Les SORCIERES DE SALEM, T.5

Par Millie Sydenier

La bataille finale se met en place. Les deux camps se préparent avec acharnement. Ed, l'ami d'Ezra et espion chez les inquisiteurs, aura un rôle important à jouer dans l'issue du combat. Chez l’ennemi, quelqu’un le surveille et le soupçonne déjà.

Lors d'une escarmouche menée par quelques habitants de la clairière, Ezra est gravement blessée par Tituba. Un poison puissant l'empêche de se réveiller et les sorcières de Terwik font tout ce qu'elles peuvent pour le soigner. Abattues, Abigail et Betty craignent de perdre leur ami.

Un article du Cambridge Gazette leur parvient et sème l’émoi parmi les sorcières de Salem. Leur irréductible village sera la cible de tous les inquisiteurs de la région qui arriveront pour prêter main-forte à Patton. L’espoir renaît quand toutes les sorcières du pays leur envoient des messages de soutien. Plus décidées que jamais, la Confrérie de la Clairière et l’Alliance de Terwik se préparent au conflit. Mais dans toute cette agitation, Sam disparaît soudain…

• Langue: Français
• Éditeur: Éditions JCL
• Date de sortie: 23 mai 2018
• ISBN: 9782894315637

Millie Sydenier

Millie Sydenier écrit depuis toujours. En 2009, après trois années d'études en Lettres Modernes, elle décide de vivre pleinement de son écriture et de réaliser un rêve d’enfant…vivre au Canada. Elle est retournée depuis dans son pays natal, mais garde un merveilleux souvenir de son passage à Montréal !

Aperçu du livre

Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales

du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

Sydenier, Millie, 1986- , auteur

Les sorcières de Salem / Millie Sydenier

Édition originale : [Sainte-Angèle-de-Monnoir, Québec] :Éditeurs réunis, 2009-2011

L’ouvrage complet comprendra 6 volumes.

Sommaire : t. 5. La danse du Chapardeur

Public cible : Pour les jeunes

ISBN 978-2-89431-563-7 (vol. 5)

I. Sydenier, Millie, 1986- . Danse du Chapardeur. II. Titre.

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© 2009 Les Éditeurs réunis

© 2018 Les éditions JCL

Images de la couverture : 123RF, Shutterstock et iStock

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Imprimé au Canada

Dépôt légal : 2018

Bibliothèque et Archives nationales du Québec

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Dans la série

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aux Éditions JCL

Tome 1 : Le souffle des sorcières

Tome 2 : La Confrérie de la Clairière

Tome 3 : La prophétie de Bajano

Tome 4 : L’Alliance de Terwik

Tome 5 : La danse du Chapardeur

À paraître :

Tome 6 : Les pierres d’Éops

Avertissement

Les faits relatés dans ce livre ne sont pas rapportés par l’Histoire. La plupart des personnages du livre ont bel et bien existé sans que je puisse leur prêter les actions que je narre. Au xviie siècle, il s’est produit à Salem des événements dramatiques dont je me suis inspirée pour créer cette série. Mais qui sait ? peut-être que l’Histoire telle que nous la connaissons cache en son sein des éléments que nous ne sommes pas en droit de connaître…

M.S.

