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Le Cercueil farci
Le Cercueil farci
Le Cercueil farci
Livre électronique450 pages10 heures

Le Cercueil farci

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À propos de ce livre électronique

Prix du roman policier - Prix du roman gay 2019!
Un polar d'été et de vacances, drôle et léger.
Après s'être séparé de son petit copain, Damien Drechsler a besoin de vacances. Le village grec de Levkos semble l'endroit idéal – endormi, ensoleillé, bucolique, avec des plages isolées et des bars où il pourra noyer son chagrin.
Mais le premier soir, Damien rencontre Nikos, un jeune homme séduisant, qui le fait tout de suite palpiter. Puis, il faillit se faire renverser par un chauffard. Le lendemain, il apprend que quelques minutes après sa propre mésaventure, un vieil homme est mort dans un accident de la route qui a l'air très suspect.
À partir de là, tout semble se détraquer. Un nudiste très bien doté essaie de le séduire ; un beau jeune homme déclenche un malentendu aux conséquences insoupçonnées ; et enfin, Damien commence à tomber amoureux de Nikos. Pire, une touriste décède dans la piscine alors qu'elle semblait en parfaite santé la veille. Encore un accident ? Ou peut-être… un meurtre ?
Intrigué, Damien essaie de démêler les énigmes qu'il a découverts. Mais avec ce commissaire de police belliqueux qu'il doit affronter, avec la disparition soudaine d'une animatrice et avec Nikos qui le laisse tomber pile au moment où il commence à espérer à nouveau, il se retrouve avec plus de questions que de réponses… Se pourrait-il que la phrase « et ils vécurent heureux » n'existe que dans les contes de fée ?

LangueFrançais
Date de sortie16 août 2021
ISBN9781005106379
Le Cercueil farci
Auteur

Dieter Moitzi

Born in the early 70s, I grew up in a little village in Austria. At the age of 18, I moved to Vienna to get my master's degree in Political Sciences, French, and Spanish. Today, I'm living in Paris, France, with my boyfriend and work as a graphic designer. In my spare time, I write, read, cook fancy recipes, take photos, and as often as I can, I travel (Italy, Portugal, Morocco, Egypt, the UK, and many more places). My literary tastes are eclectic, ranging from fantasy, murder mysteries, and gay romances to dystopian novels, but I won't say no to poetry or a history book either. I'm more a hoodie/jeans/sneakers kind of guy than a suit-and-tie chap. So far, I've published two short-story collections, four poetry collections, and four novels (to find out more, please check out my author website). My first murder mystery novel "The Stuffed Coffin" has been released on January 6, 2019, and is available in English, German and French. It has won the French Gay Crime Fiction Award 2019 (Prix du roman policier / Prix du roman gay 2019). You can also find me on Rainbow Book Reviews, where I write book reviews under the pseudonym of ParisDude. Last but not least, together with my boyfriend I run the website Livres Gay (in French), where we review and discuss gay novels.

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    Aperçu du livre

    Le Cercueil farci - Dieter Moitzi

    Le cercueil farci

    Dieter Moitzi

    Le cercueil farci

    Par Dieter Moitzi

    Couverture & mise en page Dieter Moitzi

    © Dieter Moitzi 2018

    Crédits photos : © Adobe Stock

    Pour contacter l’auteur

    dietermoitzi@gmail.com

    © All Rights Reserved Dieter Moitzi 2018

    Ceci est une œuvre de fiction. Les personnages et les lieux évoqués dans ce livre, notamment Levkos, Parathalassio, le White Beach Hotel ou le Sunset Bar, n’existent que dans l’imagination de l’auteur et dans celle des lectrices et lecteurs. Si d’aventure quelqu’un croit remarquer quelque similitude que ce soit avec des personnages, commerces ou personnes existants, l’auteur tient à souligner que c’est un pur hasard et non intentionnel. Bien entendu, l’environnement plus large, c’est-à-dire le Péloponnèse Nord, existe bel et bien, et pour ancrer le récit dans la réalité, l’auteur s’est permis d’évoquer des lieux bien réels tels que Patras, Rion, Egion, Lambiri, Kamares ou l’aéroport d’Araxos.

