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Arthur Quinn et le Loup de Fenris: Arthur Quinn et le Loup de Fenris
Arthur Quinn et le Loup de Fenris: Arthur Quinn et le Loup de Fenris
Arthur Quinn et le Loup de Fenris: Arthur Quinn et le Loup de Fenris
Livre électronique326 pages4 heures

Arthur Quinn et le Loup de Fenris: Arthur Quinn et le Loup de Fenris

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À propos de ce livre électronique

Arthur pense que la vie a repris son cours normal. Trois mois se sont écoulés depuis que ses amis et lui ont vaincu le dieu viking Loki et sauvé le monde, et depuis, tout est calme. Mais voilà qu’Arthur fait de nouveaux des rêves étranges: il rêve de dieux, de magie et d’un loup. Cela ne peut vouloir dire qu’une seule chose: Loki est de retour et seul Arthur peut l’arrêter. Alors que les jours s’écoulent, Arthur et ses amis se retrouvent dans une course contre le temps pour retrouver le dieu et l’empêcher de mettre son plan sinistre en marche.
LangueFrançais
Date de sortie30 sept. 2013
ISBN9782897333775
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    Aperçu du livre

    Arthur Quinn et le Loup de Fenris - Alan Early

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    Éloges pour Arthur Quinn et le Serpent-Monde

    Sélectionné pour le prix du Meilleur Livre Jeunesse lors des Bord Gáis Energy Irish Book Awards en 2011 et choisi pour être le livre phare du projet inédit « Les enfants sauvent Dublin » de Dublin, ville littéraire, en partenariat avec l’UNESCO.

    « Une création brillante… Un livre haletant et palpitant. »

    — Eoin Colfer, auteur d’Artemis Fowl

    « Un mélange intelligent entre le fantastique et la vie de tous les jours. C’est comme Harry Potter, à la sauce dublinoise. »

    — Irish Examiner

    « Un récit fascinant qui culmine jusqu’à sa finale épique dans les rues de Dublin… Ce livre sera à coup sûr un succès, et, dans le match à mort entre Potter, Jackson et Quinn, je donnerai mon vote pour le garçon en vert ! »

    — Inis Magazine

    « Un livre réellement superbe… avec des rebondissements surprenants dans l’intrigue, ce livre fut une lecture incroyable… un incontournable pour les amateurs de fantastique et de mythologie… tout simplement merveilleux. »

    — Mary Esther Judy, The Bookbag

    « Cette histoire originale et passionnante révèle habilement les ficelles qui relient le Dublin d’aujourd’hui à son passé viking plus sombre en redonnant vie à la mythologie nordique. Un succès infaillible auprès des amoureux des récits d’aventure. »

    — Bookfest

    « Un monde mystique où des personnages mythiques prennent vie, où le temps s’arrête, où l’inimaginable arrive, et où l’excitation est à pleine puissance du début à la fin. »

    — VOYA, Voices of Youth Advocates

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    Copyright © 2012 Alan Early

    Titre original anglais : Arthur Quinn and the Fenris Wolf

    Copyright © 2013 Éditions AdA Inc. pour la traduction française

    Cette publication est publiée en accord avec Mercier Press, Unit 3B, Oak House, Bessboro Rd., Blackrock, Cork, Ireland.

    Tous droits réservés. Aucune partie de ce livre ne peut être reproduite sous quelque forme que ce soit sans la permission écrite de l’éditeur, sauf dans le cas d’une critique littéraire.

    Éditeur : François Doucet

    Traduction : Sophie Beaume et Lauriane Crettenand

    Révision linguistique : Daniel Picard

    Correction d’épreuves : Nancy Coulombe, Carine Paradis

    Conception de la couverture : Matthieu Fortin

    Photo de la couverture : © Mercier Press

    Mise en pages : Sébastien Michaud

    ISBN papier 978-2-89733-375-1

    ISBN PDF numérique 978-2-89733-376-8

    ISBN ePub 978-2-89733-377-5

    Première impression : 2013

    Dépôt légal : 2013

    Bibliothèque et Archives nationales du Québec

    Bibliothèque Nationale du Canada

    Éditions AdA Inc.

