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La PETITE LIBRAIRIE DE GASPÉ
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Livre électronique374 pages4 heures

La PETITE LIBRAIRIE DE GASPÉ

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À propos de ce livre électronique

Océane semblait mener une existence idéale. Elle vivait à Paris avec Guillaume, son amoureux français, et travaillait pour une importante maison d’édition. Mais son bonheur n’a su durer et le couple a fini par se séparer. Déçue par la tournure des événements, elle ressent alors un besoin criant de retour aux sources et s’envole vers Montréal pour faire le point. À la recherche d’un nouveau sens à sa vie, de grands espaces verts et d’un environnement plus authentique, elle tombe sur l’annonce d’une charmante librairie à vendre à Gaspé. Rapidement, elle achète l’immeuble très convoité. Elle pourra enfin vivre le rêve de gérer son propre commerce, tout en profitant des merveilles de la majestueuse Gaspésie ! Le coeur gonflé d’espoir, elle part pour ce magnifique coin de pays.
Arrivée sur les lieux, elle se retrouve face à quelques surprises… Entre les rénovations imprévues, les
remises en question, deux soupirants passionnés, une redoutable rivale et les messages troublants de
son ex qui risquent de raviver son chagrin, Océane ne sait plus où donner de la tête ! Par chance, sa petite
librairie la poussera à se concentrer sur l’essentiel, l’aidant à tracer sa route vers un heureux destin.
LangueFrançais
ÉditeurLes Éditeurs réunis
Date de sortie20 sept. 2023
ISBN9782897838027
La PETITE LIBRAIRIE DE GASPÉ
Auteur

Marjorie D. Lafond

Éternelle rêveuse et amoureuse des lettres depuis son plus jeune âge, Marjorie D. Lafond est diplômée en études littéraires et en enseignement du français. Après huit romans publiés depuis 2015, beaucoup de questionnements existentiels et du travail d’introspection, elle se lance à présent dans la rédaction de guide de bien-être avec comme approche celle de la découverte de divers univers spirituels axés sur le mieux-être.

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    Aperçu du livre

    La PETITE LIBRAIRIE DE GASPÉ - Marjorie D. Lafond

    Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales

    du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

    Titre : La petite librairie de Gaspé / Marjorie D. Lafond

    Nom : Lafond, Marjorie D., 1983- , auteure

    Identifiants : Canadiana 20230059171 | ISBN 9782897838027

    Classification : LCC PS8623.A35895 P48 2023 | CDD C843/.6–dc23

    © 2023 Les Éditeurs réunis

    Illustration de la couverture : Yana Alisovna / Shutterstock

    Les Éditeurs réunis bénéficient du soutien financier de la SODEC

    et du Programme de crédit d’impôt du gouvernement du Québec.

    Édition

    LES ÉDITEURS RÉUNIS

    lesediteursreunis.com

    Distribution nationale 

    PROLOGUE

    prologue.ca

    Imprimé au Canada

    Dépôt légal : 2023

    Bibliothèque et Archives nationales du Québec

    Bibliothèque et Archives Canada

    De la même auteure

    chez Les Éditeurs réunis

    Les diamants sont éternels… eux !, 2022

    Avant, j’étais une princesse, 2020

    #MeToo, 2019

    Le journal intime de ma femme troublée, 2018

    Corps et âmes, 2017

    Danse pour moi, 2016

    Sous l’emprise de Monsieur Addams, 2015

    À la merci de Monsieur Addams, 2015

    Dans l’ombre de Monsieur Addams, 2016

    À Cathy, qui m’a fait découvrir cette

    majestueuse terre du bout du monde.

    1

    Bye Paris, bonjour Gaspésie !