    1 | Cette fille était une catastrophe. Vraiment

    Cette fille était une catastrophe. Vraiment. Quand elle nous avait accueillis à l’aéroport avec son faux sourire et qu’elle s’était écriée : « Salut, les amis ! Je suis CINDY ! », je m’étais dit : Merde ! Ça promet !

    J’étais de très mauvais poil, certes, mais sur ce point, je ne m’étais pas trompé. Déjà, son nom : Cindy, s’il vous plaît. Il y avait donc, en France, des gens qui regardaient leur nouveau-née et se disaient : « Tiens – si l’on la prénommait Cindy ? »

    Cindy !

    La nôtre, en tout cas, avait appris à parler, et elle le faisait savoir. C’est-à-dire, elle causait. Sans pitié.

    « … c’est une ville où les travaux durent depuis super-longtemps, vous savez », claironna-t-elle.

    Sans regarder, je savais qu’elle s’était retournée dans son siège à côté du conducteur. Je savais aussi, rien qu’à entendre le son de sa voix, qu’elle exhibait toujours son faux sourire.

    « Les ouvriers tombent tout le temps sur des vieilles pierres… euh… des vestiges archéologiques. Rendez-vous compte : ces vestiges datent encore – des vieux Grecs ! »

    À Athènes ? pensai-je avec humeur. Tu m’étonnes !

    Elle me rappelait un personnage hautement désagréable que mon amie J. D. Fowler avait inventé dans son roman Le Manoir en sang : Miss Mabel Sandhurst. Dans le livre, Mabel était une jeune femme d’une vingtaine d’année, à peu près comme Cindy, je dirais. J. D. la décrivait comme une nana bête à bouffer du foin, qui parlait à tort et à travers, juste pour faire vibrer ses cordes vocales. Autant dire que je n’avais pas été surpris de découvrir que Mabel avait réussi à se faire étrangler au début du chapitre six.

    Notre Mabel à nous, pauvres vacanciers, n’était pas auburn comme celle du roman, d’accord. Mais sinon, elle était la copie conforme de Miss Sandhurst. Elle était aussi dodue, une vraie dinde de Noël. Elle était aussi envahissante. Elle était aussi conne.

    Je compris enfin le mobile du meurtrier dans Le Manoir en sang. Ce n’était pas la peur d’être démasqué, oh non. C’était l’agacement pur et simple.

    Moi aussi, je commençais à avoir envie de l’étrangler, notre Mabel/Cindy. J’étais à ça d’ouvrir ma ceinture de sécurité, de dévaler le couloir, de mettre mes doigts autour de la gorge de Cindy et de serrer, serrer, serrer. Depuis que nous étions montés dans l’autocar, ça me démangeait dans les doigts. Vingt minutes, donc.

    Vingt ! Minutes !

    Dans sa fonction d’animatrice de Thalassa Voyages, Cindy était censée nous donner quelques informations sur la Grèce pendant le trajet. Ça, d’accord. Au début, elle nous avait donc cité le nombre d’habitants, la surface, la capitale et le climat du pays.

    Puis, elle avait enchaîné avec les taxis, les olives et les pistaches. Cinq minutes pour chaque sujet. Véridique. J’avais alors compris que ça allait être coton. J’avais fouillé mon sac à dos, en commando panique. En vain, parce que j’avais oublié d’amener mes écouteurs, comme un con. Rien n’allait m’épargner les âneries de Cindy. Elle parlait dans un micro, après tout.

    « … c’est pourquoi les travaux pour le métro athénien sont plus longs qu’à Paris… », expliqua-t-elle, ravie.

    Un gamin se mit à brailler deux rangées devant moi, comme si le métro athénien lui donnait de l’urticaire.