1

Cela faisait plusieurs nuits que Betty n’avait pu fermer l’œil. La fatigue commençait à creuser ses traits, mais personne ne le remarquait. Dans la clairière, tout le monde était fébrile. Betty était hantée par le grimoire. Elle ne le quittait plus, l’ouvrant à toute heure du jour ou de la nuit pour tenter d’en extirper les secrets. Elle se souvenait parfaitement du moment où elle avait vu les feuillets blancs se remplir d’une fine écriture à la plume. Dans cet entre-deux mondes où elle avait erré longtemps, sa mère lui avait confié un secret qui détenait un pouvoir surprenant. Un pouvoir qui pourrait permettre à Betty et aux autres sorcières d’inverser enfin le cours des choses. Mais la jeune fille était incapable de se souvenir de ce qu’il y avait d’écrit sur les pages, et encore moins de se rappeler en quoi consistait le pouvoir en question. Elle commençait à désespérer. Abigail, Ezra et Sally avaient tenté de lui faire retrouver la mémoire. La sorcière de Terwik avait lancé un nombre incalculable de sorts différents, tous censés révéler les secrets des objets magiques. Rien n’avait eu d’effet et, peu à peu, Sally s’était intéressée à autre chose. Elle devait continuer l’entraînement d’Emma. Abigail et Ezra avaient toujours été sceptiques quant aux souvenirs de Betty, qu’ils prenaient pour des élucubrations. Mais ils l’avaient quand même soutenue. Pourtant, comme les pages du grimoire restaient obstinément blanches, ils avaient peu à peu abandonné eux aussi. Betty était restée seule avec le mystère, dont elle n’arrivait pas à se dépêtrer. Sa frustration était telle qu’elle était devenue désagréable avec les habitants de la clairière. Même Emma ne l’approchait plus.

Très tôt ce matin, alors que le soleil n’était pas encore levé, Betty était sortie de son lit, le grimoire sous le bras. Elle avait remis quelques branches dans le grand feu central duquel voletaient encore quelques fumerolles. Après s’être fait bouillir de l’eau, elle ajouta dans sa tasse quelques feuilles odorantes. Elle posa le grimoire sur ses genoux et commença à le feuilleter. Lorsque les habitants se réveillèrent, ils trouvèrent la jeune fille prostrée à côté du feu, le livre dans les mains, les sourcils plissés par la concentration.

— Betty ? demanda timidement Abigail. Tu as mangé quelque chose au moins ? Tu as pu dormir ?

L’interpellée se contenta de jeter un regard vague à sa cousine.

— Betty ! Tu ne peux pas continuer comme ça ! s’exclama Abigail en haussant le ton.

Cette fois, la jeune fille releva la tête et fixa Abigail avec fureur.

— Continuer comment, Abi ? Continuer quoi ? Tu ne sais pas ce que c’est que de connaître la solution pour nous sauver mais d’être incapable de s’en souvenir ! Je ne dors plus, je ne mange plus, je suis complètement obsédée par ça ! Il faut que la mémoire me revienne sinon nous sommes perdus, je le sais ! Tu n’as aucune idée du poids qui pèse sur mes épaules !

— Mais personne ne te demande de supporter un tel poids…

— Je suis obligée ! tonna Betty. Je n’ai pas le choix. Ma mère me l’a spécifié : si je n’utilise pas ce qu’elle m’a donné, nous sommes perdus…

Betty baissa la tête, accablée. Abigail ne savait plus quoi dire. Elle s’éloigna, les épaules basses, et partit rejoindre Ezra qui s’apprêtait à aller entraîner les sorciers. Celui-ci s’arrêta dès qu’il vit son amie approcher, l’air triste.

— Betty est toujours obnubilée par ces pages ? demanda-t-il.

— Plus que jamais, soupira Abigail. J’ai peur qu’on ne parvienne pas à l’en faire décrocher.

— Laisse-lui un peu de temps ! Elle se rendra compte toute seule que son entêtement est ridicule !

— Mais on a besoin d’elle maintenant ! La bataille est imminente et Betty fait partie des sorcières les plus puissantes. Elle devrait en ce moment même s’occuper des autres, les entraîner, les rassurer, leur montrer qu’elle sera toujours à leurs côtés et qu’ils ne doivent pas avoir peur. Comme ce que nous faisons, Sally, toi et moi.

— Je sais, mais…

— Tu as vu comme les gens la regardent ? Tu les as vus ? Ils pensent qu’elle va les abandonner ! Et tu sais, je ne leur en veux pas. C’est exactement ce qu’elle fait…

— Arrête, Abi ! Tu sais aussi bien que moi que Betty est plus têtue qu’une mule ! Quand elle a une idée dans la tête, elle n’arrive pas à s’en détourner avant d’avoir trouvé la solution ou de s’être rendu compte par elle-même qu’il s’agissait d’une erreur. Alors laissons-lui du temps et, en attendant, partageons ses tâches. Prends encore plus de personnes avec toi et je demanderai aux sorcières de Terwik d’en faire autant.

