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Le Roi pour tous !: Essai
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Livre électronique663 pages6 heures

Le Roi pour tous !: Essai

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À propos de ce livre électronique

Comment peut-on être royaliste au XXI° siècle alors que le sens commun affirme que seule la République peut incarner la vraie démocratie ? Le but de cet ouvrage est de démontrer par la raison que la venue du roi est non seulement possible mais indispensable aux libertés publiques.
Alors que les soi-disant valeurs de la république ont supplanté la recherche du bien commun, la symbolique autant que l’idée même de Nation et de Patrie ont disparu du sens commun.
Une étude dépassionnée de l’ancien Régime montre à l’évidence que la monarchie n’a jamais été la tyrannie qu’on se complaît à décrire depuis deux siècles, et l’examen de la Révolution, des vrais facteurs de son origine et des effets de la machine à broyer qu’elle déclencha nous enseigne qu’elle fut plus une malédiction qu’une bénédiction pour le peuple de France.
Mais avant d’envisager le recours au roi, il faut examiner, sans faux-semblant, ce régime républicain qui dévoile ses limites, en le replaçant dans le contexte de l’Histoire de France au travers des différentes républiques qui se sont succédées.
Alors il apparaît bien que le recours à un pouvoir neutre, indépendant de tous les autres est une nécessité vitale pour une vraie démocratie. N’étant pas élu, le roi n’est tenu par aucun lien si ce n’est le bien commun. En tant que pouvoir neutre, il ne gouverne pas, il règne et peut donc être l’arbitre et le recours du plus humble dont il est proche. De surcroît, le roi incarne la dimension du sacré qui doit habiter la fonction de Chef de l’État, dimension indispensable mais ruinée par la normalité décrétée des présidents de la République, qui ne représentent qu’une partie des Français.
Être royaliste aujourd’hui n’est pas un mythe, c’est une forte espérance pour unir de nouveau le peuple de France autour de sa Patrie, de sa Nation, de son Roi : Le Roi pour tous !

À PROPOS DE L'AUTEUR

Normand d’origine, Francis Chouville a poursuivi toute sa scolarité au Lycée Corneille de Rouen avant d’être diplômé de NEOMA Business School Rouen.
Après avoir été Maire pendant dix-neuf ans de Noyers-sur-Serein, il vit aujourd’hui à Avallon, belle petite cité de caractère en Bourgogne.
LangueFrançais
Date de sortie10 juin 2020
ISBN9791037707956
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    Aperçu du livre

    Le Roi pour tous ! - Francis Chouville

    Royaliste au XXIème siècle ?

    Alors que d’aucuns pérorent, en veux-tu en voilà, sur les valeurs de la République, lesquelles ne semblent pas être les mêmes selon qu’on est assis à droite ou à gauche de l’hémicycle virtuel de l’expression politique, j’éprouve de plus en plus d’aversion, de dégoût même je dois l’avouer, pour celles et surtout ceux de notre personnel politique qui prétendent nous faire accroire, la main sur le cœur ou les yeux dans les yeux qu’ils n’ont comme seule préoccupation que notre bonheur, ou, à tout le moins, le service de NOS intérêts.

    Le principe de la démocratie n’est pas mauvais en soi, ce qui permit à Winston Churchill (dont le coefficient personnel ne l’inclinait pas à la dictature, loin s’en faut !) de proclamer que « La démocratie est le pire des régimes… à l’exception de tous les autres ».

    Et pourtant le système représentatif lié à toute société de grande taille revendiquant le principe de gouvernement démocratique ne conduit-il pas à des dérives indubitablement consubstantielles au système lui-même ? La démocratie directe à l’athénienne, référence mythique des tenants de la République, n’était possible que parce qu’elle concernait un petit nombre de citoyens dans une cité de taille somme toute modeste (et les nombreux esclaves et étrangers barbares en étaient exclus !). À une échelle différente, l’exemple suisse, souvent cité en référence, n’est viable qu’en raison du même facteur de taille qui permet une démocratie encore relativement directe recourant très fréquemment au référendum populaire (les votations) pour beaucoup de sujets liés à des points de société notamment, choses pour lesquelles les Suisses sont très sourcilleux, à juste raison…

    Mais pourquoi systématiquement faire rimer république et démocratie ? La démocratie ne serait-elle l’apanage que des seuls régimes républicains ? Les Républiques et leurs gouvernements républicains sont-ils les seules formes authentiques et authentifiées de démocratie ?