    Putain ! Je lui jetai un regard assassin, puis un deuxième à ses parents. Sa mère était en train de lui caresser la tête. Son père, assis de l’autre côté du couloir, se pencha vers lui pour lui glisser quelques mots gentils à l’oreille.

    Ben, donnez-lui un bonbon tant que vous y êtes !

    Encore des adeptes de cette stupide méthode d’éducation qui dit qu’il est primordial de laisser l’enfant s’exprimer. N’importe où, dans n’importe quelle circonstance. Surtout, ne pas intervenir.

    De toute façon, ces trois-là, je les avais repérés dès l’embarquement à Paris. On ne pouvait pas les louper, vu que le petit n’arrêtait pas de gigoter et de geindre. Okay, il avait été six heures du matin. Mais pour moi aussi. Est-ce que moi, je faisais chier les autres pour autant ?

    Non.

    Bon. Alors.

    Le papa s’appelait Paul-Auguste. J’avais entendu son nom tellement souvent que je l’avais retenu sans problème. C’était un type organiquement fadasse. Il avait la quarantaine, un visage quelconque, le teint blafard, les cheveux courts sans vraie couleur, et portait des lunettes d’écaille beigeasses. Son polo avait probablement été jaune voilà une centaine de lavages, et la teinte de son short était si particulière que j’étais incapable de lui trouver un adjectif adéquat. Cerise sur le gâteau, le mec avait mis des chaussettes blanches avec ses sandales. Le summum du mauvais goût.

    Le nom de sa chère et tendre était Isaure. Elle devait avoir le même âge que lui et le dépassait d’une bonne tête. Ses cheveux bruns étaient coupés au carré, à la Mireille Matthieu, et entouraient un visage sur lequel se dessinait une éternelle moue de pédante. Une prof de maths, peut-être. La robe démodée qu’elle portait était tellement affreuse que toute personne normalement constituée l’aurait brûlée au cours d’un rituel d’exorcisme.

    Ils avaient au moins eu le chic de mettre des fringues normales à leur fiston. Mon grand copain. Il se prénommait d’ailleurs Théophile. Oui, tout à fait. Théophile. Ça, aussi, au rayon prénoms, ça se posait là.

    Cindy déblatérait toujours sur le métro athénien. Un réseau constitué d’exactement trois lignes. On devait donc voir la lumière à la fin de ce tunnel dans peu de temps, si j’osais dire. Mais j’étais sûr que l’animatrice allait trouver d’autres sujets.

    Las, j’appuyai ma tête contre la vitre et jetai un coup d’œil dehors.

    La journée était ensoleillée, rien à dire là-dessus. Le ciel azure dressait sa coupole vers l’infini. J’eus une vision fugace de l’Acropole au loin. Le rocher avec ses temples était toujours aussi magnifique dans sa blancheur et son étrangeté. Autour de nous, Athènes scintillait dans la chaleur de midi. Par déformation professionnelle, je pensai tout de suite à Pétros Márkaris, m’attendant à voir le commissaire Kostas Charitos nous doubler dans sa voiture en pestant.

    « Regardez, Ma’me Marchand – l’Acropole, là-bas ! » entendis-je dans la rangée derrière moi. Sans micro, mais très sonore aussi.

    « Ah, oui, Ma’me Délatte – c’est joli, sur ce rocher ! N’est-ce pas, c’est joli, Ma’me Délatte !

    — Ô oui, c’est joli ! »

    Merde! Pendant un instant, je les avais oubliées, ces deux-là. Madame Délatte et Madame Marchand. Deux retraitées qui avaient probablement fricoté avec Vercingétorix dans leur jeunesse. Elles étaient super-bavardes. Et dures de la feuille. Du coup, je profitais à fond de leurs commentaires incessants, qui tombaient presque sans pause ni filtre.

