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Les Mordorés: Le Campus d'Hypérion
Les Mordorés: Le Campus d'Hypérion
Les Mordorés: Le Campus d'Hypérion
Livre électronique755 pages10 heures

Les Mordorés: Le Campus d'Hypérion

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À propos de ce livre électronique

Ayron et Lonhard deux adolescents, bien différents aux premiers abords, sont tous deux à la recherche de leurs origines communes.

Entre une troublante prophétie et un passé oublié, ils vont naviguer dans un monde magique qui leur réserve bons nombres de surprises.

Un premier obstacle va venir entraver leurs dessins, la malédiction du soleil doré.
Arriveront ils à s'en défaire ? Pourront ils percer les secrets de ses origines ?
Venez le découvrir dans le Tome 1 des Mordorés.

Plus de détails sur le site loiczadra.fr et sur Instagram à loiczadra
LangueFrançais
Date de sortie30 mai 2022
ISBN9782322447046
Les Mordorés: Le Campus d'Hypérion
Auteur

Loïc Zadra

Dès mes 5 ans, j'ai rapidement été attiré par le style Heroic Fantasy. J'ai donc dévoré des séries comme Ewilan ou Harry Potter. De lecteur à écrivain, un projet né dans ma tête à l'âge de 15ans... le premier prototype des Mordorés. Ce projet restera cependant dans les cartons quelques années. Après une reprise à 28 ans, mon objectif est simple: Publier mon premier roman l'année de mes 30 ans. Pensé sous forme de Trilogie, ce roman sera je l'espère captivant et attachant. J'ai souhaité retranscrire sur le papier un univers authentique que chaque lecteur pourra s'approprier à sa manière. Soutenu par mes amis et ma compagne, je souhaite sur le long terme faire de ce projet une rampe de lancement pour vivre de ma passion.

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    Aperçu du livre

    Les Mordorés - Loïc Zadra

    PROLOGUE

    Le bleu opalin laissait peu à peu place à un rose flamboyant dans le ciel du village de Noyah, annonçant ainsi une douce nuit d’été pour ses habitants. Maximilien, le père adoptif d’Ayron et Lonhard, les convia à le rejoindre après le dîner dans le petit jardin à l’arrière de sa chaumière. Curieux, les garçons s’exécutèrent après avoir embrassé Ellie, leur mère adoptive. Cette dernière préféra se coucher, exténuée par sa semaine de travail. Une fois réunis, assis sur un banc, le père de famille sortit de sa veste un livre. Celui-ci semblait inconnu aux jeunes hommes. Ils l’interrogèrent donc sur son origine. Ce livre s’intitulait Elypsia, la légende d’un continent. Maximilien prit pour l’occasion un air grave et s’adressa à ses deux garçons.

    ⎯ Cet ouvrage renferme la mémoire des hommes depuis le grand cataclysme. Il nous a été légué par Augurion, la divinité suprême. Il est donc primordial que vous soyez attentifs à mon récit. Je ne vous en lirai que les grandes lignes. Vos futurs enseignants vous feront étudier l’œuvre plus en profondeur. Ce qui m’importe c’est que vous preniez connaissance de notre histoire afin de bien construire votre avenir.

    Les deux garçons le fixèrent avec attention comme pour lui faire comprendre qu’ils étaient impatients de connaître la suite. Maximilien créa, par magie, un orbe lumineux plus propice à une lecture nocturne. Habituellement agité comme un Betizun², Ayron fit preuve d’un calme olympien, presque inquiétant. Son cadet Lonhard, quant à lui, était déjà pendu aux lèvres du conteur. Le quadragénaire commença alors à leur raconter la légende.

    ⎯ Notre monde, mes enfants, a été façonné par Augurion créateur de toute chose. Ce dernier, désireux de bâtir un univers autonome, se sentit dans l’obligation d’en partager le contrôle. Pour cela, il s’auto-enfanta d’une première portée de jumeaux qu’il nomma Solaris et Lumia. Une fois l’importance du concept d’équilibre entre la vie et la mort des corps célestes assimilée, le dieu originel leur confia la protection de ces derniers. Augurion s’attela ensuite à créer des planètes pouvant accueillir la vie. Cette nouvelle mission réveilla le côté maternel de l’entité suprême. Il donna donc naissance à deux autres enfants, Solstice et Nébula. Augurion laissa à ses aînés la charge de les éduquer. De son côté, il s’affaira dans son œuvre afin que l’univers compte de nombreuses planètes habitables.

    Comme si l’ouvrage avait absorbé leur langue, les deux enfants restèrent muets. Fier de son effet, Maximilien en profita pour faire une pause dans son récit.

    ⎯ Une fois satisfait de ses premiers mondes, il s’affaira à réfléchir sur les créatures qui pourraient les peupler. Fort de sa sagesse et de son altruisme, la divinité suprême proposa à ses quatre enfants de l’aider dans sa mission. Il leur demanda en ce sens de proposer des idées sur la création de nouveaux spécimens vivants. D’essence divine tout comme Augurion, ceux-ci eurent la possibilité d’emprunter n’importe quel aspect. Les cadets, plus créatifs et attirés par le vivant, s’amusèrent à se transformer régulièrement. Augurion conserva d’ailleurs quelques-unes de leurs idées pour les implanter sur différents mondes. Après plusieurs siècles de pratique, Nébula la cadette adopta une forme humanoïde que son géniteur trouva remarquable. Il donna donc naissance à cette forme de vie sur Elypsia, l’ultime création de son univers. Avec le temps, ce nouveau spécimen plut énormément à l’ensemble des enfants divins qui optèrent pour cette apparence de manière permanente.

    ⎯ Nébula est un peu notre maman à tous ? souligna innocemment Lonhard.

    Maximilien répondit par un sourire amusé avant de poursuivre.

    ⎯ Désirant le bonheur de ses enfants, Augurion décida de conférer à cet organisme vivant, qu’il avait baptisé « humains », une intelligence plus élevée ainsi qu’un libre arbitre. Naquit ainsi le début de notre civilisation et le continent d’Elypsia commença à prospérer. Leurs aînés ayant à charge la supervision des astres, Nébula et Solstice prièrent leur géniteur de leur confier sa dernière œuvre, unique en son genre. Affaibli par ses multiples créations, Augurion céda à leur demande et se retira dans l’éther pour se régénérer. Il imposa toutefois à ses cadets de veiller sur les humains et d’observer l’équilibre cosmique. Ils ne devaient en aucun cas interférer avec l’organisation sociale du continent. Augurion voulait pouvoir constater, à son retour, comment cette forme de vie plus évoluée s’en sortirait et s’il pouvait l’implanter dans d’autres mondes.

    ⎯ Cela ne s’est pas passé comme prévu, lança Ayron perspicace.

    ⎯ En effet, plusieurs siècles après le départ d’Augurion, nos ancêtres ont commencé à développer, sans que l’on en connaisse l’origine, des dons magiques. L’apparition de ce mana dit « divin » donna notamment naissance à deux clans de mages surpuissants ; les « Amotas » et les « Mordorés ». Chaque clan possédait de grands pouvoirs magiques et leurs membres avaient une particularité reconnaissable ; la couleur de leur iris. Les premiers possédaient des yeux d’une noirceur abyssale et maîtrisaient la magie des ténèbres ; les seconds, dont l’iris avait la couleur dorée du soleil, excellaient dans la magie de la lumière.

    ⎯ Surpuissants ! On peut en rencontrer pour apprendre ? demanda à nouveau Ayron fasciné par le pouvoir.