    1385, boul. Lionel-Boulet

    Varennes, Québec, Canada, J3X 1P7

    Téléphone: 450-929-0296

    Télécopieur: 450-929-0220

    www.ada-inc.com

    info@ada-inc.com

    Diffusion

    Canada : Éditions AdA Inc.

    France : D.G. Diffusion

    Z.I. des Bogues

    31750 Escalquens — France

    Téléphone : 05.61.00.09.99

    Suisse : Transat — 23.42.77.40

    Belgique : D.G. Diffusion — 05.61.00.09.99

    Imprimé au Canada

    43599.png

    Participation de la SODEC.

    Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada (FLC) pour nos activités d’édition.

    Gouvernement du Québec — Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres — Gestion SODEC.

    Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

    Early, Alan

    [Arthur Quinn and the Fenris wolf. Français]

    Arthur Quinn et le Loup Fenrir

    (Les Chroniques du mensonge ; 2)

    Traduction de : Arthur Quinn and the Fenris Wolf.

    Pour les jeunes de 13 ans et plus.

    ISBN 978-2-89733-375-1

    I. Beaume, Sophie, 1968- . II. Titre. III. Titre : Arthur Quinn and the Fenris Wolf. Français.

    PZ23.E27Ara 2013 j823’.92 C2013-941804-0

    Conversion au format ePub par:

    Lab Urbain

    www.laburbain.com

    À mes parents, Luke et Ann, et à mon frère Paul. Je n’aurais pas pu écrire ces livres sans leur soutien constant.

    Prologue

    En Irlande, le dernier loup a été abattu il y a plus de 200 ans. Avant cela, ils erraient librement dans la campagne irlandaise. Ils dormaient et se cachaient le jour, et rôdaient sur les terres la nuit, se nourrissant de bétail et d’hommes trop faibles ou trop stupides pour leur échapper. Mais l’homme s’est défendu. Et, à la fin du XVIIIe siècle, tous les loups étaient éradiqués du sol irlandais.

    Alors, si quelqu’un avait erré à travers une quelconque forêt irlandaise au début du XXIe siècle, il aurait été surpris de trouver un loup en train de boire de l’eau d’un ruisseau.

    La lueur de la lune presque pleine suspendue au-dessus de la forêt mettait les grands arbres dénudés en relief. Le gel frais luisait sur le sol dur et couvert de mousse, et une fine couche de glace se formait au bord du ruisseau. Le loup était recouvert de fourrure grise, tachée de boue au niveau des pattes. C’était un jeune loup, pas plus grand qu’un labrador, mais dont les muscles des épaules étaient puissants et allongés. Ses muscles tressautaient alors qu’il buvait l’eau froide.

    Cela faisait maintenant trois nuits qu’il était seul. Il se dirigeait vers le nord, vers son foyer. Il n’y avait rien de mieux que de s’éloigner du reste de la meute une fois par an, pour un peu de temps en solitaire, pour réfléchir, pour chasser. Mais la nourriture se faisait rare dans cette partie du pays. Il avait dévoré un hérisson la première nuit, mais il n’avait rien trouvé depuis. Son estomac gargouilla douloureusement. Il ne buvait pas l’eau du ruisseau parce qu’il avait soif, mais pour remplir son estomac.

    Il était si reconnaissant d’avoir trouvé cette eau qu’il n’entendit ni ne sentit le loup de l’autre côté du ruisseau.

    Le second loup était incontestablement plus grand et plus imposant que le premier. Il n’avait pas l’air aussi affamé que le loup gris. Au contraire, il semblait robuste et bien nourri. Son pelage était d’un blond doré — brillant et épais —, et une bande noire courait le long de son dos. Il se tenait sur un rocher au bord du ruisseau. Il ne buvait pas et respirait à peine, regardant simplement le loup gris.