    Et puis la démocratie doit-elle être une fin en soit, un objectif intangible et la garantie que du choix de la majorité (la moitié des suffrages plus un) va automatiquement, d’une façon quasi sacrale, jaillir l’assurance de la garantie du bien commun ? En effet, qu’est-ce qui est le plus important au regard de notre propre système de valeurs : que soit quasi déifié l’avis d’un certain nombre (fut-il majoritaire) ou sauvegardé le bien commun, c’est-à-dire tout ce qui appartient à tous et à personne en particulier, comme la paix, le respect de l’autre, voire le bonheur collectif ?

    Enfin, n’est-il pas nécessaire que soit incarnée la Nation, d’une façon moins impersonnelle qu’un drapeau, aussi glorieux soit-il car il a accompagné nombre de Français dans la défense de leur Patrie jusqu’à leur sacrifice suprême ? Un président, certes élu par le peuple, peut-il personnifier cette Nation pour tous les citoyens, alors qu’il a été choisi par une partie de celui-ci contre l’autre partie ? En un mot, peut-il être le Père de la Nation, l’incarnation de la Patrie, générant un respect transcendantal ?

    Comment les différentes dimensions de la problématique que sont notamment la Nation, le Bien Commun, l’Histoire avec ses excès et ses espoirs peuvent-elles s’accorder pour concevoir une autorité et un ordre social cohérents et solides, féconds de démocratie et respectés par tous, quelles que soient leurs sensibilités, leurs religions ou leurs attentes ?

    Mais reprenons dans le détail ces différents sujets que je voudrais inscrire dans ma réponse à la question posée en titre : « Comment peut-on être royaliste au XXIème siècle ? ». Cette étape me semble nécessaire pour comprendre la démarche qui m’a conduit à la conviction que Le Roi pour Tous  peut être autre chose qu’un slogan, autre chose qu’un rêve fou, mais un projet de société, d’une société apaisée qui reprendrait confiance en elle et en son avenir. Je sais que le chemin sera long, mais je crois qu’au long de ce chemin, il y a l’espérance.

    Première partie

    De la démocratie et de la Nation

    Des limites de la démocratie

    Je n’entends pas vouer aux gémonies une organisation politique (une quasi-religion !) qui ne mérite d’ailleurs ni cet excès d’honneur ni cette indignité, mais simplement en pointer les limites au travers de l’observation des faits contemporains ou de l’histoire.

    Le pouvoir du peuple est-il, comme le disait Rousseau de l’homme, fondamentalement bon, seulement corrompu par la société ? Il serait bien simpliste de le prétendre, tout aussi simpliste que de dire que les désirs de l’enfant, quels qu’ils soient, doivent être satisfaits au motif qu’il les exprime et qu’il croit sincèrement qu’ils sont bons car il veut les satisfaire. Tout parent sait très bien qu’il n’en est rien et que son rôle de père ou de mère est de canaliser les volontés de l’enfant lorsqu’elles vont à l’encontre de certaines lois fondamentales de la famille et, au-delà, de la société dans lesquelles évolue l’enfant.

    Ces lois fondamentales de la cellule sociale primaire qu’est la famille ont-elles été décidées par je ne sais quelle majorité familiale ? Les lois fondamentales, qui ont prévalu à toutes les sociétés humaines depuis la plus primitive, ont-elles été votées par un quelconque suffrage universel démocratique ? J’entends par lois fondamentales celles, non écrites, qui interdisent le vol, le meurtre, et plus tardivement la violence, le viol, l’inceste, ou même encore plus tard la profanation voire l’irrespect de l’autorité, bref, tout ce que les spécialistes nomment le droit primitif.

    Quel régime démocratique a donc fait voter ces lois fondamentales par le suffrage universel, censitaire ou je ne sais ? Aucun et pourtant, imposées par le pouvoir régnant du moment, ces lois sont toujours vivantes, reprises d’ailleurs dans les codes, doctrines ou jurisprudences qui règlent les relations entre les membres de toutes sociétés.

    Et c’est ainsi parce que ces lois sont bonnes et nécessaires pour l’équilibre de la vie sociale et pour l’épanouissement des individus, cellules et groupes qui composent la société : elles visent le bien commun, tout simplement !

    Ceci posé, peut-on considérer que le droit complémentaire, institué de façon démocratique, c’est-à-dire par le plus grand nombre au travers de ses représentants, conforte encore plus le bien commun ? Oui et non, en réalité.

