Insight: Acte II : Le Passeur

Par Frédéric Tort

Alexandre Vicerain, 30 ans, étouffé par le poids d’une vie professionnelle qu’il déteste, est un auteur frustré qui ne parvient pas à assouvir sa passion pour l’écriture. Chaque fois qu’il essaye de coucher un mot sur le papier, il est saisi d’une terreur viscérale qui le paralyse et le plonge peu à peu dans une dépression profonde.
Afin de lui sauver la mise et libérer son monde intérieur de l’emprise de trois mystérieux dictateurs, Alexis, son inconscient, va risquer le tout pour le tout, au péril de sa propre intégrité. Au gré de maintes aventures, durant lesquelles il va rencontrer des personnages exceptionnels, il va tenter d’aider Alexandre à enfin embrasser sa liberté.
Deux trames narrées en parallèle qui nous racontent l’histoire d’une quête universelle : celle du bonheur.

« La liberté est un choix qui peut coûter très cher, mais qui peut également vous convoyer vers des endroits extraordinaires où règnent la fantaisie et l’imprévisible. »

• Langue: Français
• Éditeur: Éditions Hélène Jacob
• Date de sortie: 30 oct. 2023
• ISBN: 9782370117434

Frédéric Tort

Bien que né au siècle dernier, Frédéric Tort a toujours su rester jeune.Après avoir survécu à quelques années de petits boulots dérisoires, il s’est lancé dans une carrière de réalisateur/producteur audiovisuel qu’il poursuit encore aujourd’hui.Depuis toujours passionné de littérature, ce n’est qu’à l’aube de ses 45 ans qu’il écrit son premier roman. Il y a toujours dans ses créations cette urgence de réveiller un sentiment de plaisir dans le cœur de ses lecteurs. Une intrigue prenante, pour le transporter, un rythme calculé pour le faire basculer dans une fantaisie créée et matérialisée par un imaginaire qui lui est propre. Une envie également de pousser son public sur des pistes de réflexion, de le faire réagir sur des points de la réalité qui lui sont sensibles.Qui ne se rappelle pas ses premières lectures ? Celles de Frédéric Tort ont été une succession d’aventures inimaginables, inconcevables, d’intrigues palpitantes, de retournements de situation, de voyages autour de la Terre, au centre de la Terre, sur la Lune ! L’envie que le lecteur reçoive ce plaisir est sa motivation première. L’irrésistible attrait de l’histoire qui nous fait tourner page après page.

Aperçu du livre

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INSIGHT

Acte II

Le Passeur

Frédéric Tort

Published by Éditions Hélène Jacob at Smashwords

Copyright 2023 Éditions Hélène Jacob

Smashwords Edition, License Notes

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© Éditions Hélène Jacob, 2023. Collection Fantasy. Tous droits réservés.

ISBN : 978-2-37011-743-4

Il n’est point de bonheur sans liberté, ni de liberté sans courage.

Périclès

Précédemment…

Dans le premier acte de la présente histoire, nous avons fait la connaissance d’Alexandre : un écrivain frustré, dont la créativité pourtant très féconde dans sa petite jeunesse est maintenant complètement bloquée par des démons intérieurs puissants.

Lors de la soirée fort alcoolisée célébrant son trentième anniversaire, il fait part à sa femme, Mélanie, de son envie de renouer avec l’écriture. Fortement préoccupée par cette soudaine déclaration et par peur de revivre les affres qui ont mené son mari au bord du suicide, dix ans auparavant, elle lui propose un compromis. Alexandre pourrait reprendre la plume s’il acceptait de suivre une thérapie avec le docteur Lefol, un psychiatre dont les méthodes non orthodoxes ne vont pas convaincre le jeune homme.

Dans sa lutte quotidienne pour renouer avec sa vieille et obsédante passion, il amorce une lente et inévitable descente aux enfers. Il est maintenant au pied du mur de son existence et doit choisir son avenir.

Pendant ce temps, Alexis, l’inconscient de l’écrivain, également nommé « le Passeur », reçoit un mystérieux papyrus des mains d’un résistant moribond qui va éveiller en lui le désir de se battre pour la liberté de son Amphitryon.

