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DE QUOI LA LITTERATURE AFRICAINE EST ELLE LA LITTERATURE: Pour une critique décoloniale
DE QUOI LA LITTERATURE AFRICAINE EST ELLE LA LITTERATURE: Pour une critique décoloniale
DE QUOI LA LITTERATURE AFRICAINE EST ELLE LA LITTERATURE: Pour une critique décoloniale
Livre électronique475 pages7 heures

DE QUOI LA LITTERATURE AFRICAINE EST ELLE LA LITTERATURE: Pour une critique décoloniale

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À propos de ce livre électronique

Au cours du XXIe siècle, on a régulièrement insisté sur l’urgence de penser la littérature depuis l’Afrique et la nécessité d’adapter les principes et les méthodes de l’exercice critique aux particularités de sa littérature – qui, selon certains, n’existerait même pas en tant que telle. Étant soumise à un double statut social et culturel et à des affiliations culturelles multiples, la littérature africaine d’expression française mérite pourtant un traitement critique différencié qui parachève ses possibilités de réalisation.

Écrit avec érudition et élégance, cet ouvrage propose une réflexion sur la validité scientifique et sociale d’une philosophie de la rupture, indispensable au développement d’une certaine critique. Par ailleurs, des entretiens avec quatre écrivains permettent de répondre à des questions qui servent de jalons tout au long du livre : la littérature africaine existe-t-elle ? Que valent ses écrivains et leurs éditeurs ? Où sont ses lecteurs et son public ? Qu’en disent ses critiques, les collections qui l’accueillent, et les prix littéraires qu’elle reçoit ? De quelle couleur sont ses agents et ses traducteurs ? En en quel français s’écrit-elle ?
LangueFrançais
Date de sortie17 janv. 2022
ISBN9782760644663
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    Aperçu du livre

    DE QUOI LA LITTERATURE AFRICAINE EST ELLE LA LITTERATURE - Éric Essono Tsimi

    Éric Essono Tsimi

    De quoi la littérature africaine

    est-elle la littérature?

    Pour une critique décoloniale

    Les Presses de l’Université de Montréal

    La publication de cet ouvrage a été possible grâce à un prix de recherche PSC-CUNY, financé conjointement par le Professional Staff Congress et la City University of New York.

    Mise en page: Chantal Poisson

    Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

    Titre: De quoi la littérature africaine est-elle la littérature? Pour une critique décoloniale/Éric Essono Tsimi.

    Noms: Essono Tsimi, Éric, auteur.

    Collections: Pluralismes (Presses de l’Université de Montréal)

    Description: Mention de collection: Pluralismes | Comprend des références bibliographiques.

    Identifiants: Canadiana (livre imprimé) 20210052864 | Canadiana (livre numérique) 20210052872 | ISBN 9782760644649 | ISBN 9782760644656 (PDF) | ISBN 9782760644663 (EPUB)

    Vedettes-matière: RVM: Littérature africaine—Histoire et critique. | RVM: Postcolonialisme. | RVM: Décolonisation.

    Classification: LCC PL8010.E87 2021 | CDD 896 .09—dc23

    Dépôt légal: 1er trimestre 2022

    Bibliothèque et Archives nationales du Québec

    © Les Presses de l’Université de Montréal, 2022

    www.pum.umontreal.ca

    Nous ferions mieux de moins invectiver contre les Blancs et de boire davantage.

    René Maran, Batouala

    Nun bin ich endlich geboren! – Enfin je suis né !

    Goethe, cité par André Gide, De l’influence en littérature

    Avant-­propos

    Imaginons qu’un kamikaze surgisse au moment d’un rituel médiatique d’une relative importance dans la vie et la circulation des idées et des livres. Disons, par exemple: au moment d’une émission de télévision, La grande librairie sur France 5, dont l’auteur du présent ouvrage serait l’heureux invité. Imaginons ensuite que le terroriste ne soit ni arabe comme à Charlie Hebdo ni noir comme chez Tierno Monénembo. Imaginons qu’il soit blanc. Ses motivations seraient inconnues. Parce qu’il lui faut une origine, disons qu’il serait venu exprès de Norvège ou de Nouvelle-­Zélande pour tout faire exploser. Imaginons que tout compte fait, à la vue de ce beau linge, des lumières du plateau, du sourire contagieux de François Busnel, et de la panique du public en petit nombre (unhappy few), le terroriste hésite à semer la mort et la désolation. Imaginons qu’il renonce momentanément à sa cruauté, à la condition que votre serviteur, qu’il a interrompu en plein étalage de savoir, lui raconte une histoire qui le fasse pleurer de chagrin… Imaginons donc qu’il fasse l’aumône d’un ultime sursis: à cette seule condition, digne d’un sultan des Indes, qu’une histoire à pleurer lui soit contée à chaque crépuscule et que les caméras continuent à tourner dans ce qui sera enregistré dans le Guinness des records comme le plus long direct jamais réalisé. L’écrivain en promotion, le chercheur, sommé de défendre, plutôt que son livre, l’émission LGL, voire le service public français dans son ensemble, raconte alors l’histoire de Musenzi.