    Oui car l’évolution technique, sociale et politique (autant que celle des malfaisants !) requiert des compléments constants dont on peut simplement regretter qu’en matière criminelle notamment, ils arrivent trop souvent après, car avant le peuple pense à tout autre chose et n’est prêt que lorsque le mal a été commis, en reprochant d’ailleurs souvent à ses commettants de n’avoir rien fait auparavant !...

    Par contre, on peut se demander quelle garantie pour la défense du bien commun le système de délégation peut représenter.

    Sans aller jusqu’à l’opposition « pays légal, pays réel » introduite par Charles Maurras (dont la façade monarchiste n’était là que pour masquer son désir de pouvoir fort et autoritaire), l’évolution de ses mœurs ne nous montre-t-elle pas que le personnel politique de notre pays latin a totalement perdu pied et le contact avec la réalité quotidienne du peuple qu’il est censé représenter ? Les affaires Thévenoud, Cahuzac, ou plus récemment celles des assistants parlementaires de la famille qui ont fait chuter François Fillon (mais ne concernent pas que lui, loin de là !...) sont là pour nous rappeler qu’elles ne sont que la partie visible de l’iceberg !

    Alors, de là à penser que le choix des législateurs sur ce sur quoi il leur faut légiférer puisse être influencé par leurs intérêts propres au détriment du bien commun, il n’y a qu’un tout petit pas qu’on ne peut pas hésiter à franchir sans pour cela qu’on puisse nous qualifier d’antiparlementarisme primaire.

    Et quand bien même cela ne serait pas, il est indubitable que l’évolution des pratiques politiques contribue à une déviance du système : l’individu, le membre d’un groupe social, ethnique ou religieux supplante maintenant le citoyen et il ne vote plus pour DES représentants mais pour SES représentants. Ainsi la pratique partisane, voire communautaire, prend le pas sur la défense de la chose publique, la res publica.

    La complexification de la société, de son organisation, des interrelations entre les individus et les groupes et leur régulation nécessaire a fait apparaître une classe dirigeante technocratique dont les motivations qui lui sont particulières et le sabir par lequel elle s’exprime l’éloigne inéluctablement du citoyen ordinaire qui, après lui avoir fait aveuglément confiance en raison de sa prestance, le rejette maintenant pour se tourner vers les sirènes dites populistes qui n’ont d’autre vue que de recueillir ses voix et de diriger selon leurs intérêts et vues propres !

    Ainsi, le rêve du dialogue démocratique, belle symphonie sur fond harmonieux de chœur des vierges de la république s’est-il mué en cacophonie décadente où n’émergent de temps à autre que les voix discordantes et braillardes de ceux qui crient le plus fort à défaut de dire le plus juste.

    Le sage est devenu parfaitement inaudible et, comme le dit son cousin chinois, lorsque d’un geste il montre la lune, l’idiot démocratique regarde le doigt, ne voit rien et le prétend fou, car il lui parle de choses qu’il ne peut entendre, qu’il ne veut entendre.

    Aussi, la démocratie n’est pas un mauvais régime en soi, quoiqu’en ait dit Winston Churchill, mais ses limites nous montrent bien qu’elle doit être tempérée d’autre chose pour rester (devenir ?) un bon système : mais quoi ?

    République = démocratie = république ?

    L’excellent ouvrage de Frédéric Rouvillois¹ « Être [ou ne pas être] républicain » ² nous fait nous pencher sur ce qu’est, et ce que n’est pas, la république et sa kyrielle de valeurs républicaines invoquées comme des mantras par tout ce qui fait le personnel politique de notre pays à défaut d’autre vocable qu’à tort ou à raison, il considère comme trop marquant comme France/français(e), Nation/national(e), etc. « Le mot républicain évite de dire France, Nation, élite, sélection, exigence, et même démocratie… C’est une sorte de vocabulaire de substitution qui permet de tout laisser entendre sans rien dire de précis. »³

    À grand renfort d’exemples puisés dans notre histoire, comme la première constitution de 1791 et la Terreur qui suivit, on voit bien que la République des origines tenait plus de la dictature que de la démocratie.

    Ainsi, dès 1793, le Comité de Salut Public s’arroge-t-il tous les pouvoirs, poursuivant les membres de la Convention et plaçant l’ensemble des pouvoirs et corps constitués sous sa surveillance, exerçant de facto une dictature républicaine.

