encore plus obsédée par son envie de posséder Daniel pour elle seule… et elle est sur le point d’y parvenir. La quête effrénée de Gemma l’amène vers une personne qui pourrait être en mesure de l’aider: la mystérieuse immortelle ayant jeté le sort à Penn et ses soeurs il y a des milliers d’années. Alors que Gemma et ses amis démêlent la tragique histoire de la malédiction, ils plongent plus profondément dans un monde de secrets troublants et de vendettas tordues et il leur faudra tout leur courage, leur amour et la force de leur amitié pour simplement survivre. Gemma a tant de choses pour lesquelles se battre et elle n’a jamais rien désiré autant, mais est-ce que ce sera suffisant pour arrêter ses ennemies?
LangueFrançais
Date de sortie2 avr. 2015
ISBN9782897524425
Élégie
Auteur

Amanda Hocking

Amanda Hocking lives in Minnesota, had never sold a book before April 2010 and has now sold over a million. According to the Observer, she is now 'the most spectacular example of an author striking gold through ebooks'. Amanda is a self-confessed 'Obsessive tweeter. John Hughes mourner. Batman devotee. Unicorn enthusiast. Muppet activist.' Her books include the Trylle Trilogy, the Watersong series and the Kanin Chronicles.

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    Aperçu du livre

    Élégie - Amanda Hocking

    Nanny.

    Remerciements

    Q uand j’ai commencé à rédiger la série Mélodie de l’eau, ma grand-maman était en vie. Quand j’ai terminé le dernier livre de la série, elle ne l’était plus. Elle a combattu la maladie d’Alzheimer pendant des années, alors elle n’a jamais lu aucun de mes livres, mais a lu des centaines de mes nouvelles et de mes poèmes. Et elle a gardé tout ce que je n’ai jamais écrit : des cartes de vœux de Noël à mes devoirs de lycée. Si Nanny tombait dessus, elle le gardait.

    Il me serait impossible de ne pas reconnaître l’énorme impact qu’elle a eu sur moi et mon écriture. Chacun des mots que j’ai écrits devrait lui être dédié.

    Cela ne veut pas dire qu’elle était la seule personne à m’encourager, mais elle était peut-être celle qui m’aimait le plus inconditionnellement. J’ai été très chanceuse d’avoir une famille et des amis incroyables.

    Un gros merci à mes deux parents, qui ont toujours cru en moi, et à mon beau-père, Duane, et ma belle-mère, Lisa, pour avoir pris soin de moi, même lorsqu’ils n’avaient pas à le faire, ainsi qu’à mon frère, Jeremy, qui a toujours été mon plus grand appui.

    Comme toujours, un énorme merci à mon assistant, meilleur ami, vice-roi de ma vie, Eric, qui s’assure que tout arrive. Il fait en sorte que tout soit possible et endure toutes mes humeurs, lesquelles peuvent aller de catatonique à Faye Dunaway dans Maman très chère.

    Merci à mes autres amis, Fifi, Valerie, Greggor, Pete, Matt, Gels et Mark, qui, pour une raison quelconque, aiment ma présence, mais tolèrent aussi mes nombreuses absences quand je suis en train de jouer avec mes amis imaginaires.

    L’écriture est peut-être une activité solitaire, mais faire un livre ne l’est pas. Cela requiert une équipe entière de gens formidables, comme ma rédactrice, Rose Hillirard, qui améliore les choses plus que je ne pourrais le faire moi-même, et Lisa Marie Pompilio, qui fait les pages couverture les plus merveilleuses pour mes livres, ainsi qu’à tout le monde chez St. Martin’s Press, qui fait toutes les millions de choses qui rendent les livres spectaculaires.

    Mon agent, Steve Axelrod, et son directeur des droits, Lori Antonson, sont extraordinaires. Sérieusement ! Quand des gens disent que les auteurs n’ont plus besoin d’agent, je frémis, car je ne peux m’imaginer me frayer un chemin dans tout ceci sans l’expérience et la connaissance de Steve.

    Je veux aussi tirer mon chapeau à Other House, qui a fait les bandes-annonces pour les séries Mélodie de l’eau et Trylle, simplement parce que je crois que l’entreprise est fantastique.

    Et les derniers, mais probablement les plus importants, les lecteurs ! Sans vous, je serais une folle se parlant à soi-même. Merci beaucoup !

    CHAPITRE 1

    Menace

    H arper avait répété toute la matinée ce qu’elle voulait dire à sa colocataire Liv, mais quand cette dernière la lança contre le mur de leur chambre, Harper sut qu’elle avait des ennuis.

    Cela ne faisait que six jours depuis que Harper avait emménagé dans les logements de l’Université de Sundham et avait rencontré Liv. Quand elle était arrivée, Liv s’était échinée pour aider Harper à s’installer, lui assurant qu’elles seraient les meilleures amies du monde d’ici la fin du semestre. Elle lui avait fait visiter le campus, parlant en un flot continuel de tout ce qu’il y avait sous le soleil.

    Mais alors Harper s’était détournée et s’était empressée de retourner à Capri dès le lendemain, lorsque tous les feux de l’enfer s’étaient déchaînés entre sa sœur, son petit ami et les sirènes.

    Quand Harper avait été frappée par une intense panique la semaine dernière, Liv l’avait suivie jusqu’à sa voiture. Elle avait insisté sur le fait qu’elle allait faire le trajet avec Harper, afin de s’assurer qu’elle arrive bien, et Harper dut pratiquement la pousser hors de la voiture.

    Elle ne pouvait pas expliquer le lien psychique qu’elle partageait avec Gemma, encore moins les monstres qui l’attendaient à Capri, alors elle ne pouvait accepter que Liv l’accompagne.