    La sensation de l’eau était agréable sur la langue du loup gris, bien qu’elle soit si froide qu’elle picotait les nerfs de ses dents. S’il continuait à faire aussi froid que ces dernières semaines, le ruisseau serait gelé dans une nuit ou deux. La glace, qui pour l’instant était confinée aux bords du ruisseau, allait se propager. Alors qu’il buvait, le loup étudia l’eau du ruisseau pour la première fois. Il remarqua les minces glaçons portés par le courant. Ils avaient dû tomber des branches d’arbres bordant la rivière un peu plus haut. Ce fut en regardant ces glaçons qu’il aperçut le reflet du loup doré.

    Sans même prendre le risque de lever la tête vers le loup de l’autre côté de la rivière, le loup gris s’enfuit à toute allure dans la direction opposée. Il venait de se mettre à couvert dans le sous-bois, sans pour autant ralentir, lorsqu’il entendit le loup doré le suivre, traversant le ruisseau d’un mouvement leste et agile. Le loup gris savait qu’il ne servirait à rien de se cacher. Si l’autre loup pouvait le sentir aussi bien que lui sentait son odeur, sa seule option était de le distancer. Il courut à travers les broussailles, plongeant la tête la première dans l’obscurité. Les ronces et les branches lui fouettaient le museau, accrochaient sa fourrure. Et, pendant tout ce temps, le loup doré le suivait.

    Alors qu’il s’enfonçait davantage dans la forêt, le loup gris reconnut certains repères : une pierre recouverte de mousse, une branche noueuse, un arbre qui avait été fendu par la foudre. Il était passé par ici seulement quelques minutes auparavant, alors qu’il cherchait le ruisseau. Il établit un plan en vitesse. S’il déviait de son cap assez rapidement, il pourrait peut-être tromper le loup doré et lui faire suivre la trace qu’il avait laissée en venant. Cela lui laisserait assez de temps pour s’échapper.

    Il prit une profonde inspiration et bifurqua à gauche aussi rapidement que possible. Il allait si vite désormais qu’il ne parvenait pas à entendre s’il s’était débarrassé de l’autre loup. Les muscles de ses pattes étaient en feu, lorsque, soudain, il aperçut une souche d’arbre renversée sur le côté. Elle était vide et assez grande pour qu’il s’y tapisse. Il rampa sur le ventre pour s’y faufiler, retint son souffle et écouta les bois autour de lui.

    Il n’entendit que le silence. Rien, pas même une brise faisant bruisser les feuilles mortes sur le sol. Un silence total.

    Le loup resta un instant tapi dans sa cachette à regarder la lune, jusqu’à ce qu’elle ait parcouru ce qu’il jugea être une bonne distance dans le ciel. Puis il sortit avec précaution.

    Tout à coup, quelque chose s’abattit sur lui, le retourna et le plaqua au sol. Il leva la tête : c’était le loup doré, qui grognait en retroussant les babines.

    Le loup gris se mit à se débattre, mais cela ne servait à rien. Soudain, il se passa une chose à laquelle le loup gris ne s’attendait pas. Une lumière verte émana des yeux de son ravisseur. Le rayonnement le couvrit tout entier, dissimulant l’animal. La luminosité fut un instant si puissante que le loup gris fut obligé de fermer les yeux, puis, comme par enchantement, l’éclair vert s’évanouit. Le loup doré avait disparu. Il y avait un homme à sa place, la main fermement serrée sur la gorge du loup. Il avait les cheveux blond platine et un long nez majestueux. Il arborait une barbe moderne, nettement coupée, et portait un costume trois pièces sous un manteau noir qui lui arrivait aux mollets.

    Terrifié, le loup gris jappa. En l’entendant ainsi gémir, l’homme se contenta de sourire. Il adressa au loup un large sourire qui montrait ses deux rangées de dents d’un blanc éclatant.

