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Je suis mousse: Roman biographique
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Livre électronique184 pages2 heures

Je suis mousse: Roman biographique

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À propos de ce livre électronique

Après un démarrage difficile dès son plus jeune âge et une séparation déchirante, ce jeune garçon évoluera avec l’aide de son oncle et sa tante vers un destin qui lui sera propre. Un parcours semé d’embûches, jalonné de joies, de surprises et de déceptions.

À PROPOS DE L'AUTEURE

Un livre dans les mains dès l’apprentissage de la lecture et un gout prononcé pour l’écriture, Véronique Lurois a voulu partager avec vous l’histoire de ce très bon ami qu’elle a trouvé digne d’intérêt.
LangueFrançais
Date de sortie30 janv. 2020
ISBN9782889491285
Je suis mousse: Roman biographique

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    Aperçu du livre

    Je suis mousse - Véronique Lurois

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    Véronique Lurois

    JE SUIS MOUSSE

    La Mère

    Je fais partie d’une famille de onze chérubins, j’ai l’énorme chance d’avoir dix frères et sœurs vivants, ma mère ayant porté dix-sept enfants. Je ne suis ni le plus âgé, ni le plus jeune.

    Nous vivons à Algrange dans l’est de la France également appelé Algring durant l’occupation Allemande, ce qui nous donne l’avantage d’être bilingue. C’est un petit village situé dans une vallée étroite d’environ six-mille habitants. D’un côté de la vallée, la colline et sa forêt, de l’autre, les plaines. Terrain de jeux immense où je laisse libre cours à mes rêveries, mes escapades et à mes courses effrénées. Lieu de recueil où je m’invente une vie meilleure, une vie de petit garçon comme les autres qui n’aurait pas à taire les turpitudes d’un homme qui se dit être père. Endroit d’évasion et de rires où les jeux bercent mes rares moments de liberté durant mon enfance. Un village avec son histoire, son abbaye, ses mines racontées par une fresque le long des murs.

    C’est ici que démarrent mes souvenirs. Ma grand-mère a la bonté de nous héberger dans sa cave que nous avons aménagée. Pour l’année de mes trois ans, nous emménageons dans les HLM aux sorties du bourg. C’est plus spacieux et même si nous ne sommes pas encore tous nés car connaissant les conditions de la fécondation conjugale spécifique à notre famille, je sais déjà que j’aurai d’autres frères et sœurs.

    Il sort, il voit ses copains, il boit, il s’enivre et il rentre complètement soul. Il hurle, il insulte, il menace, il frappe, il prend ce qui lui revient de droit comme il aime le dire, il pénètre et il éjacule. Il n’y a pas de place pour les préliminaires, pas de place pour le respect ou la tendresse. Notre mère n’a droit qu’à la sauvagerie, le dédain et la force. Cette manière de faire le détend, il s’endort, il ronfle. Maman a mal dans son intérieur, dans ses tripes mais surtout mal dans son cœur. Ce rituel est très fréquent d’où la multitude d’autres bébés qui viendront agrandir cette grande famille, cette famille nombreuse comme les gens nous appellent. Pour nous, les enfants, ce mode de procréation particulier n’a jamais amené d’animosité. Tout nouveau-né sera immédiatement protégé par les grands et nous serons tous envahis par le désir de sortir de cette spirale de violence.

    Malgré notre mode de vie qui aurait pu nous rendre soupçonneux, c’est avec délectation que nous profitons de ce logement, même si nous nous bousculons à chaque croisement, un sentiment d’espace nous envahit dès notre première visite. Un sentiment qui sera vite terni par les élucubrations et les excès du soi-disant paternel.

    Notre mère est une femme très courageuse, brune aux cheveux longs légèrement bouclés et épais. Détachés, ils courent sur ses épaules et viennent finir leur course au milieu de son corsage. En chignon, elle les attache simplement avec une barrette ce qui fait ressortir ses lèvres minces et un sourire qui en dit beaucoup sur cette vie qu’elle aurait aimé autre. Cette jouvencelle a dans les années cinquante la charge d’une famille nombreuse. Une femme a peine sortie de l’adolescence qui fera face aux grossesses à répétition et qui subira les assauts d’un mari ivrogne et violent.

