On a juste une vie à vivre
Par Marie-Eve Roy
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À propos de ce livre électronique
Un événement tragique fait basculer mon univers, ce qui me pousse à me questionner. Est-ce vraiment la vie dont j'ai toujours rêvé ? Où ai-je bien pu ranger mes ambitions de jeunesse ? Autour d'un énième café, au petit matin, mes copines et moi faisons un pacte : celui de profiter de chaque moment, de vivre chaque jour comme si c'était le dernier. Carpe Diem…
Me voilà donc en route vers Toronto, armée de mes cahiers de dessin et de ma bonne humeur légendaire, prête à me tailler une place dans le monde de la mode. Dès mon arrivée, j'élabore un plan de match pour devenir Gaëlle, la créatrice bientôt célèbre !
Mon seul problème : je ne connais personne dans cette nouvelle ville. Ce à quoi je vais remédier rapidement en trouvant un appartement à partager avec cinq (!) colocs. Heureusement qu'il existe les take-out chinois pour aider mon moral ! Et les beaux grands garçons bien bâtis aux yeux perçants pour aider ma libido… Mais je m'égare !
Vous avez ma parole : aucune distraction ne m'empêchera d'atteindre mon but !
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Aperçu du livre
On a juste une vie à vivre - Marie-Eve Roy
Chaque vendredi, c’est la même histoire. Souper entre filles dans mon appartement situé en plein cœur du Vieux-Québec, avec des pâtes au menu et beaucoup de vin en accompagnement. Nous en profitons pour déblatérer sur la semaine complètement folle que nous venons de passer, sur nos projets pour le week-end, sur les garçons avec qui nous envisageons de sortir, ou sur les endroits où nous voulons magasiner. En général, les réponses sont toujours les mêmes, mais les filles sont comme ça. Elles aiment parler sans arrêt de tout et de rien. Et, sous l’influence de l’alcool, elles parlent surtout de rien : « Ton coloc est trop sexy, cette veste ne te va pas du tout, ce vin est fantastique, aimez-vous ma nouvelle coiffure ?… » En voulez-vous, des sujets d’intérêt national ?
C’est seulement plusieurs heures plus tard, quand nous sommes à court d’alcool et passablement ivres, que nous nous dirigeons vers notre petit bar de chansonniers préféré. Nous y passons le reste de la soirée, jusqu’à ce qu’on nous jette dehors à trois heures et quelques du matin, parfois accompagnées, filant la plupart du temps vers le Ashton le plus près pour une poutine d’avant dodo.
Ce vendredi est comme tous les autres, c’est-à-dire qu’après avoir fini de souper, nous nous préparons avant de sortir tout en continuant de boire tranquillement. Toutefois, pour ma part, ce vendredi coïncide avec la fin des cours au cégep. Étant enseignante, j’ai terminé ma session et je suis officiellement en vacances pour les deux prochains mois et demi. J’ai de quoi célébrer !
Je suis la première à aller me changer, puisque mes habits de travail, plutôt classiques, jureraient beaucoup trop dans le bar où nous allons. J’enfile à la place un jeans moulant qui met en valeur ma taille de guêpe ainsi qu’une tunique turquoise, tout aussi ajustée, qui fait abusivement ressortir mes yeux bleus. Je complète mon ensemble avec une paire de souliers plats dorés, histoire de pouvoir danser sans trébucher. J’ai toujours aimé la mode, les vêtements et, surtout, les chaussures. Depuis que je suis petite, je m’amuse à agencer mes tenues avec différents accessoires, et j’ai dans ma garde-robe une quantité honteuse de souliers de toutes sortes. J’ignore pourquoi la gent féminine est si obsédée par cela, mais cette attirance naturelle n’en est pas moins incontestable. Peut-être que, comparativement aux hommes qui passent dans nos vies, nos souliers, eux, ne nous déçoivent jamais. Ou presque…
Je brosse mes longs cheveux brun pâle et prends soin de bien en lisser les extrémités avec mon fer plat. Un soupçon de mascara supplémentaire et je termine avec un peu de gloss sur les lèvres. En regardant mon reflet dans le miroir, je n’ai d’autre choix que de me trouver très sexy. J’ai toujours été plutôt jolie mais, apparemment, la fin de la vingtaine, mes vingt-huit ans pour être plus précise, me va à merveille. Je suis aussi mince qu’avant, mais mes courbes se sont un peu arrondies au cours des dernières années. Ça me donne un décolleté d’enfer dans lequel les garçons n’hésitent jamais à plonger les yeux. Ce qui, je dois l’avouer, est excellent pour l’estime de soi. Sur cette pensée, et avec un sourire aux lèvres, je tourne les talons pour rejoindre mes amies, un verre de vin à la main, évidemment.