    Musenzi signifie, dans une langue africaine, «non-­civilisé»: une espèce de barbare de l’intérieur, un indigène, comme ils disent. En 1940, Musenzi a accueilli un commandant français, un certain Leclerc venu à bord de son navire amiral, sur les côtes camerounaises, à Douala. Leclerc avait été envoyé par de Gaulle. C’était après le fameux appel londonien, lancé depuis une certaine radio, un certain mois d’été: monsieur de Gaulle venait d’appeler la France libre et l’autre France, un peu défaite et un peu collabo, à résister comme une seule et même France. Ses amis britanniques lui avaient conseillé d’aller se ressourcer dans les bases arrière et militaires de l’Empire, en Afrique, pour venir à bout de l’ennemi nazi et libérer la France occupée. Musenzi fit alors du Cameroun le premier «rallié» de l’Empire: il était si content d’exister auprès de son ami français, ce Musenzi, que des années plus tard, il baptisa d’ailleurs l’hymne national camerounais «le chant de ralliement». Il y avait des alliés et il y avait donc des ralliés. Les Africains étaient ralliés. Pourquoi «ralliés» plutôt qu’alliés tout court? Dans les fables, les dénominations ne sont jamais les mêmes selon que vous êtes jugé puissant ou misérable. Il fut décidé que le Cameroun pourvoirait du caoutchouc, à partir du lieu-­dit appelé Dizangué, la Centrafrique et le Mali de l’or, et que l’Afrique-­Équatoriale française se mobiliserait corps et biens. En un mot, toutes les ressources naturelles et minières nécessaires aux armées américaine et de la France libre pour construire notamment force engins de la mort seraient mises à contribution. Musenzi n’avait jusqu’alors vécu que de chasse écoresponsable et de cueillette de cinq fruits et légumes par jour. Musenzi allait dorénavant aider de manière inlassable ses amis français, qui le lui rendraient bien en l’habillant décemment (en tenue de combattant, qu’il était désormais). Lui demandait-­on d’embarquer qu’avec joie, Musenzi embarquait. Voulait-­on qu’il débarque que Musenzi, avec plaisir, débarquait. Au point de se retrouver, lui, le chasseur camerounais, grimé en un tirailleur sénégalais; lui, le soldat noir, perdu dans une escouade blanche, pendant la bataille de Falaise, en Normandie.

    Un jour, alors que l’escouade à laquelle il était affecté était en patrouille, un feu d’artifice et de mitrailleuses allemandes fondit littéralement sur lui au moment de traverser un verger normand, s’abattant sur l’escouade comme plus tard la misère sur la pauvre Afrique. Habile aux techniques de chasse à bout portant, adepte du corps à corps, Musenzi, crosse en l’air, rompit le rang. Les forêts camerounaises du Dja où il tuait sa ration quotidienne de gibier l’avaient formé: il courut vers les nazis sans peur, pour les étêter et les éviscérer morts ou vifs, comme de vulgaires sardines. «Un bon nazi est un nazi saignant», disait un haïku en sa langue. Et, zigzaguant d’un arbre à l’autre, au milieu de ces chênes disposés en quinconce, plus espacés que les arbres des forêts de son Dja-­et-­Lobo natal, n’écoutant plus les ordres de son chef d’escouade qui voulait à présent que les «chasseurs à pied» restent groupés, il s’était rendu jusqu’à l’ennemi. Alors que les balles déchiquetaient certains corps alliés pourtant restés à l’abri, rien ne l’atteignait. Les charges de l’ennemi l’esquivaient, glissaient sur sa peau noire maraboutée.

    Après la guerre, Musenzi a souffert d’un syndrome de stress post-­traumatique, c’est-­à-dire, en langage profane, d’un trouble comportemental de guerre. Tant et si bien qu’il n’a plus pu manger de viande fraîche du Dja sans haut-­le-­cœur. C’est que toute cette orgie de chair et de sang humains l’avait changé, comme ramolli. Rentré au Cameroun après l’issue victorieuse de la guerre, il a fait une dizaine d’enfants à la première broussarde impressionnée par ses exploits. Comme une malédiction, toute sa progéniture a rêvé depuis lors de la douce France pour laquelle Musenzi se serait battu, sans qu’une quelconque version canonique, ni romans (merci quand même à mon frère d’âme, David Diop) ni médailles, atteste la véracité de ses prétentions.