    ⎯ Je crains que non, l’ensemble de la communauté magique jalousait les Mordorés. D’après les écrits, ils maîtrisaient chaque élément en plus de la lumière. Cette différence entre les deux clans finit par nuire à l’équilibre du continent et une grande guerre éclata, causant ainsi la quasi-extinction de ce clan hybride, l’informa Maximilien.

    ⎯ Mais les enfants d’Augurion n’ont rien fait ? questionna le cadet.

    ⎯ J’y viens, ne sois pas si impatient mon petit Lonhard … Cela reste flou au sujet de l’intervention de ses enfants, mais sentant un déséquilibre, Augurion décida d’intervenir pour stopper la folie des élypsiens. Fortement affecté par cette guerre, il ne put retenir sa colère. Ses pouvoirs colossaux eurent raison de la quasi-intégralité du clan à l’origine de ce conflit, les Amotas. Il semblerait cependant qu’un événement l’arrêta dans sa colère et qu’une poignée de membres de chaque clan survécut. Épuisé, Augurion décida alors de bannir, dans un lieu tenu secret, les Amotas ainsi que ses cadets Nébula et Solstice. Ils avaient apparemment pris part à cette guerre. L’endroit fut entouré d’innombrables maelströms rendant impossible son accès aux mortels. Augurion les condamna à vivre sans magie jusqu’à ce qu’ils expient leurs fautes. L’ensemble de leurs pouvoirs fut conservé dans un réceptacle magique. Seule l’accumulation d’actes vertueux briserait un jour ce contenant et leur rendrait leur pouvoir de jadis. Néanmoins, une seule erreur ou un acte délibérément néfaste condamnerait son auteur d’abord à la maladie, puis au trépas.

    ⎯ C’est triste… constata Lonhard toujours aussi candide.

    ⎯ En effet mon fils, mais ce n’est pas tout. Augurion isola également les survivants Mordorés sur une île septentrionale afin qu’ils prospèrent loin de toute menace. Il enveloppa cette contrée de puissants sortilèges et confia sa sécurité à ses aînés, ceux-ci ayant cherché à calmer le conflit. Augurion leur demanda ensuite de surveiller le continent et de l’avertir si un nouveau conflit venait à naitre. Il souhaitait ainsi donner une seconde chance aux humains.

    ⎯ Donc les Mordorés, c’est les gentils, père ? questionna Ayron.

    ⎯ On dit « ce sont », le reprit-il. Mais c’est plus compliqué que cela mon enfant, sinon il n’aurait pas épargné les Amotas. Par la suite, la magie faisant désormais partie de notre quotidien, Augurion créa quatre nations au sein du continent afin d’y répartir équitablement les puissances, avant de regagner l’éther. Il modifia aussi profondément le relief et le biotope³ d’Elypsia afin de créer un partage des ressources entre les nations. Il espérait ainsi instaurer une paix solide fondée sur le commerce, l’échange et la bienveillance. Pour repartir sur de bonnes bases et qu’aucun mage ne provoque de vendetta, il modifia profondément les souvenirs de nos ancêtres. Ainsi, nous ignorons tout de l’origine du conflit et nous remercions avec ferveur Augurion chaque année pour avoir ramené la paix sans jugement des actes de ses quatre enfants.

    ⎯ La légende nous explique que ses cadets ont pris part au conflit… c’est un peu contradictoire, lâcha Lonhard.

    ⎯ Ahah, toujours en avance… répondit Maximilien qui reprenait son souffle. Afin de nous guider vers un monde de paix, Augurion dissémina différents écrits dont cette légende à travers le continent. Ces précieux opus nous ont appris à nous familiariser à l’utilisation d’une magie pacifique et vertueuse. Il a également gravé un souvenir immuable dans nos esprits :

    « Elypsia possède une atmosphère parsemée de mana divin. Celui-ci a aléatoirement transmis des pouvoirs magiques aux créatures de ce monde. Les êtres humains gratifiés d’un don élémentaire devront à leur quinzième anniversaire intégrer l’académie de magie de leur pays. L’enseignement qu’ils suivront leur offrira une maîtrise de leurs pouvoirs dans le but de protéger leurs semblables des dangers extérieurs. »

    ⎯ Je ne sais pas ce que veut dire « immuable » mais je vous protégerai tous du danger, clama fièrement Ayron.

    Cette réaction fit de nouveau rire Maximilien qui termina son récit.

    ⎯ Je te remercie mon bonhomme. Pour finir, le dieu suprême créa, dans chaque nation, une académie magique. Au sein de ces instituts, il grava une prophétie imprescriptible sur un immense monolithe.

    « Afin que la grande guerre oubliée ne se répète et entraîne la destruction définitive de ce monde, le crépuscule devra révéler les deux soleils. C’est à cette unique condition que le voile se dissipera et que l’ambre se brisera pour une paix durable. »

    ⎯ Qu’est-ce que cela signifie ? s’interrogea Lonhard.

    ⎯ Je ne saurais le dire mon enfant, mais depuis deux siècles personne n’a percé le mystère de cette prophétie. Elle fut même oubliée, pour certains.

    Maximilien referma ensuite l’ouvrage et répondit aux questions des deux garçons. Pour lui, il était important que ses enfants développent un sens critique aiguisé. Ce n’est qu’à cette condition qu’ils pourraient affronter ce monde bien moins édulcoré que dans la légende. Il leur expliqua, entre autres, que malgré la répartition bienveillante d’Augurion, certains pays démocratiques avaient sombré dans des dictatures sous l’influence de mauvais mages. Des tensions s’étaient également érigées entre différents États et depuis, même la nation de Noisette, bien éloignée au sud-ouest du continent, le ressentait.

    ⎯ A mon sens, cela ne peut qu’augurer la fin d’une paix fragile, conclue Maximilien.

    Ce soupir amena Lonhard à se questionner sur les différents aspects de la légende et sur les tensions naissantes. Ayron, quant à lui, se proclama sauveur du continent. Le quadragénaire dut faire preuve de beaucoup de patience pour qu’ils s’endorment en silence sans réveiller son épouse.

    Une fois les enfants endormis, Maximilien repensa à la légende qu’il venait de conter et se demanda pourquoi le dieu suprême restait silencieux. La situation du continent s’envenimait depuis quelques années. Ses aînés veillaient-ils encore sur eux comme il le leur avait demandé ? Ses cadets n’avaient-ils pas réussi à berner le dieu suprême pour jouer de mauvais tours aux êtres humains ? C’est donc songeur que l’administrateur du village de Noyah s’endormit cette nuit-là. Il se fit néanmoins la promesse de protéger ses deux fils adoptifs, même s’il devait donner sa vie pour cela.


    ² Race de Taureau très sauvage.

    ³ En écologie, un biotope est un type de lieu de vie défini par des caractéristiques physiques et chimiques déterminées relativement uniformes. Ce milieu héberge un ensemble de formes de vie composant la biocénose : flore, faune, fonge (champignons), et des populations de micro-organismes.

    CHAPITRE 1 :

    LE PASSAGE DE NOSTIS OMNIA

    Un magnifique coucher de soleil couronnait la petite colline à l’ouest du Village de Noyah. Le continent d’Elypsia accueillerait très prochainement l’été. L’allongement des soirées et la douceur des températures confirmaient ce changement saisonnier.

    Un couple d’oiseaux profita de la douce brise qui surplombait les récifs rocheux pour s’élancer en direction des habitations. La proximité de la forêt permettait aux habitants de jouir d’un peu d’humidité et de fraîcheur lors des mois chauds et d’hivers plutôt cléments avec peu de gel. Le duo de volatiles virevolta au-dessus des différentes chaumières du village en gazouillant amoureusement. Leur périple s’arrêta sur le toit d’Ellie et Maximilien Dragonnier⁴, les administrateurs du village.