    — Qui je suis ? dit l’homme, comme s’il répondait aux gémissements du loup. Je suis le Dieu Farceur, le Dieu de la Malice, le Père du Mensonge. Je suis Loki.

    Il se pencha en avant, resserrant sa prise sur le loup.

    — Maintenant, c’est à ton tour de me répondre. Où sont les autres ?

    Chapitre 1

    — Où sont les autres ? demanda Arthur Quinn en revenant des toilettes.

    — Ils sont allés chercher à boire et à manger, répondit Joe, son père.

    La salle de quilles était très animée ; il y résonnait des bruits divers : des pièces qu’on mettait dans des machines à sous, des balles de flipper percu-tant de petites cloches, des machines de jeux vidéo qui bourdonnaient et ronronnaient, des quilles en train de tomber ou d’être remplacées dans les allées ; et par-dessus tout ce vacarme retentissait de la musique pop des années 1980. C’était dimanche soir, le dernier jour des vacances de Noël de Joe, qui les avait amenés ici pour un dernier cadeau avant que la besogne de janvier ne commence.

    Arthur passa sa main dans ses cheveux courts — il avait fait couper sa tignasse hirsute juste avant Noël — et il s’assit à côté de Joe, qui était en train de rentrer leurs noms dans le tableau d’affichage électronique. Arthur observa son reflet dans l’écran. Il avait les mêmes yeux bleu-vert que son père, mais il tenait ses taches de rousseur de sa mère. En pensant à elle, il baissa instinctivement les yeux vers le ruban doré noué à son poignet. Il lui avait appartenu. Avant qu’elle ne meure.

    À l’époque, il avait pensé que sa mort était ce qui pouvait lui arriver de pire. Mais depuis, il avait traversé beaucoup d’histoires folles. Il regarda Joe et se dit qu’il n’était pas le seul. À peine quelques mois plus tôt, son père avait été cruellement attaqué par le dieu nordique de la malice, Loki. Joe avait été grièvement blessé et, pendant un temps, Arthur ne savait même pas s’il allait survivre. Aujourd’hui encore, sa jambe droite n’avait pas totalement guéri, et il devait s’aider d’une canne pour se déplacer. À part cela, les choses reprenaient leur cours normal pour Joe. Il travaillait comme ingénieur en chef de l’équipe qui creusait le tunnel du métro de Dublin et supervisait l’important travail d’excavation sous la Liffey — et, ces derniers temps, tout s’était déroulé sans problème. Arthur était content pour lui.

    Bien sûr, Joe n’avait que des souvenirs lacunaires de son agresseur et il ne se doutait pas que c’était un dieu nordique. Mais à part Arthur et ses amis, Ash et Max, personne au monde n’était au courant de leur différend avec Loki. Le dieu les avait approchés en se faisant passer pour Will, un garçon rusé et avenant qui se révéla être l’une des formes que le Dieu Farceur était capable de revêtir. Il les avait trompés afin qu’ils l’aident à libérer le Jörmungand — un serpent volant géant qu’on connaissait également sous le nom de Serpent-Monde, et qui était l’aîné des enfants de Loki. Le plan du Dieu Farceur avait été d’utiliser le Jörmungand pour détruire le monde, et il y serait certainement parvenu sans l’intervention d’Arthur, ses amis et une armée ressuscitée de Vikings morts.

    — Les voilà, dit Joe en levant la tête du tableau des scores.