    Imaginons qu’au bout de cent jours à attendre sa première larme, après cent une nuits de séquestration sur ce plateau C du studio Pierre Desgraupes, au sous-­sol de France Télévisions, après que l’écrivain-­chercheur a multiplié les personnages et les péripéties de son conte schéhérazadien, après que Jean-­Pierre Devillers a perdu toute maîtrise de son émission, imaginons que le kamikaze ne soit guère plus convaincu que le premier jour de la sagesse de votre serviteur ni de la pertinence de lui acheter des livres, et n’ait pas été ému une seule seconde. Que se passerait-­il dans cette émission, désormais retransmise en mondovision, où ce décor si familier s’apprêterait à être transformé en scène de crime?

    Même s’il peut en donner l’impression, le but du présent ouvrage n’est ni de plaindre ni de faire pleurer, et la cible n’en est pas l’Occident. Il ne vise pas à présenter les Africains comme des victimes, mais comme les acteurs défavorisés de rapports de force provisoirement désavantageux. Tels des Sisyphe roulant leur pierre sur la montagne, les écrivains et penseurs africains sont des héros pour les leurs, des Prométhée ayant volé quelque feu, mais tardant parfois à le ramener aux origines (les leurs et celles du feu). En tout état de cause, selon la formule du Mythe de Sisyphe, il faut imaginer ces héros heureux. J’ai choisi d’analyser, à travers ce glissement de l’âge solidaire (universalisme communautaire) à l’âge du self (communautarisme décolonial), des contemporains ayant réussi, des écrivains dont je suis souvent admiratif et qui ont le cœur rempli de leur «lutte elle-­même vers les sommets». Malgré sa tonalité neutre et un effort d’objectivité visant à en garantir la crédibilité et la justesse, cette réflexion peut présenter, dans certaines de ses conclusions, des traits et accents militants, caractéristiques du genre et significatifs des tensions vécues tout au long de ces dernières années de lecture, critique, recherche, collecte, analyse et traitement de données. Celles-­ci ont abouti à la production d’un roman Migrants Diaries (2014), d’un essai confidentiel sur l’identité (2013), d’articles savants (2016, 2017, 2019, 2021) et à présent de cette contribution interdisciplinaire, reflétant ma trajectoire intellectuelle: littérature, philosophie, psychologie et sociologie mêlées.

    L’idée à l’origine de cette protomythologie introductive qui imite le principe des œuvres afrosporiques (afrodiasporiques), celles des «enfants de la postcolonie» (novellisation des postures, métaphorisation, allégorisation, fictionnalisation) et des pères (et mères) de la mouvance décoloniale, n’est ni normative ni axiologique. Elle ne prétend pas convoquer les écrivains africains au devoir, ils assument déjà leur part. L’intention est non seulement de partager certaines des notations que je n’ai pas voulu garder prisonnières de mes journaux de bord (de thèse), mais encore d’incarner modestement, à travers la fable d’un aller-­retour, les tensions et la complexité de l’histoire récente de l’Afrique. Chaque période à venir aura tendance à retenir un aspect spécifique de cette histoire pour répondre aux défis actuels et aux questionnements immédiats du XXIe siècle. Plusieurs versions concurrentes de cette fable peuvent être imaginées pour meubler les cent et une nuits qu’aurait duré la tentative d’attentat transformée en séques­tration, puis prise d’otages. Elles traduiraient autant un idéal divers (ce mot, dans mon écriture, est hanté par Victor Segalen et Édouard Glissant) qu’une identité multiple. Les relations entre l’Afrique et la France constituent le logiciel d’édition de toutes les mythologies contemporaines de ce continent où les indépendances sont si fragiles. L’une des morales sous-­jacentes de cette fable est que la disponibilité et le penchant culturel de Musenzi au voyage, à l’ouverture et à l’acceptation de l’autre l’ont rendu vulnérable, lui et son afrodescendance. Cette vulnérabilité, cette «faille» (Mbembé, 1993) sont au cœur de la critique décoloniale.

    Prolégomènes

    Les Camerounais sont pénibles, fanfarons, fiers, ils ne sont pas aimés en France, pas autant que les Sénégalais, par exemple, ou les Ivoiriens. Il suffit de croiser les profils de Calixthe Beyala, Célestin Monga, Achille Mbembé, Léonora Miano et Patrice Nganang pour avoir sous les yeux un portrait chinois du Cameroun, un monstre, une chose absolument inapte à parvenir à un quelconque consensus. Les considérer les uns sous l’éclairage des autres est peut-­être la seule façon de comprendre l’ethos de ces écrivains, et, l’ayant compris, même en étant soi-­même camerounais, la meilleure façon de persister dans l’autodétestation, voire de tomber dans la désaffection ou la méconnaissance dans lesquelles les Français les tiendraient.

