Maman viendra payer
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À propos de ce livre électronique
Marmande en Lot et Garonne, est une petite sous préfecture tranquille. Pourtant, il s'y passe de drôles de choses.
Emma est une belle jeune femme qui ne sait rien se refuser. Elle est divorcée de Yannick Il ne paye pas la pension régulièrement pour ses deux enfants Raphaëlle une adolescente de 15 ans et Didier un enfant de 10 ans. Elle est licenciée, pour cause de compression de personnel. Les factures s'entassent.
Lorsque Patrick et Thierry lui proposent un emploi dans une entreprise de nettoyage, elle est loin de se douter qu'elle va se retrouver dans une affaire d'espionnage industriel. Elle n'est qu'un pion, Un fusible facile à faire sauter mais qu'il faut protéger coûte que coûte, ou supprimer.
Raphaëlle est mal dans sa peau. De plus, elle souffre du manque d'argent de poche pour sortir avec Kevin son amoureux. Marina, une camarade plus âgée lui propose de faire comme elle ; poser pour un photographe local qui paye ses modèles. Elle ignore que Marina est accro à la cocaïne que lui procure le photographe dont elle est la maîtresse et que les poses, en tenue légère, seront diffusées sur le Net.
C'est bientôt l'anniversaire de Didier. Il fait son caprice pour une coûteuse tablette numérique. Emma n'a pas l'argent pour la lui offrir. Tremblante de peur, elle se décide à la voler. Elle se fait prendre. Yoann Champogny, propriétaire du magasin lui fait du chantage.
Les nuages noirs s'accumulent sur Emma et Raphaëlle. Comment tout ça va-t-il finir.
Maurice, Américo LEAO
Je suis né en mille neuf cent quarante-sept, à Ambarés 33, commune sur l’estuaire de la Gironde. D’un père Portugais et d'une mère Béarnaise. Après Une carrière en gendarmeries où j’ai occupé divers postes, depuis enquêteur en section de recherches, jusqu’à commandant de brigade, en France et outre-mer, je me suis trouvé confronté au milieu avec ses magouilles et ses crimes crapuleux. Quelques-uns d’entre eux m’ont motivé pour en faire le récit. Ce sont aujourd’hui plusieurs titres qui figurent à ma bibliographie. Si les lieux où se déroulent les faits sont réels, les personnages sont de pures fictions. Les événements sortis de leur contexte d’origine pour être romancés se déroulent principalement en Gironde, Lot et Garonne mais aussi à la Martinique et en Espagne. Laissez-vous conduire sur les traces de ces mauvais garçons qui prennent vie au cours de ces affaires où gendarmes et policiers ne gagnent pas toujours et se terminent par des règlements de comptes entre gens du milieu. Beaucoup d’enquêtes ne sont jamais résolues, en douteriez-vous ?
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Aperçu du livre
Maman viendra payer - Maurice, Américo LEAO
Roman policier
Écrit par
Maurice, Américo LEAO
Ceci est une œuvre de fiction.
Toute ressemblance avec des personnes existantes
ou ayant existé
des lieux ou des événements réels
ne serait que le fait du hasard
Maman viendra payer
Première édition. 2018.
Copyright © 2018 Maurice, Américo LEAO.
ISBN Broché 9781718002807
ISBN ebook 9782490413065
Dépôt légal 3e trimestre 2018.
––––––––
Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par l’article L.335-5 et suivant du Code de la propriété intellectuelle.
Du même auteur.
Meurtre à la Palombière.
La Sorcière de la porte Rendesse et la vengeance du mage noir.
Prends Garde à La Garce.
Si tu prends mon cœur.
La fille du ferrailleur.
Les oubliés de l’histoire (Tome I Les noces de Mariette).
Les oubliés de l’histoire (Tome II L’exode l’occupation).
Les oubliés de l’histoire (Tome III Œil pour œil).
Les oubliés de l’histoire (Les trois tomes en un seul, texte intégral).
Palmyre.
Ha la gueuse.
Souvenirs
.
Maman viendra payer
1
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Mardi 9 mai 2017, 7 heures
— Elle est vraiment poussive cette fourgonnette, dit Jacques Carabini.