— Et toi ?

Ezra la regarda, surpris.

— Moi ?

— Est-ce que tu vas t’occuper des sorcières ? Est-ce que tu vas aider les gamins et les vieillards à tenir leurs arcs et à fabriquer des armes ?

— Je ne peux pas, tu le sais bien, répliqua Ezra en baissant la tête.

— Mais que fais-tu avec ces hommes qui soit tenu si secret ?

— Quand tu verras, tu ne seras pas déçue, je te le promets.

Il ne laissa pas le temps de répondre à Abigail et s’éloigna rapidement sous le regard interrogateur de la jeune fille.

— Ezra !

Le jeune homme se retourna. Sally avançait vers lui à grands pas. Il soupira discrètement. Il savait très bien de quoi elle voulait lui parler.

— Ezra ! Nous devons discuter.

— Je n’ai pas le temps, Sally ! Je dois…

— Tu dois entraîner tes hommes, je sais. C’est justement ce dont je voulais t’entretenir. Tu n’as pas le droit de nous cacher ce que tu fais avec eux. Les autres sorcières et moi, nous pourrions peut-être vous aider.

— Je ne crois pas, répondit laconiquement Ezra. Il s’agit d’une technique que je ne fais qu’expérimenter.

— Comment l’as-tu connue ? demanda Sally, les mains sur les hanches, les sourcils froncés.

— Je l’ai trouvée dans un des livres que vous nous avez apportés.

Stupéfaite, Sally resta sans voix. Ezra regardait la sorcière avec, sur les lèvres, un petit sourire qui acheva d’énerver celle-ci.

— Tu te souviens de ce que nous avons convenu ? Plus de secrets ! Tu ne dois plus faire cavalier seul. Tu te souviens de ce qui a failli arriver la dernière fois que tu as agi ainsi ? Dois-je te rappeler que Betty a failli mourir ?

— Sally ! coupa Ezra. Je sais ce que je fais. Je ne veux juste pas donner de faux espoirs à la Confrérie ou aux sorcières de Terwik. Je ne sais pas si j’arriverai au bout de cette technique et, si tel n’est pas le cas, je préfère que vous n’en sachiez rien. Mais si l’inverse se produit et que, par miracle, je parviens à la rendre effective, cela pourrait grandement nous aider !

— Mais…

— Occupez-vous d’Emma, Sally, s’il vous plaît. Et laissez-moi gérer mes hommes. Nous avons tous les deux un grand rôle à jouer dans le combat qui se prépare. Je ne vous décevrai pas, je vous le jure. Mais par pitié, laissez-moi tranquille !

Ezra adressa un gentil sourire à Sally et s’éloigna rapidement avant qu’elle ait pu ajouter quoi que ce soit. Il secoua la tête en riant intérieurement. Dieu que ces femmes étaient curieuses !

Aussitôt sorti de la bulle protectrice de la clairière, il s’envola pour atterrir presque immédiatement dans sa grotte où l’attendaient ses cinq sorciers. Très impatients, ceux-ci bondirent sur leurs pieds dès qu’ils aperçurent Ezra.

— Prêts à recommencer ? questionna ce dernier.

Un hurlement lui répondit. Empressés, les hommes s’alignèrent aussitôt et Ezra vint prendre place parmi eux. Chacun attrapa les bras de ses voisins.

— Attention ! commença Ezra. Et… maintenant !