    La deuxième république non plus n’est pas exempte de pratique dictatoriale avec les pleins pouvoirs donnés par l’Assemblée nationale au Général Cavaignac qui en usa généreusement jusqu’à l’élection du Prince Président, lequel instaura bien vite la dictature à son avantage après son coup d’État de 1851, lui-même opéré au nom de la République

    Et sans vouloir s’appesantir sur les autres tentations dictatoriales qui ont émaillé les débuts de la troisième république (gouvernement versaillais, boulangisme) on peut se souvenir de ce qu’Auguste Comte, chantre du républicanisme du milieu du XIX° siècle, écrivait : « la République Française doit être dictatoriale, et non parlementaire » !...

    Il ne faut pas non plus oublier que ce sont les élus de la République, députés et sénateurs qui, le 10 juillet 1940, ont confié les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain en suspendant, de facto, la République ; ils ont continué, d’ailleurs, à percevoir leurs indemnités parlementaires jusqu’en octobre 1941.

    Plus récemment, l’article 16 de la Constitution de la V° République, s’il a été voulu par le Général de Gaulle pour éviter la faiblesse gouvernementale de juin 1940 ou le risque de putsch militaire comme en 1958, constitutionnalise bien la possibilité de dictature du Chef de l’État, en cas de nécessité dont il est seul juge et pour laquelle les garde-fous sont, somme toute, assez peu contraignants (consultation du Premier ministre et des présidents des deux assemblées et du Conseil constitutionnel).

    Et si on élargit le spectre d’analyse hors de la France et de son histoire on complète avantageusement l’étude de l’égalité présupposée par le politiquement correct république = démocratie.

    En Italie, le mouvement fasciste de Mussolini se revendiquait résolument républicain, de la Marche sur Rome en 1922 à l’éphémère République Sociale Italienne de Salo de 1943 après la destitution et l’arrestation de Mussolini par le roi Victor-Emmanuel, les deux ne s’appréciant pas vraiment, c’est le moins que l’on puisse dire…

    Et que dire des Républiques socialistes soviétiques unies sous la bannière de l’URSS, laquelle a succédé à l’empire russe après l’abdication puis l’assassinat du Tsar Nicolas II ? Pas vraiment des exemples de démocratie, à tout le moins pas du genre de démocratie que nous avons en tête lorsque nous en parlons entre gens de bonne compagnie, même si le vocable de démocratie populaire a longtemps fait rêver, en France, l’intelligentsia de gauche (pléonasme indigent : l’intelligentsia ne saurait être que de gauche !). Nous passerons rapidement sur les autres avatars communistes que sont encore les Républiques socialistes de Chine, de Cuba ou de Corée du Nord qui, lorsque des élections s’y déroulent, nous subjuguent toujours de ce joyeux unanimisme qui s’y affiche et qui nous fait rêver, nous autres citoyens de pays déchirés par cette opposition majorité-minorité qui sape toute velléité de paix radieuse comme ces pays nous en montrent les avantages…

    De même, nous ne nous appesantirons pas sur les charmes de la libre expression dans les Républiques islamiques d’Iran, de Mauritanie, du Pakistan ou même d’Afghanistan, ni sur les grandes libertés dont bénéficient là les femmes : rester à leur place et se faire discrètes derrière les séduisants voiles et grillages qui les protègent des regards agressifs…

    Aussi, tout bien pensé, pesé et soupesé, ne prend-on pas grand risque à raisonnablement douter de la première partie de l’égalité et poser que :

    Pour parler comme les mathématiciens modernes, on peut donc prétendre que l’équation république = démocratie n’est pas parfaitement univoque

    Mais qu’en est-il de la deuxième partie ? Un régime démocratique est-il obligatoirement de forme républicaine, si toutefois d’ailleurs on peut définir ce qu’on entend par forme républicaine. Aussi, même si la définition de la république varie d’une époque à une autre et même, aujourd’hui, d’un auteur à un autre, posons par convention qu’un régime républicain s’oppose à un régime monarchique par le mode de désignation du Chef de l’État : électif dans un régime républicain, héréditaire ou plutôt successoral dans un régime monarchique.

    Ceci étant posé, peut-on raisonnablement affirmer que sont des démocraties les seules républiques (la France, l’Italie, l’Allemagne, l’Irlande, etc.) et que le Royaume-Uni, la Belgique, l’Espagne, les Pays-Bas, le Danemark, la Suède et la Norvège, tous pays de régime monarchique ne sont pas des démocraties ? Non, assurément non !