    Ellie s’affairait en cuisine pour préparer le repas du soir pour son homme et ses deux adolescents, Ayron et Lonhard. Brune d’une cinquantaine d’années aux yeux bleu foncé, elle avait coiffé ses longs cheveux d’une natte dans le dos. Elle servirait l’une de ses fameuses salades ce soir, composée de divers légumes, de tranches fines de poisson frais et de Radicchio. Cette endive de couleur rouge vif au goût assez amer riche en nutriments permettait aux magiciens de booster leurs réserves de mana.

    Ayron, l’ainé de la fratrie avait des yeux couleur noisette, des cheveux blonds coupés courts et une peau mate. Il aidait son père adoptif à combler les trous dans la murette à l’arrière de l’habitation. Ces dégâts étaient le fruit de ses nombreux entraînements magiques. Possédant des qualités certaines aux travaux manuels, il était normal pour celui-ci d’aider à réparer la murette. Ses muscles naturellement développés et sa grande taille lui conféraient une endurance et une force hors-norme pour son âge.

    Lonhard considéré comme le cadet, avait le teint de peau plus pâle, une musculature plus sèche et des cheveux bruns coiffés en bataille. Il avait cependant les mêmes yeux noisette et une taille quasi identique. Plus cérébral que son frère, il étudiait près de la serre à herbes médicinales située à dix lyps⁵ de la muraille qui bordait le fond du jardin. Malgré leur attrait commun pour la magie, l’un préférait l’étudier et concocter des mixtions, l’autre aimait les combats et utiliser ses dons pour améliorer ses performances physiques.

    Les deux jeunes garçons fêteraient bientôt leur quinzième anniversaire. D’après la lettre laissée sur leur landau après leur abandon, Ayron était né le sixième jour de l’été, à 23h59 et Lonhard le septième jour à 00h01. Tous deux déposés quelques mois après leur naissance, portaient un amour inconditionnel à leurs parents adoptifs qui prenaient soin d’eux chaque jour. C’est donc sans mal qu’ils se précipitèrent sur la terrasse à gauche de la chaumière quand Ellie les appela pour mettre la table.

    ⎯ Nettoyez-vous les mains, petits sauvages, les sermonna-t-elle gentiment. Vous allez tacher ma belle nappe blanche et je viens tout juste de la changer. Je vous ai à l’œil, attention à vous les magiciens malins.

    ⎯ Oui maman Ellie, répondirent en chœur les deux adolescents souvent taquins.

    Après un lavage de mains en bonne et due forme, ils se mirent tous autour de la table pour le dîner. Maximilien, placé en bout de table, avait un air nostalgique en observant ses deux enfants. On pouvait même apercevoir une certaine tristesse dans ses yeux vert émeraude. Sa main droite halée était posée sur ses longs cheveux poivre et sel, l’autre entortillant sa barbe grisâtre bien fournie. Dans cette position il repensa à son adolescence. C’est à cette époque qu’il avait vécu de multiples péripéties avant de devenir l’administrateur d’un paisible village, loin la capitale. Ce temps lui parut si loin, expliquant sa nostalgie. Pour ce qui est de la tristesse, il savait que la famille ne serait plus réunie encore bien longtemps, ayant lui aussi suivi des études de magie. Il avait en effet obtenu son poste de protecteur grâce à ses dons qui encore aujourd’hui, en faisaient un marginal au sein du village. Lonhard, remarqua cet air triste et demanda si tout allait bien. Maximilien prit une grande inspiration avant de lui répondre.

    ⎯ Ayron et toi… Mes fils, vous êtes dotés de fabuleuses capacités magiques. Je suis très fier de vous et de vos progrès. Je vous ai appris à contrôler votre mana en vue de réaliser votre rêve. Cette quinzième année signifie que je vais devoir vous accompagner jusqu’à la capitale et nos routes vont se séparer.

    Ce dernier mot s’étouffa dans sa gorge. Les deux adolescents partageaient son émotion et ses paroles sincères et pleines d’amour résonnaient en eux. Ayron prit la parole et lui demanda.

    ⎯ Père, nous sommes également tristes de vous quitter maman et toi et tout le village. Cela signifie que tous nos amis dépourvus de dons magiques resteront ici ? Lonhard et moi seront les seuls du village à rejoindre la capitale ?

    ⎯ En effet, mon petit, les instituts magiques effectuent leur recrutement, en s’appuyant sur le pouvoir de la comète Nostis Omnia. La convocation est l’unique moyen d’intégrer le campus, une fois la capitale rejointe. Cependant, il me semble qu’une troisième personne a la possibilité d’être sélectionnée à Noyah.

    Lonhard interrompit à son tour son père.

    ⎯ La comète Nostis Omnia, celle qui sait tout ? Une troisième personne… serait-ce Icarius ?

    ⎯ Oui, elle traverse le ciel chaque été, le premier soir de pleine lune, là où le mana magique est à son apogée. On ne connait pas vraiment son origine, on l’attribue à Augurion et elle permet aux recruteurs de localiser chaque adolescent pourvu de dons. Pour ce qui est d’Icarius, il n’a certes pas vos capacités mais possède lui aussi une magie élémentaire non négligeable.

    Après cette nouvelle réponse, Maximilien marqua une pause fraîcheur pour sa gorge. Une fois désaltéré, il reprit.

    ⎯ Une missive officielle sera magiquement adressée le soir même à tous les jeunes qui ont une prédisposition au mana. Cette lettre est une convocation pour la capitale du pays. La rentrée s’effectue, en général, une à deux semaines après la fête de l’Ataraxie⁶.

    L’évocation des festivités fit réagir Ellie. Celle-ci ne s’était pas manifestée en amont ne disposant d’aucun don magique.

    ⎯ Vous irez au marché dans la semaine pour vous acheter de beaux vêtements, c’est votre dernière fête au village, alors je veux que vous soyez impeccables.

    Les deux adolescents acquiescèrent sans broncher, car ils savaient qu’elle ne leur laissait pas le choix. De son côté, Maximilien adressa un bref sourire à sa femme avant de continuer son récit.

    ⎯ Les instituts magiques ont pour but d’enseigner, aux personnes possédant un don, la maîtrise du mana afin qu’ils protègent leurs semblables.

    Jusque-là rien de nouveau pour les deux jeunes mages, leur père poursuivit.

    ⎯ Chaque nation disposait d’épreuves d’entrée et de programme scolaire identiques. Les bataillons de combat n’existaient pas à l’époque, car les échanges entre les différents pays étaient cordiaux. Cependant, il y a une quarantaine d’années, les nations Azuré et du Lys ont sombré progressivement dans des systèmes moins égalitaires.

    ⎯ Sait-on pourquoi ? questionna Lonhard, toujours avide de connaissance.

    ⎯ Les détails restent flous, attesta Maximilien. Mais les nations de Noisette et d’Orge ont mis en place, à la suite de cela, des escadrons d'élites. Leur rôle est de maintenir la paix aux frontières et de réaliser des excursions afin de réunir plus d’informations sur les situations de leurs voisins.

    Cette nouvelle réjouit ses deux fils qui rêvaient d’aventure.

    ⎯ Toutes relations avec les instituts des pays voisins, devenus des royaumes, ont également été interdites afin de préserver le bien être des étudiants, finit par préciser Maximilien.

    ⎯ Donc l’escadron Hypérion, n’existait pas ? Et en quoi la sécurité des étudiants était-elle menacée ? demanda à nouveau Lonhard qui n’avait pas la langue dans sa poche dès qu’il s’agissait de culture.