* * *

Sally obéit à Ezra et alla s’occuper d’Emma qui errait dans la clairière à la recherche d’une activité. Malgré tout ce qu’avaient dit Ezra, Abigail et Betty aux autres habitants de la clairière, ceux-ci fuyaient encore Emma. Même les enfants la craignaient. La petite fille aurait tout donné pour partager un peu de son temps avec quelqu’un de son âge. Ce n’est pas qu’elle n’aimait pas la compagnie des sorcières de Terwik ou des filles Parris. Au contraire, toutes s’occupaient beaucoup d’elle, la cajolaient, la faisaient rire ou la consolaient quand elle en avait besoin. Mais Emma avait envie de courir, de hurler, de rire aux éclats, de grimper aux arbres et de jouer des tours aux grandes personnes. En somme, elle voulait enfin se comporter comme une enfant. Elle avait cru que la présence de Zïna lui attirerait des amis. Mais la chatte était encore plus crainte qu’elle. Ses yeux transperçaient quiconque s’approchait d’Emma et les gens trouvaient anormal qu’un animal suive ainsi une petite fille. Emma avait bien compris que certains enfants auraient voulu l’approcher et lui poser mille questions. Elle avait surpris une mère en train de faire des remontrances à son fils qui avait tenté de lui adresser la parole. Dans un univers de sorcières et de magie, Emma se sentait plus seule que jamais. L’avenir la préoccupait aussi. Quand le combat serait terminé, qu’adviendrait-il d’elle s’ils en sortaient vainqueurs ? Sally et les sorcières retourneraient vivre dans leurs villages respectifs. Ezra et Abigail s’installeraient sans doute ensemble. Quant à Betty, Emma n’était pas dupe. Elle avait surpris les regards langoureux que lui lançait le beau Sam. Betty le suivrait sans doute à Boston. Qui s’occuperait d’elle ? Emma soupira, accablée. Elle se posait beaucoup trop de questions pour ses huit ans, ainsi que Sally le lui avait déjà fait remarquer. La sorcière se dirigeait justement vers elle à vive allure, l’air furieux. Emma savait bien que la fureur de Sally ne la visait pas. Elle avait sans doute encore essayé de tirer les vers du nez d’Ezra mais sans succès. L’enfant grimaça quand même. Son entraînement n’allait pas être de tout repos et elle ne se sentait pas en forme aujourd’hui. La nuit avait été pénible et peuplée de cauchemars. Même Zïna n’avait pu l’apaiser.

— Emma ! s’exclama Sally d’un ton cinglant. Je t’ai cherchée partout ! Il faut que tu travailles !

Emma fit la moue et baissa la tête. Sally s’attendrit aussitôt. Elle remonta les pans de sa robe et s’accroupit face à l’enfant. D’un doigt, elle releva le menton de la petite, mais celle-ci refusa de la regarder dans les yeux. Alors Sally l’attira contre elle et la serra fort tout en la berçant. Emma se laissa aller et savoura le contact chaud de la grande sorcière.

— Pardon, mon enfant. Tu sais que je ne suis pas fâchée contre toi. Cet Ezra n’en fait qu’à sa tête. Il me met hors de moi. Et le pire… c’est que je ne lui en veux même pas. Ce garçon est un charmeur de première ! Je comprends pourquoi Abigail est tombée dans ses bras.

Emma étouffa un rire sur l’épaule de Sally. Heureuse de l’entendre, Sally en profita pour chatouiller la petite. Emma se débattit un moment puis, finalement, elle s’esclaffa si fort que tout le monde dans la clairière se figea et regarda la sorcière et l’enfant d’un air désapprobateur. Sally pouffa et entraîna Emma, qui riait encore, à sa suite. Zïna suivit ses compagnes, la queue dressée et les oreilles bien droites.

* * *

Tituba faisait les cent pas devant Coleen Diver, Marian Soulth et Hilda Trey, l’air martial. Les trois femmes avaient les yeux vitreux et se tenaient trop droites pour que leur posture paraisse naturelle. Tituba leur lançait des regards haineux qui ne semblaient pas les toucher. Elles avaient le regard vide et semblaient dépourvues d’âme.

— Vous souvenez-vous d’Ezra ? demanda Tituba.

Coleen, Marian et Hilda hochèrent la tête.

— Parlez-moi d’un souvenir avec lui. À vous, Hilda !

— Il me vendait de la viande. Il travaillait pour Hank.

— Vos enfants ont-ils déjà été