    En juin 2020, Télérama publiait une liste des cent livres les plus dignes de figurer dans la «bibliothèque idéale»: aucun texte africain ne s’y trouvait. Aux Loti, Barrière, Delafosse, Delavignette, Maran ont succédé Senghor, Kourouma, Tchak et Waberi: la littérature africaine, après avoir été la littérature des Français d’Afrique, est devenue la littérature des Africains de France. Il y a donc bien méconnaissance de cette production culturelle et de sa valeur. Méconnaissance, mépris ou déni d’existence entretenus par les a priori culturels et les préjugés coloniaux que les auteurs les plus emblématiques subissent en même temps qu’ils provoquent et, dans le cas des Camerounais, par la défiance qu’ils inspirent. Ces barrières cognitives et psychologiques (s)ont une histoire qui perpétue l’excommunication de Mongo Beti. Je me souviens, l’auteur de Ville cruelle (1954) était accusé de ne pas aimer la France, et à cause de cela, estimait avoir toujours été puni en n’étant jamais récompensé. Au-­delà de tout portrait-­robot de l’homo scribens camerounens, les Camerounais représentent ce que la littérature africaine d’expression française a jusque-­là produit de meilleur au XXIe siècle. Ils dominent, de loin, le palmarès du Grand Prix littéraire d’Afrique noire, du Femina, du prix Orange du livre, et l’Académie française les a distingués mieux que quiconque en Afrique. Peut-­être sont-­ils simplement au-­dessus du lot? Je me suis posé la question.

    De quelle citoyenneté est la meilleure littérature francophone, d’ailleurs? «Meilleure»: c’est là une épithète sans valeur absolue. Classer les livres les plus importants sur l’Afrique ou les meilleurs romans de la décennie, constituer la bibliothèque idéale, c’est un piège à clics sur Internet, une mode largement adoptée dans les listicles et exploitée dans les études universitaires. Confronter les littératures nationales, les comparatistes le font, mais guère dans le sens d’une hiérarchie des valeurs. Il n’y a en conséquence pas de réponse parfaite ni définitive à cette question de la meilleure bibliothèque francophone. L’idée d’accoler une épithète nationale à quelque littérature répugne à la plupart des écrivains africains, tant leur art entend transcender les frontières politiques, quand même il s’ancre dans des matières conflictuelles géolocalisables. La hiérarchisation peut certes prendre un sens au sein d’une période ou d’un espace déterminé. On peut convenir que militairement, la France est plus puissante que le Tchad, s’accorder sur les performances sportives ou scientifiques de telle équipe, telle université, tel pays, sans que cela débouche sur une fétichisation des identités nationales ou sur le mythe funeste d’une civilisation supérieure. Il reste que les littératures francophones peuvent ou doivent être comparées en valeur pour mieux souligner leur complémentarité et l’universalité du génie francophone. Le relativisme culturel, le concept selon lequel les différentes productions sont également valables en soi est moralement pernicieux. La vérité est que la littérature et les arts peuvent et doivent être évalués sur la base des distinctions et des prix certes, mais aussi des valeurs qu’ils véhiculent. La littérature camerounaise, la mieux primée par le prix Ivoire par exemple, est objectivement supérieure aux autres littératures nationales d’Afrique parce que le spectre de ses thématiques est plus divers: la liberté, la démocratie, les frontières, le féminisme, la colonisation et la science y remettent en question le monde, l’anticipent, le réinventent. Et les écrivains qui les incarnent, des femmes le plus souvent, des gays aussi, ou des génies fous comme Nganang, se posent en orateurs du genre humain, parlent du singulier au général, articulent leurs particularismes à une sorte d’impératif cosmo-­esthétique.

    Pour être concret, avant de m’intéresser plus loin à la matière du texte, je voulais citer d’entrée de jeu des noms d’auteurs, c’est-­à-dire des profils, mais aussi évoquer des titres et des prix littéraires. Le but de la manœuvre: montrer comment la culture camerounaise, en produisant peu, se distingue beaucoup. La qualité d’une littérature doit être évaluée aussi à l’aune du volume de ses déchets: le Cameroun en produit beaucoup moins que partout ailleurs, en tout cas en ce XXIe siècle. La littérature camerounaise aborde surtout le voyage ou le cosmopolitisme, la tradition, les rapports de domination, l’histoire et l’ethnicité… Elle est camerounaise par défaut, de manière résiduelle; elle existe par-­delà les frontières et en dépit d’une nationalité précaire. «En dépit», car cette littérature, ce bouillon de culture, semble exister du fait d’une génération spontanée d’écrivains. C’est la colonisation qui, ayant inventé le Cameroun (avec ses forces et surtout ses faiblesses), a aussi inventé sa littérature moderne (avec ses qualités et ses tares). La sous-­littérature camerounaise constitue l’une des cautions de la diversité du domaine français de la littérature.