    C’est ainsi que Harper avait quitté Liv : dehors sous la pluie torrentielle, désespérée d’être son amie. Et elle revint vers quelque chose de complètement différent.

    Liv dormait profondément toute la journée, manquant tous ses cours. Puis, elle entrait et sortait tard la nuit, alors que Harper essayait de dormir, heurtant des choses et faisant du bruit sans s’excuser.

    Harper ne voulait pas dire à Liv quoi faire, mais elle ne pouvait plus continuer à manquer ainsi de sommeil.

    Mardi, elle pensait enfin avoir trouvé ce qu’elle voulait lui dire. Elle se le répétait encore et encore dans la tête en se dirigeant vers sa chambre. Prenant une profonde respiration pour se donner du courage avant d’ouvrir la porte, Harper était déterminée à faire passer son message sans faire la morale à Liv.

    Il était un peu plus de midi, et Harper s’était dit que Liv dormait probablement encore. Alors, ce fut avec surprise que Harper découvrit que non seulement sa colocataire était éveillée, mais qu’elle avait un visiteur.

    Ne portant que le short de son pyjama et un soutien-gorge rose, Liv chevauchait un garçon étendu sur son lit. Harper détourna les yeux aussitôt qu’elle vit que Liv n’était pas entièrement vêtue, mais elle en avait assez vu pour comprendre que Liv était en train de se peloter avec lui plus férocement qu’elle n’avait jamais vu.

    Liv et Harper avaient toutes les deux des lits superposés avec leur bureau en dessous. Cela signifiait que Harper ne distingua pas très bien le garçon d’où elle se tenait, mais grâce à un jeans masculin et un t-shirt froissé sur plancher, elle distingua qu’il ne portait pas beaucoup de vêtements lui non plus.

    — Oh, désolée, lança rapidement Harper en se retournant, afin de laisser un peu d’intimité à Liv. Je croyais que tu étais seule.

    — Sors, siffla Liv sur un ton tranchant qu’elle n’avait jamais entendu avant.

    Les quelques mots qu’elles avaient échangés les jours précédents contenaient une suavité, pareille à du miel, mais cela avait été remplacé par quelque chose de tout à fait hargneux.

    — Ouais, désolée, je m’en vais, mais j’ai besoin de mon livre de chimie.

    Harper fila vers son bureau sous son lit et chercha son manuel.

    Une raison pour laquelle elle avait décidé d’avoir maintenant la conversation avec Liv était qu’elle devait revenir à la chambre pour échanger ses livres pour ceux de ses cours d’après-midi.

    — Magne-toi, claqua Liv.

    — J’essaie, lui assura Harper.

    Elle posa son sac à dos sur la chaise de son bureau, afin de lui faciliter la tâche. Normalement, l’organisation était l’une de ses forces et tout était à sa place, mais alors qu’elle essayait de partir, son livre avait disparu.

    — Peut-être pourrais-tu te joindre à nous, suggéra le compagnon de Liv.

    Harper choisit de l’ignorer, se disant que son temps serait mieux utilisé à chercher son livre. Elle faisait toujours dos à Liv alors qu’elle fouillait son bureau, mais elle entendit du mouvement derrière elle, puis le craquement du lit.

    Liv grogna.

    — Sors.

    — Dans une seconde.

    Harper balaya des yeux la chambre.

    — Sors ! rugit Liv, et la colère dans sa voix parut se répercuter dans la tête de Harper.

    Pendant un moment, elle resta figée, hébétée et incapable de se rappeler ce qu’elle cherchait.

    Harper secoua la tête, s’éclaircissant les idées, et répondit faiblement.

    — Je fais aussi vite que je peux. Je dois… J’ai besoin d’abord de mon livre.

    — Pas toi, dit Liv. Lui.

    Avant que Harper ou l’ami de Liv puisse dire quelque chose, Liv le poussa hors du lit. Il bascula du lit, atterrissant sur le plancher avec un bruit sourd ayant l’air douloureux. Il grogna.

    — Est-ce que ça va ?

    Harper s’accroupit près de lui, et il s’assit lentement.

    Il se frotta l’arrière de la tête.

    — Ouais… je crois bien.

    Harper l’examina, afin de s’en assurer, et elle fut soulagée qu’il porte encore son caleçon. Son torse nu révéla plusieurs écorchures fraîches couvrant sa poitrine et ses épaules. Sa lèvre saignait aussi, mais Harper n’était pas certaine que cela provenait de sa chute ou de quelque chose que Liv avait fait.

    — Qu’est-ce que tu ne comprends pas dans le mot « sors » ? demanda Liv, se penchant par-dessus le bord de son lit pour le fusiller du regard.

    Les yeux de Liv, qui avaient paru grands et naïfs quand Harper l’avait rencontrée, semblèrent maintenant plus sombres et plus calculateurs.

    — J’y vais, dit le garçon.

    Il se leva rapidement, tressaillit, puis ramassa ses vêtements sur le sol.

    C’est à cet instant que Harper découvrit enfin son livre manquant. Il était camouflé sous le jeans.

    Il n’attendit même pas de s’habiller avant de partir, préférant sortir dans le couloir en sous-vêtement plutôt que de passer une autre minute dans leur chambre. Harper ne put l’en blâmer.

    — J’ai mon livre, dit Harper à Liv en enfonçant son manuel dans son sac à dos. Alors, je vais te ficher la paix.

    — Tu n’as pas à te presser, maintenant qu’il est parti.

    Du coin de l’œil, Harper vit Liv sauter du lit et atterrir sur le sol en un gracieux mouvement. La suavité était revenue dans sa voix, mais Harper n’était pas certaine si elle pouvait s’y fier, alors elle se retourna lentement. Les cheveux blonds de Liv tombaient en vague jusqu’à ses épaules. Même si elle n’était pas aussi grande que Harper, ses jambes bronzées paraissaient longues, s’allongeant sous son minuscule short de pyjama.

