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Toujours il me manquera quelqu'un
Toujours il me manquera quelqu'un
Toujours il me manquera quelqu'un
Livre électronique196 pages2 heures

Toujours il me manquera quelqu'un

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À propos de ce livre électronique

Coralie affirme « j’ai toujours su que papa et maman n’étaient pas mes parents ».
Elle décrit ses sentiments, ses découvertes successives sur ses origines, ses interrogations, ses désillusions, ses révoltes, ses réflexions sur la Gestation pour Autrui, la Procréation Médicalement Assistée, les dons de gamètes …
Sensible, pacifique, aimante, elle doit néanmoins souvent composer avec ses poussées brutales de violence et de haine destructives qui la déstabilisent.
Ses confidences sont entrecoupées de récits décrivant les autres protagonistes intervenant dans son histoire.
LangueFrançais
Date de sortie8 août 2016
ISBN9782312046068
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    Toujours il me manquera quelqu'un - André Schouler

    cover.jpg

    Toujours il me manquera quelqu’un

    André Schouler

    Toujours il me manquera quelqu’un

    LES ÉDITIONS DU NET

    126, rue du Landy 93400 St Ouen

    Du même auteur

    (sous le pseudo Lanedore)

    Le Ginkgo, comédie, 2007, Éditions le Manuscrit

    © Les Éditions du Net, 2016

    ISBN : 978-2-312-04606-8

    Avant-Propos

    Droit à l’enfant, Fécondation in vitro, Procréation médicale assistée, Gestation pour autrui, Remplacement mitochondrial et autres techniques, et autres procédures en perpétuelles évolutions sont des sujets de société discutés par les adultes.

    Ici, c’est Coralie, l’enfant devenu adulte qui décrit ses sentiments, ses découvertes successives sur ses origines, ses interrogations, ses désillusions, ses révoltes et exprime sa souffrance d’objet conçu « sur la paillasse d’un laboratoire ».

    Sans amour.

    Aux amantes fidèles

    et leurs amants indignes

    L’énarque

    Un déjeuner entre amis

    C’était une froide journée de novembre sous un ciel bas d’où tombaient des myriades de fines gouttelettes de pluie glacée mêlées à de la neige fondue.

    Les rares passants marchaient la tête dans les épaules, abrités sous leurs parapluies bariolés. Comme Georges Morand et son épouse invités à déjeuner chez Maître Charron, dans une rue calme du vingtième à Paris.

    – Entrez, vous serez mieux à l’intérieur !

    Maître Charron les accueille sur le pas de la porte de la coquette résidence de la famille.

    René Charron et Georges Morand se connaissent depuis leurs études au lycée Louis Le Grand puis à la Faculté de Droit. Ils se rencontrent fréquemment, fiers de cultiver leur complicité.

    Georges Morand fait carrière dans la fonction publique. À la sortie de l’École Nationale d’Administration il fut placé à la tête d’un important service du Ministère de la Population.

    Le déjeuner terminé les deux hommes s’installent dans un petit salon.

    – Très bien, parfait ! Félicitations René, elle était très savoureuse cette poularde bressane accompagnée de Vin Jaune !

    – Merci ! Et que dirais-tu d’un vieil Armagnac pour finir ?

    – Maintenant que nos épouses se racontent leur vie ...

    – Et parlent des mérites du Goncourt et du Femina qui viennent d’être attribués ...

    – Peut-être aussi de colifichets...

    – Pourquoi pas !

    – Et de ta fille ! Quel âge a-t-elle ? demande Georges.

    – Notre petite Sonia aura un an à la fin de l’année !

    – Déjà ! Bravo ! Et maintenant accouche ! Tu as certainement quelque chose à me dire !

    – Accouche, ça me plait et ça tombe bien ! Dans deux ou trois semaines une jeune femme accouchera dans la clinique du Docteur Ka, annonce René.

    – Une jeune femme accouchant dans une maternité ! Ce n’est pas un scoop !

    René Charron s’amuse ! Il apprécie cette procédure qu’il appelle la « stripteaseuse » ! Commencer par distiller des informations banales. Le destinataire de l’information reste attentif pour déceler la donnée dérangeante.

