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Regards interdisciplinaires sur les publics de la culture
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Regards interdisciplinaires sur les publics de la culture
Livre électronique490 pages5 heures

Regards interdisciplinaires sur les publics de la culture

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À propos de ce livre électronique

La question des publics constitue l’une des préoccupations principales de nombreux acteurs du champ culturel. Depuis une trentaine d’années, les efforts déployés pour que les productions culturelles rejoignent des publics plus nombreux s’avèrent considérables. La démocratisation culturelle, l’éducation populaire, les politiques culturelles, l’éducation à la culture et la médiation culturelle, notamment, ont engendré une certaine forme d’obligation de résultats. Le rapport à la culture s’en trouve modifié, tout comme ce que signifie « être public ».

Le présent ouvrage se compose de chapitres d’auteurs d’horizons variés et réunis par le Laboratoire de recherche sur les publics de la culture de l’Université du Québec à Trois-Rivières, qui regroupe des chercheurs et des étudiants des cycles supérieurs de plusieurs universités ainsi que des professionnels des milieux culturels et scolaires. Le lecteur découvrira ici la complexité et la diversité des relations entre les publics et la culture dans diverses sphères d’activités, de même qu’une série d’interrogations autour de la question des non-publics.

Il sera également amené à porter un regard sur les rapports entre culture et éducation, et sur l’évolution des pratiques de recherche dans ce domaine au carrefour de plusieurs disciplines.
LangueFrançais
Date de sortie25 oct. 2017
ISBN9782760548459
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    Aperçu du livre

    Regards interdisciplinaires sur les publics de la culture - Marie-Claude Larouche

    INTRODUCTION

    REGARDS INTERDISCIPLINAIRES SUR LES PUBLICS DE LA CULTURE

    Marie-Claude Larouche

    Université du Québec à Trois-Rivières

    Jason Luckerhoff

    Université du Québec à Trois-Rivières

    Stéphane Labbé

    Université du Québec à Trois-Rivières

    La question des publics est au cœur des préoccupations de nombreux acteurs du champ culturel. Depuis une trentaine d’années, les efforts déployés pour que les productions culturelles rejoignent des publics plus nombreux s’avèrent considérables. Les restrictions budgétaires importantes découlant des politiques néolibérales appliquées par les différents paliers gouvernementaux en Amérique du Nord et ailleurs dans le monde expliquent en partie ces efforts accrus. Incidemment, dans une logique de mise en marché le plus souvent clientéliste (Lafortune, 2017) et un contexte de diversification de l’offre en culture, loisir et divertissement, les institutions se voient placées en concurrence, chacune souhaitant attirer les non-publics de la culture (Jacobi et Luckerhoff, 2010). Par ailleurs, les pratiques culturelles, de la lecture à la sortie au théâtre ou à la visite au musée, subissent aussi des mutations profondes sur le plan social, esthétique et technologique; des facteurs tels les changements apportés aux politiques gouvernementales, l’essor du numérique, le vieillissement de la population et la désindustrialisation participent à l’accélération de ces mutations. Alors que les productions culturelles sont de plus en plus considérées comme des outils de développement économique associés à une économie dite créative, la pression pour conquérir de nouveaux publics, locaux et touristiques, devient encore plus forte. Les publics scolaires, convoités par diverses institutions dans le cadre du renouvellement de leurs stratégies d’action éducative et culturelle axées sur l’apport des réseaux informatiques, des équipements et applications logicielles, font aussi l’objet de campagnes de communication et de marketing nombreuses.

