L’idéologie néolibérale : ses fondements, ses dégâts: Essai politique
Par Claude Simon
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À propos de ce livre électronique
Le néolibéralisme est-il une idéologie ? Comment s'est-il imposé dans le monde depuis quarante ans ? Quel est son bilan ? Pourquoi faut-il distinguer libéralisme et néolibéralisme ?
Toutes ces questions, et beaucoup d'autres, Claude Simon les aborde de front dans cet ouvrage très clair et documenté.
Il explique comment le néolibéralisme, sous couvert de liberté et d'efficacité économique, s'est imposé dans tous les domaines de notre vie.
Et comment il a été pensé et imposé par des théoriciens, comme Friedrich Hayek ou Milton Friedman, et par des politiques, comme Margaret Thatcher ou Ronald Reagan.
Claude Simon est aussi retourné aux sources : si le libéralisme est né au siècle des Lumières pour libérer l’homme du pouvoir absolu et mettre l’économie à son service, le néolibéralisme, lui, a inversé cette logique en plaçant les individus et les États au service de l’économie et des marchés.
Un ouvrage très intéressant qui éclaire sur l'origine et les conséquences de l'idéologie néolibérale.
EXTRAIT
De nombreux observateurs constatent une mutation, opérée à la fin de la décennie soixante-dix ou au cours des années quatre-vingt. En fonction de leur spécialité - politique, économique, financière -, ces auteurs lui donnent différentes causes : les gouvernements Reagan et Thatcher pour les premiers, les théories de Friedman et Hayek pour les deuxièmes, la libéralisation des marchés pour les troisièmes. Sont évoqués, pour traduire ce phénomène, les termes d’ultralibéralisme ou de néolibéralisme. Ce dernier étant le plus fréquemment utilisé, nous le choisirons pour cet ouvrage. Pour autant, nous n’avons pas trouvé d’analyse de cette profonde mutation qui l’aborde sous ses multiples composantes - philosophique, économique, politique - et qui soit accessible à un grand public. Nous nous sommes alors posé plusieurs questions : le néolibéralisme constitue-t-il le système de pensée qui sera dominant au XXIe siècle ? Si oui, quelles sont ses origines et ses conséquences ? En quoi diffère-t-il du libéralisme ? Où va le monde s’il persiste dans sa domination ?
CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE
Ce petit bouquin est donc une lecture indispensable : il met en perspective l’enchaînement des fausses évidences qui conduit à la destruction de nos démocraties, lesquelles se voulaient civilisées. - Collectif Roosevelt
À PROPOS DE L'AUTEUR
Claude Simon est professeur émérite d’économie à l’ESCP-Europe. Il a récemment publié : Stop à la dérive des banques et de la finance puis co-rédigé Stop au mirage de la croissance (l’Atelier/ Collectif Roosevelt).
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Avis sur L’idéologie néolibérale
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Aperçu du livre
L’idéologie néolibérale - Claude Simon
p. 256.
Introduction
De nombreux observateurs constatent une mutation, opérée à la fin de la décennie soixante-dix ou au cours des années quatre-vingt. En fonction de leur spécialité - politique, économique, financière -, ces auteurs lui donnent différentes causes : les gouvernements Reagan et Thatcher pour les premiers, les théories de Friedman et Hayek pour les deuxièmes, la libéralisation des marchés pour les troisièmes. Sont évoqués, pour traduire ce phénomène, les termes d’ultralibéralisme ou de néolibéralisme. Ce dernier étant le plus fréquemment utilisé, nous le choisirons pour cet ouvrage. Pour autant, nous n’avons pas trouvé d’analyse de cette profonde mutation qui l’aborde sous ses multiples composantes - philosophique, économique, politique - et qui soit accessible à un grand public. Nous nous sommes alors posé plusieurs questions : le néolibéralisme constitue-t-il le système de pensée qui sera dominant au XXIe siècle ? Si oui, quelles sont ses origines et ses conséquences ? En quoi diffère-t-il du libéralisme ? Où va le monde s’il persiste dans sa domination ?
Car il s’agit d’un système de pensée à la fois global, qui aborde tous les aspects de l’homme et des sociétés, et mondial², auquel aucun pays ne semble réellement échapper. Pour bien appréhender où il nous mène, il faut commencer par faire le tour de ses origines, autrement dit, bien cerner le concept de libéralisme lui-même dans ses principales composantes et ses principaux effets. Tel est l’objet de la première partie.
Dès lors que le concept de libéralisme sera bien déterminé sous tous ses aspects, nous pourrons aborder le néolibéralisme pour voir s’il constitue une simple évolution ou une mutation essentielle qui se serait insidieusement infiltrée dans nos sociétés pour les modifier profondément. Tel est l’objet de la deuxième partie.
Nous pourrons ensuite, dans une troisième partie, nous interroger sur sa portée, autrement dit nous efforcer d’anticiper le type de société où nous conduirait cette idéologie si elle devait perdurer. Nous nous interrogerons aussi pour savoir si ce terme d’ « idéologie » doit être appliqué au libéralisme et au néolibéralisme.