    On peut aisément contester mon système d’indexation ou de notation culturelle. Toutefois, je me sers de la mesure avec laquelle on nous a façonnés, des reconnaissances que, malgré notre sous-­production de livres et une exposition faiblarde de ceux-ci, nous avons pu obtenir. La pire chose qui soit arrivée aux Africains par le passé, c’est d’avoir eu des littératures nationales dites, produites, diffusées, distinguées, contrôlées par les conquérants et les maîtres. Ce péché originel se retourne et fait désormais la force d’une littérature qui s’épanouit et se distingue dans un patrimoine français francophonisé, désormais abordé et expliqué par ce qui était naguère ses marges. La littérature camerounaise se définit par des événements liés à la rencontre avec l’homme blanc (par exemple, la colonisation, les guerres, les migrations, l’intégration), mais aussi en termes liés à la terre (par exemple saisons, aubes, plantations, pour ne retenir que quelques mots tirés des titres les plus connus). Les écrivains camerounais réalisent une synthèse entre art et science, entre tropismes universalistes et croyances communautaires, entre détermination individuelle et déterminisme social – je pense ici à l’écriture et l’orientation sexuelle de Max Lobe. Quand je donne à lire des ouvrages africains, la question de la langue m’obsède. Je me demande à quel point mes étudiants s’y retrouvent, eux qui ne sont pas des locuteurs natifs du français et qui doivent lire ces textes en français, même si parfois ils peuvent en rendre compte en anglais.

    Nul besoin de maîtriser le camfranglais pour comprendre mieux qu’un Camerounais un texte écrit en cette langue composite. Les écrivains ne s’y trompent pas en ne laissant pas se perdre cette langue qui les cherche. Je me souviens encore qu’à l’automne 2019, lors de sa critique de 39 rue de Berne, un étudiant de l’Ohio State University avait relevé l’abondance des expressions comme: «là là», «bienfaiteur-­philanthrope», «fais quoi fais quoi», etc. L’interprétation que j’avais privilégiée pour parler de ces répétitions était d’abord linguistique. Je leur avais souvent expliqué comment, dans le camfranglais, l’emphase se traduit par cette figure de répétition qui consiste à étirer une syllabe.

    Naguère, dans la maison où j’ai grandi, quand ma petite sœur voulait attirer notre attention et que nous regardions par exemple la télévision, elle disait: «Qu’heiiiiin.» La conjonction de subordination censée relier deux propositions avait dans ce cas une fonction de contact: «Qu’heiiiiin.» Que + hein: le «hein» était vocatif, phatique… Comme dans la culture populaire, où l’on retrouve souvent ce «hein». Dans sa chanson Coller la petite (2015), Franko commence par «mon ami, je dis heiiiiin»… Lydol, dans son morceau de hip-­hop Le Ndem (2018), utilise ce même «hein» dans son premier vers.

    On peut être si habitués à cette parlure, à la particule emphatique et démonstrative «là» employée à toutes les sauces («le gars-­là, là-­là…») dans le langage parlé, si habitués que lorsqu’on les retrouve dans des textes, on les croit justifiés comme simples faits de langue. Sauf que l’écrivain se sert de la langue autrement. Mon étudiant, dans sa présentation, avait adopté une approche totalement différente, mais juste. Il avait parlé de «mêmeté», de la répétition comme figure homoérotique. Le narrateur étant homosexuel, l’étudiant en question avait proposé une lecture inattendue de ces tournures camerounaises utilisées dans le roman, y trouvant l’expression de l’universalité de l’homosexualité. Cette anecdote pour dire que la connaissance du contexte ne nous permet pas automatiquement de mieux saisir l’œuvre: il faut aussi, pour lire, savoir se délester de notre familiarité avec le contexte pour entrer dans le texte lui-­même.

