LE ROCHER BLANC
PAR ANNA HOPE, TRAD. DE L’ANGLAIS PAR ELODIE
LEPLAT. LE BRUIT DU MONDE, 324 P., 23 €.
ON SAIT QUE LONGTEMPS Proust a rêvé au « petit pan de mur jaune » de Vue de Delft de Vermeer. Anna Hope a trouvé encore plus fascinant: le rocher blanc que l’on aperçoit dans l’océan aux confins du Mexique, au large de San Blas. Une croyance locale indique que s’y trouverait l’origine du monde. Grâce à un séjour là-bas, la narratrice et son mari ont enfin réussi à avoir un enfant, alors qu’ils se croyaient stériles. Ils y retournent avec leur fille pour rendre grâce avec des gens venus du monde entier, tous guidés par un chaman. Portée par sa flânerie, la romancière se lance dans une recherche des temps perdus et évoque tour à tour un chanteur au bout du rouleau (inspiré de Jim Morrison) qui s’est rendu ici même en 1969, une jeune Indienne réduite en esclavage en 1907, un lieutenant de vaisseau espagnol en 1775…
Dieu merci n’est pas un roman à thèse. On peut quand même y lire une condamnation de l’Occident: sans foi ni loi, les colons ont volé des terres et pillé des richesses; devenus des hippies drogués puis des bobos déboussolés, ils reviennent sur les lieux pour trouver un sens à leur vie. Il y a une quête spirituelle dans ce livre, le rocher blanc ayant sur les différents personnages le même magnétisme que celui que la grande baleine sur les marins de . Le capitaine Achab se trouve ainsi réincarné en mère de famille moderne et inquiète, qui redoute l’Apocalypse. Mais demeure l’espoir. La moindre des choses quand on s’appelle Hope.