    — Je me suis dit qu’il voulait de l’intimité, tu vois ?

    Liv lança un clin d’œil à Harper, puis prit un débardeur dans son tiroir.

    — Ouais.

    Harper se força à sourire et essaya d’avoir l’air heureuse pour sa colocataire.

    — Il a l’air… gentil. Est-ce que c’est ton petit ami ?

    Liv pouffa.

    — Il aimerait bien. Quand je me suis réveillée, j’avais soif et faim, alors je suis descendue à la cafétéria prendre un soda dans une machine et je l’ai pris lui aussi.

    — Oh.

    Harper s’appuya contre son bureau. Elle pensa ramasser le désordre qu’elle avait fait, mais elle ne voulait pas quitter Liv des yeux.

    — Crois-tu que tu le reverras ?

    — Juste parce que je t’ai dit que tu pouvais rester ne signifie pas que nous devons parler, dit Liv en passant son débardeur par-dessus sa tête.

    Harper soupira et considéra partir, mais elle savait qu’elle allait finir par devoir parler à Liv. Alors, aussi bien en finir maintenant.

    — En fait, hum, je voulais te parler, dit Harper, plongeant dans le vif du sujet.

    Liv plissa les yeux.

    — À quel propos ?

    — Juste de la vie.

    Harper haussa les épaules et essaya de garder un ton détaché.

    — Je n’ai pas réellement pu beaucoup te parler, alors je me suis dit qu’on pourrait prendre de nos nouvelles.

    — Pourquoi ? Ce n’est pas comme si nous devions être les meilleures amies ou quoi que ce soit, ricana Liv.

    — Non, mais tu as dit que tu voulais que nous soyons amies, et je pensais qu’on le pourrait.

    Liv inclina la tête, comme si elle n’avait aucune idée de ce dont Harper parlait.

    — J’ai dit cela ?

    — Ouais.

    Harper hocha la tête.

    — Tu l’as dit à quelques reprises, en fait.

    — Oh.

    La conversation sembla réellement ennuyer Liv, qui se mit à jouer avec un fil sur son bas de pyjama.

    — Est-ce que c’était la semaine dernière ? Cela me paraît il y a une éternité.

    Liv se retourna pour fouiller à nouveau dans son tiroir. Harper l’observa, bouche bée, stupéfaite par le changement.

    — Est-ce qu’il est arrivé quelque chose ? demanda Harper pendant que Liv sortait une jupe en jeans.

    — Pourquoi ? Que veux-tu dire ?

    Liv continua à lui tourner le dos pendant qu’elle enlevait son bas de pyjama et mettait la jupe.

    — Je ne sais pas. Tu sembles… différente.

    Quand Liv se retourna vers elle, Harper remarqua la même obscurité dans ses yeux, comme si une ombre était descendue pour masquer une nouvelle mal­veillance, et Liv sourit en coin.

    — C’est donc de cela dont il est question ?

    — Quoi ?

    — Je sors et m’amuse, et tu es jalouse ?

    Liv fit un pas vers elle, et instinctivement, Harper voulut reculer, mais elle n’avait pas d’espace. Le bureau se trouvait dans son dos, alors elle se redressa.

    — Quoi ? Non.

    Harper secoua la tête.

    — Je suis heureuse que tu t’amuses à l’université. Mais je me demandais si tu pouvais faire moins de bruit quand tu entres le soir.

    Harper ne voyait plus l’intérêt de faire du papotage.

    — Tu me réveilles, et je n’arrive pas à dormir.

    — Tu ne veux même pas être mon amie, n’est-ce pas ?

    Liv continua à avancer vers elle, et tout le duveteux de sa voix avait été remplacé par quelque chose de glacial.

    — Tu veux juste me dire de me taire.

    — Non, ce n’est pas ce que je dis.

    Harper se pressa de se corriger.

    — Je crois que tu es une très gentille fille et…

    Liv l’interrompit avec un rire qui envoya des frissons déplaisants le long de la colonne de Harper.

    — Oh, je ne suis pas une gentille fille.

    Elle était en réalité plus petite que Harper, mais c’était comme si elle la surplombait. Il y avait quelque chose de tellement imposant en elle que Harper ne put expliquer, et elle ravala sa peur.

    C’est à ce moment, alors que Liv la regardait de ses grands yeux glaciaux, que Harper comprit que Liv était folle. C’était la seule chose pouvant expliquer les changements spectaculaires et violents de ses humeurs.

    — Peu importe. Je ne sais pas de quoi tu parles et je dois me rendre en classe, dit Harper. Tu es passée de gentille à folle en trois secondes, et je n’ai pas de temps à perdre avec ça.

    — Je ne suis pas folle !

    Liv lui cria au visage, des postillons se posant sur ses joues.

    — Et je n’en ai pas encore terminé avec toi.

    — On se parle plus tard, d’accord, Liv ?

    Harper tenta de garder une voix apaisante et égale.

    — Je dois y aller, et si tu étais intelligente, tu te préparerais et irais en classe. Sinon, cela aura peu d’importance que nous nous entendions ou non, car tu ne resteras plus encore très longtemps.

    — Est-ce que c’est une menace ? Est-ce que tu me menaces ? demanda Liv.

    — Non.

    Harper se pencha, afin de prendre son sac, quittant des yeux Liv pour seulement une seconde.

    — Si tu ne vas pas en classe, tu ne…

    Liv ne fit qu’un bref mouvement dans la vision périphérique de Harper, puis elle sentit une main s’enrouler autour de sa gorge. Liv plaqua Harper contre le mur suffisamment fort pour faire tomber un miroir sur le plancher et qu’il y éclate en morceaux.