Traînant ses propres démons comme une ombre, il décide de tout tenter pour retrouver le Maître, qu’il a perdu dans sa jeunesse, et récupérer sa véritable place aux commandes d’Encéphalon, le monde intérieur d’Alexandre. Pour cela, il va devoir déloger la Triade, trois dictateurs qui mènent le ministère d’une main de fer, depuis son enfance. Sa stratégie est simple : mettre en œuvre toute une série de provocations publiques, afin de rallier à sa cause le plus de pensées possible. Ensuite, lorsque leur nombre sera suffisant – et avec l’aide de la mythique résistance –, il renversera le pouvoir et reprendra son siège légitime.

Les choses vont plutôt bon train jusqu’à ce qu’apparaisse monsieur Angoisse, le nouveau directeur du SSS – Services Secrets du Subconscient –, dont la méchanceté et l’habileté semblent absolues. Le combat d’Alexis est presque impossible. En plus de monsieur Angoisse, il doit fuir la Bête, sorte d’entité obscure se nourrissant des insécurités qui le hantent, depuis ce jour fatidique où il a perdu le Maître…

Bienvenue, ô lecteur impénitent.

L’appel impérieux et irrésistible de la curiosité a rossé la paresse. Cette histoire d’inconscience vous intrigue, résonne peut-être au plus profond de votre être comme une vérité ancienne. Un trésor enfoui sous le couvert de la bienséance et d’une éducation impartiale administrée depuis le plus jeune âge. Vous désirez cette liberté, ce bonheur auquel aspire Alexandre avec tant de ferveur.

Mais la liberté n’est pas aisément pourchassée. Elle est un choix qui peut coûter très cher, mais qui peut également vous convoyer vers des endroits extraordinaires où règnent la fantaisie et l’imprévisible. Où la vie rêvée devient une vie de rêve.

Toute odyssée fricotant avec l’imaginaire répond à certaines règles. À certains concepts universels qui sont bien trop souvent méconnus de vous autres, mortels impénitents. Il n’est pas de conscient sans inconscient. Ces deux réalités coexistent sur le plan céleste.

Bien des Passeurs sont dépourvus de leur privilège de meneur. Celui de notre protagoniste en est un bel exemple. Alexandre a ceci de particulier que c’est un être brisé. Voyez-vous, son monde intérieur fut jadis pris en otage par un trio de dictateurs nommé « la Triade ». Depuis cette infortunée machination, Alexis erre comme une âme en peine qui aurait perdu l’étoile de son destin.

Nyx, le nain boursicoteur de rêves.

1 – Le rite du flûton

Alexis venait tout juste de souffler sa septième bougie. Comme tous les jeunes gens de son âge, il aurait dû emprunter le cursus scolaire classique, mais un tout autre chemin avait été tracé pour lui. Une destinée à laquelle il ne pouvait échapper. Par une belle nuit d’été, le quarantième jour suivant son anniversaire, pour être plus exact, il fut tiré de son sommeil par un être qu’il n’avait jamais rencontré de son vivant. Sa physionomie élancée et la matière de ses vêtements étaient d’une élégance absente du monde d’Encéphalon. Il semblait d’un certain âge et pourtant sa figure, dépourvue de nez et d’oreilles, affichait une sorte de jeunesse éternelle. Seuls ses yeux trahissaient une grande expérience, comme une sagesse réconfortante.

— Je suis Akok, se présenta-t-il. Racoleur de l’école des Passeurs et garant de la flamme d’équinoxe qui me permet de contrôler la vibration céleste. N’aie aucune crainte, mon enfant, je suis ici pour te guider.

Alexis dévisageait ce personnage comme s’il sortait de l’un de ses rêves. Il clignait des yeux et doutait de sa réalité.

— Ta destinée appelle, ton devoir est de me suivre prestement, nous n’avons que peu de temps.

Les parents d’Alexis entrèrent alors dans la chambre. Ils portaient une valise qu’ils déposèrent au pied du lit.

— Pater ! Mater ! s’exclama Alexis. Qu’est-ce que tout cela signifie ?

Akok se retourna vers les nouveaux venus. Malgré la finesse de ses traits, on pouvait lire l’étonnement sur son visage.

— N’est-il donc au courant de rien ?

La mère ignora la question et s’assit sur un coin du matelas, tout en prenant la main de son fils dans les siennes. L’émotion étreignait chacun de ses gestes et modulait sa voix d’une façon qu’Alexis n’avait jamais entendue jusque-là.

— Tu es différent de tous les autres enfants, mon chéri, expliqua-t-elle. Il est temps maintenant de recevoir ton flûton et d’apprendre les rouages de ta fonction.