    ⎯ Il y a trente-cinq ans, ce régiment a en effet vu le jour, le hasard ayant fait que cela corresponde à ma première année d’études, quelle veine ! plaisanta Maximilien.

    Son air redevint plus grave quand il aborda le sort des étudiants.

    ⎯ Les Royaumes Azuré et du Lys organisaient des combats à mort entre étudiants ; leur souhait étant de garder uniquement ceux qui avaient survécu pour en faire des tueurs à gages manipulables.

    La mâchoire des deux adolescents se crispa et leur estomac se serra à la suite de cette révélation. Leur motivation d’intégrer le bataillon Hypérion pour faire le bien autour d’eux n’en fut que renforcée.

    ⎯ Et comment intègre-t-on ce bataillon ? Tu n’as jamais voulu nous répondre, s’enquit encore une fois Lonhard.

    ⎯ A sa création, les quinze meilleurs de l’école avaient le privilège d’intégrer l’élite afin de créer cinq groupes de trois mages. Chaque prétendant tirait au sort un duel magique ; les vainqueurs de chaque duel étaient ainsi sélectionnés.

    ⎯ Des duels ! C’est mon domaine ça, s’exclama Ayron qui sautillait sur place à l’idée de pouvoir affronter d’autres mages dès le test d’entrée.

    ⎯ De nombreux mages ont péri en mission ! C’est la raison pour laquelle je ne voulais pas vous en parler… vous devez maintenant connaître la vérité, afin de tracer votre propre voie.

    Maximilien redoutait le moment où ils seraient choisis par la comète. Il souhaitait les protéger d’un destin qui pourrait être funeste. Seuls le bonheur et le bien-être de ses enfants l’importaient. Il continua sur un ton des plus solennel.

    ⎯ Faire partie de l’élite peut monter à la tête et devenir néfaste ! Il faut savoir rester humble et être conscient qu’il y a toujours meilleur que soi. Un duel sans enjeu au sein d’une école ne permettra jamais de juger des capacités de réactions d’un étudiant face au véritable danger.

    Maximilien laissa ses fils méditer sur ses propos, le temps de s’hydrater une nouvelle fois puis il poursuivit son récit.

    ⎯ Pour moi, la force brute n’est pas une unité de mesure lorsqu’il s’agit de survie. J’ai déjà eu l’occasion de voir des mages moins puissants, mais plus malins, survivre lors de redoutables expéditions. C’est pour cela que je vous ai également enseigné l’entraide. Vous êtes complémentaire, chacun possédant ce qui manque à l’autre ; c’est ce qui fera votre force.

    ⎯ Nous avons bien conscience père, que tu as su nous inculquer des valeurs fortes. Malgré les dangers qui nous attendent, nous devons nous présenter à Hypérion, répondit Lonhard avec beaucoup de convictions.

    Maximilien lui adressa un regard plein de fierté avant de poursuivre.

    ⎯ Depuis mon passage à l’académie, les tests et les programmes se sont durcis. Nous avons perdu trop de nos frères et sœurs, souligna le père de famille visiblement très touché par ce phénomène.

    Après une courte pause de réflexion il continua son récit afin de leur donner les informations en sa possession.

    ⎯ Peu de nouvelles recrues ont par ailleurs grossi les rangs et les anciens ont dû assurer le travail en attendant la relève, expliqua t’il.

    ⎯ Cela t’a conduit à effectuer de multiples missions avant de raccrocher ? l’interrogea l’aîné à son tour.

    ⎯ Oh oui mes enfants, mais mon objectif final a toujours été de revenir ici pour protéger ma belle Ellie et mon village de cœur, Noyah.

    Pour accompagner son propos, Maximilien prit son épouse dans ses bras et l’embrassa ; ce qui déclencha une moue chez les deux adolescents. Maximilien y répondit par un grand sourire avant de poursuivre.

    ⎯ Vous savez il n’y a pas que l’escadron Hypérion qui compte ! Les mages pourvus de talents magiques faibles et modérés dits de « seconde classe » intègrent aussi la milice magique et assurent la protection de chaque village.

    ⎯ Mais cela réduirait notre champ d’action pour en connaître plus sur nos origines, raisonna Lonhard.

    ⎯ Nos dons méritent meilleure attribution, se targua Ayron. Dois-je rappeler qu’un jour je serai le mage le plus puissant de ce continent ?

    ⎯ Tu es au village de Noyah mon fils, je doute que tu aies pleinement conscience des dons magiques qui t’entourent dans ce monde ! le sermonna Maximilien.

    L’adolescent baissa les yeux, se sentant coupable d’avoir fait de la peine à son père. Le doyen de la famille, reprit alors son récit.

    ⎯ Les mages ayant un don supérieur assurent quant à eux la défense de la capitale au sein de la compagnie Noisette, ce qui est déjà un grand honneur. Il ne faut pas perdre de vue que l’intégration de l’escadron est déterminée selon vos dons et soumise à certaines conditions.

    ⎯ Des conditions ? s’enquiert Ayron.

    ⎯ L’élite du pays gère les missions les plus dangereuses, ce qui demande d’énormes sacrifices tant au niveau personnel que familial.

    ⎯ Père… malgré tout l’amour que nous avons reçu, nous avons besoin de connaître la raison de notre abandon, souligna Lonhard d’un air solennel. Nos actions seront également plus bénéfiques au sein des Hypérion.

    Cette révélation mit les larmes aux yeux d’Ellie, qui ne voulait pas voir ses deux enfants s’éloigner d’elle et braver tous les dangers. Sachant néanmoins qu’ils ne seraient pas pleinement heureux tant qu’il manquerait des fragments à leur histoire, elle devait se résigner à cette séparation. Les deux adolescents vinrent étreindre leur mère chacun à leur tour, ne désirant en aucun cas lui causer de la peine. De son côté, Maximilien continua d’arborer son air nostalgique, lui qui avait vécu tant d’aventures avant de connaître cette vie paisible. Ses deux enfants avaient si vite grandi qu’il les voyait toujours comme deux bambins fragiles à qui il venait d’apprendre à marcher.

    Seul mage de son village en charge de sa protection, il avait été le plus à même de recueillir ces deux orphelins. Il leur avait par ailleurs inculqué, au fil des ans, une base de savoirs magiques. Cette adoption l’avait également empli de bonheur car il n’avait jamais réussi à avoir d’enfants avec Ellie.

    Après le repas, Ayron et Lonhard prirent le temps de rassurer leurs parents. Ils auraient la possibilité de voir Maximilien une fois tous les trois mois, celui-ci devant se rendre à la capitale pour assister au conseil des protecteurs. Ce dernier réunissait l’ensemble des administrateurs des villages du pays. Ils échangeaient sur divers sujets comme les pénuries de nourriture ou les nouveaux sorts de protection, ce qui en découlait l’allocation des ressources à chaque village, en fonction des besoins saisonniers. Pour finir de rassurer leur mère, les deux adolescents promirent de lui écrire une lettre régulièrement afin de la tenir au courant de leur avancée.

    ***

    La semaine qui suivit fut plus calme et Maximilien retrouva sa joie et son entrain habituel. L’approche des fêtes d’anniversaire de ses deux fils lui avait mis un peu de baume au cœur. Même s’il essayait de se faire discret, les deux adolescents savaient qu’il leur préparait une surprise. Au cours de cette dernière semaine de printemps, les deux frères venaient d’achever leur premier cycle scolaire. Celui-ci constituait un socle commun d’éducation à tous les enfants. Cet éveil éducatif préparait ceux qui n’auraient pas la chance de se rendre dans la capitale à des métiers qui ne nécessiteraient pas de mana élémentaire. La magie n’était en effet pas enseignée au sein de ce parcours. C’est pour cela que Maximilien avait préféré les éduquer au mana le plus tôt possible. En sachant plus sur leur origine qu’il ne voulait l’admettre, son choix n’avait pas été anodin et l’aspiration de ses fils l’avait motivé à leur fournir un maximum de bases solides.