    En outre, la démocratisation culturelle, les politiques culturelles, la médiation culturelle, l’éducation à la culture et l’éducation populaire, notamment, ont engendré une certaine forme d’obligation de résultats. Le rapport à la culture s’en est trouvé modifié, de même que la définition de ce que signifie être public. Aussi les publics de la culture ont-ils été étudiés tant en sociologie, en muséologie qu’en communication. Si Esquenazi considérait en 2003 le concept de public difficile à manipuler, en affirmant par exemple que «la sociologie des publics est un domaine névralgique, à la fois incertain et fiévreusement discuté» (Esquenazi, 2003, p. 4), un dossier sur le thème «À la recherche du public», dirigé par Dayan dès 1993, avait contribué à la mobilisation par les chercheurs du concept de «publics au pluriel». L’instabilité même du concept de publics, constat qui se dégage de ce dossier, sera d’ailleurs abordée par Esquenazi, qui se proposera d’étudier «les communautés provisoires que forment les publics, la diversité de leurs réactions et de leurs identités» (Esquenazi, 2003, p. 5). Selon lui, «la définition des publics résulte de façon importante des choix théoriques du sociologue» (Esquenazi, 2003, p. 6); en effet, les publics «n’émergent [incidemment] que dans un rapport à une offre culturelle précise», comme le rappelle Lafortune (2017, p. 43).

    Par ailleurs, les débats scientifiques déjà nombreux concernant le concept de publics ont intégré des investigations historiques, conceptuelles et empiriques portant sur les non-publics; c’est notamment le cas de deux ouvrages collectifs dirigés par Ancel et Pessin (2004a, 2004b). En 2010, Jacobi et Luckerhoff ont fait un clin d’œil au dossier d’Hermès en rassemblant pour la revue Loisir & Société un dossier intitulé «À la recherche du non-public»; les sept contributions composant cet ensemble ont contribué à montrer que la question de la réception est directement liée à la perspective d’analyse du chercheur ainsi qu’au contexte dans lequel on devient public.

    INTENTIONS DE L’OUVRAGE

    La majorité des contributions présentées ici découlent d’un colloque organisé par le Laboratoire de recherche sur les publics de la culture de l’Université du Québec à Trois-Rivières (LRPC) dans le cadre du 84e Congrès de l’Association francophone pour le savoir, à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) en mai 2016. Sous l’intitulé «Recherches sur les publics de la culture: esthétique, communication et éducation, théories et méthodes», l’événement invitait les chercheurs à présenter leurs travaux sur les esthétiques associées à différentes expériences culturelles; les stratégies mises en œuvre par diverses institutions culturelles pour attirer, rejoindre ou fidéliser leurs publics; les conditions nécessaires pour que les non-initiés aient accès à des manifestations et objets artistiques et culturels éloignés de la vie quotidienne; enfin, sur les propositions théoriques et méthodologiques à la base des investigations sur les rapports entre publics et offres culturelles.

    Si la première intention derrière le présent ouvrage était le partage de nos réflexions au-delà du cercle restreint des participants au colloque, une autre, tout aussi importante, découle d’une volonté, exprimée au sein du LRPC, de mettre en dialogue – voire de confronter – diverses approches disciplinaires afin de faire émerger des constats à partir de résultats susceptibles d’intéresser les milieux culturels et de l’éducation, de même que de contribuer à l’approfondissement ou au renouvellement d’objets de recherche. Le LRPC, qui rassemble des professeurs et des étudiants en études littéraires, en théâtre, en communication, en éducation, en loisir, en culture et en sociologie, ainsi que des professionnels des milieux culturels et scolaires, a pour principaux objectifs le développement d’un regard résolument interdisciplinaire sur les publics de la culture, ainsi que la réalisation de travaux résolument menés dans une perspective transdisciplinaire.

    STRUCTURE DE L’OUVRAGE

    Regards interdisciplinaires sur les publics de la culture se compose de 12 chapitres, rédigés par 25 auteurs d’horizons variés. Sous la plume de Mathilde Barraband, professeure au Département de lettres et communication sociale de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), «Quels lecteurs l’université forme-t-elle? Petite histoire de l’ouverture des études littéraires françaises au corpus contemporain» retrace les étapes de la légitimation de la littérature contemporaine dans l’université française, du XIXe siècle à nos jours. Reprenant les mots de Barthes, selon qui «la littérature est ce qui s’enseigne dans les classes», l’analyse met en lumière la réorientation des programmes universitaires vers les corpus contemporains, assortie de finalités certes liées à la stimulation de la création littéraire, mais aussi à un certain clientélisme universitaire.