— Je ne comprends pas, Mater.

— Ne lui avez-vous pas donné Le Guide céleste du petit Passeur ? demanda Akok, sans cacher son irritation. Cet enfant aurait dû être instruit de sa condition !

— Nous voulions te protéger et avons attendu le dernier moment, rétorqua la mère avec fierté pour se justifier. C’est pour ton bien que nous te l’avons occulté.

Les parents exhibèrent un bout de bois ovoïdal bardé de plusieurs minuscules trous qu’ils portaient autour du cou et qu’Alexis n’avait jamais aperçu. Comme une flûte rondelette.

— Ceci est un flûton. Nous sommes spéciaux et l’avons également reçu, le quarantième jour suivant notre septième anniversaire. C’est la tradition. Il y a beaucoup de jeunes pensées de ton âge dans le monde, mais toi tu es différent, tu es un Passeur. Même si nous préférerions te garder avec nous, tu vas devoir partir pour une école particulièrement adaptée aux enfants comme toi, pour apprendre à contrôler ton pouvoir.

Akok profita du moment. Il adressa un regard mécontent aux parents, tandis qu’il s’agenouillait devant le garçon. Il lui tendit cérémonieusement une boîte, à bout de bras, tout en baissant la tête par respect.

— Alexis, prenez possession de votre flûton et acceptez par ce geste la responsabilité et le destin de Passeur qui est le vôtre.

— Je ne comprends pas, c’est quoi le Passeur ? Pater ? demanda-t-il, affolé.

Le père posa sur lui un œil mécontent. Pour ne pas le froisser davantage, Alexis ouvrit le coffret et découvrit son flûton. Alors qu’il l’observait, une sorte de peur irrationnelle s’empara de lui. Il implora l’aide paternelle du regard, avec un désespoir non feint. Ce dernier redoubla de sévérité.

— Voyons fiston, ne fristouille point ! Accueille ton destin et n’en fais point toute une histoire.

Alexis contempla Akok, qui attendait toujours la réponse à sa question.

— J’accepte, dit-il d’une voix tremblante.

— Bien ! exulta le racoleur en se levant. Habillez-vous et prenez vos bagages, jeune homme. Nous devons partir dans l’instant.

Akok entraîna les parents hors de la chambre.

— Qu’est-ce que tout cela signifie ? demanda-t-il avec colère. En agissant mêmement, vous causez bien plus de mal à ce pauvre enfant !

— Nous savons très bien ce que nous fricotons, nous connaissons votre institution, rétorqua Mater. Nous sommes des Passeurs, je vous le rappelle. En tant que tels, nous sommes au fait du type d’éducation que vous allez dispenser à notre fils.

— Vous allez le tournebouler et en faire une victime de la société, ajouta Pater. Le monde se métamorphose et vos méthodes stagnent.

— Ces propos sont déplacés, ce n’est pas votre rang de juger les procédés célestes. Croyez bien que j’en référerai au conseil.

— Mais faites donc !

Après s’être vêtu à la hâte, Alexis sortit de sa chambre et étreignit fortement ses parents. Il avait compris qu’il ne les reverrait pas de sitôt et qu’il ne pouvait rien y changer. Il s’éloigna de la maison, les larmes aux yeux, accompagné du racoleur qui semblait glisser sur le sol plutôt que de marcher. Ce dernier fut pris d’émotion pour cet enfant qui se jetait courageusement dans l’inconnu. Une forte empathie qui éveilla en lui quelque instinct protecteur.

— Ne vous inquiétez point, c’est un destin merveilleux qui vous attend, mon petit. Vos parents auraient dû vous en dire davantage, s’indigna-t-il.

Voyant qu’Alexis pleurait en silence, Akok s’agenouilla devant lui et le saisit par les épaules. Le contact de ses mains avait quelque chose de rassurant.

— Chaque être doté d’une âme est appelé « Amphitryon » ou « Hôte », car il abrite un monde intérieur unique et particulièrement riche de vie. Cet univers, singulier à chacun, est régi par un ministère, lui-même dirigé par l’inconscient aussi dénommé le « Passeur ».

Akok attendit qu’Alexis assimilât toutes ces informations nouvelles.