    Ayron et Lonhard mirent donc à profit leurs derniers temps libres pour rendre service aux habitants du village en utilisant leur magie. Les deux frères purent ainsi empocher quelques pièces après chaque mission accomplie. Cette bourse leur permettrait d’acheter des vêtements sur le marché et d’avoir un petit pécule pour leur voyage jusqu’à la capitale. Ils auraient pu certes compter sur l’argent familial, mais Maximilien avait insisté sur le fait qu’ils devraient être indépendants pour se préparer au mieux à ce qui les attendait. Ayron affectionnait les missions physiques comme couper du bois ou façonner des roches pour les futures constructions. Il aida à réapprovisionner le stock du village situé dans un grand bâtiment en pierre au toit arrondi au centre de Noyah.

    Lonhard, de son côté, partit en forêt pour y recueillir des plantes afin de préparer des remèdes qui permettraient aux villageois de soigner leurs différents maux. C’est après quelques jours de dur labeur et une bourse conséquente que le cadet, bien organisé, partit sur le marché afin d’acquérir de beaux vêtements.

    Trois pièces de valeurs différentes étaient utilisées dans chaque pays. Des pièces de bronze, d’argent et d’or. Dix pièces de bronze équivalaient à une pièce d’argent et dix pièces d’argent à une d’or. Dans ce pays, la monnaie était marquée d’une noisette avec le nombre d’unités de valeur sur l’une des faces. Sur l’autre face, on pouvait observer un paysage différent suivant la valeur du sou. La représentation d’une forêt était frappée sur les pièces de bronze. Une illustration du bassin des cent chevaux, situé au sud-ouest du pays, était apposée sur celles d’argent. L’esquisse de la capitale se retrouvait sur les pièces dorées. Les monnaies de chaque pays étaient frappées au sein des chefs-lieux et l’escadron Hypérion escortait les convois de minerai pour en assurer la sécurité.

    Lonhard disposait de cinquante pièces de bronze et d’une dizaine en argent, il n’aurait donc pas de mal à trouver son bonheur. Malgré la petite taille du village, les commerçants ne manquaient pas de produits et l’allée centrale du village regorgeait de merveilles artisanales (vêtements, bijoux, sculptures, armes décoratives…). Anticipant même l’hiver prochain, Lonhard s’offrit, en plus des vêtements prévus, une belle cape en cuir réalisée sur mesure par Gaius l’artisan du village. Ce dernier était le père de leur ami Icarius qui possédait des dons élémentaires dans la magie terrestre. Bien que Gaius ait longtemps soutenu qu’il ne disposait d’aucun mana, Lonhard l’avait plusieurs fois vu utiliser une magie différente dans l’exercice de son métier. Une magie d’enchantement d’après l’adolescent qui permettait au père d’Icarius de conférer certaines caractéristiques aux objets façonnés. De plus, si Gaius et sa femme ne disposaient d’aucun don, il était impossible qu’Icarius en soit pourvu.

    Son frère Ayron, plus futile et extraverti, préféra dépenser sa paie en offrant des fleurs ou des bijoux aux filles de son âge. L’aîné consacra également du temps à s’entrainer à la magie aqueuse. Un après-midi, il se fit sermonner par Ellie au cours d’une conversation sur la fête de l’Ataraxie, et ce devant son amie Anabella, venue lui rendre visite. Ce qui lui était reproché, c’est d’avoir fait passer l’achat de vêtements au second plan. Ellie décida alors de lui confier douze pièces d’argent tout en le réprimandant sur son manque de maturité. Elle insista sur le fait que s’il ne changeait pas de comportement, elle n’aurait pas assez confiance pour le laisser se rendre à la capitale. Piqué dans son amour propre, l’adolescent s’excusa et promit de faire des efforts.

    Son amie Anabella, folle amoureuse de lui depuis sa plus tendre enfance et trop candide pour ressentir une quelconque jalousie, se proposa de l’accompagner. Cette dernière souhaitait lui offrir des vêtements en guise de cadeau de départ. N’ayant aucun don magique, Anabella agissait ainsi pour profiter des derniers instants en compagnie de son amour de jeunesse. Ayron qui n’avait pour Anabella qu’une affection amicale, accepta sa proposition pour lui faire plaisir et pour calmer les foudres de sa mère.

    Spectateur de la scène malgré lui, Lonhard se décida de suivre son frère et son amie discrètement car il pressentait quelques drôleries. A l’aise lorsqu’il s’agissait d’études de la magie ou de potions, le cadet se baladait très rarement seul en public ayant un tempérament plutôt farouche.

    Le village de Noyah était aménagé autour d’une grande avenue commerçante qui le traversait de part en part et d’une place circulaire qui la coupait en deux. Sur cette place trônait une grande colonne soutenant la statue d’une femme vêtue d’une simple robe, munie d’une petite corne d’abondance et d’une couronne en forme de croissant de Lune. Pour les noyens⁷, elle représentait Nébula déesse lunaire de la fertilité, fille d’Augurion. Au pied de la colonne, plusieurs robinets permettaient aux habitants de s’approvisionner en eau douce ; celle-ci étant bâtie sur une source naturelle. La célébration de la fête de l’Ataraxie se faisait sur cette place. Une douzaine de platanes habillaient l’extérieur de celle-ci. L’école et le hangar de stockage de matériaux se trouvaient également aux alentours. L’habitation de Maximilien et Ellie se situait quant à elle au Sud-Ouest du village proche de la colline et de la grande plaine qui bordait Noyah à l’Ouest. La forêt longeait le côté Est du village.

    Lonhard se servit de sa magie du vent pour se hisser sur une large branche au sommet d’un des platanes du village. Cette branche bien fournie en feuilles lui garantit une excellente cachette. Après quelques minutes d’observation, l’intuition du cadet fut plutôt bonne. En effet, il passa son après-midi à pouffer de rire lorsqu’Anabella fit essayer des vêtements trop longs ou trop courts, de couleurs parfois excentriques à Ayron. Ce dernier se retrouva même affublé d’un paréo féminin pensant essayer une cape.

    L’aîné se procura finalement deux belles tuniques aux couleurs sobres, des bas convenables et une cape sombre plus courte que celle de son frère, mais tout aussi efficace contre le froid. Le soir venu, après avoir ramené Anabella chez elle en la remerciant pour son aide, il déballa tout son attirail à la maison pour qu’Ellie puisse l’admirer dans ses nouveaux vêtements. Fière des achats de son fils, l’épouse de Maximilien arbora un visage plus doux à l’égard de son aîné et l’encouragea à continuer ainsi dans le droit chemin. Au cours de la semaine suivante, le jeune homme fit tout pour contenter les attentes d’Ellie et ainsi ne pas être privé d’une rentrée à l’institut magique.

    Le sixième jour de l’été pointa le bout de son nez la semaine suivante. L’effervescence se fit ressentir dans la famille, car dans quelques heures, nos deux adolescents allaient passer le cap des quinze ans. Toute la famille s’affaira à nettoyer la chaumière, entretenir le jardin et préparer le repas pour les invités du soir. Ellie et Maximilien avaient convié plusieurs de leurs amis dont Gaius l’artisan, Valentine la dernière enseignante de premier cycle et Norton le bibliothécaire du village. Côté jeunes, Ayron et Lonhard partageaient ce moment avec une dizaine d’amis dont Anabella et Icarius. Plus petit que les deux frères, les yeux noisette et les cheveux châtains, ce dernier avait quinze ans depuis l’hiver dernier.