    Trois ans plus tôt

    Un voyage en Europe pour mes vingt-six ans… J’arrive à peine à y croire ! Ce coup de tête, c’est tout à fait moi. Dire que la semaine passée encore, j’étais en train de me morfondre dans mon deux et demie du centre-ville de Montréal, incapable de profiter de l’arrivée du printemps. Même l’ouverture des premières terrasses ne m’émoustillait pas cette année. Au lieu de me sentir revivre comme chaque début de mai, je demeurais cloîtrée et passais plutôt ma peine dans le travail. Ça faisait des semaines que je bûchais comme une folle depuis le décès de mon père. Mais à présent, finis l’apitoiement et le travail acharné. Comme me l’a si bien rappelé ma cousine Justine, que je m’apprête à rejoindre en Croatie, il est temps que je m’amuse un peu ! À moi le dépaysement, la mer et les forteresses !

    Je n’ai pas eu la chance de voyager souvent dans ma vie, donc la Croatie n’est pas la première destination que j’aurais choisi de découvrir. Parmi tous les beaux pays de ce monde, j’aurais plutôt opté pour un classique comme la Grèce, l’Italie, l’Espagne ou le Portugal, qui figurent tous sur ma bucket list d’ailleurs, sans oublier la France et ma ville fétiche, Paris… Mais pour ce qui est de cette dernière, je pourrai enfin la cocher sur ma liste des choses à voir avant de mourir ! Car en ce moment même, j’y suis, à Paris, cette métropole où je rêve de poser les pieds depuis mon adolescence.

    Pour l’instant, je n’ai droit qu’à un séjour éclair. Je passerai la nuit à l’aéroport Charles-de-Gaulle, dans un hôtel connecté au Terminal 3, avant de m’envoler demain pour Dubrovnik, en Croatie. Je reviens tout juste d’un après-midi dans le quartier Montmartre ! Je savoure donc la Ville Lumière, tel un léger hors-d’œuvre que l’on déguste avant un repas gastronomique.

    Aujourd’hui, je disposais d’à peine cinq heures pour me promener dans Paris. Entre le quartier de la tour Eiffel, celui des Champs-Élysées ou Saint-Germain-des-Prés, là où se trouve Notre-Dame-de-Paris, le choix de l’arrondissement s’avérait difficile. Où investir ce temps précieux ? J’ai finalement laissé mon cœur décider et je me suis dirigée vers le Paris dans sa forme la plus enchanteresse : le quartier Montmartre. Le 18e arrondissement, avec Montmartre et Pigalle, le Moulin Rouge et la romantique basilique du Sacré-Cœur, représente depuis toujours le Paris de mes rêves. Il me fascine et m’attire depuis mes quinze ans, alors que j’étais tombée un peu par hasard sur la comédie musicale Moulin Rouge. De plus, ce quartier de Paris me rappelle mes études littéraires à l’université, car on y abordait l’univers des poètes tourmentés qui vivaient dans Montmartre jadis.

    Entre boulangeries, cafés, pubs, terrasses fleuries, parfumeries, boutiques authentiques et magasins de style attrape-touristes, je n’avais pas assez d’yeux pour tout voir. Je me sentais comme une petite fille à Disney World. C’est donc ainsi que j’ai flâné dans les rues, le sourire fendu jusqu’aux oreilles, à prendre mille et un clichés de façades toutes plus originales les unes que les autres. Je me suis imprégnée bien comme il faut de l’atmosphère des lieux, qui regorgent d’histoires et de légendes, sous les airs de chanteurs de rue accompagnés de leur accordéon.

    Assise sur la terrasse d’un splendide café du xixe siècle, j’ai pris le temps de savourer le moment et de remercier la vie. Paris et moi, c’est une histoire d’amour qui dure depuis des années ! Dommage que je le quitte déjà demain matin… Mais, heureusement, ce n’est que partie remise : tout de suite après mon séjour en Croatie, je serai de retour ici, et cette fois, je me suis réservé cinq journées entières pendant lesquelles la belle Ville Lumière et moi aurons davantage de temps pour faire connaissance.