    À la demande du Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM), Marie-Claude Larouche, professeure au Département des sciences de l’éducation de l’UQTR, Denis Simard, professeur au Département d’études sur l’enseignement et l’apprentissage de l’Université Laval, Katryne Ouellet, étudiante à la maîtrise en éducation à l’UQTR, ainsi que Mélanie Deveault et Mathieu Thuot Dubé, tous deux concepteurs rattachés à la Direction de l’éducation du MBAM, présentent une recherche évaluative formative portant sur les «Enjeux disciplinaires et culturels associés à l’appropriation scolaire de la plateforme muséale ÉducArt» du Musée des beaux-arts de Montréal par des enseignants du secondaire au Québec. Documentant les défis posés par l’intégration des ressources proposées par ÉducArt en classe, ils s’interrogent sur les voies à emprunter pour concilier adéquatement, dans le respect de leur mission institutionnelle respective, l’expérience proposée par ÉducArt, les nécessités de l’enseignement, de même que les besoins et les réalités des diverses disciplines scolaires.

    Denis Simard, professeur au Département d’études sur l’enseignement et l’apprentissage de l’Université Laval, Héloïse Côté, auteure et chargée de cours au Département d’études sur l’enseignement et l’apprentissage de l’Université Laval, et Erik Falardeau, professeur au même département, se penchent sur les visées poursuivies par des enseignants du secondaire au moment d’arrêter leur choix sur des œuvres littéraires, alors que le curriculum leur laisse entière liberté à cet égard. Dans un chapitre intitulé «Séparer le bon grain de l’ivraie: les critères de sélection des repères culturels dans la classe de français, langue première, au secondaire», ils distinguent des visées d’intégration, d’explicitation, de distanciation et de pertinence, faisant ainsi écho aux intérêts individuels des enseignants et aux besoins que ces derniers perçoivent chez leurs élèves.

    Dans «Les musées de sciences et de technologie, l’éducation formelle et l’éducation non formelle», Olivier Champagne-Poirier, doctorant en communication sociale à l’UQTR, Ghislain Samson, doyen de la gestion académique des affaires professorales à l’UQTR, Pierre Chastenay, professeur au Département de didactique de l’UQAM, et Jason Luckerhoff, professeur au Département de lettres et communication sociale de l’UQTR, s’intéressent à l’intégration des visites dans musées de sciences et de technologie (MST) aux planifications pédagogiques en sciences et technologie. L’adoption d’une démarche qualitative et inductive mobilisant divers acteurs du milieu scolaire a permis de mieux comprendre un processus influencé par les perceptions de l’apport éducatif des MST, les obstacles freinant l’inclusion d’activités se déroulant hors des murs de l’école – telle que la visite de MST – et la formation universitaire en éducation.

    Dans un chapitre intitulé «Le discours officiel sur les relations entre les ministères de la Culture et de l’Éducation du Québec de 1961 à 2007: démocratisation ou démocratie culturelle?», Héloïse Côté, auteure et chargée de cours au Département d’études sur l’enseignement et l’apprentissage de l’Université Laval, Denis Simard, professeur au Département d’études sur l’enseignement et l’apprentissage de l’Université Laval, et Marie-Claude Larouche, professeure au Département des sciences de l’éducation de l’UQTR présentent les résultats d’une étude chronologique allant de 1961, année de création du ministère des Affaires culturelles du Québec, à 2007, soit celle où fut implanté le Programme de formation de l’école québécoise: enseignement secondaire, deuxième cycle. Ils font état de la plus grande liberté de choix laissée aujourd’hui à l’enseignant qui doit sélectionner les contenus culturels au sein d’un vaste répertoire de repères qui comprend aussi bien des œuvres que des pratiques quotidiennes d’ici et d’ailleurs, d’hier et d’aujourd’hui.