    Le repas se déroula dans la joie et la bonne humeur. Pour clôturer l’événement, Valentine déposa sur la table un grand gâteau garni de fraises et de crème pâtissière. L’enseignante l’avait confectionné pour féliciter les jeunes gens de la fin de leur premier cycle d’enseignement.

    En suivant, Gaius offrit aux deux frères une magnifique paire de gants en cuir. Pour finir, Ellie déposa une luxueuse boite devant chacun de ses deux fils adoptifs. Devant leur regard ébahi elle en délivra le contenu avant de laisser son mari compléter.

    ⎯ Elles renferment des bijoux et pas n’importe lesquels. Pour toi Ayron une chevalière en or assortie d’une pierre d’onyx, confectionnée par mes soins. Ton père l’a par ailleurs envoutée. La pierre d’onyx pourra stocker une grande réserve de mana grâce à un sort qu’ils vous apprendront à l’institut de magie.

    ⎯ Quant à toi Lonhard. Nous t’offrons un bracelet muni d’une attache en argent et composé de plusieurs pierres d’onyx de forme sphériques. Son utilité est identique au bijou de ton frère.

    Les deux adolescents, émus par tant de présents, remercièrent chaleureusement leurs parents et les différents invités. Après la dégustation du dessert, Maximilien invita l’ensemble des convives à se rendre dans le grand pré à l’extérieur du village pour la surprise finale. L’herbe était rase et la pleine lune commençait à percer dans le ciel, offrant ainsi un léger éclairage sur les collines environnantes. Maximilien s’éloigna un peu et demanda à tout le monde, en amplifiant magiquement sa voix, de fermer les yeux trente secondes. Lorsque le délai fut écoulé, ils le fixèrent tous bouche bée. Ce dernier faisait danser des feux follets de couleurs diverses entre ses mains positionnées en arc de cercle l’une au-dessus de l’autre. Quand un nombre suffisant de feux follets virevolta entre ses mains, il les projeta en l’air, ce qui produisit de grandes trainées lumineuses accompagnées de sifflements. Une fois à leur apogée, les feux-follets éclatèrent pour se dissiper en différents motifs dans le ciel. Ce spectacle permit à Ayron et Lonhard d’oublier tout ce qui les entourait et de vivre un intense moment d’émotion.

    A la fin de la représentation, les convives remercièrent chacun leur tour Maximilien pour ce magnifique tour de magie qu’ils découvraient pour la première fois et rentrèrent chez eux. Les deux adolescents questionnèrent leur père sur cette magie qui les avait époustouflés. Maximilien eut un rire nerveux, gêné par tous ces compliments, il prit cependant le temps de leur répondre.

    ⎯ C’est un ami de la capitale qui m’a confié un parchemin de sort en échange d’un remède. C’est une incantation élémentaire de feu qu’il est très difficile de maîtriser. Je me suis longuement entrainé ces dernières semaines, mais vous ne m’avez pas rendu la tâche facile, petits curieux.

    ⎯ Un sort de feu ? Tu pourrais me prêter le parchemin ? J’aimerais m’entrainer à le maîtriser et bien sûr, ce n’est pas pour impressionner les filles ! s’exclama Ayron dont la fougue trahissait les véritables intentions.

    ⎯ Ce sort est réservé aux adultes. Je l’ai juste utilisé pour illuminer dignement cette journée si particulière. Il n’est pas fait pour jouer les jolis cœurs !

    Le sourire de Maximilien et la mine déconfite de l’aîné provoquèrent un fou rire chez Lonhard. Après s’être calmé, il s’adressa à son père adoptif.

    ⎯ C’est donc ça que tu tramais dans notre dos, je t’ai longuement observé, sans jamais réussir à deviner tes actions… J’ai d’abord pensé à des exercices de relaxation, avoua le cadet.

    Maximilien rit à son tour.

    ⎯ Non mon fils, je n’ai pas besoin de me relaxer. Ce sort demande une concentration continue de mana au niveau des paumes de la main. Je m’entraînais donc à le ressentir pour le concentrer avant de le faire apparaître physiquement sous forme de petits feux follets.

    ⎯ En tout cas, c’était super impressionnant et c’est le plus beau des cadeaux, complimenta Ayron qui venait de se remettre de sa déception.

    ⎯ Bande de flatteurs ! C’était la moindre des choses avant de vous conduire pour la capitale. Et puis, cela me démangeait depuis des années de réutiliser ma magie de feu avec autant d’intensité, confessa Maximilien.

    Epuisé après la dépense d’énergie que lui avait demandé ce sort il informa les deux adolescents qu’il allait se coucher. Il les autorisa néanmoins à rester pour le passage de la comète. Ils devraient cependant rentrer juste après. Surexcités de pouvoir enfin observer le passage de cet astre, les deux adolescents acquiescèrent avec un grand sourire.

    Une fois seuls, les deux frères se couchèrent dans le champ pour attendre la venue de Nostis Omnia. Le ciel était dégagé, des milliers d’étoiles tapissaient déjà la toile noire et la pleine lune bientôt à son apogée suffisait à elle seule pour éclairer les plaines alentours. Une soudaine brise provoqua quelques frissons chez les adolescents. Ils ressentirent ensuite des picotements un peu partout dans leur corps. Soudain une étoile bien plus impressionnante traversa le ciel. Un phénomène lumineux bleu et rouge tout autour de la comète accompagna son déplacement. La scène dura une poignée de secondes avant que celle-ci ne disparaisse à l’horizon.

    Un peu déçu, Ayron s’adressa à son frère :

    ⎯ Je m’attendais à mieux, je ne sais pas toi, mais à part les picotements dans tout le corps, je n’ai pas ressenti grand-chose. C’était un super spectacle visuellement, mais après le tour de magie de Maximilien, cela m’impressionne moins.

    ⎯ Oui cela m’a fait la même impression, confirma Lonhard. L’essentiel c’est de l’avoir enfin vue. Nous allons également recevoir nos convocations pour la grande aventure.

    Comme les deux adolescents l’avaient promis à leur père, ils se relevèrent rapidement afin de rentrer chez eux. Une fois debout, Ayron se tourna vers son frère.

    ⎯ Même si père nous dit qu’il existe bien plus fort au-delà de ce village, nous allons dépasser nos limites frangin et nous intégrerons l’escadron Hypérion. Sans effort il n’y a pas de récompense… Nous allons explorer le monde et découvrir nos origines !

    Lonhard acquiesça de la tête avec un grand sourire. Le cadet garda cependant en tête les paroles de Maximilien, il savait au fond de lui qu’il faudrait redoubler d’efforts pour intégrer l’élite.

    Il se dirigea alors vers son frère, leva son bras droit vers le ciel, paume de main grande ouverte. Ayron fit de même et enserra celle de son frère. Ils se regardèrent et répétèrent « nous allons intégrer les Hypérion et découvrir d’où nous venons ». A cet instant un grand flash les éblouit et un bruit sourd retentit comme si la foudre s’était abattue sur eux. Ils se retrouvèrent expulsés à plusieurs lyps l’un de l’autre, à moitié sonnés.


    ⁴ En Référence à l’arbre et non aux dragons.

    ⁵ 1 lyps = 1 mètre.

    ⁶ Ataraxie ou « absence de troubles » est une fête en l’honneur d’Augurion qui ramena la paix sur le continent, celle-ci se déroule cinquante jours après la première pleine lune d’été.