    Nous avons donc bien démontré que la deuxième partie de l’égalité est totalement usurpée et que

    Donc à mesure que nous avons navigué dans le temps historique de notre pays comme dans le temps et l’espace hors de ses frontières, nous avons acquis la preuve, s’il en était besoin, que république et démocratie n’étaient pas des ensembles biunivoques. Mais il est un autre aspect conceptuel que nous n’avons qu’effleuré : la notion de chose publique (res publica) est-elle aussi biunivoque de celle de bien commun ? Nous allons tenter d’aborder cette question dans le chapitre suivant, qui précédera celui consacré à la symbolique de la Nation, qui englobe le rapport entre le visible et l’invisible, le sacré et le profane.

    Bien commun et res publica

    On a coutume d’évoquer l’intérêt général en l’identifiant comme la somme des intérêts particuliers ou encore comme le PPDC (plus petit dénominateur commun) des différents intérêts privés. Mais cet intérêt général là n’est-il pas que le camouflage des intérêts privés des groupes au pouvoir, sanctionné par le suffrage majoritaire ?

    N’est-ce pas cette sacralisation du principe majoritaire qui sanctifie cette vision libérale à l’origine de toutes les opérations de dérégulations des systèmes économiques et de la magnification de la mondialisation ?

    Cette notion d’intérêt en masque une autre, beaucoup plus essentielle à la construction sociale, celle de la recherche du bien commun, qu’il faut distinguer des biens communs, autant que de la chose publique, la res publica romaine devenue la république.

    Les biens communs sont les ressources nécessaires à l’ensemble des humains pour assurer leur développement, voire leur survie (la terre, l’eau, l’air). Ils peuvent être privatisés en totalité (la terre) ou partiellement (l’eau) et ne pas l’être du tout (l’air).

    À ce sujet d’ailleurs, la privatisation des biens communs a souvent revêtu l’habit de l’intérêt général, lequel masquait bien des intérêts privés puissants : ainsi en fut-il, en Angleterre au début du XIX° siècle, de l’appropriation des Commons (les prairies communes) par des propriétaires terriens au motif d’y expérimenter des techniques agricoles modernes, poussant au passage (objectif recherché !) les petits paysans sans terre vers les villes pour constituer le prolétariat dont l’industrie naissante avait besoin.

    La France, restée plus rurale, n’a pas connu ce même mouvement à la même époque, la révolution industrielle y ayant été plus lente et plus tardive, les pâtis communaux le sont restés tant que le mouvement de concentration des exploitations agricoles n’avait pas entraîné la disparition progressive des micro-exploitations non spécialisées et de l’élevage diffus qui était commun.

    On peut aussi considérer que la privatisation de l’exploitation de l’eau dans nos contrées où elle reste quantitativement importante a été rendue nécessaire par la complexité de plus en plus grande des techniques de son épuration autant que par la réglementation de plus en plus contraignante et sophistiquée qui y prévaut grâce au lobbying puissant des compagnies fermières auprès des pouvoirs publics et administrations qui la définissent. Alors qu’on peut considérer qu’au stade initial, la concentration capitalistique nécessaire pour réaliser à grande échelle des infrastructures d’assainissement et de traitement de l’eau potable n’était pas à la portée des collectivités publiques en charge, laissant le champ à l’industrie privée, la pérennité de ce secteur privé ne peut aujourd’hui s’expliquer que par son action de complexification des normes évoquée précédemment.

    On entrevoit donc bien que la gestion des biens communs a, sous l’influence des intérêts privés (la res privata), fortement tendance à échapper au bien commun !...

    Le bien commun est ce qui est nécessaire au développement d’une communauté d’homme dans la Cité, une communauté politique (de polis, la cité en grec). Cette notion a été développée par Saint Thomas d’Aquin (bonum communis) pour se substituer à celle de bien public (bonum publicum) en tant que concept, certes, plus spirituel que politique. Elle traduit l’inclination de l’être humain à aller vers Dieu comme sa fin ultime.

    Cette acception s’est ensuite déchristianisée, mais reste présente l’idée que l’homme ne recherche pas uniquement la satisfaction de ses intérêts propres, mais aussi celle d’une cause plus noble, une cause commune avec ses associés dans la communauté de la Cité.

