Fleurs à aubépines
Par Nathalie Morgado
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À propos de ce livre électronique
Elle peut revêtir diverses formes, plus ou moins subtiles.
Traitée ici avec une approche théâtrale, ce drame met en scène une famille dysfonctionnelle. L'aubépine c'est beau mais ça pique. On dit aussi des fleurs d'aubépine qu'elles appartiennent à une espèce difficile à déterminer. Un peu comme ces cinq femmes fleurs : Cindy, Lisa, May, Théa et Lili, roses pleine de sang et d'épines.
Nathalie Morgado
Nathalie MORGADO est spécialisée en art contemporain et cinéma, journaliste et scénariste. Elle anime également des ateliers d'écriture sur la façon d'écrire des récits de fiction de la nouvelle, au roman en passant par le scénario. Occasionnellement traductrice en anglais, elle anime aussi des conférences sur l'écriture et le cinéma.
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Avis sur Fleurs à aubépines
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Aperçu du livre
Fleurs à aubépines - Nathalie Morgado
(Rilke)
ACTE I
Acte 1, scène 1
Un intérieur représentant une chambre en désordre. Lit défait, jouets d’enfants au sol. Une commode avec un tiroir ouvert : à l’intérieur un poupon, c’est Kevin, le dernier des enfants. Le tiroir lui sert de berceau. Des bouteilles d’alcool vides, des emballages de médicaments type antidépresseurs et autres jonchent le sol.
Une table encombré de reste de déjeuner, d’un biberon, de bouteilles de verre, un grand cendrier plein à ras bord posé dessus. Des piles de CD, des vieux magazines déchirés, des chaussettes : impression de taudis. Au fond, un fil à linge avec des épingles sur lequel sèche un string criard genre string à motif panthère.
Dans un coin de la scène un fauteuil en cuir pété, face à un ordinateur portable posé sur une table basse de salon qui en a vu d’autre. Le rideau s’ouvre sur Cindy, elle porte un legging tire-bouchonné, des mules à pompons roses, un débardeur très serré, très échancré, qui moule son opulente poitrine, elle fume, elle est outrageusement maquillée. On la surprend au saut du lit. Une pendule sonne deux heures de l’après-midi. Elle a la gueule de bois. Elle est au téléphone, elle parle avec une amie.
CINDY, au téléphone
Je te dis qu’il va rappliquer avant trois heures. Si, si, si, si, si…Je lui ai dit que le petit allait pas fort, que j’avais plus une thune pour acheter les médicaments. Il va venir je te dis. Comment ça ?
(silence, elle écoute les objections de sa copine).
Et alors ! (ton révolté). Ce n’est pas parce qu’il épouse cette pute qu’il ne va pas rappliquer pour sa baise ! Je te le dis il va venir passer sa nuit de noces avec moi (un silence) Ne serait-ce qu’à cause des gosses…Je lui ai dit que Théa et Lili voudraient bien assister à la cérémonie… Ça l’a fait culpabiliser grave !…Bah non elles ont rien demandé… Théa a peut-être compris mais Lili à part dormir je me demande si elle comprend quoi que ce soit…Et puis ce ne sont pas leurs oignons… j’en ai pas parlé avec elles… C’est juste leur père, il doit leur filer un cadeau pour l’occase…Quoi May ? Qu’est-ce qu’il en a à foutre ! Ce n’est pas lui le père…Par contre pour les trois autres… Pire qu’une mitraillette ! Il m’a engrossé à tous les coups, trois fois à la chaîne, le salaud ! Faut qu’il paie ! Du pognon pour moi, des cadeaux pour les gosses (on entend des pleurs de bébé, c’est Kevin. Cindy s’interrompt brièvement puis reprend. Le bébé pleure toujours. Cindy hausse la voix mais ne fait aucun geste vers le bébé). T’entends ? C’est pas du chiqué ! C’est bien son chiard qui me casse les oreilles !
Les autres, j’étais tranquille. Elles fermaient leurs gueules. Mais celui-là, c’est bien un mec, il braille pour rien ! (les pleurs du bébé sont toujours présents).
Je peux pas le laisser ne serait-ce qu’une heure, il braille comme un cochon qu’on égorge. Alors que Théa, je pouvais aller au ciné et en boîte, elle était vachement accommodante, elle se mettait dans un coin et elle pionçait. Comme Lili. Tu les oubliais aussi sec. Et May c’était encore mieux. Je pouvais la filer à son oncle et j’étais free ! (la copine réussit à en placer une. Cindy écoute, elle fait des petits signes de tête et ponctue par des ouais, ouais. Puis elle reprend. Les pleurs s’estompent mais sont toujours là). Mais Kevin c’est une plaie ! Si je lui colle pas sa dose il chiale comme un cochon qu’on égorge, (on entend des pleurs espacés), il va me tuer ce gosse (dit sur un ton de racaille). Elle écoute encore la copine quelques instants puis soudain : attends, il est quelle heure ? Déjà ? Faut que je te laisse, c’est le replay de mon programme ! Bah, les vampires à LA voyons ! Et après j’attends quelqu’un… Quelqu’un ! (elle glousse comme une ado) Nan, je te dirai pas son nom...T’es trop curieuse (elle continue de glousser et se tortille). Nan. La prochaine fois…Nan, pas aujourd’hui. Nan. Nan. Nan. Bise louloute.
Cindy raccroche. Elle se précipite vers la table, prend une bouteille de bière, le bébé pleure toujours mais c’est comme si cela ne la concernait pas. Elle se rue sur le fauteuil, allume l’ordinateur, tape l’adresse pour accéder au replay. On entend la musique du générique. Un immense sourire illumine le visage de Cindy. Elle se cale au fond du fauteuil, ouvre sa bière avec ses dents, crache la capsule, boit au goulot rapidement et avec avidité comme si c’était de l’eau après un séjour dans le désert. On entend des bribes d’une émission de télé-réalité. « Non mais Samantha t’avais pas le droit de coucher avec Jordan sans me demander la permission »,« les gars aujourd’hui on va aider le Burundi en coupant des cannes à sucre »,« et Julia c’est rien qu’une pouffe je veux plus lui parler ». Elle a l’œil rivé à l’écran. Elle est