    ⁷ Habitants de Noyah, Noyenne au féminin.

    CHAPITRE 2 :

    DIRECTION LA CAPITALE

    Lonhard fut le premier à ouvrir les yeux à la suite du choc phénoménal qu’ils venaient de subir lui et son frère. Le cadet ne vit pas en premier lieu l’herbe calcinée aux alentours et ne ressentit pas non plus l’odeur qui s’en dégageait. Sa vision encore embuée par l’impact se porta tout d’abord sur ses avants bras. Ceux-ci semblaient cicatriser d’eux-mêmes des brûlures provoquées par la foudre, grâce à de petits arcs électriques qui léchaient sa peau. Même si son corps cicatrisait en surface, il sentit tous ses muscles endoloris et chaque mouvement lui fut très pénible. Lorsque sa vue s’éclaircit enfin, il remarqua que l’ensemble de son corps manifestait ce phénomène de cicatrisation rapide. Ses vêtements entaillés à de nombreux endroits, ne bénéficièrent malheureusement pas de ce processus de guérison.

    Non sans peine, le cadet arriva à se remettre sur pied. Debout, il eut beau essayer de se souvenir, jamais il n’avait ressenti une telle douleur généralisée. Lorsque Lonhard réussit à reprendre un semblant de consistance, il localisa visuellement son frère. Ayron se situait à quelques lyps de lui, un léger frisson parcourut alors l’ensemble du dos du cadet. Il constata, à ce moment précis, que de véritables flammes consumaient le champ un peu partout autour d’eux. Terrorisé, il se figea à la vue du feu qui se dirigeait dangereusement vers son aîné toujours inconscient. Assommé par la chaleur ambiante et la fumée qui commençait à le faire tousser, Lonhard puisa en lui une force inconnue. Ce courage qui sied habituellement à son aîné, lui faisait défaut jusque-là. Cependant, la menace imminente poussa Lonhard à dépasser ses limites. Après avoir vaincu sa peur, il s’empressa de venir porter secours à son frère. Le temps qu’il mît à se dégager de l’emprise de sa tétanie, suffit néanmoins à certaines flammèches pour atteindre le buste d’Ayron. A son grand étonnement, les flammes opéraient l’effet contraire sur la peau de son aîné, comme les éclairs sur la sienne. Ayron, une fois guéri, ouvrit à moitié les yeux et grogna car il peinait lui aussi à se relever. Lonhard établit ensuite un constat de la situation après l’avoir relevé.

    ⎯ Tu sais ce qu’il s’est passé ?

    ⎯ Non, tout s’est déroulé très vite, pour moi aussi…

    Ayron, nullement diminué par la fumée et la chaleur ambiante, dût à son tour porter secours à Lonhard, plus en difficulté. Il le prit donc sur son épaule pour l’aider à s’éloigner des foyers principaux avant de reprendre leur conversation. Une fois dans un espace épargné, un détail sauta aux yeux de l’aîné.

    ⎯ Mais qu’as-tu fait à ton œil gauche mon frère ? Il est d’un teint orangé !

    ⎯ Mon œil gauche ? Je ne ressens aucune différence, ma perception est la même, suis-je blessé ? le questionna Lonhard inquiet avant de poursuivre. Mais attends… le tien aussi ! Enfin le droit pas le gauche ! Il n’est plus noisette mais doré comme le soleil !

    ⎯ Doré comme ma bague ? demanda Ayron pour être sûr de bien comprendre.

    Lonhard acquiesça d’un signe positif de la tête. La confusion était la plus totale pour les deux adolescents. Ce vacarme et l’incendie avaient bien sûr attiré l’attention des habitants aux alentours et Maximilien accourut au centre du pré où étaient réunis les deux jeunes.

    ⎯ Ça va les enfants ? Rien de cassé ? leur lança Maximilien à bout de souffle, diminué par les fumées.

    ⎯ Oui ça va, quelques courbatures et l’esprit un peu confus mais rien de cassé, répondit Lonhard.

    Soulagé par ce retour, Maximilien s’adressa à l’aîné.

    ⎯ Ayron, je compte sur toi pour éteindre cet incendie. Rappelle-toi de mon enseignement et concentre ta magie aqueuse dans tes mains.

    En retour, l’adolescent ferma les yeux et se concentra. Au cours de son exercice, un détail le troubla. Une sensation différente le traversa, comme si ses dons s’étaient décuplés. Ce nouveau pouvoir échappa par ailleurs à son contrôle. Il se surprit à projeter un jet de flammes qui manqua de peu de calciner Maximilien. Paniqué, l’aîné arrêta le flux magique et s’excusa longuement. Interloqué mais pas fâché, Maximilien le pria de se concentrer à nouveau tout en s’écartant.

    Au second essai, un puissant jet d’eau fut libéré, avec succès, par l’aîné. Il éteignit ainsi les flammes aux alentours. Ne pouvant néanmoins contrôler l’immense source magique qui émanait de son corps, Ayron explosa en morceaux un bloc de pierre, en amont de leur position. Les rochers se dirigèrent alors dangereusement dans leur direction, prenant un élan exponentiel lors de leur descente. L’adolescent dût produire un nouvel et conséquent effort pour les stopper, grâce au geyser qui jaillissait de ses paumes.

    Lorsqu’il interrompit son incantation, Ayron put lire la stupeur sur les visages de son père et de son frère, ils venaient d’échapper de peu à une catastrophe. Faisant fi de ce qu’il venait de se passer, Maximilien encouragea son aîné à recommencer la manœuvre en douceur, afin de maîtriser totalement le feu. Lorsque l’incendie fut éteint après plusieurs essais moins brusques et le calme revenu sur la plaine, ils s’affalèrent tous les trois sur le sol, épuisés. Les fumées s’étaient également dissipées et malgré l’odeur d’herbe calcinée qui régnait, l’air était plus respirable. Ce n’est donc que lorsqu’ils jetèrent un œil au loin, qu’ils prirent connaissance de l’inquiétude des voisins. Maximilien leur adressa alors un signe rassurant et, bénéficiant de sa notoriété de protecteur il réussit à les convaincre de retourner se coucher. Une fois la foule éloignée, il vérifia qu’aucun nouveau départ de feu ne serait possible et raccompagna ses fils tranquillement à la maison afin de tirer au clair ce qu’il venait de se passer.

    Ils retrouvèrent Ellie sur le pas de la porte, le visage marqué d’inquiétude. Son expression se décrispa, quand elle put constater que seuls leurs vêtements étaient abimés. Dans le foyer, ils prirent place sur les fauteuils de la pièce principale. Fauteuils qu’Ellie avait recouverts de vieux draps afin qu’ils ne les salissent pas. Leur tutrice s’empressa ensuite de leur apporter de nouveaux vêtements et des serviettes humidifiées. Ceci pour nettoyer la suie sur leur peau. En récupérant leurs habits délabrés, elle croisa le regard d’un de ses fils et s’esclaffa.

    ⎯ Mais qu’est-ce que vous avez fait à vos yeux !

    Maximilien, absorbé par l’incendie et la sécurité du village jusque-là, prit un air grave en remarquant à son tour cette coloration.

    ⎯ C’est atypique, votre pigmentation observe une légère variation. Je comprends mieux mon fils pourquoi ton pouvoir t’a échappé tout à l’heure. Le feu n’étant pas ton pouvoir d’origine, cette coloration en est sûrement la cause. Un homme ordinaire ne possède qu’une seule magie élémentaire et non deux. Lonhard, une différence de ton côté ?

    ⎯ Mes brûlures ont été soignées par des arcs électriques, souligna le cadet. Mais je maîtrise la magie du vent, donc cela ne signifie peut-être rien.