    Il est facile, dans l’espace francophone, d’apprécier la valeur relative des littératures africaines, en constituant un dossier critique et historiographique complet, avec toutes les dynamiques culturelles internes et externes aux nations. Selon moi, la valeur pourrait être un sujet décisif en littérature. Certes, aucune évaluation ne pourrait établir qu’une quelconque littérature est meilleure que les autres. D’un point de vue historique, il peut aller de soi que ce sont la France ou Haïti qui ont les fonds les plus enviables; en étant pragmatique, on peut considérer que le pays francophone qui publie le plus ou qui a la plus grande liberté d’expression produit certainement les œuvres parmi les plus marquantes de la littérature d’expression française. Le Québec, la Belgique ou la Suisse romande seraient alors des références. Mais rien ne garantit que la liberté, la puissance ou la richesse (même si elles aident vraiment, notamment à produire plus de déchets ou à recycler plus rapidement) soient des facteurs décisifs dans la production de chefs- d’œuvre. En faisant preuve d’idéalisme et en considérant ses effets sur le monde, nous méjugerions encore la littérature africaine. Les ressources numériques et Internet ont rendu la pauvreté moins handicapante, ont entraîné un changement dans la littérature mondiale dont il n’est pas possible d’évaluer immédiatement les répercussions. Beaucoup de ces changements ne sont pas pour le mieux, mais dans le cas de l’Afrique, des réseaux sociaux et de la création littéraire, la balance est essentiellement positive: on constate une sorte de renouveau de la parole et de l’oralité. Néanmoins, pour en revenir au mérite national, la littérature africaine la plus intéressante est, en l’occurrence, celle à laquelle le monde a été le moins exposé. Ce que je souhaite montrer, c’est qu’elle est la plus à même d’offrir des possibilités d’apprentissage, d’innovation et de régénération des vieilles littératures québécoises, belges ou haïtiennes. Je suis toujours un peu philosophe quand il s’agit de présenter un cours sur l’histoire, les sociétés ou les littératures africaines. L’importance de la littérature en tant que représentation culturelle et expérience particulière du monde va de soi quand il s’agit des littératures occidentales ou venant d’Afrique du Nord, du Moyen-­Orient, d’Amérique latine ou d’Asie. Pour ce qui est du reste de l’Afrique, en revanche, il faut être un peu philosophe, un peu sociologue, expliquer, justifier, accuser, relativiser… Aussi la concurrence littéraire entre différentes nations francophones peut-­elle donner lieu à un début de théorie critique de la francophonie. Je ne cache pas que la proclamation de la supériorité, en ce XXIe siècle, de la littérature camerounaise vise à encourager la manifestation d’autres expériences nationales en Afrique. La littérature africaine facilite l’éducation linguistique, aide à la formation francophone des étudiants américains, chinois, australiens, japonais, brésiliens… Dans le cas de l’Amérique du Nord, par exemple, cette littérature francophone aiguise la conscience d’une culture qui se trouve aux racines de leur économie et de leur société. Le passé, le présent et l’avenir sont en jeu; toutes les communautés francophones ayant massivement immigré aux États-­Unis depuis le XXe siècle constituent en effet une partie de leur histoire contemporaine. La centralité de l’Afrique dans les études de la langue française, sa diffusion comme sujet de recherche dans des domaines autres que les African studies, les études de développement ou l’ethnologie constituent des fenêtres de tir et d’occupation du français. Il ne s’agit plus de décoloniser notre langage, comme le préconisait Ngũgĩ wa Thiong’o il y a trois décennies, mais de coloniser la langue française, de lui insuffler tous nos accents et toutes nos vérités, et de l’enseigner partout comme nouveau standard, de valoriser le cas échéant le camfranglais, le nouchi ou les langues émergentes qui revigorent nos ressemblances transsahariennes, transméditerranéennes, au point de devenir le substrat du français contemporain des cités. Les écrivains sabotent le français, le désacralisent et le défigurent, avec des références, des mots et des images puisés dans les langues nationales: de langue dominante, le français devient langue dominée.

    La nouvelle normalité produite par les réseaux sociaux et la libéralisation de la diffusion des idées a provoqué un décalage évident entre la littérature telle qu’elle était produite et consommée, l’influence de grands groupes d’édition, de distribution et de diffusion, et les besoins émergents d’une jeunesse africaine mieux informée, créant de nouveaux cadres d’action qui peuvent être perçus comme dissociés des justifications littéraires traditionnelles. La lettrure diversifie les usages de la lecture et de l’écriture, la pédagogie décoloniale intègre dans la littérature les productions des médias sociaux pour lesquels les formes habituelles d’enseignement sont inefficaces. L’usage des nouvelles technologies et les progrès de la communication audiovisuelle contribuent à satisfaire le besoin de fiction vivante typique des jeunes lecteurs. Les humanités peuvent être numériques, africaines et décoloniales tout en ancrant la culture de la parole comme modalité de l’orature.