    Le conjoint de ma mère est un homme grand, aux cheveux courts, ondulés et coiffés en arrière. Alcoolique, cet être possède également un côté sadique. Pas assez satisfait des violences physiques exercées sur sa femme et ses onze enfants, la blessure psychologique atteint son apogée lorsque celui-ci oblige ses progénitures, dans le silence et assis sur une chaise, à assister au déroulement d’une scène rythmée au gré de ses envies de cogner, d’insulter et malmener son épouse. Beaucoup de sentiments cruels feront face, des sentiments dont nous ignorions l’existence. La haine, la colère, l’envie de vengeance mais aussi l’amour, la joie (malgré notre misère, nous restons des enfants) et bien d’autres apparaitront dans notre imagination. Le rêve nous permet de tenir.

    L’année de mes dix ans nous apprenons avec horreur, comme si les raclées quotidiennes ne suffisaient pas, que ma sœur ainée a été violée par son propre père. La petite de six ans a su malgré son âge et avec un reste d’innocence, comprendre qu’il ne s’agissait pas des coups douloureux habituels. Les plaintes, les cris, les gémissements ainsi que les pleurs étaient déchirants.

    Ma mère porte plainte, son mari est incarcéré pour six mois. Nous sommes sous tutelle de l’état. Durant la fin de cette période, notre mère fatiguée est hospitalisée pour une grippe, les médecins découvrent également une phlébite puis un cancer du sein. Les grands prennent soin des petits. Mon frère aîné travaille pour subvenir aux besoins de la fratrie. Ma sœur de seize ans a alors la charge de la famille avec les tout-petits. Pendant un mois, nous avons réussi, onze enfants à la maison, les uns choyés, les autres devant faire face à une situation allant de mal en pis, à nouer solidement les liens qui nous unissent encore aujourd’hui quarante ans après, et jamais nous n’oublierons, même si nous l’avons compris bien plus tard, le courage de nos ainés. Puis arrive la rupture. Peu de temps avant la libération du vieux, les services de l’état se présentent pour emmener nos six sœurs et les deux plus petits des garçons. Le plus grand de nous tous, avec le soutien de ses dix frères et sœurs, refuse d’ouvrir la porte aux gendarmes, l’intervention d’un serrurier sera nécessaire. Nos ainés ne comprennent pas. Encore aujourd’hui, je me souviens du manque ressenti le premier soir.

    Pour leur sécurité, les filles et les plus jeunes sont placés dans des familles d’accueil, les plus grands réapprennent, dans la douleur, à vivre sans leurs cadets et sans le soutien de notre sœur qui a toujours su nous entourer. Notre sœur mère à qui encore aujourd’hui, nous vouons un attachement particulier que nous avons développé au fil de toutes ces années durant lesquelles nous avons été séparés. Cette jeune fille blessée n’a pas hésité à donner toute son énergie pour s’occuper des petits et comme elle continue ses études, c’est notre frère de quatorze ans Sylvain qui reste à la maison pour s’occuper des bébés, le plus grand d’entre nous travaille toute la journée.

    Puis, l’homme est libéré, il s’installe de nouveau à la maison. Nous ne sommes plus que trois garçons et nous vivons dans l’angoisse à ses côtés. J’ai interdiction d’aller rendre visite à ma mère à l’hôpital et je n’ai que très peu de nouvelles. Elle me manque. Je ne vais plus à l’école, le matin, je pars avec mon cartable et vais la voir en cachette. Elle aussi a besoin d’un peu de réconfort. Elle s’inquiète de notre devenir car elle sait qu’elle nous laisse entre les mains d’un individu grossier et cynique. Alors je la rassure, je lui raconte de bien belles histoires auxquelles elle ne croit pas mais qui la font sourire. Sans jamais mentionner le nom du mâle qui ne lui a alloué que peur et souffrance, j’invente un bel avenir pour ses onze enfants.

    Elle s’endort et je retrouve les copains qui chapardent une pomme, une banane ou un morceau de pain à la cantine et me les donnent le midi.

    Durant les neuf mois de son hospitalisation, la santé de ma mère ne fait que décliner. À la maison, elle est très vite remplacée par la nouvelle compagne de son mari. Ils se sont trouvés sur annonces. Notre vie est difficile, je ne m’entends pas avec la nouvelle venue et ses quatre enfants. Pendant ce temps, ma mère agonise et décède à l’âge de quarante-deux ans. Le plus âgé d’entre nous a dix-huit ans, le plus jeune, quatorze mois. Je tairais la colère qui se transformera en haine. Mon corps entier est envahi par la fatigue, une lassitude qui mettra des jours à disparaître. Un grand sentiment d’isolement, une perte énorme, un gouffre dans lequel le moindre souffle pourra me précipiter sur les mauvais chemins de la vie. Encore aujourd’hui, je n’éprouve que de la rancœur envers cet individu.