    – Ce sera très vraisemblablement une fille.

    – Banal ! L’échographie permet de le savoir !

    – Ce sera un enfant né de père inconnu.

    – Ce sont des situations qu’on rencontre parfois. Et quoi d’autre ?

    – La mère abandonnera son enfant !

    – Comment sais-tu cela avec trois semaines d’avance ?

    – Parce qu’elle a déjà donné son accord par écrit. L’enfant sera considéré né sous X. Donc pupille d’État.

    – Ça, c’est mon domaine !

    – Donc adoptable !

    – Ça aussi, c’est mon domaine !

    – J’ai les adoptants !

    – Oh là là ! tu vas vite en besogne ! Il faut diligenter une enquête...

    – Je les connais bien, ils présentent toutes les garanties nécessaires. J’ai une bonne connaissance de vos procédures. Dès le lendemain de la naissance tu auras le dossier complet sur ton bureau : profession, niveau de vie, logement, revenus, situation patrimoniale, situation matrimoniale, état civil, motivations. Tu sauras tout !

    – Et alors ?

    René Charron est satisfait ! Ce n’était qu’un jeu entre complices. À présent il faut montrer son exigence.

    – Tu fais fissa ! Les parents ont tout préparé ! Ils prendront le bébé huit jours plus tard !

    – Ça c’est fissa ! mais ça peut se faire !

    – Merci Georges ! J’entends nos épouses qui nous rejoignent.

    Elles entrent toutes deux, madame Morand, tenant la petite Sonia dans ses bras, interpelle les deux hommes :

    – Alors, vous avez bien reconstruit le monde dans le sens qui vous convient ?

    Ils haussent les épaules ! Maître Charron l’arrête en souriant :

    – Secret professionnel !

    – Bof ! Regarde, Georges, cette petite Sonia est magnifique !

    … et madame Charron conclut…

    – C’est nous, les femmes, qui construisons le monde à venir avec nos enfants !

    « Lorsque l’enfant paraît, le cercle de famille … »

    Quand ils sont repartis en fin d’après midi, la pluie mêlée de neige fondue continuait obstinément de tomber.

    Moi, Coralie

    Ma jeunesse et sa malléabilité

    Jamais je n’aurais su dire pourquoi, mais j’ai toujours su que papa et maman n’étaient pas mes parents ! Toutes les fibres de mon corps me l’objectaient.

    Secrètement cachées dans un pli au plus profond de mon subconscient, des preuves intimes m’ont toujours discrètement convaincue que maman n’est pas ma mère.

    Une voix, une modulation, une musique qui m’accompagnent, enfouies dans ma mémoire, me disent que maman n’est pas ma mère.

    Je connais une palpitation, un rythme, des battements de cœur qui ne sont pas ceux de maman.

    Une odeur, ce sens si subtil venant du fond des âges, reconnaissance et identification d’une appartenance à une tribu, une odeur que je reconnaîtrais entre toutes me confirme que maman n’est pas ma mère.

    Une trace furtive sur ma peau, un toucher, une signature que je n’ai jamais retrouvés témoignent que maman n’est pas ma mère.

    Je n’avais aucune attirance physique particulière pour maman, je ne la reconnaissais pas.

    Je savais que maman n’était pas ma mère, mais je n’étais qu’une petite fille, un bébé fragile, solitaire et abandonné, alors, naturellement poussée par un puissant réflexe vital, confiante, rassurée dans ses bras aimants, je l’ai néanmoins inconsciemment et rapidement acceptée et j’ai répondu sans réserve à son amour.

    Je ne pense pourtant pas que cela se soit passé très facilement, mais qu’il me fallut ensuite un peu de temps pour apprivoiser ce nouvel environnement. J’étais un petit bébé n’ayant jamais connu l’affection de mes parents, mais j’étais physiquement imprégnée de ma jeune histoire. J’ai donc dû apprendre des sons, des odeurs, des touchers nouveaux qui n’ont certainement pas effacé ceux qui sont enfouis au fond de moi, venant de la femme qui m’a portée dans son ventre, mais se sont superposés comme un nouveau sédiment recouvrant le sédiment de base. Progressivement, ce sont ces nouveautés qui régirent mon comportement, cachant mes souvenirs innés, mais toujours vivants, en un secret refuge d’où ils sauraient resurgir.