    La cohérence des études francophones comme instrument de cons­truction culturelle des individus et des communautés africaines commande une réévaluation de la part qu’a jouée l’Afrique dans l’œuvre de la France. Parmi les derniers Nobel français, trois lauréats sur sept étaient à la fois français et étrangers: Albert Camus est algérien; J. M. G. Le Clézio, mauricien; Gao Xingjian est à la fois français et chinois. On peut ajouter que Claude Simon est né à Madagascar; Saint-­John Perse, dont l’œuvre s’ouvre sur le cycle antillais, est né à Pointe-­à-Pitre et a été marié à une Américaine; et Maryse Condé, lauréate du prix Nobel alternatif 2018, est guadeloupéenne. Blanche et chrétienne «en apparence», c’est-­à-dire si l’on regarde les auteurs mis en avant par les principaux éditeurs, ainsi que les principales chaînes de télévision publique et privée, la France est européenne avant tout, mais n’en garde pas moins dans ses veines du sang africain. La colonialité, le sens et la langue sont des domaines d’intérêt cruciaux pour toute approche critique du fait social-­littéraire subsaharien. J’insiste donc sur l’importance d’un nécessaire décentrement dans la lecture des textes francophones. Cette lecture, quand elle se veut technique (critique ou pédagogique), quand elle se propose d’apprendre aux jeunes esprits à construire des sens, ne peut ignorer que l’œuvre découle d’un encodage, fait référence à une ou plusieurs sociétés, à d’autres langues (le camfranglais, le nouchi, le malinké…). Qui dit «encodage» dit «décodage», lequel, en l’espèce, est à la fois un processus d’immersion dans un secret qui demande à être sondé, et un réseau de sens ou un système de symboles. Sans avoir besoin de partager la même histoire ou les mêmes valeurs que l’écrivain, on peut se permettre bien des libertés dans l’appréhension du message. D’ailleurs, le subjectivisme et l’esthétique transcendantale de Kant consistent à reconnaître en chaque lecteur cette aptitude, par le seul fait de la perception. Reste que nul ne doit se limiter à cet universalisme de bon aloi en se soustrayant au prérequis (je ne dis pas «impératif», mais simplement «conditionnement culturel») de compétence interculturelle. Quand bien même on ignorerait cette compétence, on devrait discerner les apports de l’écrivain, entrer dans son univers, en un mot exécuter la tâche ingrate d’agencer les considérations interculturelles et décoloniales.

    Les enseignants sont parmi les agents de diffusion les plus efficaces de la littérature francophone. Le libre accès est une chance pour les générations futures. Mais tout ne sera pas réglé avec des enseignants dévoués et de la gratuité. J’ai dû supprimer du programme de lecture de mes étudiants un livre publié par une maison d’édition camerounaise parce que, même avec l’ISBN, il était introuvable sur Amazon et les plateformes les plus courantes de commande. La librairie universitaire n’aurait pas pu en trois mois nous le rendre disponible. Samuel Beckett, Marjane Satrapi, Albert Camus, c’était facile à obtenir. Le seul livre qui n’était pas disponible une semaine avant la rentrée, alors que je l’avais choisi parce que lui, au moins, apparaissait rapidement sur ces plateformes, était celui de Mongo Beti. Le semestre précédent, j’avais introduit 39 rue de Berne de Max Lobe au dernier moment dans ma liste, mais il avait été disponible en une semaine. N’importe quel ouvrage autopublié en Europe, ces dernières années, circule plus facilement que la plupart des textes de Mongo Beti. Certains de ses romans sont tout simplement indisponibles, à l’instar d’un livre de Djaïli Amadou Amal que j’ai également dû déprogrammer au dernier moment, parce qu’il n’était pas trouvable sur Amazon.

    Une plus grande bibliodiversité devient nécessaire à la survie de la langue française, avec plus d’éditeurs indépendants, mais aussi plus de diffuseurs africains. Le seul diffuseur-­distributeur de littérature camerounaise, c’est le Français Messapresse, qui détient ce monopole depuis six décennies et met le livre camerounais sous tutelle française permanente. Là-­bas, la littérature est un être-­au-­monde, on fait avec elle ce que l’on fait avec le cacao, le café, la banane, le poivre, le bois: on la produit pour autrui. Développer la littérature africaine signifie, sur le plan scolaire, développer l’apprentissage du français, vulgariser l’existence et le dynamisme des langues africaines que l’on peut assimiler à des êtres-­pour-­soi, pour continuer avec le jeu des références au lexique sartrien. Je propose plus loin dans ce texte une analyse des processus psychologiques et des dynamiques identitaires à l’œuvre dans la littérature africaine, qui en France a des spectateurs (des curieux, ces passants qui s’arrêtent avec bienveillance dans les salons), certes, mais trouve de plus en plus des lecteurs (public de niche). L’expérience du contact et du terrain dans les messages littéraires ne saurait être minorée; la lecture en circuit fermé, c’est la lecture qui élimine toute sensibilité culturelle et fait des œuvres de banals produits, de simples bêtes de concours qu’il faut primer.