    La main de Liv agrippa la gorge de Harper, et celle-ci fut immobilisée contre le mur. Les doigts de Liv étaient étonnamment longs, et Harper ne pouvait pas s’en défaire. Elle pouvait à peine respirer et griffa en vain le bras de Liv.

    — Liv, croassa Harper en continuant à se débattre.

    — Ne me cherche pas, Harper, déclara Liv dans un grognement sourd. Si tu me menaces ou me prends de haut encore, je vais te détruire, espèce de stupide poufiasse.

    Puis, elle lâcha Harper et recula. Harper chercha son air et se frotta le cou. Sa gorge brûlait, et elle se pencha en toussant.

    — Qu’est-ce que tu fous, Liv ? demanda Harper entre deux toux.

    Elle était toujours penchée vers l’avant et leva les yeux vers Liv.

    — Je ne te menaçais pas ! Je disais que si tu voulais rester à l’école, tu devais te rendre en classe.

    Un large sourire s’épanouit sur le visage de Liv.

    — Tu as raison. Si je veux rester, je dois me rendre en classe. Mais je ne veux pas rester. Et je me fiche de ce que disent ou pensent les gens. Je ne vais pas habiter avec une mégère comme toi plus longtemps que nécessaire. Je fiche le camp.

    Liv enfila ses chaussures, prit son sac et quitta la pièce, tout en chantonnant une mélodie en sourdine. Harper ne replaça pas la chanson, mais fut certaine de l’avoir déjà entendue.

    CHAPITRE 2

    Visite nocturne

    C ’était le même rêve qu’elle faisait chaque nuit depuis que Lexi avait été tuée. Gemma était dans l’océan. L’eau était froide, et les vagues se percutaient autour d’elle, l’écrasaient.

    C’était la nuit où Penn avait donné à Gemma la potion pour la transformer en sirène, puis l’avait jetée dans l’océan enveloppée dans le châle de Perséphone. Gemma se sentait comme un poisson dans un filet, essayant de le déchirer pour s’en échapper avant qu’elle se noie.

    Puis, elle sentait le changement s’opérer, le monstre de la sirène s’installer au fond d’elle, l’emplissant d’une faim dévastatrice. Mais son corps ne se transformait pas. Ses jambes ne devenaient pas des nageoires, et elle ne pouvait pas revenir à la surface.

    Ses ailes jaillissaient douloureusement de son dos et déchiraient le tissu, libérant Gemma. Mais elles battaient inutilement sous l’eau, et lorsque Gemma était certaine qu’elle allait se noyer, elle faisait surface. Le soulagement de pouvoir respirer à nouveau était cependant de courte durée.

    Le rêve se transformait, et plutôt que de se retrouver la nuit où elle était devenue une sirène, elle se trouvait maintenant sous l’orage de la semaine précédente, nageant à la surface de l’eau dans les vagues se fracassant au pied de la falaise près de la maison des sirènes.

    La tête décapitée de Lexi volait dans sa direction, des mèches de cheveux voletant derrière. Mais Lexi était toujours en vie, ses yeux écarquillés et conscients de tout. Lexi criait à Gemma à travers ses dents effilées comme des lames emplissant sa bouche.

    C’est à ce moment que Gemma se réveillait, des sueurs froides couvrant son front et à bout de souffle. Elle s’assoyait dans son lit, espérant se calmer suffisamment pour se rendormir, mais n’y parvenait jamais.

    Ce n’était pas qu’elle aimait tellement Lexi. C’était plutôt à quel point elle s’était sentie impuissante et prise au piège. À ce moment, lorsque se trouvait au pied de la falaise pendant que Lexi se battait avec Daniel au sommet, jamais elle ne s’était sentie aussi faible ou apeurée.

    Gemma refusait de se sentir ainsi à nouveau. À partir de maintenant, elle devait être en parfaite maîtrise de ses pouvoirs de sirène, et pas l’inverse.

    Un bruyant coup à la porte interrompit ses pensées et la fit sursauter. Gemma prit son téléphone cellulaire de sa table de chevet, vit qu’il était passé minuit et qu’elle n’avait pas manqué d’appel ou de texto.

    Elle attendit quelques secondes pour voir s’il y aurait d’autres coups, et comme ce fut le cas, elle se glissa hors du lit. Son père travaillait au matin, et elle ne voulait pas le réveiller.

    — Tu en as mis du temps, dit Penn quand Gemma ouvrit la porte.

    — Chut. Mon père va t’entendre.

    Gemma jeta un regard vers l’escalier derrière elle. Les lumières de l’étage étaient encore éteintes, alors il était presque certain que son père n’avait rien entendu.

    Penn haussa les épaules.

    — Alors ?

    — Alors, sortons pour parler.

    Gemma sortit dans la nuit, fermant la porte silencieusement dans son dos. Il était plus facile de sortir, plutôt que d’essayer d’expliquer les bonnes manières de base et la considération envers les autres à Penn.

    C’était la nouvelle lune, donc sauf de faibles étoiles, le ciel était entièrement noir. Gemma n’avait pas allumé à l’extérieur, alors en premier, elle ne vit que les formes sombres de trois filles se tenant devant sa maison.

    Puis, elle sentit un changement dans ses yeux, et ses pupilles s’élargirent. Ses sens de sirènes s’enclenchèrent automatiquement, transformant ses yeux en ceux d’un hibou, afin qu’elle puisse clairement voir dans l’obscurité.

    Penn se tenait directement devant elle, mais Thea et une fille se tenaient à quelques pas derrière. La nouvelle fille avait des cheveux blonds et de grands yeux. Quelque chose en elle lui parut familier, mais Gemma ne l’observa pas suffisamment longuement pour découvrir de quoi il s’agissait.

    L’unique chose qui importait était qu’il y avait une autre fille et ce que cela impliquait.

    — Que veux-tu ? demanda Gemma.