— Vous êtes un Passeur, Alexis. Vous êtes l’inconscient d’Alexandre, votre Amphitryon, l’Hôte de tout ce que contient Encéphalon. Votre fonction première sera de guider ses pas dans l’existence, de lui montrer le chemin. Vous allez également avoir le privilège d’être en contact avec le « Maître », qui est le seul à connaître la voie du bonheur. Il est l’essence même de l’Amphitryon, votre essence, il est l’être le plus précieux et le plus fragile de votre monde. Le Maître doit être protégé à tout prix.

Voyant qu’Alexis n’avait pas compris le sens de ses propos et qu’il s’angoissait de recevoir ainsi une telle responsabilité, Akok poursuivit :

— Ne craignez point, jeune Passeur, je vous amène dans une école spécialement conçue pour ceux de votre trempe, où l’on vous enseignera tout ce que vous avez besoin de savoir pour accomplir votre tâche.

Akok se releva et vérifia l’heure à une montre de gousset qu’il extirpa de son gilet.

— Parfait !

Du fond de la rue déboula un taxi comme Alexis n’en avait jamais vu auparavant. Une DS multicolore dont l’intégralité de la carrosserie était couverte de motifs mystiques et brillants. Le véhicule parut jaillir d’un éclair bigarré et stoppa devant eux avec une soudaineté irréelle. Un rasta albinos aux yeux rougis en sortit. Un nuage de dense fumée blanche s’échappait de l’habitacle derrière lui. L’étrange rastafari bougeait avec lenteur, comme si son corps était régenté par une gravité différente de la nôtre.

— Bonjour, Maurice.

— Yes man, Akooook ! Comment ça va, mon man ?

Maurice avait cet accent un peu traînant et caractéristique des gens des îles.

— Je te présente Alexis, le Passeur d’Encéphalon, il vient de recevoir son flûton.

— Yo maaaan, Alexiiiiis !

— Alexis, voilà Maurice. C’est un chauffeur transvibrationnel qui, comme moi, peut utiliser la flamme d’équinoxe. Je voyage seul, mais lui est autorisé à embarquer des passagers.

La porte arrière du véhicule s’ouvrit d’elle-même, faisant sursauter le petit garçon qui regardait Akok avec des yeux ronds. Tout ce que cet étrange personnage racontait n’avait aucun sens pour lui.

— Il est temps de partiiiir, coupa le nouveau venu dans un sourire opiacé. Direction l’école des Passeurs, man.

2 – Hippocampus

Alexis et Liane s’étaient faufilés d’ombre en ombre pour esquiver les nombreux soldats patrouillant autour des centres d’archivage qui pullulaient dans le quartier d’Hippocampus. Il s’agissait de l’un des secteurs les plus irréels d’Encéphalon. Son architecture iconoclaste était un mélange de toutes les époques, de tous les styles existant dans la mémoire de l’Hôte. Pour atteindre la cachette de fortune dans laquelle ils se dissimulaient, les deux acolytes avaient dû franchir l’épaisse muraille médiévale qui entourait toute la zone, traverser un arrondissement de huttes préhistoriques, s’insinuer entre les imposants gratte-ciel du centre, éviter l’espace gréco-romain en passant à travers un colossal temple égyptien, et tout cela sans mentionner les constructions mongoles, chinoises, mayas et russes qu’ils n’avaient point foulées du pied. Une profusion merveilleuse qui aurait fait la joie de tout architecte.

Dans les innombrables agences ministérielles parsemant Hippocampus étaient traitées toutes les démarches concernant la mémoire de l’Amphitryon. Des milliers de pensées, provenant des quatre coins d’Encéphalon, arpentaient ses rues tortueuses et formaient des queues immenses devant les guichets des antiques administrations. Elles venaient en quête de réponses, porteuses de sensations diverses, d’odeurs, d’images ou de sons destinés à enrichir un souvenir ou bien réveiller un sentiment chez Alexandre.

Voilà presque une semaine qu’Alexis et Liane se planquaient dans un pigeonnier situé sur les toits d’un modeste immeuble de quartier. Depuis leur cachette de fortune, ils bénéficiaient d’une vue privilégiée sur le petit centre d’archivage, de l’autre côté de la rue, et pouvaient en étudier tous les aspects sans être découverts. Une longue-vue télescopique pressée contre son œil, Alexis chronométrait pour la trentième fois les allées et venues des nombreux gardiens, qu’il notait sur un carnet.

Collée à son flanc, Liane l’observait avec une lascivité non dissimulée. Une irrésistible envie de le toucher s’empara soudain d’elle. Sa main, tremblante d’émotion, s’avança