    Marie-Pierre L. Nadeau, diplômée à la maîtrise en loisir, culture et tourisme de l’UQTR, Marie-Claude Lapointe, professeure au Département d’études en loisir, culture et tourisme de l’UQTR, et Jason Luckerhoff, professeur au Département de lettres et communication sociale de l’UQTR, livrent, dans «Les non-publics des musées d’art: les raisons du désintérêt chez les 15-24 ans», leurs réflexions sur les spécificités de ce groupe. Leurs résultats de recherche pourraient notamment permettre aux institutions muséales de réfléchir à leurs stratégies pour attirer les jeunes âgés de ce groupe d’âge.

    Virginie Soulier, maître de conférences en muséologie, communication culturelle et artistique à l’Université de Perpignan, s’est intéressée à la manière dont les camps d’internement des exilés espagnols construits en toute hâte au moment de la victoire de Franco deviennent depuis peu des institutions muséales. Son chapitre, «Les témoins-publics et le patrimoine mémoriel: patrimonialisation des anciens camps d’internement des exilés espagnols en Catalogne», décrit et analyse la mise en mémoire et la mise en patrimoine d’un événement historique récent et sensible, tout en rendant compte du rôle des témoins dans la production et la transmission d’un patrimoine mémoriel à la fois matériel et immatériel.

    Depuis la fin du XXe siècle, le tournant communicationnel et la baisse de financement public ont conduit les musées à placer le visiteur au cœur de leurs préoccupations et à chercher un financement autonome; dans ce contexte, l’évaluation muséale a probablement rendu possible une discussion à propos de la performance dans les musées. Afin de mieux comprendre ce phénomène, Marie-Chantal Falardeau, doctorante en communication sociale à l’UQTR, Pascal Forget, professeur au Département de génie industriel à l’UQTR, et Jason Luckerhoff, professeur au Département de lettres et communication sociale de l’UQTR, ont animé des entretiens individuels et de groupe avec les employés du Musée d’art de Joliette (MAJ), récemment rénové, agrandi et restructuré. Sous le titre «La perception de l’amélioration continue en contexte muséal», leur chapitre propose des analyses qui permettent d’affirmer que les employés de ce musée n’ont pas une perception négative des approches d’amélioration continue et qu’ils appliquent déjà, dans le cadre de leurs fonctions, des pratiques liées à ces approches.

    Stéphane Labbé, doctorant en communication sociale à l’UQTR, et Jacques Lemieux, professeur associé au Département d’information et de communication de l’Université Laval et au Département de lettres et de communication sociale de l’UQTR, abordent les variations de l’offre et des usages des bibliothèques publiques du Québec sous l’angle du territoire. Ils proposent ainsi une analyse orientée par une typologie développée à l’échelle locale et suggèrent que la taille et la densité de la population d’une municipalité font varier sensiblement l’offre culturelle déployée ainsi que les usages qui en sont fait.

    Dans un texte visant à mieux comprendre l’approche centrée sur la cognition du lecteur dans l’acte de lecture d’un texte narratif, soit Volley-ball de Christian Oster (Éditions de Minuit, 1989), Mélanie Grenier, étudiante à la maîtrise en lettres à l’UQTR, mobilise les théories d’Iser, d’Eco et de Valenti. Son chapitre aborde les différentes phases de la construction cognitive du lecteur et propose une application concrète par une étude de cas.