— D’après toi, pourquoi ils l’ont fichu à la ferraille chez EDF ?
— Oui, il y a de ça. En plus on n’avance pas avec cette ambulance qui roule au pas.
— Ne t’énerve pas, c’est sûrement pour aller chercher un malade.
À ce moment, Jacques éclate de rire.
— Ça te fait rire, peut-être que ce sera toi un jour qu’on amènera à la chimio, ou ailleurs.
— Non, ce n’est pas ça. Je rigole parce que c’est la première fois que tu portes une combinaison de travail.
— Et alors, il n’y a pas de sot métier, riposte André.
Pendant ce temps, l’ambulancier actionne son clignoteur. Le portail de la villa est ouvert, un gendarme lui fait signe d’entrer, puis referme derrière lui. Un groupe de personnes se tient à proximité.
— Merde, c’est chez notre client qu’il va, lâche Jacques.
— Arrête-toi, on va demander aux gens qui sont devant la porte.
— Que se passe-t-il ? Nous devions faire des travaux d’entretien sur le poteau qui se trouve... André fait mine de lire une adresse sur un papier. Chez monsieur... enfin, celui qui habite là.
C’est une dame d’un certain âge dont la chemise de nuit dépasse largement du manteau qu’elle a passé par-dessus qui répond.
— Un cambriolage qui a mal tourné semble-t-il.
— Et alors, il est blessé ? J’ai vu renter une ambulance.
Celui qui semble être son mari le renseigne.
— Que non, je crois bien qu’il est mort.
— Ce n’est pas le moment de monter au poteau, nous reviendrons un autre jour, dit Jacques en démarrant.
— Ouais, si quelqu’un se met à piquer notre boulot, on est bon pour Pôle emploie, dit André.
— En attendant, ça change la donne. Les flics vont remonter jusqu’à notre amie Emma, et là, Joël il ne va pas être content.
— Ouais, après un silence, Jacques rajoute, tu crois qu’il va falloir s’en occuper ?
— C’est à Joël de décider, mais ça ne me plaît pas de supprimer cette femme ; elle est d’une naïveté désarmante et ne m’a rien fait.
— Moi non plus, confirme Jacques.
— Quel drôle de métier on fait.
Jacques hausse les épaules, cynique il rajoute.
— Il faut bien que l’on bosse, si on veut manger tous les jours.
*
**
Revenons au vendredi 10 mars 2017.
Emma attend le facteur avec une certaine appréhension. En principe, il passe avant neuf heures. Elle le guette depuis la fenêtre du salon. Dès qu’il ressort de l’immeuble, après avoir déposé le courrier dans la boîte, elle s’empresse d’aller le récupérer. Ouvrir l’enveloppe de sa banque ne prend que quelques secondes. Ouf. Le chèque que Yannick lui a remis a été crédité. Ce n’est pas toujours le cas.
Le jugement de divorce prononcé depuis déjà un an n’a pas été spécialement en sa faveur. Trois cents euros pour elle et ses deux enfants, Raphaëlle et Didier, ce n’est pas le Pérou. Son salaire de caissière chez « Beauchanp-Marmande » lui permet juste de vivre. La pension alimentaire est censée l’aider. Elle en est là de ses réflexions lorsque le téléphone la tire de sa lecture.
— Allô !
— Emma, c’est Roseline, toujours partante pour la sortie en discothèque de samedi.
Elle n’y pensait plus vraiment à cette sortie. Ses moyens financiers sont limités. Pourtant, la tentation est la plus forte.
— Bien sûr que j’y pense, j’ai repéré un ensemble pantalon à rendre jalouse les copines. Je pense que je vais me l’offrir.
« Elle en a bien besoin de nouveaux vêtements, avec son petit salaire et ses deux gosses à élever. Elle ne changera jamais, quelle tête de linotte », pense Roseline.
— Tu as bien fait de te faire plaisir, d’autant plus que la semaine dernière, avec Dany, on s’est fait draguer par deux beaux mecs. Ils ont proposé que l’on se revoie samedi, je suis sûre qu’ils vont te plaire.