    « Ô, et regardez, Ma’me Délatte – elle est vraiment bizarre, leur écriture, vous ne trouvez pas ? Il y a des lettres que je n’ai jamais vues avant…

    — Oui, Ma’me Marchand – bizarre ! On dirait du russe, n’est-ce pas ? »

    À propos de russe… Ma bouteille de vodka me revint à l’esprit. Un énième soupir m’échappa. Si seulement j’avais eu le droit de la mettre dans mon bagage à mains ! Une bonne gorgée de gnôle aurait pu me remonter le moral. Ou, du moins, m’anesthésier. Mais non. Consignes de sécurité obligent, la bouteille se trouvait dans mon sac de voyage, enfoncée entre mes chaussettes et mes boxers. J’espérais seulement qu’elle avait résisté au voyage en soute sans péter. Manquait plus que ça – qu’arrivé dans ma chambre d’hôtel, j’ouvre mon sac pour découvrir un tas de fringues détrempées puant l’alcool.

    Sans plus de procès, Cindy changea de sujet. Elle déclara péremptoirement : « … est le pays des milliers d’îles. Il y a vraiment plus de mille îles en Grèce. Certaines d’entre elles sont habitées par les… euh, les habitants des îles, et certaines sont… euh, sont vides… Poros, Hydra, Spétses, Milos, Sifnos, Paros, Mykonos, Ios, Chios, Santorin, puis Lesbos, bien sûr… »

    Mille îles – si elle nous les énumère, une par une, ça va durer…

    « Vous savez pourquoi il n’y a pas de chatons, là-bas ? » cria un mec assis au fond du car. Un grand rigolo ; il n’arrêtait pas de nous abreuver de vannes, souvent bien graveleuses.

    « Euh… non, aucune idée », répondit Cindy dans le microphone en se retournant.

    Je m’attendais au pire.

    « Parce qu’à Lesbos, on bouffe toujours toutes les chattes ! »

    Mon Dieu. Charmant.

    Tout le monde s’esclaffa. Sauf moi et Isaure, que je vis jeter un regard furibond vers l’arrière.

    Eh bien. Pendant deux semaines, j’allais avoir ça comme compagnie. Le destin me choyait vraiment. Soupir. L’autocar roulait sous le soleil d’Athènes, Cindy déblatérait, les deux vieilles derrière moi jactaient, et le gamin braillait.

    °°°

    Quand Athènes était derrière nous, j’étais tellement cuit que la beauté des paysages ne s’imprimait dans ma tête que vaguement. Au début, c’étaient des collines terreuses, des rochers nus et une végétation cramée par l’été, avec le bleu profond et prometteur de la mer qui scintillait entre deux buttes de temps à autre.

    Puis, je voyais défiler le Péloponnèse Nord et sa côté sinueuse, que la voie express Corinthe-Patras suivait comme un interminable ver en asphalte. Des oliviers noueux étendaient leurs feuilles argentées vers le haut comme s’ils priaient pour une averse. De l’autre côté du Golfe, les montagnes brumeuses du continent titillaient le ciel de leurs cimes accidentées.

    Le petit Théophile s’était endormi à un moment, à mi-hurlement. Mais ça pleuvait toujours commentaire sur commentaire, derrière moi. « Ô, regardez, Ma’me Délatte… ! »

    — Ah, oui, Ma’me Marchand ! »

    Et Cindy n’avait pas cessé de nous gaver, non plus.

    Le trajet semblait durer une cruelle éternité ou deux. Quand le car quitta enfin la voie express, je n’en croyais pas mes yeux. La longue chaîne de montagnes à notre gauche s’éloignait, devenant pâle et se confondant avec la brume de chaleur de l’arrière-pays.

    Nous passâmes un panneau, sur lequel je déchiffrai le mot « Levkos ». Il s’agissait d’un village constitué de vieilles maisons en pierre et de ruelles étroites. Autour d’une petite place somnolaient une église, un café, une taverne et un magasin qui vendait des Souvénires Grécque. L’orthographe fantaisiste m’arracha un demi-sourire fatigué.