    La façon dont mes étudiants établissent le lien entre la langue, le récit et le genre, la perception qu’ils ont de la relation entre fantômes, fantasmes et réalité, leur manière de se familiariser avec l’environnement culturel des personnages qu’ils rencontrent au fil des pages justifient la mobilisation de grilles de lecture transversales alliant sociologie, histoire, linguistique, psychologie et critique, quand il s’agit de recherche littéraire africaine. L’un de mes étudiants, parmi les plus brillants, parti à Douala, qu’il avait tant visité à travers les romans de Calixthe Beyala ou de Hemley Boum, en était revenu choqué. Il m’avait fait part d’un dépaysement paradoxal:

    Ce fut l’expérience d’une vie de finalement voyager dans les endroits que j’ai passé tant d’années à étudier dans les livres. L’année dernière, je me suis retrouvé au Niger (deux fois), au Cameroun et en Tunisie – et j’ai quitté chaque endroit avec la sensation bouleversante que l’Afrique de Felwine Sarr et Alain Mabanckou et les autres n’a rien à voir avec ce qu’on vit au quotidien. Ils ne font pas vivre l’Afrique que j’ai vue, et ils n’ont de toute manière pas à écrire comme s’ils y vivaient. C’était une découverte importante pour un jeune homme dont les seules grilles de lecture du continent étaient 1) les médias américains, 2) les écrivains morts et 3) les intellectuels de la diaspora. La réalité pour l’essentiel est, décidément, assez éloignée de ce qui est véhiculé (ma traduction).

    Il ne s’agissait ni d’une mise en cause des écrivains ni d’une mise en accusation des journalistes, mais plutôt d’une remise en question de sa propre façon d’approcher la fiction africaine et les discours sur ce continent. Il confessait l’erreur qui avait été la sienne de les avoir approchés de la même manière que d’autres livres et informations sur d’autres parties du monde. Il disait pour finir qu’il comprenait mieux le sens de mes annotations sévères sur son devoir de fin d’année. La ligne d’étude décoloniale que je préconise n’est pas un dogme scientifique, c’est simplement une base crédible de discussion, qui interroge la mémoire traumatique des littératures périphériques: la langue est porteuse d’une crypte; qu’il s’agisse du camfranglais ou du français, on a affaire à des sites (hyperlieux?) de développement de la mémoire. Ce qu’il y a d’intéressant avec le camfranglais, c’est qu’il n’est la langue maternelle de personne, c’est une langue d’élection, une langue cryptophore qui verbalise et permet de penser à l’ombre du français, une langue-­secte qui coupe et relie, que l’on parle parce que l’on veut coder et décoder. En Occident, les enfants dessinent beaucoup et, ce faisant, apprennent à reconnaître les objets dans des formes, cela avant leurs cinq ans, très tôt donc. L’exploration des images leur permet de s’identifier et de comprendre, et tous les livres dont ils sont inondés, ou les espaces que la société leur dédie, sont une tentative permanente de colorisation et schématisation du monde. Ils ont recours à un réseau de symboles pour rendre habitable le monde réel, dont ils ont toute la vie pour saisir la brutalité et la noirceur. Dans cette sorte de critique littéraire du monde, les petits Blancs non seulement interprètent les représentations (et les couleurs plus gaies que nature) d’une réalité objective, mais encore ils se fondent sur les valeurs dominantes de la société: la couleur d’une poupée, l’apparence du danger, le beau ou le laid, le familier ou l’étranger, l’homme, la femme, le mariage, etc.

    Les facilitateurs de lisibilité, tels que les glossaires, les astérisques ou les notes de bas de page, sont pour moi un sujet de grande préoccupation, un texte littéraire devant se suffire à lui-­même. Face au camfranglais ou au français tel que le code l’écrivain africain, il convient d’être conscient de cette crypte contenant les réponses aux fausses pistes qui s’ouvrent devant tout lecteur; les tournures originales ou les mots exotiques sont comme des images statiques, qu’il faut déduire par une sensibilité interculturelle décoloniale. Ils construisent aussi du sens dans leur démarche de décodage, étant donné que les premiers lecteurs, les correcteurs, les éditeurs de cette littérature africaine sont souvent des Européens qui ont déjà étoffé les motifs liant le texte au contexte, non pas originaire, mais cible. L’horizon le plus menaçant de cette littérature n’est pas la compréhensibilité, mais plutôt l’interprétation fructueuse. Les jeunes étudiants qui apprennent le français tout en découvrant la littérature acquièrent en même temps la conscience de conventions narratives non dénuées de partis pris. On leur présente l’Afrique comme naguère on leur présentait le monde, sauf que, désormais, comme l’étudiant revenu de Douala, ces jeunes personnes sont à l’aise avec les nuances de ce monde.

    L’enseignement de la littérature africaine dans des universités américaines m’a réservé de nombreuses surprises. De même, l’enseignement de la langue française m’a fait remettre en question mon usage du français. Je contrôle mieux mon débit et mon articulation, les mots et les tournures que j’affectionnais ont depuis été évacués de mon écriture. L’intégration de ma trajectoire d’auteur

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