    Si on peut considérer que certains éléments du bien commun ressortissent de l’identité de la communauté (langue, culture, traditions, histoire, lois, voire religion), celui-ci ne saurait se réduire à l’appartenance à une même origine. L’adhésion à une communauté est indépendante de l’origine de chaque être humain qui la compose : c’est une adhésion à son bien commun ; et c’est le partage de ses valeurs qui fonde justement le bien commun auquel chaque citoyen adhère et doit tendre à le promouvoir. L’aspect commun résulte d’une participation positive et volontaire au destin de la communauté.

    Ainsi, le bien commun désigne le bien-être ou le bonheur collectif d’une communauté ou en général de ses membres et l’ensemble des choses qui sont supposées y contribuer : biens matériels, respect d’autrui, justice sociale. S’il nécessite un engagement de chacun comme condition de fonctionnement de la règle, le respect de la loi commune ne doit pas être, à cet égard, une obligation à laquelle chacun se plie pour ne pas être châtié. En effet « le bien commun implique plus que le respect de la loi exprimant l’intérêt général »⁴.

    De plus, la notion de bien me semble plus large que celle d’intérêt, de profit ou de gain immédiat. Si elle n’exclut pas ce qui concerne les richesses, les possessions, ce qui est bien, c’est d’abord le bonheur partagé, ce qui est juste, ce qui est favorable à l’être humain, moi comme l’autre à l’inverse de ce qui est mauvais, injuste et néfaste.

    À cet égard l’importance, dans le bien commun, de la justice et de son corollaire l’égalité est primordiale en ce sens qu’elles sont porteuses de la fraternité comme ciment essentiel de la cohérence et de la paix dans la cité.

    Lorsqu’il théorise les principes de bon gouvernement (remplacé aujourd’hui par le prétentieux « gouvernance », lequel vient de l’anglais governance qui ne signifie pas autre chose que bon gouvernement ! CQFD) au XVI° siècle Jean Bodin ⁵ note avec pertinence que :

    « Les semences de guerre civile viennent de l’injustice. L’injustice, armée de force, ruine les États. À l’inverse, la justice est le pilier ferme de la République. […] La véritable société est fondée sur le partage et l’amitié en termes de droit. Les changements de république adviennent pour richesse excessive des uns, pauvreté extrême des autres. L’égalité est mère nourrice de la paix et de l’amitié. »

    Remplaçons amitié par fraternité et on s’aperçoit que, avec deux cents ans d’avance, Jean Bodin, fervent champion du pouvoir monarchique dans son œuvre politique, préfigure deux des trois thèmes de la devise de la République française (et des grandes loges maçonniques françaises).

    Alors que Saint Thomas d’Aquin donnait au bien commun une nette acception religieuse et à tout le moins spirituelle, Jean Bodin, lorsqu’il aborde le thème, ne prend nullement le contre-pied des thomistes mais s’attache à replacer la recherche du bien commun dans les principes de bon gouvernement de la chose publique, la république.

    Comme nous le rappelle le philosophe Jean-Luc Marion, de l’Académie Française, dans une récente interview⁶ : « Les intérêts particuliers s’affrontent et, dans le meilleur des cas, trouvent un compromis. Le problème réside dans le fait que l’intérêt général reste provisoire et reflète le rapport de force entre les électeurs. Il n’est donc pas représentatif de l’ensemble de la population, car il ne prend en compte ni les pauvres, ni les exclus, ni les morts, ni surtout ceux qui naîtront […]. C’est ici qu’intervient la notion de bien commun. Critiqué par la modernité comme abstrait, essentialiste et théologique, remplacé par la contractualisation, le bien commun ne se définit pas par la négociation. Il contredit les intérêts particuliers et aussi l’intérêt général. »

    Reprenant à son compte les travaux du Père Gaston Fessard⁷ qui, pour lui, a modernisé le concept de bien commun, il ajoute : « Le bien commun apparaît alors comme une exigence objective qui conditionne la possibilité des biens particuliers, même si elle les contredit. Il joue le rôle transcendant d’une condition de possibilité du reste. La politique peut, à la rigueur, assurer la liberté et l’égalité dans une période de croissance, mais ignore ce qu’est la fraternité. […] Et nous sommes des sociétés qui meurent de ne pouvoir assurer ni assumer cette fraternité. Car elle reste au-delà de nos moyens politiques et demande le bien commun. »

    Mais il semble bien qu’aujourd’hui certains veuillent abandonner la notion de bien au prétexte qu’elle est chargée d’une connotation éthique, voire religieuse. Cette attitude bien-pensante n’est-elle pas représentative de la culture et de l’empreinte du relativisme pour lequel, in fine, tout se vaut, toute croyance est bonne, car inventée par l’homme ?