Annabelle est déjà prête, vêtue d’une simple robe en denim bleu foncé et les cheveux en un chignon très haut. Naturelle, simple et jolie comme toujours. Quant à Joëlle, avec son éternel look hippie, elle n’a même pas pris la peine de retoucher son maquillage plutôt inexistant. Seule une mince couche de fond de teint a pour mission de couvrir les quelques marques laissées par une vilaine acné juvénile datant de l’adolescence.
Il ne reste qu’à attendre Adeline, et ça promet d’être long. Très long. C’est de loin la plus coquette du groupe. Avec son mètre soixante, elle est plutôt petite et un peu plus ronde que moi, et très soignée de sa personne. Elle aussi adore la mode, et elle ne néglige aucun détail quant à son look. Ses bijoux s’agencent avec son ombre à paupières, qui elle a été choisie pour faire ressortir la couleur de ses chaussures, etc.
Une autre bouteille de vin plus tard, notre amie est enfin prête. Tout ce temps pour porter les mêmes vêtements qu’à son arrivée à l’appartement, soit un jeans pâle et un haut noir ajusté. Les boucles naturelles que font ses cheveux sont absolument sublimes, et je l’envie au plus haut point depuis le jour où je l’ai connue, moi qui ai toujours besoin de mon fer à lisser. La demi-heure où elle s’est enfermée dans la salle de bain lui a donc servi à refaire son maquillage. Ombre à paupières foncée, blush, mascara, rouge à lèvres ; elle n’a rien épargné. Et voilà, le quatuor est prêt ! Tant mieux, car nous sommes à court d’alcool.
Après un pipi dans le stationnement pour Adeline et une cheville tordue à cause des talons hauts que porte Annabelle, nous voici enfin parvenues à notre lieu de débauche fétiche. Comme chaque fois que nous mettons un pied dans ce bar, la fête bat son plein.
Le chansonnier a entamé sa soirée depuis un bon moment déjà, si bien que le plancher vibre sous la foule de fêtards déchaînés qui dansent comme si leur vie en dépendait. Tout le monde connaît les paroles de l’air qui joue en ce moment, Cœur de loup de Philippe Lafontaine. Ce morceau est un véritable classique des bars québécois. Mais allez savoir pourquoi, puisque le chanteur en question est belge ! Personne n’a jamais dit que c’était logique. C’est comme ça, un point c’est tout. D’ailleurs, Joe Dassin aussi est populaire dans ce bar. Ah ! les Québécois !
L’endroit est plein à craquer. Heureusement, nous sommes des habituées. Étape numéro un : nous faufiler à travers la foule en délire jusqu’au bar près de la scène. Comme nous sommes de bonnes clientes, en nous voyant, le serveur se précipite vers nous afin de nous servir ce délicieux nectar qu’on nomme bière.
— Ce sera comme d’habitude, mesdemoiselles ?
— Oui, Patrick ! Deux pichets pour commencer. Et c’est ma tournée !
— Parfait, Gaëlle, je reviens tout de suite, me dit-il en me faisant un clin d’œil.