    — Je voulais te présenter ta nouvelle meilleure amie.

    Penn fit un pas de côté et fit un geste vers la fille derrière elle.

    — Allô.

    La fille sourit et agita les doigts vers Gemma, faisant pouffer Thea et se retourner de dédain.

    — Qui c’est, celle-là ? demanda Gemma à Penn.

    — Tu ne te souviens pas ?

    La nouvelle s’éloigna de Thea et s’approcha de Penn, afin que Gemma puisse mieux la voir.

    — Je suis Liv. J’étais la colocataire de ta sœur à l’université.

    — Jusqu’à ce qu’elle décide aujourd’hui d’abandonner et de venir vivre avec nous, marmonna Thea.

    Elle détourna les yeux vers la nuit, réussissant à avoir l’air à la fois lasse et irritée d’une manière qu’elle seule pouvait.

    C’était pour cette raison que la fille lui avait paru familière. Gemma ne l’avait rencontrée que brièvement la semaine précédente alors qu’elle aidait Harper à déménager dans sa chambre. Liv avait paru amicale, mais Gemma avait eu trop de choses en tête pour réelle­ment la remarquer.

    En outre, l’apparence de Liv s’était modifiée. Elle n’avait pas paru sans charme, mais plutôt ordinaire. Maintenant, son visage était plus lumineux, ses cheveux plus brillants, et il y avait en elle une sensualité qui n’était pas là auparavant.

    Les changements étaient subtils, mais manifestes, pour Gemma. Liv avait gardé un peu de ses yeux de biche naïve, et Gemma fut quelque peu surprise de ne pas l’avoir reconnue plus rapidement à cause de cela.

    — Pourquoi ? Pourquoi a-t-elle abandonné ? demanda Gemma à Penn, sans démontrer de l’intérêt à Liv. Comment vous connaissez-vous ?

    — N’est-ce pas évident ? fit Penn avec un large sourire. C’est ta nouvelle sœur.

    Gemma soupira.

    — Ouais, j’avais compris cela.

    — Ne sois pas si déçue, dit Liv joyeusement. Je suis très amusante, je te jure.

    — Ça, c’est vrai, dit Thea, le sarcasme filtrant de sa voix rauque.

    Penn lança un regard contrarié vers Thea, mais se retourna vers Gemma, affichant un sourire trop optimiste.

    — Gemma. Dois-tu toujours être une rabat-joie ? Allez ! C’est une bonne chose. Si nous n’avions pas transformé Liv, nous serions toutes mortes dans deux semaines. Liv vient de sauver ta vie ! Tu devrais la remercier.

    C’était vrai. Et même si Gemma détestait admettre qu’elle était un peu soulagée, elle se sentait aussi énormément coupable. Liv était mêlée à cette horrible pagaille, et si Gemma avait brisé la maudite malédiction, personne d’autre n’aurait eu à être atteint.

    — Tu ne m’as jamais remercié d’avoir sauvé ta vie, remarqua Gemma.

    — C’est parce que tu as agi en vraie pouffiasse dans tout cela, lui rappela Penn. Liv voulait cela.

    — Vraiment ? demanda Gemma, s’adressant à Liv pour la première fois.

    — Pas toi ?

    Liv parut sidérée.

    — C’est incroyable, Gemma ! C’est la plus belle chose qu’il ne me soit jamais arrivée !

    Gemma leva la main, afin de faire taire l’exubérance de Liv, et regarda vers la maison, mais aucune lumière ne s’était allumée, alors elles étaient encore probablement tranquilles.

    — Oups, désolée, dit Liv. J’avais oublié ton père.

    — Tu vois.

    Penn pointa vers Liv.

    — C’est le genre de réaction que tu aurais dû avoir.

    — Désolée de ne pas avoir sauté de joie comme la « petite rayon de soleil ».

    Gemma pointa vers Liv.

    — Excuse acceptée, répliqua Penn.

    — Alors, pourquoi êtes-vous ici si tard ? demanda Gemma.

    — Nous allions nager, et j’ai pensé que ce serait le moment idéal pour toi de rencontrer Liv, puisqu’elle habite ici maintenant, expliqua Penn. De plus, tu devras aider à lui enseigner les bases.

    — Les bases ?

    Gemma secoua la tête.

    — Je les connais à peine. Comment suis-je censée lui montrer quoi que ce soit ?

    — Penn veut simplement dire qu’elle veut de l’aide pour faire du gardiennage, dit Thea sèchement.

    — Je n’ai pas besoin d’être gardée, intervint Liv, sur un ton, selon Gemma, désobligeant. Vous m’avez déjà tout montré la fin de semaine dernière. Je vais bien. Je suis prête.

    — Elle est peut-être un tantinet trop zélée et a parfois besoin de se faire un peu refréner, dit Penn.

    — Ce n’est pas vrai ! cria Liv avec indignation, ce qui, selon Gemma, était une réponse complètement inappropriée.

    Presque chaque fois où Penn avait parlé à Gemma, elle l’avait fait avec une doucereuse condescendance ou avec une autorité vache, mais avec Liv, elle parlait de manière raisonnable, presque gentiment. Cela ne semblait pas justifier l’irritabilité de Liv.

    — Eh bien, cela paraît super, mais je vais passer sur la baignade nocturne, dit Gemma.

    — Réellement ? demanda Penn. Depuis quand passes-tu cela ?

    — Depuis que j’essaie ce nouveau truc d’honnêteté avec mon père, fit Gemma. Je lui ai dit que je ne filerais plus en douce ou ne m’enfuirais pas, alors je n’irai pas.

    — Ça semble nul.

    Penn plissa le nez en signe de dégoût.

    — Tu es nulle.