2. Par un regrettable anglicisme, de nombreux auteurs mélangent les termes de « globalisation » et de « mondialisation ». Les anglophones, considérant que la terre a la forme d’un globe, utilisent donc le terme de globalization là où nous devons, nous, utiliser celui de « mondialisation ». Pour autant, ce dernier terme est très sensiblement différent de celui de « globalisation », qui doit conserver son sens propre comme notre phrase le montre. L’anglicisme appauvrit trop souvent notre langue pourtant riche.
PREMIÈRE PARTIE :
Le libéralisme, un système complet et complexe : philosophique, économique et politique
Pour aborder un concept complexe et polysémique,
l’usage des différents dictionnaires permet de donner une ligne directrice et, le cas échéant, de déterminer des frontières entre les différents sens du terme.
Le Littré (paru de 1873 à 1877) donne du libéralisme une définition des plus courtes : « Opinion, principes des libéraux ». Il devient plus prolixe au terme « libéral » auquel il donne quatre sens :
- qui est digne d’un homme libre ;
- qui aime à donner ;
- qui est favorable à la liberté civile et politique et aux intérêts généraux de la société ;
- vertu des païens.
Au XIXe siècle le libéralisme caractérisait des individus ayant une haute valeur morale et le terme se limitait donc à sa portée éthique.
Un dictionnaire plus moderne (Le Grand Robert de la langue française) en donne trois sens à portée beaucoup plus large :
- ensemble des doctrines qui tendent à garantir les libertés individuelles tantôt contre l’arbitraire du gouvernement (...) tantôt contre l’influence des groupes par la limitation de la puissance des partis, des syndicats ;
- doctrine selon laquelle la liberté économique, le libre jeu des « lois naturelles » (...) ne doivent pas être entravés par une intervention autoritaire ;
- attitude de respect à l’égard de l’indépendance d’autrui.
Le Dictionnaire Historique de la langue française confirme l’évolution du sens du mot : « a d’abord défini la doctrine des libéraux français avant de prendre son sens moderne en politique et en économie par opposition à étatisme et socialisme ».
Pour résumer, on constate au XIXe siècle la naissance d’une conception philosophique centrée sur de hautes valeurs morales individuelles, telle que la générosité, progressivement captée par les champs économique et politique, avec par exemple la limitation des pouvoirs de l’État et des syndicats. Pour bien cerner tout le contenu du concept, nous suivrons donc ces différentes étapes.
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Les sources philosophiques, économiques et politiques du libéralisme
Si le terme de libéralisme est apparu pour la première fois en 1816 (Maine de Biran), ses sources sont, en réalité, antérieures. On peut en situer les origines au XVIIIe siècle, également appelé siècle des Lumières. À très grands traits, cette période se caractérise par des penseurs qui veulent libérer l’individu de la tutelle d’un monarque absolu ou de Dieu. Il ne s’agit pas de nier celui-ci mais de restaurer le rôle de la raison et donc la maîtrise de l’homme sur lui-même, laquelle lui confère une responsabilité dans sa relation aux autres : c’est d’abord la dimension morale. Celle-ci n’émane plus de Dieu mais de l’homme lui-même. Kant (1724-1804), le grand philosophe allemand, définit bien cela dans la première phrase de son opuscule, Qu’est-ce que les Lumières ? : « Les Lumières, c’est la sortie de l’homme hors de l’état de tutelle dont il est lui-même responsable. L’état de tutelle est l’incapacité de se servir de son entendement sans la conduite d’un autre. »
Les sources philosophiques
En France, Voltaire (1694-1778), Montesquieu (1689-1755), Rousseau (1712-1778) et Diderot (1713-1784) notamment vont apporter leur pierre à cette construction. Puis, de la morale, on passe naturellement à la relation de l’ensemble des individus entre eux, c’est-à-dire à la politique. En France ce sera principalement Montesquieu (1689-1755), qui, avec De l’Esprit des Lois et la nécessaire séparation des pouvoirs (législatif, exécutif, judiciaire), marquera l’histoire.
Mais les idées qui vont imposer leur forte empreinte sur la doctrine libérale viennent, pour l’essentiel, d’outre-Manche. Le terrain était déjà préparé dès le XVIIe siècle par John Locke (1632-1704), qui doit être considéré comme un précurseur du libéralisme. Dans son Traité du gouvernement civil (1690), il définit ce que doit être un bon pouvoir politique (§ 4 du Traité, autrement dit son introduction) :
« Pour bien entendre en quoi consiste le pouvoir politique, et connaître sa véritable origine, il faut considérer dans quel état tous les hommes sont naturellement. C’est un état de parfaite liberté, un état dans lequel, sans demander de permission à personne, et sans dépendre de la volonté d’aucun autre homme, ils peuvent faire ce qu’il leur plaît, et disposer de ce qu’ils possèdent et de leurs personnes, comme ils jugent à propos, pourvu qu’ils se tiennent dans les bornes de la loi de la Nature. Cet état est aussi un état d’égalité ; en sorte que tout pouvoir ou toute juridiction est réciproque, un homme n’en ayant pas plus