    Mais non ! Croyants ou agnostiques, nous sommes héritiers d’une culture chrétienne et le nier ne changera rien à l’affaire : cette culture, qui a laissé son empreinte jusque dans les plus petits de nos villages avec ses églises, ses calvaires et ses saints statufiés, appartient à notre bien commun, qu’on le veuille ou non.

    Personne, aucun libre penseur, aucun tenant d’une laïcité la plus exacerbée ne peut nier que la France fut chrétienne avant Clovis et après Robespierre ! Chrétienne et catholique. Alors, pourquoi renier les bienfaits du bien, de l’amitié, de la chaleur humaine et de la fraternité au prétexte qu’il s’agit aussi de valeurs chrétiennes ?

    Quant au terme commun, il est aussi contesté parce qu’empreint de l’idée d’un consensus parfait, lourd d’un unanimisme contraint ou de pensée unique ; on lui préfère la loi de la majorité.

    Les valeurs deviennent donc relatives, on abandonne ainsi la notion de bien et de mal au profit du souhaitable et du possible pour la collectivité. Ces notions étant elles-mêmes fluctuantes comme est fluctuante l’opinion publique au gré de ses ressentis, elles font varier la morale (le bien et le mal) comme sous-produit de ce souhaitable et de ce possible défini par la majorité, lesquels en deviennent le seul guide.

    Au passage, on escamote aussi LA communauté au bénéfice d’une collectivité composée de groupes, de communautés juxtaposées qui ont des référents et des valeurs dissemblables (mais qui toutes se valent !) et donc pas de bien commun.

    Et c’est ainsi qu’on déstabilise en la fractionnant une communauté lorsque, pour plaire à telle ou telle tendance (fut-elle majoritaire au sein de ses représentants élus) on impose une éthique qui viole la conscience de celles et ceux qui ont gardé foi dans la notion du bien commun qu’ils ou elles ont reçue de leurs parents et de leur éducation. Ce fractionnement d’ailleurs perdure bien au-delà du fait générateur et, telles les ondes de l’eau après la chute d’un caillou, peut arriver à créer un état critique de la société et la violence du verbe débouche sur la violence sociale.

    Je suis ainsi persuadé que le passage en force de la loi sur le mariage homosexuel a créé une rupture au sein de la société, dans laquelle les tensions étaient déjà fortement exacerbées par la crise économique de 2008-2009, et l’incapacité de nos dirigeants successifs à en juguler ses conséquences. C’est cette rupture que nous payons aujourd’hui lorsque les Français renvoient dos à dos les partis de droite et de gauche pour se jeter dans les bras des extrêmes ou d’un homme providentiel pour qui la Providence n’est autre chose que de dire le tout et son contraire à des Français divisés et totalement déboussolés.

    Il est tout de même étonnant qu’une constitution, aussi élaborée et amendée que celle de la V° république, n’ait pas prévu que des lois sociétales ne puissent devoir être ratifiées que par voie de référendum. Je reste en effet persuadé que si une consultation populaire avait été organisée sur le sujet, la crise aurait été évitée, car le peuple français aurait vu qu’il était respecté. Et d’ailleurs, cela n’aurait peut-être pas changé la donne puisque la plupart des sondages effectués à cette époque montraient l’assentiment des Français sur le sujet…

    Dans cette affaire comme dans nombre d’autres, ce que beaucoup de Français ont de plus en plus de mal à admettre, c’est que ce genre de décision est prise à la majorité simple de représentants, certes élus, mais dont les proportions ne représentent même pas le panel de leurs sensibilités politiques.

    Mais, plus grave encore dans la démarche et qui échappe totalement à l’observateur lambda : on abandonne de facto la part nécessaire du spirituel pour confier intégralement la rédaction de la loi commune aux seules fluctuations de l’avis majoritaire (et encore s’il s’agissait de l’avis de la majorité qualifiée des citoyens eux-mêmes !). Car l’opinion publique est fluctuante et même pour des sujets sociétaux de la plus haute importance : prenons l’exemple de la peine de mort. Sa suppression était aussi conforme aux valeurs chrétiennes (« Qui prend l’épée périra par l’épée ») comme aux valeurs humanistes postchrétiennes et, à l’époque où elle fut abolie, l’opinion publique était prête.