— Et Dany, elle en dit quoi ?
— Tu sais bien qu’elle est en couple, alors elle te cède la place.
— Tu peux compter sur moi, Raphaëlle gardera Didier.
À peine raccroché, elle regrette de s’être précipitée. Le chèque de Yannick est bien encaissé, mais il devait servir à payer le loyer de son T3 à la résidence de « La Gravette ». L’achat de « l’ensemble pantalon » qui lui fait tant envie est marqué cent vingt euros. Le chèque va en prendre un coup.
Ouais se dit-elle, « ce n’est pas grave, je dois toucher ce soir une avance sur ma paye. Monsieur Bouchon attendra bien jusque-là ».
Un rapide coup d’œil à sa montre la rassure. Je ne prends mon service qu’à onze heures, j’ai le temps d’aller chercher mon ensemble, je le laisserai dans mon vestiaire.
Emma va bientôt fêter ses trente-six ans, mais elle en fait facilement cinq de moins. Grande, les courbes harmonieuses de son corps attirent facilement le regard des hommes. Elle le sait, en use et en abuse à l’occasion. Ajoutez à cela un joli visage où percent deux yeux noisette. Lorsqu’elle rit, deux fossettes se dessinent de chaque côté de sa bouche. Des cheveux aile de corbeau pourraient parachever l’ensemble, s’ils n’étaient coupés très court, lui donnant un air de garçon manqué.
Pour elle, rien n’a jamais beaucoup d’importance, ce qui compte, c’est son bon plaisir. Coquette et capricieuse, boudeuse si elle n’obtient pas la satisfaction de ses désirs son incapacité à gérer le ménage et tenir le foyer a conduit Yannick à demander et obtenir le divorce.
Avant de partir, elle se rend dans la chambre de Raphaëlle, ouvre le tiroir de la table de nuit.
« Ah, il est toujours là. Je le lui rendrai plus tard, si j’y pense », se dit-elle.
*
**
Raphaëlle sort de son dernier cours de la matinée, il est onze heures trente. Elle presse le pas pour arriver chez elle avant midi. Elle doit préparer le repas pour son jeune frère Didier qui rentre déjeuner avant de repartir en classe. Elle n’a pas cours cet après-midi ; il est prévu, avec deux autres copines, d’aller au cinéma voir le dernier Harry Potter.
Dans l’entrée de l’immeuble, au-dessous de sa boîte à lettres, accroché à un piton, un sac de toile contient un pain. À l’intérieur se trouve aussi la note pour la semaine. Une voix juvénile la fait sursauter.
— J’ai faim, que ce qu’il y a pour midi ? Déclare Didier.
— Je n’en sais rien, je suis comme toi, j’arrive juste.
— Il y a au moins le pain, rajoute l’enfant en riant.
— Et la note, dit Raphaëlle en lui agitant le bout de papier sous le nez.
Sur la table de la cuisine, Emma a préparé le couvert. Un petit mot, précise : « Il reste des pâtes d’hier, fait les réchauffer au four micro-ondes. Il y a deux steaks hachés et des yaourts au frigo. N’oublie pas de fermer le gaz. » C’est signé Bisous Maman.
— Y a que ça, râle Didier.
— Demain ça ira mieux, je viens de voir le relevé de compte de la poste que Maman a laissé sur la table du salon.
— À bon, papa a payé notre pension ?
— Oui, je vais pouvoir m’acheter une paire de chaussures, la semelle de celles-ci est décollée.
— Et moi, une tablette pour mon anniversaire. Tous mes copains en ont et ils se moquent de moi parce que je n’en ai pas.
— Vu ce qu’il reste sur le compte de maman, je pense que tu vas attendre.
Didier s’apprête à justifier se demande, lorsque le timbre de la porte d’entrée lui coupe la parole.
— Qui ça peut-il être ? Nous n’attendons personne, dit-il.
— Surtout à l’heure du repas, confirme Raphaëlle.
De nouveau, la sonnette résonne dans l’entrée. À voix basse la jeune fille déclare.
— Tu restes là, sans bouger, je vais regarder par le judas.