    La petite route continuait encore sur deux ou trois kilomètres, se faufilant en serpentines à travers des champs et des jardins. Puis, le car franchit un portail et freina devant un grand bâtiment. Le panneau indiquait : White Beach Hotel.

    Nous étions arrivés à l’hôtel. Au beau milieu de nulle part.

    Pour de tels endroits, il y avait une belle expression en allemand : « Là où renard et lapin se disent ‘Bonne nuit’. » Ceci dit, je n’étais même pas sûr qu’il y ait des renards et des lapins dans ces contrées.

    Les deux prochaines semaines promettaient d’être mortellement calmes.

    °°°

    Quand je sortis du car, les gens étaient déjà en train de se ruer vers les coffres. J’entendis quelques cris énervés. « Faites attention ! » – « Arrêtez de pousser comme ça ! » – « Quel mufle ! » – « Aïe ! Vous me marchez sur les pieds, là ! »

    Ma première pensée ne fut pas très charitable : Allez, les cons – crêpez-vous le chignon!

    Dare-dare, je me mis à l’écart. Mon sac de voyage pouvait attendre. Il n’allait pas se volatiliser, et ma chambre non plus. Puis, les escarmouches autour des bagages se savouraient toujours mieux de loin. Idéalement à l’ombre, avec une cigarette au bec et un sourcil levé.

    Je sortis donc mon paquet de cigarettes, en allumai une et inhalai la première taffe avec volupté.

    Il n’y avait pas beaucoup de jeunes gens dans mon groupe de vacanciers, constatai-je. Une seule fille avait mon âge. Je comptais aussi deux ados, probablement ses frères puisque les trois se ressemblaient beaucoup, de visage. Puis, mon ami Théophile.

    Sinon, que des personnes de la tranche 40+. Surtout, +. Soupir. Avec la chance que j’avais actuellement, les autochtones étaient tous vieux, aussi. Déjà qu’ils étaient à une certaine distance de l’hôtel…

    À ce moment-là, un jeune homme sortit de l’hôtel. Ah. Espoir. Bel homme. J’avais beau être d’humeur massacrante, je voyais toujours bien, merci. Et là, il y avait de quoi mater. Le mec avait des cheveux blond foncé et un beau visage bronzé au menton déterminé. Sous son T-shirt noir se dessinait un torse musclé. Le pantalon en lin blanc faisait office de paquet cadeau pour un petit derrière athlétique, une paire de cuisses puissantes et, franchement, ce qu’on appelle communément une belle bosse.

    En partant, le mec regarda furtivement en ma direction.

    Et soudain, son front se rida. Il mit les mains sur les hanches, me scruta plus attentivement et… me lança trois phrases rapides et sèches en grec.

    Bien ma veine. Un seul beau mec dans les barrages, et il m’engueule.

    2 | Enfin, même les beaux gosses devraient

    Enfin, même les beaux gosses devraient réfléchir deux fois avant de m’emmerder, aujourd’hui. J’étais en train de concocter une réponse cassante, quand le mec remarqua le sac à dos à mes pieds, qu’ornait toujours l’étiquette Bagage Cabine – Hand Luggage.

    Une lueur de compréhension illumina son visage. « Excusez-moi, mais vous… euh, vous n’êtes pas le nouveau jardinier ? » demanda-t-il en français, avec un accent plutôt mignon.

    Presque malgré moi, je me fendis d’un sourire. « Ah, non. Je ne suis pas jardinier. La nature m’en remercie, d’ailleurs. »

    Le jeune homme éclata de rire, montrant des belles dents blanches. « Vous venez d’arriver avec les autres vacanciers ?

    — C’est ça ! »

    Il me tendit la main. « Je m’appelle Yiorgos. Excusez-moi pour ce malentendu. »

    — Pas de souci. » Je serrai sa main avec vigueur. « Je m’appelle Damien. Damien Drechsler.