    Leurs voisins, Ash, Max et Stace Barry, étaient en train de revenir, les mains pleines de contenants de maïs soufflé, de hot-dogs dégoulinant de ketchup et de boissons. À 12 ans, Ash — diminutif d’Ashling — avait le même âge qu’Arthur. D’habitude, elle attachait ses cheveux auburn en queue de cheval, mais ce soir-là, ils étaient détachés et encadraient son visage. Stace avait 17 ans, et c’était sa dernière année de lycée avant de partir pour l’université. Elle ressemblait à Ash, mais en plus âgée. Max, leur jeune frère, était un garçon de sept ans très nerveux qui avait connu quelques mois difficiles. Arthur était content de voir qu’il était redevenu lui-même. Pendant leur affrontement avec Loki, Max avait été retenu en otage par le Dieu Farceur. Après cela, Max avait enduré de terribles cauchemars pendant des semaines. Il se réveillait en sueur, hurlant dans son lit, et seuls les câlins d’Ash pouvaient le rendormir. La journée, il était tendu et paranoïaque, et il avait peur de sortir tout seul de la maison. Néanmoins, au bout de quelque temps, voyant qu’il n’y avait plus aucun signe de Loki, il avait eu de moins en moins de cauchemars, jusqu’à ce qu’ils cessent enfin totalement. Max était presque redevenu le garçon qui, même lorsqu’Arthur venait à peine d’emménager, le pressait sans cesse pour qu’il joue avec lui au soccer, et ce, par tous les temps. Arthur, Ash et lui étaient les seuls à avoir été autorisés par Loki à garder en mémoire leur souvenir de son attaque dévastatrice sur Dublin. Bien que cela fasse désormais deux mois que cela s’était passé, Arthur savait que ses amis, comme lui, y pensaient souvent, même s’ils n’en parlaient que rarement.

    Arthur se força à ne plus y penser et se leva pour aider la famille Barry à porter leur collation.

    — Pourquoi cela a-t-il été aussi long ? gronda-t-il avec un sourire.

    Quelqu’un devait aller se remaquiller ! dit Ash en regardant sa sœur de travers.

    — C’était pas moi ! cria Max, qui, malgré sa bouche pleine de maïs soufflé, essayait de boire en même temps une gorgée de coca.

    — Vous ne pouvez pas m’en vouloir, dit Stace en tendant un hot-dog à Joe. Il y a de beaux garçons par ici…

    Elle inspecta la salle de quilles en battant des cils, puis elle se retourna vers Ash.

    — Ne t’inquiète pas, Ash. Tu comprendras un jour, quand tu t’intéresseras aux garçons.

    Ash rougit vivement. Elle jeta un œil vers Arthur en espérant qu’il n’ait rien remarqué. Mais il était trop occupé à aider Max à décharger ses bras remplis de boissons et de nourriture. Il leva la tête et surprit son regard.

    — Désolé, dit-il, je n’ai pas entendu. Tu as dit quelque chose ?

    — Non ! répondit Ash en vitesse avant que Stace n’intervienne. Rien du tout ! Alors, tout est prêt pour jouer ?

    — Tout est prêt ! s’exclama Joe en appuyant sur la touche Entrée une dernière fois sur le tableau. C’est toi qui commences, Max.

    ***

    Dans le quartier pavé de Smithfield, de l’autre côté de la ville, se trouvait l’Expérience Viking. C’était un village viking reconstitué, entouré d’un haut mur couvert de fresques représentant une vie antique et ses légendes, avec un ensemble de maisons en contreplaqué aux toits de chaume. Au milieu des ruelles et des rues, on trouvait même un marché et un petit pont qui passait au-dessus de douves peu profondes. L’attraction promettait aux visiteurs l’occasion de « Voir comment les Vikings vivaient dans le Dublin antique ! ».

    Ce dimanche soir, par un temps glacial, il était plus de 20 h, et le parc était donc fermé aux visiteurs. D’ailleurs, comme c’était la basse saison, l’attraction était fermée depuis la mi-novembre et n’allait rouvrir qu’à la fin du mois de février. Les jours d’ouverture, des comédiens jouaient le rôle des habitants du village, tandis que de vieux mannequins représentaient d’autres Vikings à la tâche dans les petites maisons. À l’exception près que ce n’étaient pas tous des mannequins.