En silence, elle s’approche, sur le palier, elle reconnaît sans peine Monsieur Pierre Bouchon, le concierge de l’immeuble. Didier s’est rapproché de sa sœur. Elle s’enhardit à entrouvrir la porte, bloquée par une sécurité.
— Je savais que vous étiez là, dit le concierge.
— Mais oui monsieur, c’est pourquoi ?
— Mais pour le loyer pardi. Vous savez le combien nous sommes ?
Surprise par cette question qui lui semble stupide, Raphaëlle déclare d’une petite voix.
— Le dix.
— Et oui, le dix. Les loyers doivent être payés le premier du mois, sauf s’il tombe un dimanche. Cela fait trois fois que je le réclame à votre mère... mais avec elle... elle n’est pas là je suppose.
— Non monsieur elle travaille à « Beauchamp », s’interpose Didier.
— Eh bien lorsqu’elle rentrera ce soir, dite lui bien, que j’attends son loyer.
D’une toute petite voix, elle murmure en repoussant la porte.
— Oui monsieur, maman viendra payer.
Elle essuie furtivement une larme qui perle à ses yeux. Elles se voient encore aller en cours avec ses chaussures aux semelles baladeuses. Étranger à la situation, Didier réclame.
— J’ai faim, on mange ?
Résignée, mais le cœur gros, la jeune fille ouvre la porte du frigo, où se trouvent deux steaks hachés et les deux yaourts. Rien d’autre.
— Il n’y a que ça, s’exclame Didier, de nouveau.
Raphaëlle étouffe un soupir de lassitude, hausse les épaules. Elle tente de justifier sa mère.
— Tu le vois bien, mais ne t’inquiète pas, maman fera des courses avant de rentrer.
Sitôt le déjeuner avalé, Didier s’est affalé sur le canapé du salon. La télécommande à la main, il zappe pour trouver un dessin animé. Raphaëlle finit de ranger les assiettes dans le lave-vaisselle. Les idées s’enchaînent dans sa tête. « Je commence à comprendre pourquoi papa est parti. Il en a eu ras le bol de cette maison où l’argent ne fait que passer. Il y a bien son chèque, mais le loyer n’est pas payé, le boulanger non plus, le frigo est vide ».
Penchée maintenant au-dessus de l’évier, elle nettoie sa chaussure gauche, celle dont la semelle se désolidarise. Après l’avoir bien séchée, elle répare les dégâts avec de la super glu. C’est la deuxième fois. Va-t-elle tenir encore ?
Treize heures trente sonnent.
— Didier, éteint la télé, c’est l’heure que tu retournes à l’école.
— Déjà ?
— Oui, file.
Sitôt l’enfant parti elle se rend dans sa chambre. Elle avait précieusement gardé dans le tiroir de sa table de nuit le billet de vingt euros, offert par sa grand-mère pour cette séance de cinéma. En vain, le tiroir n’est pas bien grand, elle le retire pour voir s’il n’est pas passé derrière. Elle renverse le contenu sur son lit. Rien. Les larmes lui montent aux yeux. Elle se laisse aller.
« Merde, merde, merde, trois fois merde ».
Ce n’est pas la première fois qu’Emma pioche dans ses maigres économies.
« C’est maman, je suis sûre que c’est elle qui me l’a piqué ».
Elle sait qu’il est inutile de chercher dans la maison une somme suffisante pour payer l’entrée du cinéma. Si Emma s’est emparée de son billet de vingt euros, c’est qu’il ne se trouve plus un centime nulle part.
Le téléphone sonne
— Allô !
— Raphaëlle, c’est Josy, nous sommes en bas de chez toi, nous t’attendons.
De quoi aurait-elle l’air en avouant qu’elle n’a pas les moyens de payer sa place. Une main cruelle lui tord l’estomac. Elle renifle pour repousser des larmes qu’elle ne veut en aucun cas laisser couler. C’est d’une toute petite voix qu’elle répond.
— Je suis désolée, les filles, je ne me sens pas bien, j’ai vomi mon déjeuner, je préfère rester à la maison.
— C’est vrai que tu as une drôle de voix. C’est dommage car lorsqu’il a su que tu étais des nôtres, Kevin a voulu venir avec nous.
