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Chroniques: Notes d'un économiste 2016
Chroniques: Notes d'un économiste 2016
Chroniques: Notes d'un économiste 2016
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Chroniques: Notes d'un économiste 2016

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À propos de ce livre électronique

Les Éditions Anthemis vous proposent un outil complet pour comprendre l'évolution économique en 2016.

Ce court recueil rassemble quelques textes publiés dans la presse belge et française au cours de l’année 2016. Les contributions émanent d’observations de l’économie ou des événements qui affectent nos communautés.

Quels que soient les thèmes traités, les textes restituent une intuition de basculements, comme si la torpeur d’années nonchalantes allait être déchirée par des phénomènes inattendus. Un monde ancien, vieillissant et épuisé, s’effondre. Ce monde est celui de l’insouciance et du vain espoir que les certitudes soutiennent le futur.

En Belgique, les sinistres attentats terroristes ont révélé l’exténuation morale du Royaume. Ces événements, loin d’être isolés, s’inscrivent dans une cinétique de bouleversements du monde dont nous n’avons pas pris toute la mesure, car les équilibres géopolitiques se modifient. Ces confusions s’inscrivent elles-mêmes dans d’importantes turbulences économiques : la crise de 2008 a laissé de profondes cicatrices, tandis que le vieillissement de la population, combiné aux révolutions de la numérisation, va modifier la sphère des comportements économiques.

Il importe désormais que l’agencement politique promeuve la cohésion sociale et l’espérance dans un monde où les bouleversements sont trop nombreux pour pouvoir être compris et intégrés par une population inquiète et désemparée. Notre pays a besoin de concentration, de concertation, d’alignement et de promotion de valeurs vertueuses qu’on pourrait englober sous le vocable de "patriotisme". Il faut que la critique soit orientée vers une confiance nationale.

L’Histoire nous donne un avertissement : si l’avenir n’appelle pas des hommes de caractère alimentant les ferments d’un resserrement moral et intellectuel, il trahira les promesses que nous lui avons confiées.

Un ouvrage écrit par des professionnels, pour des professionnels.

À PROPOS DES ÉDITIONS ANTHEMIS

Anthemis est une maison d’édition spécialisée dans l’édition professionnelle, soucieuse de mettre à la disposition du plus grand nombre de praticiens des ouvrages de qualité. Elle s’adresse à tous les professionnels qui ont besoin d’une information fiable en droit, en économie ou en médecine.
LangueFrançais
ÉditeurAnthemis
Date de sortie23 août 2017
ISBN9782807202221
Chroniques: Notes d'un économiste 2016

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    Aperçu du livre

    Chroniques - Bruno Colmant

    sociétal

    Un avenir révoqué ?

    Cet oubli profond qui nous suit…

    Chateaubriand (1768-1848)

    Mémoires d’outre-tombe

    C’est sans doute l’urgence de partager des impressions déjà lointaines et diluées dans le temps qui m’a incité à les figer dans un livre. Ce dernier, comme certains des précédents, est une collection de textes publiés dans la presse belge et française. Rien ne les structure sinon une réflexion instantanée.

    Les thèmes relèvent de l’économie, mais pas exclusivement. Au risque de m’aventurer dans des disciplines pour lesquelles je n’ai aucune légitimité académique, j’ai voulu partager des intuitions – je devrais écrire d’éphémères fluences – au sujet des événements qui nous atteignent.

    Les textes sont rassemblés en quatre thèmes : les phénomènes monétaires, la gestion de l’économie sous l’angle des pressions déflationnistes, des développements fiscaux et des contributions qui m’ont été inspirées par les attentats qui ont frappé nos communautés. Dans ce dernier domaine, je me suis interrogé sur l’histoire, la direction et les valeurs de notre pays.