    Je sais cependant que nous nous aimions, maman et moi, réservées comme deux amoureux marchant côte à côte sans toutefois oser se donner la main, inhibés par une infranchissable distance empêchant un plus tendre rapprochement.

    C’était quand même de l’amour, un bel amour filial sans réserve ! Nous percevions le bonheur que nous nous apportions mutuellement, comme le petit enfant fier de ses premiers pas, encouragé par le sourire maternel et confiant dans les bras qui se tendent vers lui.

    Elle n’était pas ma mère, je l’ai adoptée, elle est devenue ma maman et quand elle me dit « papa » en me montrant son époux, il est devenu mon papa. Je devenais une petite fille apparemment comme les autres, abritée dans une famille avec un papa et une maman.

    Une petite fille presque comme les autres, pourtant très différente parce que mes parents n’étaient pas mes parents, parce que je ne connaissais pas mes vrais parents, parce que je n’avais pas de grands-parents, pas de tantes, pas d’oncles, pas de cousins, pas de cousines, pas de frère, pas de sœur, à peine quelques copines éphémères croisées au cours de ma scolarité.

    Je m’y suis habituée par la force des choses et c’est probablement à cause de cet isolement et de la précarité de mes relations que je me sens à l’aise dans le travail solitaire et que je ne partage pas facilement mes émotions.

    Parce que j’étais, somme toute, une petite fille heureuse, naturellement portée à l’optimisme, cherchant à ne voir que le bon côté des choses, parce que mon enthousiasme ne m’a jamais quittée, j’ai toujours célébré mon existence comme un hymne à la beauté de la vie.

    Mon origine dissimule néanmoins un mystère que je n’éluciderai sans doute jamais.

    – Dis, maman, qu’est-ce que ça veut dire « adoptée » ?

    J’étais encore petite, j’avais environ sept ans, lorsque je lui ai posé cette question. J’avais fréquemment entendu ce mot dans les conversations de mes parents et de leurs rares amis quand ils parlaient de moi, je savais donc qu’il me concernait. J’en ignorais cependant la signification. Son explication fut directe et circonstanciée.

    – Tu es notre fille chérie et tu l’es devenue le jour où nous avons entrepris les démarches en vue de ton adoption. Tu avais à peine une semaine d’existence quand tu es entrée dans notre maison ! Nous t’avons adoptée.

    Une femme, que mes parents ne connaissaient pas, m’a mise au monde dans la clinique du Docteur Ka, mais, pour des raisons personnelles, elle ne pouvait pas assurer mon éducation. J’étais un petit bébé tout seul ! Mes parents sont venus, ils m’ont « adoptée » emmenée ici et je suis devenue leur fille.

    Quand j’y pense à nouveau aujourd’hui je me souviens bien que sa réponse me suffit, mais que jamais, ni ce jour-là ni plus tard, je ne posai la question du père ! Je le comprends pour la première interrogation, parce que je n’étais qu’une petite fille, mais j’ignore pourquoi je ne l’ai jamais posée plus tard ! C’était sans doute secondaire dans mon esprit !

    J’ai ensuite accompagné papa dans son bureau car il voulait me montrer quelque chose à ce sujet. Il sortit d’une armoire un gros dossier de documents personnels dont il tira un extrait intégral de mon acte de naissance mentionnant le jugement d’adoption faisant de moi, Coralie, la fille des époux Vernier. Il me l’a fait lire, mais je n’ai pas tout compris, butant sur des mots dont je ne connaissais pas le sens ! Ça ressemblait à un titre de propriété ! Un juge avait décrété que je serais leur fille ! C’est tout ce que j’en avais retenu !