    Évidemment, je me réjouis de ce voyage deux en un ! Ce n’est pas tous les jours qu’on a la chance de traverser de l’autre côté de l’océan. Je compte en profiter à fond et je suis certaine que la Croatie saura me surprendre. Puisque j’ai réservé très tardivement, j’avoue ne pas avoir eu le temps de me familiariser avec le pays. En fait, j’ai bien essayé de me dénicher un guide avant de partir, mais j’ai eu du mal à en trouver un à jour, donc j’ai laissé tomber l’idée. Je ne suis toutefois pas inquiète, car je serai entre de bonnes mains avec ma cousine Justine. J’ai confiance qu’elle me fera voir des merveilles !

    Rafraîchie et vêtue de l’une de mes robes colorées favorites, je décide d’aller faire un tour au bistro-bar de l’hôtel où je passe la nuit. J’ai encore des étoiles dans les yeux en repensant à mon après-midi en solo dans le quartier Montmartre.

    Je m’approche du comptoir au bar. Je comprends que c’est ici qu’on commande avant de prendre place parmi les touristes déjà installés. J’aime beaucoup l’ambiance qui règne dans cet endroit, mi-bar, mi-restaurant. On y joue de bons vieux classiques français. Quand je suis arrivée, Édith Piaf chantait Non, je ne regrette rien, et maintenant, Charles Aznavour entame Emmenez-moi… des opus tout à fait de circonstance ! J’observe la clientèle. Tout le monde ici a l’air de bonne humeur. J’étudie l’ardoise au bar en attendant que l’une des deux personnes derrière le comptoir, un homme et une femme, vienne me servir. C’est finalement le barman qui arrive à la caisse.

    — Bonsoir, comment puis-je vous servir en ce vendredi soir ?

    — Bonsoir, je vais vous prendre un cappuccino.

    Puis, je me dis que j’ai envie d’un peu plus de piquant dans ma vie ce soir. J’ajoute :

    — Oh ! Et un verre de votre meilleur cognac français avec ça !

    J’adore le cognac, ça me rappelle mon papa chéri ; c’était son alcool préféré.

    Le barman se met à rire en me souriant.

    — Le cognac est toujours français, mademoiselle.

    Je sens mes joues s’empourprer. Que je suis bête !

    — Oh… oui, évidemment ! Désolée, ça doit être le décalage horaire.

    Il me répond :

    — Au fait, j’adore votre accent… Le Canada va bien ?

    Je rectifie :

    — Le Québec, oui, il va bien.

    J’avoue ne pas être très au fait de ce qui se passe en dehors de ma province. Je lui souris. Je le trouve pas mal cute, ce gars-là !

    — Pardonnez-moi la comparaison, mais est-ce qu’on vous a déjà dit que vous ressembliez à…

    Je lui coupe la parole :

    — Laissez-moi deviner… à Brigitte Bardot ?

    — Oui ! Quand elle était jeune, évidemment !

    Je m’esclaffe.

    — C’est drôle, vous êtes la troisième personne qui me fait cette remarque-là depuis mon arrivée à Paris.

    Et c’est vrai : il y a eu cet agent aux douanes en arrivant, ensuite la serveuse du café à Montmartre et maintenant lui… Au Québec, jamais personne ne m’avait adressé cette drôle de comparaison. Je crois pouvoir le prendre comme un compliment, même si je ne me considère pas exactement comme le sex symbol que Brigitte Bardot était. Moi, je me considère plutôt comme une fille bien ordinaire et même plutôt timide. Ah, ces Français ! C’est moi qui adore leur accent et leur style sophistiqué !

    Le charmant barman s’affaire à me préparer mes consommations et je le vois qui parle à sa collègue :

    — Elle lui ressemble, non ?

    La fille rousse d’une trentaine d’années hausse les épaules et prend un air qui semble vouloir dire : « Je ne trouve pas tant que ça et ta remarque m’agace. » Elle lance ensuite un autre regard dans ma direction, que je juge un peu froid.