Dans la vie, on peut dire qu’une personne a un problème d’alcool quand elle boit systématiquement plusieurs jours par semaine. On peut aussi dire qu’elle a vraiment un gros problème de consommation quand elle achète de l’alcool plutôt que de la nourriture (comportement typiquement étudiant qui, en général, se corrige de lui-même lors de l’entrée sur le merveilleux marché du travail). Et une personne est carrément alcoolique quand tous les serveurs du bar l’appellent par son prénom. Évidemment, c’est à cette étape que je suis rendue. Je dois trop fréquenter le cégep et ses étudiants !
Quand nous sortons, je suis toujours la première à payer la tournée, car je suis celle qui a le meilleur emploi du groupe, après Adeline. J’ai terminé mes études en littérature il y a deux ans, à l’Université Laval, et j’enseigne maintenant au Cégep de Sainte-Foy. Je n’ai pas encore une tâche complète, mais je donne quand même deux cours par session, en plus d’en partager un avec un autre enseignant. Je suis donc loin d’être mal prise, d’autant plus que j’habite en colocation avec Annabelle, ce qui réduit de moitié les dépenses relatives au logement. Ou plutôt du tiers, puisque je dois souvent lui avancer de l’argent…
À ce jour, Annabelle en est à sa troisième réorientation de carrière, alors elle passe le plus clair de son temps à étudier. Et, quand il lui en reste un peu après nos sorties du week-end, elle travaille à temps partiel dans une boutique de vêtements à la Place Laurier. Décidément, notre groupe, Joëlle mise à part, a une légère obsession des tissus divers : tops, jeans, jupes, robes, nous en sommes complètement folles.
Dans notre appartement, Annabelle et moi formons toute une équipe. Moi, super désorganisée, toujours en retard partout et qui oublierais ma tête si elle n’était pas prise sur mes épaules, mais qui me rends néanmoins au cégep chaque matin pour donner des cours, pour corriger des travaux ou pour répondre aux questions des étudiants. Quant à Annabelle, elle est structurée comme personne et un peu obsessive-compulsive quand il s’agit de la propreté des lieux ou du respect des horaires, mais elle est toujours à errer dans l’appartement en pyjama entre deux travaux à remettre. Ça doit être mon côté artistique qui prend le dessus sur le reste de ma personnalité pour que je sois si peu à mon affaire, tandis qu’Annabelle a certainement hérité du caractère légèrement névrosé de sa mère. Quoi qu’il en soit, il y a des avantages à vivre avec quelqu’un qui fait sans cesse le ménage.
Le reste de notre groupe d’amies n’est guère mieux. Adeline, jeune avocate prometteuse, vient à peine de passer son barreau. Elle habite à Sillery, le quartier riche de Québec, dans une maison qu’elle a héritée de sa grand-mère avant même d’avoir terminé ses études en droit. Écologiste de nature, la conscience sociale très développée, Joëlle ne rate jamais une occasion de nous faire la morale, parce que, je cite : « Ceci peut être récupéré, cela peut être réutilisé et cette séance de magasinage est inutile. » Sans oublier ses sermons sur la consommation responsable ! Et on ne parle pas d’alcool, précisons-le. Selon elle, nous possédons déjà tout ce dont nous avons besoin. Quelle rabat-joie !
Même si à vue de nez nous avons l’air d’une bande plutôt hétéroclite, de solides liens nous unissent. Nous nous connaissons depuis le début du cégep et nous avons partagé, au fil des années, toutes nos joies et nos peines.
Nos deux pichets étant vides, Adeline en commande deux autres pendant que nous dansons comme des folles en nous inventant des chorégraphies à mesure que le chansonnier fredonne ses mélodies, telles que Pleurs dans la pluie de Mario Pelchat et Heavy Metal des Cowboys fringants. C’est assurément ça, la vie ! Quatre amies, célibataires, dans la vingtaine, sans aucun souci autre que travailler, magasiner et faire la fête. Quoi demander de plus ? Des hommes ? Peut-être. Ou pas.