    — Enchanté ! Et encore désolé, je ne voulais pas être mal poli. Écoutez, je vous paierai un verre, d’accord ? Là, je suis pressé, mais peut-être ce soir, dans la discothèque… »

    Il fit un pas vers moi et me serra brièvement l’épaule.

    Gloups. Son parfum me monta dans les narines, une fragrance agréablement fraîche et citronnée. Le col en V de son T-shirt révélait un torse imberbe et des tétons qui se dressaient comme des petites baies mûres prêtes à être cueillies.

    Le beau Yiorgos lâcha mon épaule, leva la main pour me saluer et s’en alla d’un pas dynamique. Son pantalon enserrait joliment ses cuisses à chaque mouvement. Vu sous cet angle, la discothèque de l’hôtel pourrait bien me tenter, ce soir. Juste pour boire un verre, en tout bien, tout honneur.

    Je ramassai mon sac à dos par terre, puis retournai à l’autocar. Mon sac de voyage était le tout dernier bagage dans le coffre. Il avait l’air tristement abandonné.

    Un symbole approprié.

    °°°

    Après la luminosité estivale, mes yeux mirent un instant avant de s’adapter à la pénombre du hall d’entrée. Il était à peu près vide ; on n’était que cinq clampins, en tout. Derrière un long comptoir en bois sombre, une réceptionniste aux cheveux gris était en train de donner les clés à une autre femme grisonnante – une des touristes de mon groupe. Cindy traînait à côté des deux et contemplait le plafond. Son faux sourire avait cédé la place à une expression légèrement irritée.

    Je passai lentement devant un ascenseur, où une quatrième femme se débattait avec ses bagages. Elle avait réussi à ranger deux valises dans la cabine, vis-je, mais une dernière, plutôt volumineuse, restait encore à caser. La femme était en train de fouiller dans son sac à mains. Elle en sortit un kleenex et se tapota le front.

    Une petite boîte était tombé par terre. Je la ramassai, jetai un rapide coup d’œil dessus et la lui tendis. « Excusez-moi, Madame – vous venez de perdre ça. »

    La bonne femme sursauta et m’arracha la boîte en marmonnant : « Mademoiselle.

    — Au temps pour moi, Mademoiselle. Dites, voulez-vous que je vous donne un coup de main ? Elles ont l’air lourdes, vos valises. »

    Elle hocha la tête et rangea la boîte.

    Je posai mes sacs par terre et soulevai son dernier bagage. Enfin, j’essayai. Parce que – la vache ! C’était lourd ! Impossible que ce soient des fringues ; la bonne femme devait voyager avec des parpaings. Quand elle vit que j’étais légèrement dépassé, elle mit la main à la pâte. Même à deux, nous eûmes du mal à hisser la valise sur les deux autres.

    « Vous venez en vacances, ou vous immigrez ? » demandai-je, essoufflé.

    La bonne femme me décocha un regard noir. Elle n’avait pas l’air commode. La quarantaine malheureuse, pâle et maigre comme un clou, elle avait des traits vinaigrés et sur-maquillés. Chaque millimètre de son visage était recouvert d’une épaisse couche de fond de teint, sur laquelle elle avait appliqué des couleurs criardes, un peu au petit bonheur la chance.

    Claire Beddingford ! me dis-je tout de suite. La gouvernante dans Les cinq moutons noirs de mon amie Billie Jones. Un personnage aigri et quelque peu effacé au début. Mais au fil de l’intrigue, on se rendait compte qu’elle en pinçait pour Lord Huntington, un des protagonistes de la série. Billie décrivait notamment ses regrettables efforts de peinturlurages en tout genre pour attirer l’attention de son objet de désir. Bien sûr, ceux qui connaissaient la série de Billie savaient que Miss Beddingford perdait son temps. Lord Huntington ne s’intéressait qu’à son acolyte, le bel inspecteur Forbes. C’était Forbes, d’ailleurs, qui affublait la pauvre Claire du sobriquet « the Lemon Lady » – la Dame Citron.