    En ce qui concerne les expressions terroristes, mes textes restituent une insidieuse et lourde intuition de basculements imminents, comme si la torpeur d’années indolentes allait être déchirée par des phénomènes inimaginables. Sans être un adepte des théories déclinistes ni être englouti dans des abysses de perplexité, je crois qu’un monde ancien s’effondre. Ce monde, comme d’avant les grandes guerres, est celui de l’insouciance et du vain espoir que les certitudes soutiennent le futur.

    L’avenir va – je le crains – trahir les promesses que nous lui avons confiées.

    De Gaulle parlait d’obscure fatalité.

    L’Histoire, ignorante de sa puissance, est une tempête furieuse qui trompe les hommes, détruit l’ordre et saccage les espérances.

    Et personne ne sait qui en décide.

    Bruno Colmant,

    Hiver 2016

    Des monnaies

    La monnaie : un flux d’unités de confiance

    La monnaie est un concept insaisissable. C’est à la fois un flux, créé par le multiplicateur bancaire, c’est-à-dire la séquence des dépôts et emprunts, et un stock, créé par les banques centrales.

    C’est le fondement de notre système d’économie marchande. Ses fonctions principales sont connues : c’est un étalon de mesure des échanges et une unité de compte. Elle possède un rôle transactionnel puisqu’elle permet de remplacer le troc des biens et des services par une marchandise intermédiaire, un « super-objet », à savoir la monnaie elle-même. Dans cette perspective, elle mesure l’utilité du temps consacré à la fabrication d’un bien ou à la production d’un service. Mais ce n’est pas tout : elle sert aussi d’instrument de thésaurisation. En conservant une quantité de monnaie, on diffère sa consommation dans le temps. En effet, l’argent épargné sert principalement à couvrir d’éventuelles dépenses futures.

    L’origine étymologique du mot monnaie est peut-être un indice intéressant pour comprendre son signifiant. La Monnaie ramène au Palais de la Moneta où les pièces romaines étaient frappées. La légende véhicule que ce Palais fut construit à l’endroit où les oies du Capitole étaient parquées et dont les cacardements auraient prévenu de l’invasion de Rome par les Gaulois, au IVe siècle avant Jésus-Christ.

    La contraction sémantique conduirait alors à savoir de quoi la monnaie, comme les oies du Capitole, avertit. C’est le fil directeur de notre raisonnement. Au reste, qu’est-ce que la monnaie, sinon une convention socioétatique ?

    La monnaie possède une fonction transactionnelle, mais le bien-fondé de sa valeur réside dans sa fonction d’épargne, qui correspond elle-même à la confiance qu’on peut avoir dans le pouvoir d’achat futur de la monnaie. Si les agents économiques sont défiants par rapport à la monnaie, ils vont se dépêcher de s’en débarrasser au profit de biens réels, qui deviennent eux-mêmes, le cas échéant, une nouvelle monnaie. C’est une application de la loi de Thomas Gresham qui constate que « la mauvaise monnaie chasse la bonne ». En effet, lorsque deux monnaies (dont des biens réels et de l’or, par exemple) se trouvent simultanément en circulation, les agents économiques préfèrent conserver, thésauriser la « bonne » monnaie, et par contre utilisent pour payer leurs échanges la mauvaise dans le but de s’en défaire au plus vite. Si, par contre, les agents économiques ont confiance en la monnaie, ils l’épargnent à long terme. La confiance dans la monnaie se mesure donc par sa profondeur dans le futur.

    La monnaie s’est imposée au rythme de la division du travail, c’est-à-dire lorsque le troc ne permettait plus d’assurer un fonctionnement des communautés marchandes. Au cours de l’Histoire, elle a revêtu de nombreuses formes. À l’origine, elle était un bien consommé (un animal, par exemple) pour devenir progressivement un bien non consommable. Progressivement, son monopole a été capturé par les pouvoirs publics, car la monnaie est un des attributs de l’autorité et permet de payer l’impôt. Les droits de lever l’impôt et de battre monnaie correspondent d’ailleurs aux deux privilèges régaliens.