    La lumière au-dessus d’elles s’alluma, signifiant que son père était éveillé, et Gemma jura entre ses dents. Quelques secondes plus tard, il ouvrit la porte avec son nouveau fusil de chasse en main. Il ne le pointa pas vers elles, mais il voulait s’assurer qu’elles savaient qu’il l’avait.

    Peu importe le nombre de fois où Gemma lui avait dit que ce fusil n’affecterait pas les sirènes, Brian insistait tout de même pour le sortir chaque fois qu’il pouvait.

    Il ne connaissait pas d’autre manière de protéger sa fille contre elles. Il ne pouvait pas les faire arrêter ou en parler à leurs parents, ni les combattre, car elles l’auraient mis en pièce. Il ne pouvait même pas leur parler, car leur chant allait l’hypnotiser.

    Alors, il avait acquis un fusil de chasse et les regardait furieusement du pas de la porte.

    — Alors, c’était bien de papoter avec vous, lança Gemma en reculant vers la porte. Mais voilà mon signal pour rentrer.

    — Chanceuse, marmonna Thea.

    — J’ai été heureuse de te rencontrer de nouveau, Gemma, dit Liv en s’avançant comme si elle voulait lui serrer la main.

    — Ouais, amusez-vous, dit Gemma.

    Elle se glissa précipitamment dans la maison sans toucher à Liv.

    — Que se passe-t-il ? Pourquoi était-elle ici ? s’enquit Brian, se tenant si près de la porte que Gemma le heurta presque en entrant.

    Puis, il lui lança un regard étrange.

    — Quoi, papa ? fit Gemma, examinant nerveusement son expression confuse.

    — Tes yeux… sont différents, lui dit-il, paraissant un peu affligé.

    Cela expliquait pourquoi la lumière tamisée du salon lui parut si vive. Ses yeux n’étaient pas encore transformés de leur forme d’oiseau. Elle cligna plusieurs fois les yeux, les obligeant à se changer. Finalement, le salon fut sombre à nouveau, avec une seule lampe jetant de la lumière.

    — C’est mieux ? demanda Gemma.

    — Ouais, dit Brian, même si elle put voir par son expression qu’elle était redevenue normale. Que voulaient ces filles ?

    — Je ne sais pas vraiment, dit Gemma, sachant que ce n’était pas l’entière vérité.

    Elle poursuivit.

    — Elles voulaient me présenter à la nouvelle Lexi.

    — Elles lui ont trouvé une remplaçante ?

    Son père leva un sourcil de surprise.

    — Ça a été rapide.

    — Ouais, ça a été rapide, dit Gemma.

    Elle omit de dire à son père qu’une partie de cette rapidité était parce qu’elles avaient déjà trouvé cette fille. Liv devait probablement être la remplaçante de Gemma, mais lorsque Penn avait décidé de tuer Lexi à la place, elles avaient dû changer de plan.

    Le combat de la semaine précédente, alors que Lexi avait tenté de tuer Gemma et Daniel, avait été en fait une bonne chose. Il lui avait acheté quelques semaines supplémentaires. Selon la rapidité qu’elles avaient transformé Liv après la mort de Lexi, il n’aurait fallu qu’une journée ou deux de plus avant que Penn tue Gemma. Liv était prête.

    — Combien de temps sont-elles restées ? demanda Brian.

    — Seulement quelques minutes.

    — Pourquoi ne m’as-tu pas réveillé quand elles sont arrivées ?

    Gemma passa devant son père et s’assit sur le canapé du salon.

    — Je ne voulais pas te déranger. Je sais que tu dois te lever dans quelques heures et je n’allais nulle part.

    — Mais tu connais le marché, dit fermement Brian. Tu me dis ce qui se passe. Tu me tiens informé.

    — Je sais et je le fais.

    Son père parut se détendre un peu et il s’assit dans son fauteuil inclinable près d’elle.

    — Comment se passent les choses avec le rouleau ?

    — Elles vont…, commença Gemma, tentée de mentir.

    Les choses n’allaient pas bien. Après que Thea lui eut donné le rouleau, Gemma, Harper et leur père étaient demeurés debout toute la nuit pour l’examiner. Il était écrit dans une langue ancienne. Ils crurent tout d’abord qu’il s’agissait du grec, mais après avoir essayé de le traduire grâce à Internet, ils découvrirent qu’il était impossible à déchiffrer.

    Samedi dernier, Harper et Gemma étaient allées voir Lydia et lui avait montré le rouleau. Elle avait fait des copies, car Gemma ne voulait pas le laisser à quiconque. Lydia avait dit qu’elle essaierait de le traduire et d’y trouver des renseignements.

    Pendant que Lydia était occupée à cela, Gemma avait décidé de travailler à la meilleure seconde option, soit de détruire le rouleau. Harper s’y était opposée, argumentant qu’ils n’étaient pas certains de la manière dont le rouleau fonctionnait. S’ils le détruisaient, cela tuerait peut-être toutes les sirènes, incluant Gemma. Gemma était prête à prendre le risque, mais Harper continua d’insister sur le fait qu’ils devaient le traduire d’abord.

    Mais cela n’avait pas fait de différence. Gemma n’avait pas réussi à même l’endommager.

    Le rouleau était fait en un papyrus épais. Il rappelait presque à Gemma du carton, mais il était suffisamment mince pour être roulé. Le papier était beige, mais Gemma n’était pas certaine s’il avait toujours été ainsi ou si la couleur s’était transformée avec le temps. Les bouts étaient inégaux et légèrement jaunis, mais sinon, il ne paraissait pas en si mauvaise condition.

    L’encre était d’un brun très foncé et moiré. Quand elle penchait le papier sous différents éclairages, l’encre chatoyait et luisait. Elle s’était demandé si c’était l’encre en soi qui donnait au papier ses propriétés puissantes ou s’il était sous l’influence d’un sort.