    Dame Citron. Ça allait aussi comme un gant à la bonne femme devant moi. Dommage, d’ailleurs, qu’elle soit aussi renfrognée et vinaigrée. Avec un petit peu moins de maquillage et un petit peu plus de sourire, elle aurait pu être une jolie femme.

    Quand nous avions terminé avec ses parpaings, Dame Citron me remercia. Elle se tourna ensuite vers la réception et lança d’une voix étonnamment sonore : « Maman ! Tu viens, ou quoi ?

    — J’arrive, Anne, j’arrive ! » répondit la femme grisonnante. Elle dit chaleureusement au-revoir à la réceptionniste et traversa le hall.

    Je ramassai mes propres bagages et me rendis à la réception en m’essuyant le front. 

    L’accueil de Cindy fut quelque peu acide et impatient. « Ha ! Enfin ! Vous avez trouvé le chemin ! »

    Je pris sur moi et ne répondis pas. Dieu sait quelle vacherie m’aurait échappée, sinon.

    « Vous avez un nom, par hasard ? Et je peux voir votre voucher ? » demanda-t-elle.

    Je lui donnai le document, toujours sans mot dire. À défaut d’avoir appris les bonnes manières, elle avait sûrement appris à lire. Qu’elle se démerde, alors.

    « Damien Drechsler. Bon. Moi, je suis Cindy, et je m’occupe du programme sportif à l’hôtel…

    — Du programme sportif ? Sérieux ? » rompis-je mon silence en la scrutant, surpris.

    Cindy cligna des yeux et prit une profonde respiration. Sans se retourner, elle laissa tomber le voucher sur le comptoir et dit : « Pour votre information, nous avons un tournoi de ping-pong qui commence dans une heure…

    — Vous voulez rire ? Du sport ? Certainement pas. » Je secouai la tête. Après une seconde de réflexion, je m’enquis d’une voix mielleuse : « Mais dites-moi, Mademoiselle : le dîner est servi à partir de quelle heure ? »

    Bien sûr qu’elle avait expliqué ça en détail, dans l’autocar. Mais j’avais envie de la faire chier à mon tour.

    Mon envie devait être transparente, car elle me jeta juste un regard assassin. Puis, elle aboya par-dessus son épaule : « Madame Régnier – vous lui expliquerez tout ça, okay ? »

    C’était vraiment une conne. Je préférai me tourner vers la réceptionniste. « Vous vous appelez Madame Régnier ? Êtes-vous Française ?

    — Ah non, non, non. Je suis Belge.

    — Tiens donc ! C’est rigolo. Comment avez-vous atterri dans ce coin de Grèce ? » Je m’accoudai sur le comptoir comme si ça m’intéressait vraiment.

    Cindy déduisit à juste titre que je venais de lui donner congé.

    « À plus tard, alors ! » grogna-t-elle et partit, passablement vexée. Vraiment le portrait craché de Mabel Sandhurst – physique, comportement, vacuité des propos, tout y était.

    « Un vrai rayon de soleil, celle-là », commentai-je sans vouloir.

    Madame Régnier gloussa. Elle glissa les clés de la chambre 217 vers moi et dit : « Enfin, bref… Je vous souhaite quand même un agréable séjour. Alors, qu’est-ce que vous vouliez savoir ? »

    °°°

    Dès que j’avais franchi la porte de ma chambre au deuxième étage, j’ouvris mon sac de voyage et en sortis la bouteille de vodka. Elle était indemne. Je poussai un soupir soulagé avant de la ranger dans le frigo, que je trouvais sous ma table de chevet. Je choisis ensuite un short de bain et un T-shirt propre dans mes affaires et me changeai. Le sac de voyage avec le reste des vêtements atterrit dans l’armoire sans plus de procès.