— Tant pis, ce sera pour une autre fois.
En raccrochant le combiné, elle ne peut retenir le spasme qui monte de son estomac. Elle n’a que le temps de se précipiter aux waters. Kevin était là. Cela fait plusieurs mois qu’elle attend qu’il l’invite à sortir avec lui.
*
**
— Je sors samedi avec Roseline, elle a déniché deux beaux mecs, je sens que nous allons bien rigoler, dit Emma.
Elle a retiré son ensemble pantalon de son emballage, et le présente devant elle.
— Qu’est-ce que vous en pensez. Ils ne devraient pas résister les beaux gosses de Roseline.
— C’est sûr, s’aventure l’une de ses collègues.
— Nous n’avons pas le temps d’admirer tes achats rajoute une autre, nous allons rater la relève et la responsable des hôtesses de caisses va nous passer un savon.
Déçue de ne pas être le centre d’intérêt du groupe, elle remballe ses achats en maugréant. « Elles sont jalouses, c’est tout ».
Pendant ce temps, une réunion se tient dans le bureau du directeur du magasin.
— C’est un coup dur, constate le directeur.
— Oui, j’étais au courant de cette offre publique d’achat de notre enseigne par la chaîne « Vert Pré », mais je ne pensais pas qu’elle aboutisse avant la fin de l’année. C’est d’autant plus gênant qu’ils nous demandent de réduire le nombre de personnel et principalement les hôtesses de caisse, confirme le directeur des ressources humaines.
— Vous avez vu avec la comptabilité, qu’elles n’aient pas l’idée de nous assigner aux Prud’hommes.
— Le problème est réglé, elles ne sont que deux. Chloé Brion est célibataire et demeure avec ses parents, elle n’a que six mois d’ancienneté. Le plus délicat, c’est le cas d’Emma, Rhony. Elle est chez nous depuis un an, juste après son divorce, et elle a deux enfants à charge.
— Son indemnité de licenciement ne devrait pas être bien élevée, fait remarquer le directeur.
— Non, quelques centaines d’euros. J’ai fait le calcul avec son mois de salaire et le reliquat de ses congés, elle dépasse à peine les deux mille cinq cent et des poussières, compte tenu de l’avance qui lui a été consentie et que la comptabilité va lui verser ce soir.
— Bon, rajoute le directeur, la corvée est de votre ressort.
À quatorze heures, la responsable des caisses informe Chloé Brion de ce que la déléguée du personnel l’attend dans le bureau du directeur des ressources humaines.
— Que se passe-t-il ?
— J’ai bien peur que nous n’ayons été rachetés par « Vert Pré », déclare sa supérieure.
— Et alors ?
— Compression du personnel.
Chloé affiche la pancarte « fermé ». Elle a compris.
— S’il vous plaît messieurs dames, je ferme, veuillez passer à une autre caisse.
La relève inhabituelle de Chloé n’a pas échappé à Emma. Ni la triste figure que présentait sa collègue.
« Allons, que se passe-t-il », se dit-elle.
Machinalement, elle accorde un regard furtif aux globes qui dominent chacune des caisses. Elle sait pertinemment qu’ils dissimulent tous une caméra de surveillance.
« Chloé n’est pas assez stupide pour avoir planqué quelque chose. Non, ce n’est pas ça ».
Lorsque la jeune fille revient, il est facile de voir à sa mine défaite, qu’elle n’a pas reçu une bonne nouvelle. Accompagnée de la responsable des caisses, elle se dirige vers elle. Emma commence à se crisper. Une sueur froide glisse le long de son dos lorsqu’elle lui adresse la parole.
— Chloé va vous remplacer Emma. Vous êtes attendue au bureau du directeur des ressources humaines. La déléguée du personnel y est déjà.
Au cours du changement, Chloé a le temps de lui glisser.
— Je suis virée, compression de personnel.
Emma n’a pas besoin d’un dessin. Elle est parfaitement consciente que son ancienneté dans l’enseigne ne lui permet pas d’être maintenue.
La présence de la déléguée du personnel la rassure sur un point. Au moins, si l’indemnité n’est pas pharamineuse, on ne tentera pas de la spolier.