    Dans le chapitre suivant, Suzanne Foisy, professeure associée au Département de philosophie et des arts de l’UQTR, Hervé Guay, professeur au Département de lettres et communication sociale de la même université, et Pascale Marcotte, professeure titulaire au Département de géographie de l’Université Laval, analysent la notion d’expérience sous l’angle de trois traditions différentes, à savoir la philosophie, le théâtre et le tourisme. Les auteurs y exposent certaines distinctions à faire entre ces trois perspectives, notamment sur les plans de la nature – individuelle ou collective – de l’expérience, de même que sur la nature de l’interaction que sous-tend celle-ci.

    Dans le dernier chapitre de cet ouvrage, Séverine Dessajan, ingénieure au Centre de recherche sur les liens sociaux (CERLIS), et Olivier Thévenin, professeur de sociologie à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3 et chercheur au CERLIS, livrent un texte qui rend compte de trois grandes perspectives sociologiques appliquée à l’étude des publics de la culture, à savoir:

    1.La sociographie des publics.

    2.Les processus de production et de réception des œuvres.

    3.Le rôle des médiations humaines et matérielles.

    Par cette mise en commun, les auteurs montrent l’intime arrimage entre la démarche méthodologique, l’objectif et la perspective sociologique choisie.

    Les chapitres de cet ouvrage ont été évalués et commentés par un comité scientifique composé de Jacques Lemieux, professeur associé au Département d’information et de communication de l’Université Laval et au Département de lettres et communication sociale de l’UQTR; Claude Martin, professeur honoraire de l’Université de Montréal et professeur associé au Département de lettres et communication sociale de l’UQTR; Marie-Ève Carignan, professeure adjointe au Département des lettres et communications de l’Université de Sherbrooke; Marie-Claude Larouche, professeure agrégée au Département de sciences de l’éducation de l’UQTR; Jason Luckerhoff, professeur titulaire au Département de lettres et communication sociale de l’UQTR; Stéphane Labbé, doctorant en communication sociale à l’UQTR. Soulignons aussi la contribution de lecteurs anonymes auteurs d’évaluations à l’aveugle à la demande du comité scientifique, lorsque l’expertise des membres du comité s’est montrée insuffisante pour bien apprécier l’objet d’étude ou la perspective d’analyse proposés.

    Alors que le Québec se dote d’une nouvelle politique de la culture, les contributions de ce collectif permettent d’explorer les tensions qui existent entre publics et culture, dans diverses sphères d’activités, de même que de porter un regard sur l’évolution des pratiques de recherche et du discours officiel québécois associant culture et éducation.

    BIBLIOGRAPHIE

    ANCEL, P. et A. PESSIN (2004a). Les non-publics: les arts en réceptions, tome 1, Paris, L’Harmattan.

    ANCEL, P. et A. PESSIN (2004b). Les non-publics: les arts en réceptions, tome 2, Paris, L’Harmattan.

    DAYAN, D. (1993). «À la recherche du public», Hermès, Une revue de l’Institut des sciences de la communication du CNRS (ISCC), nos 11-12.

    ESQUENAZI, J.-P. (2003). Sociologie des publics, Paris, La Découverte.

    JACOBI, J. et J. LUCKERHOFF (2010). «À la recherche du non public/Looking for Non Publics», Loisir & Société/Society and Leisure, numéro thématique, vol. 32, no 1.

    LAFORTUNE, J.-M. (2017). «(Dé)politisation de la culture et transformation des modes d’intervention», dans N. Casemajor, M. Dubé, J.-M. Lafortune et E. Lamoureux (dir.), Expériences critiques de la médiation culturelle, Québec, Presses de l’Université Laval, p. 31-54.

    Chapitre 1

    QUELS LECTEURS L’UNIVERSITÉ FORME-T-ELLE?