    Il avait de toute évidence une protection magique. Malgré son épaisseur, le papyrus semblait fragile sous les doigts de Gemma, lui rappelant une feuille de maïs desséchée. Elle avait eu l’impression qu’elle pourrait aisément le briser ou le déchirer en deux.

    Mais elle n’y était pas parvenue. Un ciseau ne le coupait pas. Il ne faisait que plier le papier sans l’endommager du tout. Elle avait essayé des cisailles de jardinage et avait même demandé à son père de l’aider avec son plateau de sciage. Le papier ne faisait que plier et courber. Rien n’arrivait à le mettre en pièces. Il avait même coincé la déchiqueteuse de la bibliothèque.

    Le feu ne le brûlait pas. L’eau ne le tordait pas. Gemma commençait à manquer d’idée sur la manière d’essayer de le détruire. Quand elle l’avait plongé dans l’eau, l’encre avait paru scintiller, mais en le ressortant, rien n’avait changé. L’encre tenait bon, et le rouleau demeurait intact.

    Si la destruction était hors de question, alors elle devait trouver un moyen de le lire. Jusqu’à ce que Lydia revienne avec une traduction officielle, Gemma faisait de son mieux pour l’interpréter d’elle-même en fouillant sur Internet pour des documents avec une écriture similaire.

    Brian faisait de son mieux pour donner un coup de main grâce aux quelques indices que Bernie lui avait donnés, mais jusqu’à maintenant, aucun n’avait paru utile. Les renseignements que Bernie lui avait livrés semblaient être davantage des superstitions aléatoires.

    — Rien de nouveau jusqu’à maintenant ? demanda Brian.

    Gemma tira les genoux sur sa poitrine.

    — Non, pas encore.

    — Mais cela ne fait que quelques jours. Laisse un peu de temps. À quel moment cette fille est-elle censée te donner des nouvelles de la traduction ?

    — Lydia ? Je n’en suis pas certaine.

    Gemma secoua la tête.

    — Elle espère au courant de la semaine.

    — Dès que tu l’auras, nous arriverons à tout comprendre, la rassura Brian.

    — Ouais, je sais.

    Gemma se força à sourire.

    — Je vais m’en tirer. Tu n’as pas à t’inquiéter.

    — Je sais que tu vas t’en tirer, mais c’est mon travail de m’inquiéter. Je suis ton père.

    Ils continuèrent à discuter un peu avant que Brian retourne se coucher. Gemma retourna dans sa chambre, mais elle savait qu’elle n’arriverait plus à dormir pour le reste de la nuit.

    C’était encore étrange de parler à son père ouvertement de tout ceci. C’était bien, car tout garder secret lui avait fait un énorme poids sur la poitrine. Mais parfois, elle se sentait mal d’avoir dit la vérité à son père. Elle ne voulait pas qu’il s’inquiète à son sujet. Il avait déjà tant de choses à s’occuper.

    C’est pour cette raison qu’elle gardait encore des choses pour elle, comme le fait que Liv soit devenue une sirène était probablement un mauvais signe. Cela permettait à Penn de commencer à chercher une nouvelle remplaçante, ce qui signifiait que le temps de Gemma était encore compté.

    Mais plus que cela, une nouvelle sirène était un autre monstre dans son chemin. Penn voulait la tuer, Lexi avait essayé de la tuer, et avec sa chance, Liv allait possiblement éprouver la même chose que Penn et Lexi.

    Liv était simplement une sirène supplémentaire que Gemma allait devoir écarter avant de pouvoir être enfin libérée de cette malédiction.

    CHAPITRE 3

    Coïncidence

    Q uand Harper se fut calmée de l’attaque de Liv la veille, sa première pensée avait été : « Cette fille est une sirène. »

    Elle avait presque aussitôt rejeté l’idée, se disant que c’était parce qu’elle avait les sirènes en tête. Mais il y avait des signes pour soutenir cette affirmation, mis à part sa colère irrationnelle et sa force extrême. Ses cheveux blond foncé avaient un éclat plus doré, et ses yeux bruns avaient une nouvelle intensité.

    Mais Harper finit par se dire qu’elle ne pouvait pas en être certaine. Elle n’y avait pas porté beaucoup d’attention, et Liv pouvait tout aussi bien avoir pris de la drogue ou avoir un grave problème de santé mentale, ce qui expliquerait ses importantes sautes d’humeur et sa grande violence.

    Après le départ précipité de Liv, Harper avait pris quelques minutes pour reprendre son souffle, puis avait ramassé ses choses et s’était rendue en classe. Quand elle était revenue plus tard cet après-midi-là, leur chambre était complètement démolie, ou du moins du côté de Liv avec un peu de pagaille débordant vers le côté de Harper. Le lit était détruit, les affiches étaient déchirées, et des débris quelconques étaient éparpillés partout.

    Harper avait considéré dormir dans l’aire commune cette nuit-là, mais comme la plupart des choses de Liv semblaient être parties, elle décida de prendre le risque. Elle avait été en sécurité, car Liv n’était pas revenue. Elle espérait qu’elle ne reviendrait jamais.

    Lorsque son cours de psychologie de l’après-midi avait été annulé parce que le professeur était absent, elle alla sur le gazon du campus plutôt que de retourner dans sa chambre. C’était un cours qu’elle avait avec Liv, alors cela ne lui avait pas permis de voir si Liv était réellement partie, mais c’était quand même une bonne occasion de faire des devoirs.

    De plus, la température était superbe, particulièrement en comparaison à la chaleur intense de la semaine précédente. L’air était presque frais, ce qui était un changement agréable. Elle prit son manuel, voulant réviser les terminologies médicales, et ne remarqua pas combien de temps s’était écoulé lorsque son cellulaire sonna.