    Mon attention se porte à nouveau sur celui qui prépare mes consommations. Ce jeune Parisien doit avoir sensiblement mon âge. Il affiche un visage mature et très viril, ainsi que des yeux doux, qui d’ailleurs me laissent entrevoir même d’aussi loin leur magnifique teinte bleue. J’adore l’énergie qu’il dégage et j’aime le voir bouger en arrière du bar au son de la musique entraînante. Celle-ci est plutôt forte pour ce genre d’établissement avec une clientèle simplement en transit, attendant de s’envoler vers une autre destination. Peu importe, je suis fière de mon choix d’hébergement : j’ai opté pour un hôtel au look moderne et dynamique, en plus d’être abordable. Le bistro-bar se compose de banquettes et de tables rondes munies de sièges rembourrés. Les tables ont vue sur un écran géant devant lequel se trouve une petite scène, où des musiciens semblent se produire certains soirs.

    Toujours au comptoir du bar, le barman revient avec mes verres.

    — Je t’ai choisi un de mes cognacs préférés, le Camus Île de Ré, tu m’en donneras des nouvelles !

    Je lui réponds :

    — Oui, avec plaisir.

    Il s’occupe ensuite de me faire régler l’addition. Pendant que je lui tends ma carte de crédit, nos regards se croisent. Cela semble le déstabiliser, car lorsqu’il me redonne ma carte plutôt maladroitement, celle-ci s’échappe de ses doigts, virevolte dans les airs, avant d’atterrir sur le sol. Quelle drôle de trajectoire cette carte a prise !

    — Oups, vraiment désolé pour cette maladresse…

    Je ris de bon cœur.

    — Un barman maladroit… tu casses beaucoup de verres ?

    — Non, pratiquement jamais ! Je ne suis pas réputé pour être maladroit, à vrai dire… j’imagine que c’est l’effet que me font les belles touristes québécoises !

    C’est indéniable, ce sourire contagieux et ces belles paroles me font de l’effet également. Nerveuse, je le remercie simplement.

    — Profite bien de ta soirée, me lance-t-il avant de passer au client derrière moi, qui devait commencer à s’impatienter.

    Le feu aux joues, je vais m’installer sur l’une de ces banquettes bleues invitantes, un bleu comme celui qu’affiche en partie le drapeau français. Sur l’écran géant devant moi défilent des vidéoclips américains en mode silencieux qui ne correspondent pas à la musique qui fait vibrer la place. Autour de moi, juste des voyageurs, manifestement. Quelques clients sont assis seuls tout comme moi, mais la plupart festoient ou discutent en groupe. Trois gars à ma droite, la trentaine, me paraissent « réchauffés », comme on dit en bon vieux québécois. À ma gauche, un groupe de dix personnes en mode festif également. Et il y a moi, avec mon sourire de touriste et mon bonheur d’être là, tout simplement. Étrangement, assise parmi ces étrangers internationaux, je ne me sens pas seule. Je relaxe, tout de même fatiguée après un long vol de nuit Montréal-Paris, et surtout, après mon après-midi de découvertes. J’ai l’âme légère et la tête pleine d’images parisiennes et d’airs joyeux. Dalida, Joe Dassin, Pigalle, Ella, Elle l’a, Y’a d’la joie… Les classiques français entraînants s’enchaînent.

    Le beau barman apparaît à mes côtés et me tire de mes rêveries.

    — Tiens, pour me faire pardonner ma maladresse de tout à l’heure et surtout, pour accompagner à merveille ton café et ton cognac, je t’offre un morceau de notre délicieux paris-brest… c’est notre préféré ici.

    — Oh, merci, c’est vraiment gentil de ta part !

    — Allez, goûte, tu m’en donneras des nouvelles.

    Il reste planté là et je comprends qu’il ne partira pas avant un verdict de ma part.

    Je coupe donc à la fourchette un morceau de cette pâtisserie feuilletée et crémeuse, avant de le porter à ma bouche. Oh là là ! Ce dessert est un vrai délice ! Je m’exclame :

    — Oh mon Dieu ! C’est décadent, ce truc-là. Un paris-brest, tu as dit ?