Comme toujours, nous avons l’impression d’avoir à peine eu le temps de cligner des yeux que notre montre affiche déjà l’heure tant redoutée : deux heures quarante-cinq. La soirée du chansonnier est presque finie, et il annonce la fermeture imminente du bar avant d’entamer sa dernière chanson.
— Last call, les filles, nous rappelle notre gentil serveur.
— Un autre pichet, crient en chœur les joyeuses luronnes en état d’ébriété que nous sommes.
Même les chansons destinées à inviter poliment les gens à rentrer chez eux, telles que Walking on Sunshine, ne nous refroidissent pas. Malgré le last call de Patrick, nous continuons à chanter, à danser et à vider notre énième pichet de bière pendant qu’une bande de garçons, voyant la fin de la soirée arriver, décident de toute évidence qu’ils ne veulent pas la terminer seuls.
— Alors, les filles, vous passez un bon moment ? dit le plus grand du groupe en s’approchant de nous.
— Oui, et, idéalement, on ne veut pas se le faire gâcher, répond sans aucun tact notre chère Joëlle.
Ai-je oublié de mentionner qu’elle préfère les filles ? Évidemment, ce n’est pas un problème pour nous, et nous adorons notre amie. Par contre, ce qui nous agace un peu, c’est qu’elle fait souvent fuir les garçons avec ses répliques cinglantes. La plupart du temps, c’est très drôle, mais, d’autres fois, l’une d’entre nous serait bien partie avec l’un d’eux afin d’assouvir ses bas instincts le temps d’une nuit. Apparemment, cette nuit est l’une de ces nuits.
— Nous passons un excellent moment, ne manque plus qu’un peu de testostérone au menu, rétorque Adeline d’une voix qui se veut aguicheuse, mais qui en réalité est rauque d’avoir trop bu et chanté.
Le garçon fait un signe de tête à ses trois amis qui patientent derrière. C’est le signal, j’imagine, pour leur dire que tonight is the night. Adeline flirte déjà sans aucune pudeur avec le grand garçon aux cheveux noirs, tandis que les trois autres s’approchent rapidement de nous, les yeux remplis d’espoir. Malheureusement pour eux, ni Annabelle ni moi et encore moins Joëlle ne sommes intéressées. Leur ami sera le seul chanceux de la soirée.
— Il est trois heures, on ferme. Allez, on se dépêche, intervient (encore !) le barman.
— Oui, m’sieur ! On finit notre bière et on part, que je lui rétorque.
— Ah, c’est toujours la même histoire avec vous. Vous arrivez trop tard et vous ne voulez jamais repartir, répond notre ami Patrick avec un sourire en coin assez craquant, il faut bien l’avouer.
Mais les barmen, c’est comme les colocs masculins, on n’y touche pas ! Parce qu’après, tout devient compliqué et on ne réussit plus à obtenir un service adéquat, dans le cas des barmen, ou une cohabitation saine, dans le cas des colocs (comprendre ici être encore capable d’aller aux toilettes en bobettes le matin sans que cela cause de malaise). Croyez-moi sur parole pour les deux situations : been there, done that !
Patrick nous laisse toujours cinq minutes de plus qu’aux autres. Un cinq minutes pour Annabelle, Joëlle et moi à tenter de repousser les avances absolument non subtiles et dégradantes des amis (laids) du garçon (vraiment pas si beau) qui s’en donne maintenant à cœur joie dans la bouche d’Adeline.
— OK, c’est assez, je m’en vais ! lance soudain Joëlle.
— Bien d’accord, que je réponds. Adeline, bouge-toi, c’est l’heure.
Entre deux baisers bien trop indécents pour avoir lieu dans un endroit public, Adeline réussit à nous répondre, presque avec l’écume au bord des lèvres :
— Ça va, les filles, allez-y. Je vais rentrer avec Dan.
— Adeline, tu oublies que c’est toi qui as la voiture, que je lui rappelle.