— Nous sommes désolés de devoir nous séparer de vous Madame Rhony, mais nous avons été rachetés par « Vert pré ». À compter du premier avril, vous ne ferez plus partie du personnel. Les sommes qui vous sont dues vous seront versés à ce moment-là.
Ce n’est pas énorme, non, mais Emma ne voit que la somme qui lui échoit. Déjà elle a en tête quelques achats dont jusqu’à maintenant elle s’était passée. Et puis, il y a les allocations de chômage. Elle s’installe à la caisse délaissée par Chloé sans laisser voir son état d’esprit.
« Je vais en profiter pour me reposer un peu », se dit-elle, alors qu’il faudrait rapidement trouver autre chose.
Emma s’est fait verser son avance en numéraire. À la fin de son service, consciente de ce que son réfrigérateur est désespérément vide, elle fait quelques achats. Tout en parcourant les rayons, elle réfléchit.
« Est-il bien raisonnable de garder cet ensemble pantalon. Je ne l’ai encore pas porté, je pourrais le rendre ».
Elle repousse bien vite cette pensée.
« Non, bien sûr, j’en ai déjà parlé à Roseline, et puis je ne peux pas sortir en discothèque avec des vêtements qu’elle a déjà vus. Je le garde ».
Dans l’entrée de l’immeuble, elle bute sur le concierge.
— Madame Rhony, vous voilà enfin. Vous savez que le loyer doit être payé le premier du mois, sauf s’il tombe un dimanche.
— Monsieur Bouchon, je vous avais complètement oublié, le temps de monter chez moi, j’envoie Raphaëlle vous porter le chèque.
— Ce n’est pas utile de déranger votre fille Madame Rhony. Je monte avec vous, ce sera plus simple.
Pas moyen d’y échapper.
— Vous avez raison, ce sera plus simple.
Pendant que Monsieur Bouchon rédige la quittance de loyer, Emma à contrecœur lui remet le chèque demandé.
Raphaëlle s’est approchée pour aider sa mère à ranger les courses. Elle a un pincement au cœur en remarquant la poche du magasin de vêtements. Curieuse, elle jette un œil à l’intérieur.
« Elle ne s’emmerde pas ma mère, alors que je n’ai même pas une paire de chaussures correcte ».
Le ticket de caisse est à l’intérieur.
« Comme dans le sac du pain ce matin » se dit-elle.
Didier vient interrompre ses réflexions intimes.
— Elle a pensé à prendre de la brioche pour le petit-déjeuner ? Il n’y en a plus.
Monsieur Bouchon vient de partir.
— Mais tu ne penses qu’à manger des cochonneries trop sucrées, le sermonne Emma.
Raphaëlle attaque à son tour.
— Maman... j’avais un billet de vingt euros dans le tiroir de ma table de nuit, il n’y est plus.
— Cesse de te plaindre tout le temps veux-tu ? J’en ai eu besoin ce matin pour mettre de l’essence à la voiture et aller travailler. Parce que moi je travaille. Au cas où tu ne le saurais pas.
Elle se reprend aussitôt.
— Ou du moins, je travaillais car j’arrête à la fin du mois. Ils m’ont foutue à la porte.
Avant que Raphaëlle ne trouve une réplique, elle rajoute.
— Compression de personnel, alors il va falloir faire attention aux dépenses.
— C’est pour ça que tu t’achètes des fringues à cent vingt euros alors que je n’ai même pas une paire de chaussures pour aller au lycée.
Didier se joint à la conversation.
— Et moi, tu m’as promis une tablette pour mon anniversaire.
Elle se fait plus douce.
— Mais oui mon chéri, tu l’auras ta tablette, mais ton anniversaire n’est que dans deux mois, alors tu vas attendre un peu.
Pendant ce temps, Raphaëlle est au bord de l’explosion.
— Mes vingt euros, mamy me les avait offerts pour aller voir le dernier Harry Potter avec mes copines. Elles y sont allées cet après-midi sans moi. Elle laisse passer une demi-seconde puis rajoute, et avec Kevin.
— Vous m’énervez tous