    — Exactement ! L’une des pâtisseries françaises par excellence !

    La texture, le goût tout juste assez sucré… Ils l’ont, l’affaire, les Français ! Mes papilles sont aux anges. Dommage, j’avais entrepris de faire attention au sucre les deux premiers jours de mon arrivée en Europe pour me sentir belle dans mon maillot sur les splendides plages de Croatie… Tant pis. Jamais je ne cracherai sur une délicieuse pâtisserie qu’on m’offre si gentiment.

    — Moi qui rêve d’enfin goûter aux fameux macarons de chez Ladurée, je doute fort qu’ils battent ce dessert-là…

    — Pour des macarons divins, je connais de bonnes adresses, moins touristiques…

    Il me sourit. Un peu nerveuse, je change de sujet :

    — En passant, j’adore votre playlist.

    — Ah oui ? Tant mieux ! Ça fait plaisir à entendre. C’est la mienne justement.

    Et moi d’ajouter, sous le charme :

    — On a les mêmes goûts musicaux en tout cas !

    J’ai droit à un autre sourire craquant avant de le voir repartir au pas de course derrière le comptoir pour servir un client qui lui fait signe de vouloir régler l’addition.

    Pendant que je déguste mon paris-brest et sa crème onctueuse, et que mes papilles se réjouissent, il y a cette autre chanson que j’aime beaucoup qui débute : Dans les yeux d’Émilie de Joe Dassin. Je tends l’oreille aux paroles :

    Dans son quartier du Vieux-Québec

    Les rues ont l’air d’avoir l’accent

    Et l’an deux mille voisine avec

    Les maisons grises du vieux temps

    Je n’avais jamais vraiment porté attention aux paroles. Drôle de coïncidence que cette chanson qui joue ici ! Puis, juste avant le refrain :

    Moi j’avais le soleil jour et nuit dans les yeux d’Émilie

    Je réchauffais ma vie

    À son sourire

    Que c’est romantique ! L’Émilie de la chanson était donc québécoise…

    J’ai dévoré mon paris-brest jusqu’à la dernière miette, terminé mon cappuccino et achève également mon verre de cognac. Je devrais penser à retourner à ma chambre maintenant… J’ai l’intention de me coucher tôt pour être en forme demain matin. Mais le problème, c’est que cette musique savoureuse me tient bien éveillée… Et ça y est, la prochaine chanson me ramène de nouveau à ma terre natale : J’irai où tu iras de Céline Dion et Jean-Jacques Goldman. Je souris de plus belle.

    Chez moi les forêts se balancent

    Et les toits grattent le ciel

    Les eaux des torrents sont violence

    Le feu me monte aux joues quand j’aperçois une fois de plus le gentil barman se diriger vers ma banquette. Il m’offre à présent un petit verre contenant une liqueur jaunâtre.

    — Je crois avoir fait une nouvelle découverte française pour toi… du pastis. Tu connais ?

    Je suis enchantée de cette dégustation qui m’attend, car j’adore essayer de nouvelles saveurs, surtout lorsqu’il s’agit de spiritueux, de vins, de bières ou toute autre boisson alcoolisée !

    — Non, je n’ai jamais goûté… Paris est une première pour moi.

    — Les premières fois sont tellement excitantes… profites-en à fond.

    — Oui, j’en ai bien l’intention !

    Il retourne rapidement à ses clients qui attendent. Je me rends compte que nous n’avons pas pris le temps d’échanger nos prénoms. Je déguste cette boisson étrange. Ouf, ça goûte l’anis, ce truc ! Si la première gorgée me surprend un peu, je commence à apprécier les suivantes, et chaque fois que je me retrempe les lèvres, j’ai l’impression de connecter toujours un peu plus avec ma destination chouchou. Le beau barman me sourit depuis le bar. Manifestement, il me fait de l’effet, celui-là. Je me demande s’il est célibataire.