— Arkkkkk ! éructe-t-elle en continuant d’embrasser ledit Dan et de lui prendre le derrière à pleines mains.
— Bon, ça va. On va rentrer en bus, les filles et moi. Tu devrais en faire autant, d’ailleurs, tu as bien trop bu pour conduire, lui dis-je en faisant signe aux autres que notre lift nous laisse tomber pour un gars. Encore !
— Cesse de me faire la morale, je sais quand j’ai trop bu ou non, hurle-t-elle en nous regardant quitter le bar.
Comme d’habitude, ça ne vaut pas la peine d’essayer de la raisonner. Nous voilà donc laissées à nous-mêmes, obligées d’aller continuer la soirée au McDo de la rue Saint-Jean pour déguster un trio McCroquettes avec sauce BBQ et poutine. Rien de tel après une nuit arrosée ! Et puis, nous avons besoin de forces pour marcher les trois kilomètres qui nous séparent de notre appartement et de nos si moelleux et confortables lits. Pourquoi Adeline est-elle celle qui nous fausse le plus souvent compagnie, alors que c’est elle qui possède une voiture ?
C’est avec un mal de tête épouvantable que je me réveille en ce superbe samedi matin ensoleillé. Je jette un œil à mon réveil : neuf heures trente. Je me lève tant bien que mal, après à peine quatre heures de sommeil, et me dirige vers la salle de bain pour prendre deux Advil et un grand verre d’eau.
— Plus jamais je ne boirai, que je me mens à moi-même, comme je le fais presque chaque semaine depuis des années.
— Je ne te crois pas, réplique du tac au tac ma coloc qui m’a entendue parler toute seule, tout en rampant hors de son lit dans un état qui est, si cela est physiquement possible, encore plus lamentable que le mien.
Les soirées, c’est bien. Mais les lendemains sont trop souvent difficiles. Heureusement, pour régler ça, il y a MasterCard.
— Où est-ce qu’on va magasiner cet après-midi ? demande soudain Annabelle.
— J’irais bien faire un tour à la Place Laurier pour acheter de nouveaux jeans, lui dis-je.
— Ça me va. Comme ça, je pourrai faire un saut au travail pour consulter mon horaire de la semaine prochaine.
— Tu viens avec nous, Joëlle ? que je crie à notre invitée encore endormie sur le sofa.
— Mmmm, pas besoin de jeans. Cette surconsommation… totalement irresponsable…, marmonne-t-elle avant de se rendormir.
On s’en doutait bien. Au moins, son état ne lui permet pas trop de nous faire la morale à ce sujet, ce matin.
Annabelle et moi entreprenons de préparer le déjeuner pour nous trois : œufs, bacon, etc., en attendant le fidèle coup de fil d’Adeline, qui ne manque jamais de téléphoner dès qu’elle se libère de ses amants pour tout nous raconter. Et quand je dis tout…
Joëlle réussit à s’extirper du sofa pour venir nous rejoindre, attirée par l’odeur alléchante du bacon. Nous mangeons en rigolant à propos de la veille, de notre repas au McDo, de notre retour à pied avec Annabelle en talons hauts, et de notre réveil difficile. Puis, nous faisons un peu de vaisselle, celle de ce matin et celle de notre souper d’hier. Il ne nous reste qu’à prendre nos douches et nous serons comme neuves, prêtes à entamer notre journée.
Vers midi, Joëlle repart chez elle pour nous laisser aller surconsommer en paix. Fait étrange, je crois que c’est la première fois qu’elle s’en va avant qu’Adeline ne téléphone. En général, nous nous marrons ensemble une bonne demi-heure en écoutant ses histoires rocambolesques.
— Bah, elle me racontera plus tard. Elle n’y manque jamais, même si elle sait que d’entendre parler de pénis me répugne. Ça devait être un bon coup, en tout cas, blague Joëlle avant de quitter notre appartement.
Treize heures. Annabelle et moi décidons de partir sans notre amie. Si nous voulons avoir le temps de faire les boutiques, c’est maintenant ou jamais.