    PETITE HISTOIRE DE L’OUVERTURE DES ÉTUDES LITTÉRAIRES FRANÇAISES AU CORPUS CONTEMPORAIN

    ¹

    Mathilde Barraband

    Université du Québec à Trois-Rivières

    Les discours déclinistes sur la littérature, s’ils constituent un exercice aussi ancien que la littérature elle-même, se sont multipliés ces dernières décennies en France (Gefen, 2009). Ils ont servi à proclamer la mort du grand écrivain (Raczymov, 1994), la fin de la littérature (Todorov, 2007) ou, de manière un peu plus mesurée, l’adieu des Modernes à la littérature (Marx, 2005). Quoique la répétition de ces actes de décès puisse à juste titre inspirer la méfiance, force est de constater que la littérature n’occupe plus le rôle central qu’elle occupait historiquement dans la «nation littéraire» qu’est la France (Fergusson, 1991). Dans ce contexte, la formation à la lecture littéraire a inspiré d’assez nombreuses études qui ont cherché à éclairer ce qui s’enseigne dans les écoles, du primaire au secondaire, et ce qui constitue la bibliothèque intérieure des enseignants (voir la recension dans Rouxel et Louichon, 2010, p. 9). Si «la littérature, c’est ce qui s’enseigne», selon le mot bien connu de Roland Barthes (1971, p. 170), l’avenir de la littérature se joue en effet en partie dans les classes. Peu de travaux ont toutefois porté sur le cas particulier des études littéraires à l’université. Peut-être en va-t-il du sentiment que la culture littéraire des étudiants est déjà faite. Peut-être, aussi, les universitaires sont-ils peu enclins à questionner leurs propres pratiques. Pourtant, ce que lisent et étudient, font lire et étudier les universitaires a fort à nous apprendre. C’est bien à l’université que sont formés les maîtres, ceux-là mêmes qui transmettront leur savoir, du primaire jusqu’au supérieur. En outre, les corpus d’études et de recherche littéraires de l’université ont beaucoup évolué ces dernières décennies.

    L’histoire récente des études littéraires universitaires en France mérite donc qu’on s’y arrête davantage. Quels types de lecteurs cherchent-elles à produire²? Quels corpus favorisent-elles et avec quelle conception de la fonction sociale de la littérature et de l’université? Pour avancer des réponses à ces questions, l’analyse du sort dévolu au corpus contemporain³ est un excellent indicateur. Si l’intégration de la littérature actuelle à l’enseignement et à la recherche s’est aujourd’hui banalisée, elle a longtemps suscité une forte opposition. On aurait pu considérer que le foisonnement de la création appelait l’expertise du chercheur, que la compréhension des formes nouvelles nécessitait la médiation d’un professeur. Mais ce sont d’autres représentations qui se sont mises en place et ont dominé le champ des études littéraires universitaires. Il y a peu, encore, une coutume prescrivait d’attendre un délai de 20 ans après la publication d’un texte pour l’enseigner, voire d’attendre la disparition d’un écrivain avant de mener des recherches sur son œuvre (Doubrovsky, 1992; Viart, 2008). Le commentaire de la littérature actuelle a longtemps été délégué à la critique journalistique et sa transmission assurée par les pairs, d’étudiant à étudiant notamment. Pourquoi une telle division des tâches entre critique universitaire et critique journalistique? Pourquoi évacuer la littérature contemporaine de l’enseignement et de la recherche? Je propose d’apporter quelques éléments de réponse à ces questions, en retraçant la lente et difficile légitimation du corpus contemporain à l’université, depuis les origines des études littéraires modernes, c’est-à-dire la seconde moitié du XIXe siècle, jusqu’à nos jours. Je reprendrai ici le résultat d’enquêtes que j’ai menées ces dernières années, souvent en collaboration, et qui ont pris diverses formes: celles de l’étude des programmes et des ressources en enseignement et en recherche dans les universités ou encore d’entretiens avec des enseignants-chercheurs de différentes générations. Ces enquêtes se concentrent pour l’instant essentiellement sur le cas des universités parisiennes et elles n’ont pas le caractère systématique qu’elles mériteraient. Mais elles permettent de dresser un premier état des lieux que d’autres travaux pourront

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