    La chanson se poursuit. Elle me fait penser à ma mère, qui la faisait souvent jouer quand j’étais enfant. J’irai où tu iras… ce morceau rythmé était-il réellement dans la playlist de ce gars ?

    Pendant que mon gentil serveur s’affaire au bar, nos regards s’ancrent l’un dans l’autre alors que Goldman chante :

    J’irai où tu iras, mon pays sera toi

    J’irai où tu iras

    Qu’importe la place

    Qu’importe l’endroit

    Le moment est si fort que je finis par me demander plus sérieusement si cette chanson m’est dédiée à moi, la jeune Québécoise que Paris a su rendre toute pétillante… Mais peu importe, si LE moment parfait existe, c’est bien celui-là !

    Or, je songe : je ne rêve pas, il y a bien eu deux chansons consécutives en lien avec le Québec… ça ne peut pas être une coïncidence, non ?

    Deux chansons françaises plus tard, c’est l’heure : je me lève et rejoins le bar pour m’acheter une bouteille d’eau avant de monter à ma chambre. Mais cette fois, je fais une femme de moi. Je me convaincs : je ne perds rien à jouer la curieuse pour tenter d’obtenir quelques informations à propos de ce beau barman. C’est vraiment rare que je prenne les devants avec les gars, mais s’il y a des moments dans la vie où il faut oser, c’est bien en voyage. Car en voyage, on est déjà, de toute manière, hors de notre zone de confort.

    Je me lance donc :

    — Tu es de Paris ?

    Il me répond avec plaisir, semble-t-il :

    — Oui, en fait, je suis né à Nice. Mais j’ai déménagé à Paris à l’âge de dix-huit ans.

    — Voilà ce qui explique ton beau teint ! Et Nice te manque ?

    Malgré ses yeux clairs, il a le teint assez foncé. Je ne dirais pas basané, mais presque. On dirait un beau grand Italien du sud. J’adore son look et j’aime beaucoup ses épais cheveux foncés.

    — Bah… j’y retourne souvent pour des vacances le temps de voir les oncles et cousins… Sinon, j’aime bien ma vie à Paris. Pour les études et les perspectives d’emploi dans mon domaine, c’est parfait.

    — C’est vrai que les bars ne manquent pas…, remarqué-je.

    — Oui, mais barman, c’est pas mon métier en fait, m’apprend-il.

    — Ah non ? Pourtant, à te voir flipper les bouteilles avec tellement d’aisance tantôt…

    — Tantôt ? C’est mignon comme mot. Ça veut dire tout à l’heure, en québécois ?

    Se moque-t-il de mon langage ?

    — Oui, exact !

    — D’accord, je tâcherai de m’en souvenir.

    Il me fait un clin d’œil, puis il poursuit :

    — J’étudie en gestion marketing, ou plutôt, j’étudiais, car je viens tout juste de terminer mes derniers examens ! Et toi, belle Canadienne, que fais-tu dans la vie ?

    — Moi, j’ai terminé mon baccalauréat en littérature française il y a deux ans déjà. En ce moment, j’assure un remplacement de deux ans en tant qu’éditrice adjointe, avec possibilité de prolongation. Il me reste deux mois à faire à mon retour de voyage ; la dame que je remplace s’est remise de sa maladie et elle est déjà de retour au travail de manière progressive. Quant à moi, on verra où le vent me mènera par la suite… J’ai déjà commencé à envoyer des curriculum vitæ à d’autres maisons d’édition.

    — Tu sais qu’à Paris, il y a d’excellentes maisons d’édition où faire carrière…

    — Oh, oui, je sais, le rêve…

    — Tu trouves que Paris est un rêve ?

    — Oh que oui !

    Il rit.

    — Tu as peut-être raison… Demeures-tu à Paris quelques jours ? J’aimerais t’inviter à dîner.

    — Je m’envole pour la Croatie demain, mais je reviens à Paris dans huit jours.