    Maximilien enregistra cette nouvelle information et prit une profonde inspiration pour réfléchir quelques secondes, avant de poursuivre.

    ⎯ Comme vous le savez, nous vous avons recueillis il y a quatorze étés sur le pas de la porte. En revanche, j’ai omis de vous dire qu’une seconde lettre accompagnait vos berceaux.

    ⎯ Que disait-elle ? demanda promptement Ayron.

    ⎯ Que vous étiez différents de nous mais sans plus de détails. L’ombre qui l’a déposée était déjà loin lorsque j’ai relevé la tête.

    ⎯ Une ombre ! L’un de nos parents ? s’exclama l’aîné.

    ⎯ Je ne saurais vous dire… la nuit était bien sombre.

    Cette réponse déçut les deux garçons qui ressentaient, malgré leur amour inconditionnel pour leurs parents adoptifs, l’envie de savoir pourquoi on les avait abandonnés si jeunes. Ce qu’ils ignoraient c’est que Maximilien leur cachait une partie de la vérité. Afin de ne pas être percé à jour dans son omission, Maximilien bifurqua sur une nouvelle indication

    ⎯ La lettre me demandait également de vous apprendre à maîtriser vos dons, ce que je pense avoir fait. Un parchemin d’incantation magique reposait aussi sur le pas de ma porte. D’après le message, il ne devait être utilisé qu’en dernier recours.

    ⎯ C’est-à-dire ? le questionna Lonhard.

    ⎯ Si j’ai bien compris le dialecte ancien qui y est apposé, il s’agirait d’un envoûtement permettant de masquer une particularité afin de vous protéger. Après je me trompe peut-être, je ne maîtrise plus tout à fait ce dialecte aujourd’hui, clarifia Maximilien.

    Ce détail fit sourire Ayron, car pour lui son père adoptif était l’homme le plus sage et le plus avisé du continent. Il écouta cependant attentivement la suite des explications.

    ⎯ Si j’ai raison, il me permettra de rendre à vos pupilles leur aspect d’antan. Il est vrai que cette coloration pourrait vous attirer des ennuis à la capitale.

    ⎯ Tant que je conserve mes nouveaux dons, cela me convient ! lâcha Ayron fier de ce potentiel inouï.

    ⎯ Si je peux éviter de passer pour une bête de foire, cela me convient, précisa Lonhard plus timidement.

    ⎯ Je vais faire de mon mieux mes enfants. Je ne peux rien vous garantir. Sachez cependant que votre sécurité est ma priorité. Enfin… commençons.

    Avant le début de l’incantation, Lonhard posa une dernière question.

    ⎯ Penses-tu que cette coloration a un lien avec les clans magiques des légendes ? Dans mes souvenirs, l’un d’eux possédait des yeux dorés.

    ⎯ Non, je ne crois pas. Ces écrits servent avant tout à nous mettre en garde sur la responsabilité qui incombe aux mages pourvus de grands pouvoirs. La maîtrise d’une seconde magie élémentaire est très rare mais observable chez une poignée de mages. Si vous aviez maitrisé une énergie de lumière, là je serais allé dans ton sens.

    Ce propos déçut le cadet qui débordait d’imagination. Le jeune homme n’abandonna cependant pas son rêve de rencontrer un jour ce clan divin et garda ce souhait au plus profond de son être.

    ⎯ Et la prophétie ? s’exclama alors Ayron, qui voyait les choses en grand. Elle est également fausse ?

    ⎯ Personne ne l’a vraiment comprise… Si ma mémoire est bonne, la phrase exacte est la suivante : Quand le crépuscule révèlera deux soleils, alors le voile se dissipera et l’ambre se brisera.

    ⎯ Les deux soleils ? L’ambre ? répéta Ayron qui ne saisissait pas le sens de cette phrase.

    ⎯ J’ai longtemps cru qu’un second astre poindrait dans le ciel, précisa Maximilien. Il serait cependant difficile de survivre à la chaleur que dégagerait un soleil supplémentaire au-dessus de nos têtes. Pour votre sécurité, j’aviserai néanmoins le directeur de la couleur latente de vos pupilles mais veillez à garder cela secret.

    ⎯ Entendu, lui répondirent en cœur Ayron et Lonhard.

    Maximilien, après cet échange, déroula le fameux parchemin et psalmodia des mots incompréhensibles. Une aura lumineuse entoura alors les deux garçons pour se concentrer ensuite aux niveaux de leurs yeux et de leurs mains. Tout au long de l’incantation, les deux adolescents ressentirent une douce chaleur parcourir leur corps. Une fois la lumière dissipée, leurs pupilles retrouvèrent le teint noisette habituel. Les pierres d’onyx sur leurs bijoux brillèrent aussi d’un éclat particulier, comme si une imposante quantité de mana y avait été absorbée.

    Les trois hommes sentirent une baisse significative de leur énergie à la suite de cette incantation. Harassés, les adolescents remercièrent donc leurs parents pour leur bienveillance et partirent s’affaler dans leur lit respectif sans même prendre de bain, au grand dam d’Ellie.

    Ce n’est que le lendemain, lorsque le soleil atteignit son zénith, qu’Ayron et Lonhard ouvrirent un œil. Absorbés par les émotions de la veille, le sommeil des deux frères ne fut en rien perturbé par le vacarme qui caractérisait le village depuis l’aube. Néanmoins conscient de leur odeur corporelle saumâtre, ils prirent un bain. Après s’être séchés et rhabillés, ils croisèrent leur tutrice dans la cuisine. Après lui avoir fait une bise, ils constatèrent que le déjeuner était déjà prêt et la table mise.

    ⎯ Où est passé Maximilien ? questionna alors Lonhard.

    ⎯ Votre père est parti sur la place principale afin de répondre aux questions des villageois. Les événements de la nuit dernière ont fait des émules, mais il ne devrait plus tarder. Il a missionné les meilleurs artisans du village pour réparer les dégâts.

    ⎯ C’est si moche ? se risqua Ayron.

    ⎯ Une dizaine de clôtures abimées, des arbustes calcinés et tout le champ à retourner pour semer de nouvelles graines. Rassurez-vous, rien d’irréversible répondit Ellie.

    Dans le quart d’heure qui suivit, Maximilien passa le pas de la porte, deux enveloppes à la main et la mine pâle. On aurait pu penser que ses forces vitales l’avaient en partie quitté.

    ⎯ Je ne suis pas mécontent d’être enfin rentré ! Je vois que vous êtes enfin debout, je suis ravi de vous retrouver. La matinée n’a pas été facile pour moi. Avant d’oublier, voici vos convocations à l’institut de magie.

    Il tendit une enveloppe à chacun. Au premier abord, les deux garçons virent une enveloppe classique avec un sceau marron en cire représentant un arbre majestueux. Cependant, Maximilien leur délivra une information supplémentaire.

    ⎯ Je vous laisse les ouvrir, de toute façon je ne pourrais pas le faire moi-même. Ceci pour une raison simple, le cachet se déverrouille uniquement au contact de la personne concernée.

    ⎯ C’est une magie fascinante ! répondit promptement Ayron.

    ⎯ Oui, ils ont récemment renforcé la sécurité. Des mages métamorphes mal intentionnés, des pays voisins, usurpaient l’identité de jeunes recrues afin d’infiltrer nos rangs, les informa Maximilien.

    ⎯ Certains ne doutent de rien ! lança Lonhard.

    Chacun des deux frères se saisit de l’enveloppe à son nom. Une petite étincelle apparut au niveau du sceau en cire au contact de leur

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