    Au fil de l’Histoire, la monnaie est devenue fiduciaire (c’est-à-dire fondée sur la confiance) et scripturale (transmissible par des écritures manuelles ou informatiques). Aujourd’hui, la monnaie est au mieux un bout de papier et au pire des électrons qui apparaissent épisodiquement sur l’écran d’un ordinateur. Elle n’est plus gagée par des métaux précieux, comme c’était le cas dans le cadre des cours de change fixes de l’étalon-or du système de Bretton Woods, abandonné en 1971.

    La monnaie n’a donc plus de valeur, mais se limite à la représenter. Comment est-il dès lors possible de réconcilier le manque de substance intrinsèque de la monnaie avec la valeur qu’on lui attribue ? Il faut que quelque chose garantisse la monnaie tout en lui étant supérieur. Or, quel est ce « quelque chose » ? C’est la confiance. Tout se passe donc comme si la monnaie était garantie par des unités « psychiques » de confiance individuelle qui, assemblées collectivement, assurent sa pérennité. La question est alors de savoir en quoi la confiance doit se placer. C’est à ce niveau que le raisonnement tourne court : il faut que la monnaie soit garantie par la confiance en… les institutions qui émettent la monnaie.

    En d’autres termes, la substance de la monnaie est indéfinissable, puisqu’elle est garantie par elle-même. C’est un concept en suspension, car il faut une réciprocité de la qualité de la confiance et de la quantité de monnaie. On pourrait même avancer que la monnaie est un artéfact, c’est-à-dire un phénomène créé de toute pièce, dépourvu de toute signification théorique. En même temps, c’est un phénomène plus ou moins conscient d’adhésion forcée puisque son cours légal est imposé par les États.

    L’économiste français Jean-Baptiste Say énonçait que « la monnaie est un voile » portant sans doute sur la crédibilité des États qui la frappent et sur la santé des échanges commerciaux. Aujourd’hui, on pourrait avancer que la discipline « morale » de la BCE garantit la pérennité de l’euro, c’est-à-dire que l’indépendance des autorités monétaires investit ses dirigeants d’une conservation de la confiance associée aux signes monétaires.

    De plus, comme la monnaie est garantie par elle-même, elle transporte une certaine vision de l’organisation politique. C’est à ce niveau qu’il faut faire intervenir l’État. Ce dernier possède le droit de lever l’impôt et de battre monnaie, mais aussi d’endetter la collectivité.

    En résumé, la monnaie est un concept singulier. C’est même un archétype, une idée qui sert de modèle à une autre. La monnaie porte en elle son caractère éphémère : elle se déprécie, se remplace, se confisque et se nationalise au gré des chocs de l’évolution des communautés humaines. Elle ne protège de l’avenir que de manière très temporaire, c’est-à-dire aussi longtemps que les hommes décident eux-mêmes de la stabilité de leur futur.

    Certains croient que la monnaie est synonyme de protection contre les aléas de la vie, mais c’est bien naïf : la fortune est fragile. La plus grave erreur en économie est de croire que les agencements monétaires sont irréversibles. Or ils ne le sont jamais : l’Histoire fourmille de monnaies devenues caduques. Une monnaie ne domestique jamais une communauté et on ne la postule pas par autorité. On ne peut pas non plus imposer un étalon monétaire inadapté à une population qui le réfute. C’est sans doute le véritable avertissement que véhicule la monnaie.

    Juin 2016

    Le veau d’or

    La monnaie est un concept qui relève des croyances ou des hallucinations collectives. C’est un état de confiance, plus ou moins stationnaire, fondé sur la stabilité de l’ordre socioétatique. Aujourd’hui, la monnaie est créée par les banques centrales. Cette création monétaire est garantie par des obligations souveraines qui sont, elles aussi, liées à la stabilité de l’ordre politique. Ces dernières sont, en effet, des gages sur la capacité d’un État à canaliser l’épargne… de monnaie… de ses citoyens et à extraire de la création de richesses des générations futures l’intérêt de ces mêmes dettes. La monnaie contemporaine est donc garantie par la monnaie future, dont elle assure la fécondité et la reproduction. Elle est un flux séminal permanent.