    Après l’incident avec Loki, Arthur avait dû cacher presque 100 soldats vikings morts qui étaient revenus à la vie pour l’aider à vaincre le Jörmungand. Il avait eu l’idée de les faire entrer en douce dans l’Expérience Viking. Ici, ils pouvaient se mêler aux mannequins usés, et personne ne se poserait de questions sur leur visage sombre et tanné. C’était parfait. Les Vikings s’étaient tout de suite sentis chez eux. Tout en étant à la vue de tous, ils seraient bel et bien cachés. Du moment qu’ils ne bougeaient pas trop pendant qu’il y avait des visiteurs, ils pouvaient faire ce qu’ils voulaient la nuit. Et, cette nuit-là, ils avaient allumé un feu de camp au milieu du marché.

    L’armée avait été cachée sous terre pendant plus de 1 000 ans. Et, pourtant, ils avaient l’impression que quelques minutes seulement s’étaient écoulées entre leur mort silencieuse dans la caverne souterraine et le moment où ils s’étaient réveillés, au mois d’octobre précédent. Ils avaient donné leur vie pour protéger le monde — chacun avait pris une potion pour arrêter son cœur, pour qu’il se remette à battre si, ou quand, le Jörmungand tentait de s’échapper — et personne ne le saurait jamais.

    Bjorn, le chef des soldats et le second d’Arthur, était assis au plus près du feu sur un trône en papier mâché qu’ils avaient emprunté dans la salle des accessoires. Bien qu’ils soient morts et que le froid ne les dérange pas, Bjorn était heureux d’occuper la place d’honneur devant les flammes. Il était bon de prétendre avoir encore besoin d’un feu pour se réchauffer. Il regarda son armée autour de lui. Une poignée de ses hommes avait été détruite par le Jörmungand, mais la majorité des soldats avait survécu à cette bataille. Ils portaient tous les mêmes tuniques poussiéreuses qu’ils avaient revêtues le jour où on les avait envoyés pour garder la tanière du Serpent-Monde. Ils auraient pu les échanger contre des vêtements plus propres et plus confortables, mais ils ne le voulaient pas. Ils aimaient conserver ce lien avec le passé, avec leurs familles, leurs femmes et leurs enfants, qui étaient morts des siècles auparavant.

    Bjorn sourit en regardant ses hommes. Ils plaisantaient et riaient — bien que leurs rires soient en réalité des sons gutturaux et sifflants accompagnés de haussements d’épaules, leurs voix sèches ne pouvant émettre que des grognements. Quelques-uns essayaient même d’entonner les chants de leur terre natale avec des ébrouements aigus.

    Ils étaient heureux. Mais pour combien de temps ? Bjorn avait pensé qu’une fois que le Jörmungand serait vaincu, on leur accorderait enfin une mort paisible. Et, pourtant, ils étaient toujours là, toujours vivants dans ce lieu et dans ce temps étranges.

    Soudain, il fut parcouru d’un frisson.

    C’était inattendu. Il n’avait ressenti ni chaleur, ni froid, ni douleur depuis qu’il s’était éveillé, et pourtant il ne pouvait pas se tromper sur ce qu’il venait de se passer. Un frisson glacial était remonté le long de sa colonne vertébrale, du bas de son dos au haut de sa nuque.

    Un Viking assis tout près grogna d’un air interrogateur. Cela se traduisit grossièrement par : « Qu’est-ce que c’était ? » À voir l’expression inquiète sur les visages de tous ses camarades, Bjorn sut qu’ils avaient tous ressenti la même chose.

    — Je ne sais pas, grogna Bjorn pour lui répondre, mais je crains que des temps sombres n’arrivent.

    ***

    Dans une autre partie de la ville, à quelques kilomètres de la salle de quilles où la partie avançait joyeusement, quelque chose de tout aussi étrange se passa dans la chambre d’Arthur.