    Je lui souris et lui demande :

    — On échange nos numéros sur WhatsApp, si tu veux ?

    — Oui, avec plaisir, jolie blonde !

    Je m’apprête à partir, mais me retourne pour lui demander ce qui me brûle les lèvres depuis tantôt, ou pour le dire à la française, depuis « tout à l’heure » :

    — Hé, dis-moi… les chansons qui jouaient tout à l’heure… tu sais, celle de Céline Dion et celle de Joe Dassin, Dans les yeux d’Émilie, c’était simplement une coïncidence ?

    — Oui et non, ces deux chansons figuraient réellement sur ma playlist, mais comme elle est très longue, j’avoue avoir repéré les deux chansons et les avoir fait jouer juste pour toi, la belle Canadienne, ou plutôt, la belle Québécoise… qui se prénomme ?

    Je sens la chaleur monter à mes joues. Il m’enlève les mots de la bouche. J’avais justement oublié de lui demander son prénom !

    — Ha ha, je m’en doutais pour les chansons ! Je trouve ça très mignon. En passant, moi, c’est Océane.

    — Wow ! Quel joli prénom pour une jolie fille aux yeux verts. Moi, c’est Guillaume.

    Je me dis intérieurement : Comme l’un de mes auteurs français préférés… Guillaume Musso !

    Nous nous saluons une dernière fois après avoir échangé nos numéros. Et je retourne à ma chambre, bouleversée par cette rencontre surprise. Ce jeune Français semble vibrer au même diapason que moi. À peine rentrée, je reçois déjà un texto.

    Heureux d’avoir fait ta rencontre, belle Canadienne, ou plutôt, belle

    Québécoise comme tu sembles le préférer… J’espère sincèrement

    que nous aurons l’occasion de nous revoir.

    Moi de même, Guillaume. Ça m’a fait plaisir d’avoir discuté

    avec toi. Encore merci pour les petites attentions. J’ai adoré !

    À bientôt, j’espère.

    Je me remémore ce beau sourire et ces magnifiques yeux clairs avant de tenter de me recentrer sur ce qui m’attend maintenant : ce premier périple en Europe en solo ! Bon, pas tout à fait en solo, puisque je m’apprête à rejoindre ma cousine, mais tout de même ! Mon seul autre passage en Europe date de mes quinze ans, lorsque mes parents m’ont emmenée en Angleterre visiter Londres. J’en garde d’ailleurs des souvenirs incroyables ! Depuis ce temps, mes expériences de voyage se sont limitées à trois tout-inclus en onze ans. Sans être pauvres, mes parents n’étaient pas très riches et n’avaient donc pas les salaires pour nous payer de beaux voyages, sauf celui à Londres, dont mon père rêvait depuis sa jeunesse. Et de mon côté, mon emploi étudiant comme commis au salaire minimum à la librairie du coin n’était pas suffisant pour me faire voyager non plus. Mais maintenant que je suis un peu plus en moyens, je compte bien reprendre le temps perdu pour explorer le monde ! Demain matin, je ferai l’expérience d’un vol domestique entre Paris et Dubrovnik, d’une durée d’une heure trente seulement. Ils en ont de la chance, les Européens, de pouvoir se déplacer d’un pays à un autre aussi rapidement !

    Comme je l’avais espéré, la Croatie m’en fait voir de toutes les couleurs. Dès mon arrivée à Dubrovnik, c’est le dépaysement total ! La mer bleue, étincelante au soleil, les vieilles barques colorées au bord de l’eau, les falaises, les forteresses… Celle qu’on surnomme la « perle de l’Adriatique » est une ville côtière aux airs de contes merveilleux et aux décors de carte postale.

    Le port de Dubrovnik est charmant, avec tous ses bateaux impressionnants, ses petits cafés et ses boutiques longeant les quais. C’est d’ailleurs le premier endroit où nous nous promenons avant de partir en voiture jusqu’à la vieille ville. En chemin, les panoramas entre mer et côtes sont à couper le

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