La déchéance de la nationalité ou la désagrégation de l'Etat
Par Serge Surin
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La déchéance de la nationalité ou la désagrégation de l'Etat - Serge Surin
La déchéance
de la nationalité ou la désagrégation de l’État
Serge Surin
La déchéance de la nationalité ou la désagrégation de l’État
Réflexions sur le principe d’égalité face à la déchéance de la nationalité française comme sanction juridique constitutionnelle d’une « catégorie » de Français « susceptibles » de commettre des crimes de terrorisme ou « potentiellement » encline au terrorisme
LES ÉDITIONS DU NET
22, rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes
© Les Éditions du Net, 2016
ISBN : 978-2-312-04150-6
Avant-Propos
La déchéance de nationalité vantée comme si c’était la seule solution possible contre la radicalisation des jeunes dans le djihadisme et le terrorisme n’est autre que la déchéance de l’État républicain lui-même. En effet, le principe fondateur de la République réside dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui prône l’égalité devant la loi, que celle-ci vise à protéger ou à punir. La loi doit être entendue ici comme tout type de loi, y compris, et surtout la loi fondamentale qu’est la Constitution. Ainsi, mettre deux catégories de Français dans le cadre de la Constitution, c’est détruire le principe fondateur de l’État au détriment des valeurs du vivre-ensemble car la nationalité, avant d’être rattachée à la personne à qui elle est délivrée, et c’est quel que soit le mode d’acquisition, est d’abord rattachée à l’État. De ce point de vue-là, déchoir un individu de sa nationalité, c’est arracher un membre du corps de l’État, comme on aurait arraché une dent de sa bouche juste parce qu’elle a mordu sa langue ou tout autre membre de son corps dès lors qu’il a fait mal au reste du corps. Ainsi, l’État n’est plus un État solide, mais un État liquide, voire gazeux. Malheureusement cette décision d’insérer la déchéance de nationalité dans la loi fondamentale de l’État n’a fait l’objet d’aucun débat sérieux si ce n’est qu’on a assisté à quelques surenchères médiatiques dont la teneur est largement rapportée ici. Cette absence de débat sur la question a donné logiquement lieu à un déficit de réflexion jusque dans l’avis favorable et très contestable du Conseil d'État relatif à ce projet de loi constitutionnelle qui, au départ, n’avait jamais pour objectif de constitutionnaliser la déchéance de nationalité, loin s’en faut, il suffit d’écouter avec un peu d’attention le discours de François Hollande du 16 novembre 2015 devant le Congrès de Versailles pour s’en convaincre. Il est difficile de ne pas remarquer que le président de la République a choisi de mettre en jeu le fondement de l’État au détriment d’une réponse pourtant attendue face au malaise qui frappe une catégorie de jeunes Français qui sont désœuvrés. Et cela, paraît-il, pour satisfaire non tant l’opposition et les opinions extrêmes qui réclamèrent depuis longtemps la déchéance de nationalité que pour mettre sur pied sa propre stratégie politique face à l’opinion. Une telle mesure ne pouvait que pointer une fois de plus encore les faiblesses de l’État qui décide de fuir devant ses responsabilités face à la jeunesse en créant de faux problèmes en vue d’en apporter des fausses réponses qui trompent ainsi l’opinion publique.
Introduction
Hobbes écrivait que « Pour établir la paix, les hommes se dessaisissent de leur droit sur toutes choses et concluent un contrat.{1} » Ce contrat, c’est le contrat social repris et développé par Rousseau en 1762. Ce contrat social en tant que fondement de l’État ne peut être révisé que pour aller dans le sens de la paix sociale et du vivre-ensemble.
Mais cette paix sociale est menacée d’un coup en plein cœur avec la question de la déchéance de leur nationalité française d’une catégorie de Français ayant été condamnés pour crime de terrorisme contre l’État. Décidément, les