    Le silence était presque total dans la maison des Quinn. L’écran plat de la télévision au rez-de-chaussée était en veille, et le bourdonnement de sa petite lumière rouge était à peine audible. Le grand réfrigérateur de la cuisine vrombissait faiblement. Les chiffres du réveil que la mère d’Arthur avait offert à Joe quelques années plus tôt clignotaient doucement dans le noir. La lumière était allumée dans l’entrée pour dissuader les voleurs potentiels. Tout à coup, toutes ces choses et tous les autres objets électriques de la maison s’éteignirent en même temps ; toute l’électricité se déconnecta dans un rayon de trois kilomètres de la maison des Quinn, plongeant toute cette zone dans l’obscurité. Les téléphones portables s’éteignirent tout seuls, les baladeurs arrêtèrent de diffuser leur musique, les ordinateurs cessèrent de fonctionner. Même les voitures furent arrêtées sur place, leur système électronique tombant en panne simultanément.

    Il n’y avait qu’une seule lueur qui brillait faiblement dans toute la zone obscurcie, mais personne n’était là pour la voir. Elle était dans la chambre d’Arthur et émanait de sous son lit. C’était une lueur verte régulière qui palpitait, provenant d’un objet mystérieux : un marteau avec une tête de fer, courbé à son sommet. Il y avait des runes — des lettres antiques — gravées dans la tête du marteau, et une corde fine était nouée autour de la courte poignée. Arthur l’avait trouvé dans la tanière du Jörmungand avec les Vikings. Il s’en était servi pour vaincre Loki puis, incertain de ce que cet étrange objet était réellement ou de ce qu’il devait en faire, mais sûr qu’il allait lui être utile un jour prochain, il l’avait caché sous son lit. Et le marteau brillait désormais avec éclat.

    ***

    C’était au tour d’Arthur de jouer. Après le deuxième tour, Stace était en tête, ce qui la surprenait autant que les autres. Arthur s’avança sur l’allée — sous les encouragements de ses partenaires de jeu — et se concentra sur les quilles. Il plissa les yeux et se plaça correctement pour bien viser. Lorsqu’il fut satisfait, il fit deux pas en arrière.

    Avec un dernier regard pour s’assurer qu’il visait bien le centre, il avança en courant, s’agenouillant légèrement, le bras en arrière pour lancer sa boule. Il balança le bras vers l’avant, mais, alors que ses doigts sortaient des trous, une douleur vive et intense se mit à brûler dans sa poitrine. La boule de quilles frappa violemment le sol brillant, avança un instant en oscillant, avant de glisser dans l’un des dalots, alors qu’Arthur agrippait sa poitrine et tombait en arrière sur le sol.

    La douleur partit aussi vite qu’elle était arrivée. Arthur regarda la boule rouler dans le dalot vers les quilles. Sauf que ce n’étaient plus des quilles. C’étaient des dents : d’énormes cro-chets tranchants comme des lames de rasoir. Il les reconnut tout de suite. Une langue fourchue darda entre eux, des gouttes visqueuses de bave atterrissant sur le sol ciré. C’était la gueule du Jörmungand ! Il était revenu. D’une manière ou d’une autre, il était revenu et faisait retentir son terrible sifflement.

    Arthur recula vivement en rampant, paniqué, regardant autour de lui pour voir si quelqu’un d’autre avait remarqué la transformation. Mais tout le monde agissait normalement, riait, jouait et parlait avec ses amis. Lorsqu’il se retourna de nouveau vers la piste, la gueule avait disparu. C’était de nouveau un simple ensemble de quilles blanches, rien de plus. Mais les mots peints au-dessus des quilles avaient changé. Le panneau disant « ON S’AMUSE AU BOWLING ! » en couleurs vives n’était plus le même. Les lettres avaient disparu désormais, remplacées par des lignes et des hachures transversales. Il ne pouvait pas les lire, mais il savait exactement ce que c’était. Des runes.

    Il se mit debout et regarda autour

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