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Rome Deux millénaires en musique

Rome! Cité antique, héritière de Troie depuis l’union mythique d’Enée et de Lavinie. Fille de la Louve qui a sauvé leurs descendants, Romulus et Remus. Elle n’a cessé de s’étendre autour de ses sept collines: Aventin, Capitole, Coelius, Esquilin, Palatin, Quirinal et Viminal. Puissance impériale, elle a dominé tout le pourtour méditerranéen (Mare nostrum, « notre mer », disaient les Romains) puis tout l’Occident, des îles britanniques jusqu’à la mer Noire. Siège de la Catholicité, son rayonnement s’étend sur les cinq continents. Capitale de l’Italie moderne, elle est prise d’une « fièvre de la construction » qui a façonné son apparence actuelle, paradoxale, faisant se côtoyer toutes les modernités des siècles passés. Urbs antique devenue Ville éternelle, Rome est la cité de tous les arts et des plus grands créateurs italiens: de Michel-Ange à Federico Fellini, de Raphaël à Alberto Moravia, de Caravaggio à Giorgio de Chirico… Et aussi des musiciens: de Boèce à Respighi, de Palestrina à Scelsi…

Roma triomphans

Dès l’Antiquité, Rome résonne de musiques. Tout le long de la Via sacra et jusqu’au Forum, les triomphes célèbrent les victoires militaires aux sons retentissants des cornua et des tubae. Au Capitole, les cérémonies religieuses et funèbres sont auréolées des mélopées des litui (cuivres imitant la forme des crosses des aruspices) et des tibiae, cette flûte à deux tuyaux, cousine de l’aulos grec, dont Ovide disait dans ses Fastes, qu’elle « résonnait dans les temples, dans les réjouissances et dans les tristes funérailles ». Sur la scène des deux théâtres de Pompée et de Marcellus, la cithare (aujourd’hui confondue avec la lyre) soutient le chant des acteurs, comme en témoignent plusieurs allusions dans les comédies de Plaute. Les spectacles de mime, très appréciés, introduisent également déclamation et chant, avec accompagnement de tibia, pour stimuler la danse. Plus tardive, la pantomime (introduite à Rome par Pylade en 22 av. J.C.) fait appel au choeur et à un grand nombre d’instruments: outre la tibia, la syrinx (flûte de pan), les lyres et cithares, cymbales, crotales et autres percussions peuvent être employées.

Sous la République, si Scipion l’Africain s’indigne que les jeunes s’adonnent au chant, « ce que nos Anciens estimaient honteux pour des hommes libres », Cicéron au contraire en encourage et célèbre la pratique dans plusieurs écrits (De oratore, De divinatione). Dès le règne d’Auguste, les phonasci (professeurs de chant) sont recherchés; on acclame les citharèdes, fièrement drapés dans leurs habits pythiques teints de pourpre et brodés d’or. Les empereurs vont aussi se distinguer par leurs talents musicaux. Suétone rapporte que Titus était bon chanteur et joueur de cithare. Chacun se souvient (surtout depuis l’incarnation cinématographique mémorable offerte par Peter Ustinov) des poèmes que Néron aurait chantés sur sa lyre, en l’an 64, tandis qu’il contemplait l’incendie de Rome. Enfin, dans le Cirque Maxime et au Colisée, les cris des gladiateurs et des condamnés livrés aux bêtes féroces sont couverts par les sons puissants des hydraules, orgues antiques dont la facture nous a été rapportée par Vitruve dès le premier siècle de notre ère. Les Chrétiens en garderont mémoire et répugneront longtemps à introduire dans leurs églises cet instrument associé au massacre de leurs martyrs.

Mère de l’Eglise et de la musique occidentale

Peu après avoir adopté le christianisme comme religion d’Etat, à la fin du e siècle, l’Empire romain s’effondre en 476. Pourtant, c’est encore à Rome durant l’époque troublée des « invasions barbares », que sont constitués les éléments théoriques et esthétiques dont découle toute notre. 480-524). Descendant d’une noble famille romaine (la Anicii), consul et ami du roi ostrogoth Théodoric, à la fois savant et philosophe réputé, il synthétise le legs mathématico-musical des Pythagoriciens et des Aristotéliciens à la lumière de la mentalité symbolique chrétienne. Ses traités ( et ) seront fidèlement copiés et commentés jusqu’à la Renaissance. En instituant le , la « quadruple voie » de l’enseignement des sciences mathématiques (réunissant arithmétique, géométrie, astronomie et musique), il assure la pérennité d’un (savoir-faire) désormais doublé d’une (connaissance théorique), tant dans les institutions religieuses, civiles, privées qu’universitaires.

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