    Mais que se passerait-il si aujourd’hui la question était posée au peuple Français et la décision de sa majorité avait force de loi ? Mais à cela, ceux qui nous représentent ou nous gouvernent ne sont pas prêts car ils savent le résultat. Et que l’on soit d’accord ou non ne change rien, cette République démocratique sait s’absoudre de la volonté populaire lorsque ça l’arrange : souvenons-nous du référendum de 2005 sur le projet de constitution européenne qui fut rejeté par le peuple français et contourné par une procédure de ratification au Congrès en 2008 !

    Pour conclure, je dirais que le bien commun ne peut se résumer à la seule chose publique : il se situe à un niveau qui va au-delà de la res publica.

    Mais ce bien commun, comment le conserver et le faire fructifier ?

    Et qu’est-ce qui est plus représentatif de notre bien commun que la Nation ?

    Nous entrons là dans un domaine qui n’est plus seulement rationnel et matériel mais qui devient éthique et spirituel.

    Ce domaine est bien celui du symbole, cette notion qui appartient tant au domaine de l’intangible que du tangible : « Une moitié du symbole est dans l’invisible, l’autre est réelle »⁸.

    La symbolique de la Nation

    Symbole : représentation concrète d’une notion abstraite.

    Nous sommes bien là au cœur du sujet : quoi de plus abstrait de nos jours que la notion de Nation ! Alors même que l’idée d’identité nationale est vomie comme lourde d’exclusion (Ah ?), de stigmatisation de l’étranger (bah voyons !), de nationalisme (l’horreur brune !) et pourquoi pas de xénophobie (au point où nous en sommes…), évoquer la Nation et ce qu’elle représente auprès de nos chères têtes blondes (diantre, foin de ce genre de considération raciste !) nourries au sein exclusif de la bien pensance amnésiante de notre école du savoir lobotomisé autrement nommée éducation nationale, évoquer la Nation, disais-je, amènerait aujourd’hui à un bouquet de visages pour le moins ahuris et de réponses fortement inspirées de récentes performances de l’équipe multicolore de pied-ballon habillée de bleu…

    Car que reste-t-il de la Nation en 2019 ? Certes, nous disposons encore d’une panoplie symbolique, laquelle me semble pour partie plus digne d’un inventaire à la Prévert que de représenter la Nation de France.

    Mais, avant de la passer en revue, un préambule s’impose : lorsqu’on regarde le site on ne peut plus officiel de la Présidence de la République,⁹ on ne trouve pas de symbole de la Nation ou de la France, mais des symboles de la république, ce qui est pour le moins restrictif même si leur revue s’impose. Il faut aller, c’est un comble, sur le site Wikipedia¹⁰ pour trouver un inventaire historiquement et sociologiquement plus complet, même si certains (le béret, le vin ou le fromage) peuvent prêter à sourire.

    Le drapeau bleu-blanc-rouge

    C’est à ce jour l’article 2 de la constitution de la V° république qui stipule que « L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge. Il est savoureux de noter d’ailleurs que si la constitution parle de l’emblème national, le site de la Présidence de la République le réduit à un emblème de la république

    Quoi que l’on puisse dire, croire ou penser du régime républicain actuel, le drapeau est incontestablement plus que le symbole le plus fort de l’identité française, il en est l’emblème. Même s’il est récent au regard de la France, il est devenu par la force tragique de notre histoire contemporaine, et particulièrement le conflit meurtrier de 1914-1918, ce qui unit, au-delà de tout, les Français dignes de leur nationalité.

    Il faut pardonner, mais ne pas oublier, les actes odieux à son égard comme lorsqu’il fut brûlé en mai 2007, ou encore le poème de Jean Zay, futur ministre de la république, où, à 19 ans certes, et au sortir de la Première Guerre mondiale qui avait fait des millions de morts, il écrivait « tu es pour moi de la race vile des torche-culs ».

    Les raisons du choix des couleurs du drapeau seraient, selon l’explication la plus couramment donnée, d’avoir associé le blanc, couleur royale aux bleu et rouge qui étaient les couleurs de la Garde Nationale, et auparavant des Gardes Françaises auxquelles elle avait succédé en septembre 1789. Selon d’autres, l’origine

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