    Quand elle le saisit et vit l’heure, elle jura entre ses dents. Même si elle était pressée de se rendre à un rendez-­vous, elle devait quand même répondre. C’était son père l’appelant durant sa pause, et il allait s’inquiéter, si elle ne répondait pas.

    — Hé, papa, dit Harper en se démenant pour mettre ses livres dans son sac à dos d’une main tout en tenant son cellulaire de l’autre.

    — Est-ce qu’il y a quelque chose qui ne va pas ? s’enquit Brian, déjà tendu d’inquiétude.

    — Non, tout est super, mentit Harper en jetant son sac sur son épaule.

    Elle n’avait rien dit à personne à Capri au sujet de l’attaque de Liv. Il y avait déjà suffisamment de choses qui se passaient sans qu’ils se mettent à s’inquiéter des problèmes de sa colocataire.

    — Tu sembles à bout de souffle, persista-t-il.

    — Je suis simplement en retard, expliqua-t-elle en traversant vivement le campus. J’ai une rencontre dans peu de temps avec le professeur Pine.

    — Qui est-ce ? demanda Brian.

    — Tu te souviens ? Je t’ai déjà parlé de lui, fit Harper. C’est le professeur d’histoire qui était archéologue auparavant.

    — Oh, ouais, Indiana Jones, dit Brian.

    Harper se mit à rire.

    — Ouais, lui.

    Brian parut hésiter avant de poursuivre.

    — C’est au sujet de Gemma, n’est-ce pas ?

    — Ouais.

    Harper hocha la tête et baissa les yeux, comme si les autres étudiants traînant sur le gazon pouvaient déchiffrer son expression et savoir de quoi elle discutait.

    — Eh bien, si tu es occupée, je ne vais pas te retarder.

    — Désolée. Je ne veux pas me débarrasser de toi, ­s’excusa Harper en s’arrêtant lorsqu’elle atteignit les portes extérieures de la faculté. Mais on se voit cette fin de semaine quand je vais revenir à la maison pour la pièce de Gemma.

    Quand elle eut raccroché d’avec son père, Harper entra pour trouver le bureau du professeur Pine. Il n’était pas l’un de ses professeurs, mais elle avait parlé avec son conseiller qui l’avait référée à lui à cause de son expérience en archéologie.

    Quand Harper lui avait téléphoné la veille pour prévoir une rencontre, elle avait dû inventer une histoire sur la manière qu’elle avait découvert le rouleau. Il l’aurait probablement envoyé voir un psychologue, si elle lui avait parlé de monstres et de malédictions. Alors, elle lui avait simplement expliqué que sa sœur avait trouvé un vieux rouleau dans la maison de Bernie McAllister alors qu’elle la nettoyait après sa mort et qu’elles avaient quelques questions à ce sujet.

    Le professeur Pine avait été assez aimable pour arranger une rencontre à son bureau, même s’il doutait être en mesure de réellement l’aider. Mais Harper était prête à suivre toutes les pistes, afin d’en découvrir davantage sur le rouleau.

    Harper avait appris à se débrouiller sur le campus plus rapidement qu’elle s’y était attendue et réussit à trouver le bureau avec cinq minutes d’avance. La vitre givrée indiquait « professeur kipling pine ». Elle songea à attendre à l’extérieur, mais la porte était partiellement entrouverte, alors elle frappa légèrement.

    Comme il ne répondit pas, elle ouvrit la porte plus grande et vit un homme penché sur sa table de travail. Il semblait être dans le début de la trentaine, un peu jeune pour tous les voyages que son bureau et sa réputation suggéraient, avec des cheveux blonds peignés vers le côté.

    Des écouteurs couraient de ses oreilles à son iPad déposé sur sa grande table de travail en chêne, dangereusement près d’une canette de Red Bull ouverte. Devant lui se trouvait une petite boîte couverte de symboles rappelant à Harper un croisement entre un casse-tête cryptex et le cube de la Configuration des Lamentations du film Hellraiser.

    Le professeur portait une lorgnette attachée à ses lunettes, comme un monocle que les joaillers utilisent pour inspecter les diamants. Il avait un minuscule outil ressemblant à une aiguille qu’il enfonçait sur la boîte, puis tapait rapidement quelque chose sur son iPad, apparemment documentant de minuscules découvertes.

    Comme il était si absorbé par son travail, Harper prit un moment pour examiner le bureau, ce qui était plutôt difficile, car il était empli du plancher au plafond.

    Le bureau était un mélange d’égyptien ancien, de steampunk et de technomoderne. Des artéfacts et de vieux livres débordaient des étagères mêlées à toutes sortes de gadgets vaguement antiques. Une croix d’ânkh, un vieux globe avec une longue-vue saillant sur le côté et une balance numérique clignotante occupaient la même tablette. Et il y avait un mince ordinateur, la tablette sur sa table de travail et une lumière laser bleue enfouie dans un coin parmi des manuels et des journaux écrits en syrien.

    Le bureau du professeur Pine était comme le plus étrange des épisodes de Hoarders*.

    — Professeur ? appela avec hésitation Harper.

    — Oui ?

    Il leva la tête, afin de la regarder, l’observant à travers son monocle. Il tira sur l’un de ses écouteurs.

    Harper dut réprimer un sourire en constatant qu’il ressemblait un peu à un jeune Indiana Jones. Malheu­reusement, il n’était pas vêtu d’une veste de tweed ou d’un chapeau. À la place, il portait une chemise à manches longues déboutonnée et laissant voir un t-shirt de Joy Division.

    — Nous avions rendez-vous à 13 h 15.

    Harper fit un geste vers l’une des quatre horloges de son bureau, la seule indiquant la bonne heure.

    — Je suis en avance de quelques minutes, mais je peux revenir…

    — Non, entre.

    Professeur Pine tira l’autre écouteur de son oreille

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