— Nous ne pouvons pas toujours attendre après Adeline, soutient ma coloc.
— Je sais, mais c’est elle qui voulait absolument aller s’acheter de nouveaux souliers pour le mariage de son frère, le mois prochain.
— Appelle-la sur son cellulaire et dis-lui de nous rejoindre là-bas. Si ça se trouve, elle est encore nue, avec un mal de tête, dans le lit d’un étranger qu’elle n’a aucun souvenir d’avoir rencontré. Comment peut-on coucher avec quelqu’un et ne pas être foutu de se souvenir de son nom le lendemain ?
Annabelle, notre petite prude ! Elle parle beaucoup, mais, quand vient le temps d’agir, elle rebrousse chemin plus souvent qu’à son tour. Pour elle, embrasser un étranger ne se fait pas avant d’avoir mémorisé au moins son nom, ce qu’il fait dans la vie, et de s’être assurée qu’aucune fille ne l’attend à la maison. Facile pour quelqu’un qui a une mémoire d’éléphant, plus difficile pour le commun des mortels ! Pfff !
Une sonnerie, deux, trois. C’est donc à la boîte vocale que je parlerai. Je déteste ces engins, d’où mon utilisation abusive des textos. Pour moi, le téléphone est à utiliser en cas d’urgence seulement.
« Adeline, c’est Gaëlle. Nous t’attendons depuis des heures pour aller faire les boutiques, alors nous partons sans toi. Ton Dan doit être un véritable dieu du sexe pour que tu consentes à rater une séance de magasinage. Bref, si tu veux te joindre à nous plus tard, texte-moi. »
Dix-sept heures trente. Annabelle et moi sommes de retour à la maison, les bras chargés de paquets, excitées à l’idée de déballer et de réessayer le tout. J’ai trouvé le jeans que je cherchais, un Guess noir très, très serré, que j’ai agencé avec un tas de nouveaux tops. Quant à Annabelle, elle a dévalisé le comptoir des cosmétiques du Body Shop, en plus d’assortir son maquillage neuf à… un tas de nouveaux tops. Nous sommes sans contredit des accros du magasinage ! Vive les cartes de crédit !
Mais d’abord, l’heure est venue de manger les délicieux sushis que nous avons rapportés. Accompagnés d’une bouteille de riesling, évidemment ! Encore une fois, une réflexion d’alcoolique finie : pour se remettre d’un lendemain de veille pénible, rien de mieux que de boire de nouveau ! Pourquoi s’en priver, de toute façon, puisque ça fonctionne à merveille ?
Pendant que j’ouvre la bouteille, Annabelle remarque qu’il n’y a aucun message sur le répondeur. Au même moment, je prends conscience que mon cellulaire n’a pas vibré de la journée. Qu’est-ce qui se passe avec Adeline ? Est-ce qu’on devrait s’inquiéter ? Elle n’a jamais raté une séance de magasinage ni un souper sushis au cours des sept dernières années.
— Je vais tenter de joindre Adeline, que j’explique à Annabelle pendant qu’elle nous verse du vin.
— OK, mais ne la laisse pas te raconter sa nuit torride. Les sushis attendent et ils vont refroidir.
— Très drôle. Mais non, t’inquiète, elle va se faire un plaisir de venir nous rebattre les oreilles de ça ce soir !
Une sonnerie, deux, trois… Finalement, c’est la mère d’Adeline qui me répond.
— Madame Vigneault, quel honneur ! Je ne savais pas que vous deviez rendre visite à Adeline ce week-end. Ça explique pourquoi elle ne nous a pas donné de nouvelles de la journée.
— Gaëlle, bonjour. En fait, notre visite n’était pas au programme… Hum… Nous avons eu un appel de la police, la nuit dernière… Écoute… Adeline a eu un accident de voiture. Je suis désolée de te l’apprendre, mais elle… elle n’a pas survécu.