    Ce soir-là, je ne rentre pas à la maison car je sais que plus aucun frein n’arrêtera les excès de cette créature dans ses moments de grands égarements, ce sont les gendarmes qui me ramènent.

    Enfin, notre géniteur est déchu de ses droits paternels et dès lors, je rentre dans les rouages de l’assistance publique, nous sommes séparés. J’ai alors quatorze ans.

    Mes deux frères restent à la maison car le plus âgé a atteint sa majorité et le second en est très proche. Ils partiront dès que possible, les souvenirs étant bien trop douloureux.

    Bonjour, je m’appelle Guytou et voici quelques mots sur ma petite enfance.

    Niort

    Je suis placé chez mon oncle et ma tante, la sœur de ma mère, qui à plusieurs reprises ont bien essayé de prendre sous leur tutelle plusieurs d’entre nous, mais sans jamais réussir malgré toutes les démarches et les insistances auprès des services de l’état. Notre cas ne devait pas être assez grave. Ils connaissaient notre condition, en étaient bouleversés et souffraient terriblement de notre situation. Après le décès de sa sœur et avec tout le soutien de son mari, ma chère tantine réussit enfin à récupérer un de ses neveux. Je serai le seul, mes autres frères et sœurs ayant été placés avant le repos éternel de notre mère. C’est avec un énorme plaisir que je quitte l’appartement détestable où j’ai été obligé de survivre durant ces premières années. Ma fratrie me manque déjà.

    Je pars donc pour Niort, un chamboulement brutal car c’est une ville d’environ soixante-mille habitants, mais je suis heureux de quitter ce village encore habité par cet être ignoble qui nous aura donné que malheur, larmes et effrois.

    Je découvre alors cette grande agglomération mais également l’entourage et l’amour de mon oncle et ma tante et surtout celui de ma cousine qui mettra tout en œuvre pour me faire découvrir la vie d’adolescent que je n’aurai jamais pu connaître si j’étais resté à Algrange. Leur fils et les deux autres filles ont déjà quitté le domicile familial et commencé une histoire qui leur sera spécifique. Lui est amputé d’une jambe. Cela s’est passé durant son service militaire à Madagascar. Il est grand et ressemble à Jean Gabin ce qui le rend encore plus chaleureux qu’il ne l’est déjà. Cette cordialité n’a d’égal que sa gentillesse, son bon sens et l’envie de bien faire vis-à-vis d’un enfant que l’on vient d’arracher aux siens, à ses frères et sœurs qui étaient le seul lien affectif qu’il connaissait. Un jeune être blessé par la disparition dramatique de sa mère, un préado rempli de colère envers un scélérat puant qui continuera à mener une vie en toute impunité.

    Elle, petite, aux cheveux mi-longs, rondouillarde et d’une ressemblance frappante avec ma mère, m’entourera de l’affection qu’elle aurait destinée à nous tous, les pauvres petits comme elle nous appelait, ce qui peu à peu effacera sa tristesse. Sa grisaille causée par l’angoisse de voir ses neveux et nièces subir les tromperies perfides d’un traitre autorisé à être de nouveau auprès d’une femme avec gamins disparaitra au fur et à mesure de mon évolution.

    Ma cousine, grande et plantureuse sera mon alliée, mon amie durant tout mon séjour dans cette délicieuse maisonnée. J’ai le droit de parler, rire, exprimer les joies et mes peines. On m’embrasse, on me sourit et je suis choyé. Les repas sont des instants de détente, la nuit je dors profondément. Je n’ai aucune inquiétude pour le lendemain sur le déroulement de ma journée. Alors je reprends goût à la vie, je me repose et même si je n’envisage pas encore un avenir, j’ai l’immense plaisir de profiter de tous les bons moments que nous octroie notre destin. Les mots de bienvenue fusent dès mon arrivée. Ma tante :

    – Rentre Guy tu es ici chez toi, je te présente ta cousine, vous allez faire un

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