    Au reste, si l’État s’écroule, alors la monnaie et sa contrepartie, à savoir les dettes souveraines, sont annihilées. Cela peut prendre de multiples formes : guerre, révolution, hyperinflation, confiscation.

    La banque centrale est, sous cet angle d’approche, une manipulatrice d’illusions : elle transforme un état de confiance étatique (les dettes souveraines) en symboles monétaires fondés sur un état de confiance.

    Que penser de ces fluentes intuitions ? Faut-il s’abîmer dans le gouffre nihiliste de Nietzsche, selon lequel « Rien ne vaut rien. Il ne se passe jamais rien et cependant tout arrive. Mais cela est indifférent ». Ou, au contraire, faut-il s’abandonner aux convictions monétaires collectives ? Probablement. C’est l’envoûtement de la monnaie qui est, finalement, une résignation et une tutelle.

    Octobre 2016

    Les étés monétaires meurtriers

    Les mois d’été ne sont pas toujours rayonnants pour les monnaies. On se souvient du mois d’août 1971, avec l’engloutissement américain des accords de Bretton Woods, du décrochage de la livre sterling du SME en septembre 1992 et de son sabordage en juin 2016, sans compter les relents de la crise grecque dont le paroxysme fut atteint par la nécessité, imposée au Président de la BCE, qu’il ferait tout pour sauver l’euro, durant l’été 2012.

    Et maintenant, que va-t-il se passer ? J’ai la faiblesse de penser que le marché des changes est une base instable, mais probablement la meilleure expression de la force relative d’une économie. Les variations du cours de change reflètent et corrigent les excès qui leur ont donné naissance. La chute de la livre sterling est donc un phénomène autocorrecteur, tout en reflétant instantanément l’appauvrissement de l’économie britannique qu’elle va continuer à corriger.

    Juin 2016

    L’accord de Shanghai

    Depuis des trimestres, les milieux financiers américains bruissent de rumeurs d’une hausse des taux d’intérêt, dont le suspense est savamment entretenu par la Federal Reserve. Cette augmentation des taux n’est pas nécessaire, mais elle convoie une valeur informationnelle portant sur la normalisation du circuit monétaire américain. Cependant, le problème d’une hausse de taux est qu’elle pénalise les exportations américaines au travers d’un renchérissement du cours du dollar. Indirectement, cela favoriserait la capacité exportatrice de la Chine qui entretient une dévaluation progressive de sa propre devise, mais cela susciterait aussi un reflux d’investissement chinois au profit des États-Unis. Les États-Unis sont donc pris entre deux feux, à savoir la normalisation de leur politique monétaire qui entraînerait une appréciation du dollar et le souhait de ne pas subir cette même appréciation. C’est à ce niveau que se situe l’accord de Shanghai, commis lors d’un récent G7. Les Chinois se sont engagés à ne pas déprécier leur monnaie tandis que les Américains s’empêcheront de monter trop fortement leurs taux d’intérêt afin d’éviter des glissements de capitaux de la Chine vers les États-Unis. La Chine pourrait incidemment conserver l’image d’une monnaie stable nécessaire à sa crédibilité internationale.

    Bien sûr, on ne doit jamais exclure une dévaluation brutale de la devise chinoise, qui se transformerait en décrochage monétaire. Mais, ce jour-là, les Américains augmenteraient leurs droits à l’importation à due concurrence.

    Juin 2016

    Taux d’intérêt et illumination stellaire

    Bill Gross, un des meilleurs gestionnaires de fonds obligataires au monde, a récemment associé la politique de taux d’intérêt négatifs à une supernova, c’est-à-dire à la mort d’une étoile qui s’accompagne d’une augmentation fantastique et brève de sa luminosité. La métaphore céleste ramène au fait que les taux d’intérêt négatifs conduisent à une surévaluation de la valeur des obligations qui ne peut pas, sauf à penser à la perpétration de rendements négatifs, subsister.

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