KAZUO ISHIGURO
Il a beau nous parler depuis sa maison de Londres par écrans interposés, Kazuo Ishiguro nous enveloppe de sa densité humaine et intellectuelle. Et prend son temps, impressionnant de douceur et de profondeur, pour évoquer son nouveau roman, le magistral Klara et le Soleil. Il faut dire que c’est son premier livre depuis son prix Nobel de littérature, en 2017, et qu’il y voit peut-être un engagement supplémentaire. Ce portrait d’une « amie artificielle », robot touchant et salvateur, est dédié à sa mère, disparue en 2019. Blessée à Nagasaki lors de l’explosion atomique, celle-ci avait ensuite suivi son mari, envoyé en mission scientifique en Angleterre. Toute la famille avait alors adopté la culture britannique, au point que le romancier affirme aujourd’hui avoir quelque peu oublié sa langue natale. Il grandit à Southampton avec ses deux soeurs, un père océanographe, fréquente l’école publique, puis l’université du Kent pour y suivre les premiers cours d’écriture créative, et rêve de devenir une rock star, à l’image de Leonard Cohen, Bob Dylan ou Joni Mitchell, qu’il admire.
Après des premiers livres couronnés de succès (en 1982), publié en 1989 puis adapté au cinéma par James Ivory, lui assure la notoriété. Kazuo Ishiguro témoigne d’emblée d’un éclectisme absolu, d’une capacité à explorer des univers radicalement différents, et ce toujours à la première personne. Le lecteur passe ainsi du Japon au domaine de Lord Darlington ou, aujourd’hui, à une Amérique futuriste. C’est là que nous emmène récit bouleversant sur l’amitié, la solitude, le dévouement maternel. Androïde plus humain que les humains, à la fois naïf et lucide, génial et puéril, Klara va s’attacher à Josie, adolescente malade pour qui le