    Cette description concrète des circonstances de mon adoption, faite par maman, était l’illustration de ce qui était indiqué dans l’acte. Comme une image avec sa légende inscrite en dessous ! Je retournai donc à mes préoccupations de petite fille comblée par un papa et une maman et la chaleur confortable de leur affection. Ma curiosité était satisfaite et je n’avais à me soucier de rien ! J’avais, pour le moment, obtenu un renseignement suffisant qui trouva sa place dans ma mémoire d’enfant où je saurais le retrouver. Comme l’apprentissage d’un nouveau mot, un mot particulier se rapportant à une succession d’événements lointains dont je n’avais aucun souvenir. Un événement, un peu confus dans mon esprit, qui me concernait pourtant personnellement. Il me faudra ensuite une réflexion plus approfondie pour déchiffrer cette information. Sur l’instant, c’était trop tôt, l’heure n’était pas encore venue.

     Quant au document que m’a montré papa, je ne l’ai jamais revu ! Je ne l’ai d’ailleurs jamais cherché ! Il repose vraisemblablement encore dans le gros dossier beige bien rangé au milieu des nombreuses archives que papa conservait. Qu’il dorme ! Et quand cela me fut demandé j’ai, par la suite, toujours fourni un simple extrait d’acte de naissance établi sans référence à mon adoption. Cela suffisait !

    Puis vinrent ces instants où, dans les creux vides de mon cœur, dans des moments de solitude, d’apparent abandon, je pensais à ma mère, cette femme sans nom, sans visage qui me mit au monde, puis aux circonstances ayant entouré ma naissance suivie de mon abandon.  Je ne savais rien, il me fallait imaginer, persuadée que maman n’en savait rien. Elle me l’aurait dit.

    Quand j’étais en colère - presque toujours pour des raisons futile - j’étais impitoyable et je blâmais avec force cette mère qui abandonna sans regret son enfant. Moi, Coralie ! Je me révoltais, je m’enfermais sur moi-même, je ne parlais plus, je m’isolais pour ruminer ce qui avait bien pu se passer. Je ne savais rien d’autre que l’évocation laconique de maman assurant qu’elle ignorait tout. Ce que je fabulais s’imposait à moi comme une certitude qui me désespérait. Cet abandon était monstrueux, inadmissible, intolérable. Moi, une petite fille fragile, sans défense, ma mère m’avait lâchement abandonnée à peine venue au monde. J’étais innocente, je n’avais rien fait pour mériter cela. Je ne suis pas laide, pas difforme, pas malade, pas pestiférée pour justifier cet abandon. J’étais d’autant plus furieuse que je savais que tout ce que j’étais, tout ce que j’avais venait d’elle : mes mains, mes jambes, mon corps, mon cœur, ma vie venaient de celle qui n’avait pas voulu de moi. De celle qui m’avait rejetée. J’en venais à me haïr parce que je la haïssais. Je lui reprochais de m’avoir conçue, portée pendant neuf mois, mise au monde et aussitôt rayée de son existence. J’enrageais de ne rien savoir et de ne rien trouver d’autre que ces scènes dramatiques dont l’évidence me décourageait.

    Quand lasse de mes idées noires et de mes larmes difficilement retenues, enfin je me calmais, je lui cherchais des excuses. Des prétextes qui me déculpabilisaient en même temps. Était-elle réellement dans un tel dénuement qu’il lui était impossible de me garder ? Était-elle si pauvre, si faible qu’elle m’abandonna en ayant l’assurance qu’une autre femme se chargerait de moi pour me fournir tout ce qu’il me fallait pour grandir ? C’était plausible, mais ça non plus, je n’arrivais pas à le croire. Je me disais que, quel que soit mon état, à sa place, je n’aurais pas agi de cette manière. Je me serais dévouée corps et âme pour mon enfant. Et j’en étais tellement convaincue que j’en concluais qu’elle aussi, ma mère aurait agi de cette façon. Bien sûr, puisque j’étais sa fille ! Ce n’était donc pas la bonne explication.

    Je me retrouvais alors, toute seule, abandonnée, désemparée, sans réponse satisfaisante à ce qui me tourmentait.

    Je trouvais alors une autre explication. Je me réfugiais dans la fiction du vieux film de

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