    La chambre était spacieuse, tout en blanc et beige, avec quelques accents gris métallique et rouge rouille. Je fis le tour pour tester les boutons des lampes, la clim’ et la chasse d’eau dans les toilettes. Tout fonctionnait comme il fallait.

    J’inspectai aussi le balcon. Au loin scintillait la vaste étendue de la mer, délimitée par les montagnes brumeuses du continent. Juste en-dessous de moi, je découvris le petit parc avec des palmiers, des platanes, des pins maritimes et des arbustes à fleurs, qui séparait le bâtiment principal de la piscine.

    On m’avait mis deux fauteuils, une petite table et un cendrier rouge foncé, sur lequel figurait le logo de l’hôtel. Cool – j’allais pouvoir fumer sur mon balcon.

    J’allai tout de suite chercher mon Kindle et mes cigarettes et m’installai sur une des chaises. J’allumai une clope et ouvris mon appareil. Billie m’avait envoyé son tout dernier manuscrit, Mr. Crowley’s Last Secret. Le livre n’était pas encore paru aux États-Unis, alors je n’avais pas de deadline. Mais plus tôt je commençais à travailler dessus, plus vite je serais payé. Et j’avais pour habitude de lire les livres avant de me mettre à la traduction.

    Alors, ce Mr. Crowley. Pour le titre, ça allait être facile : Le dernier secret de M. Crowley. Je fumais en dévorant le premier chapitre. Comme l’avait expliqué Billie dans son dernier mail, ce Mr. Crowley était le célèbre occultiste britannique Aleistair Crowley. Ça promettait.

    Les premières pages étaient déjà bien haletantes. On sentait l’épais mystère que l’on allait avoir du mal à percer jusqu’au dernier paragraphe. Billie avait un style fluide et assez poétique qui plongeait le lecteur immédiatement dans le vif de l’intrigue. Mais je n’arrivais pas à me concentrer. Était-ce l’environnement nouveau ? Le manque de sommeil ? La douleur que je sentais encore sourdre en moi ?

    Je refermai la liseuse, retournai à l’intérieur et m’assis sur le lit. Le matelas était impeccable. Pas trop mou ni trop dur. En tout, le cadre me convenait. Tout était joli et fonctionnel. Pas un palace, mais je ne m’étais pas attendu à ce qu’Alex fasse des folies.

    En revanche, le silence qui me tombait dessus me mettait mal à l’aise. Je n’entendais que le ronronnement de la climatisation et un léger fond sonore qui venait de dehors. À défaut d’une meilleure idée, j’allumai la télé.

    Je tombai sur une blondasse qui caquetait furieusement en grec. Une belle baie ensoleillée brillait en arrière-plan. La caméra tourna et zooma sur un type aux cheveux gris, que la blondasse tenait en otage. Je le vis hocher la tête, une légère lueur de panique dans les yeux.

    Bon. Bof.

    J’éteignis.

    Puis, je partis.

    °°°

    Le White Beach Hotel était blanc et longiligne, avec des balcons peints en bleu. Il ressemblait à un paquebot transatlantique échoué sur la terre ferme. Un peu désuet, mais élégant, svelte et haut.

    Des moineaux piaillaient au-dessus de ma tête pendant que je traversai la pelouse du parc d’un pas lent. Les cigales chantaient tout autour de moi. J’entendais de la musique, des conversations nonchalantes, des bruits venant de la piscine.

    Bon, bon, bon.

    Il n’y avait pas grand monde. Je m’arrêtai près du bassin. Deux enfants barbotaient dans l’eau. Dans un coin, un couple discutait tranquillement, les têtes flottant comme deux îles dans les eaux turquoise. La maman grisonnante de la Dame Citron nageait la brasse, ses mouvements énergiques et déterminés.

    De l’autre côté de la piscine, il y avait un bar avec une grande terrasse. Là aussi, la clientèle était clairsemée. Je découvris la Dame Citron elle-même assise à une table tapie dans l’ombre. Elle regardait dans le vide, la mine morose. Son visage me parut comme un reflet de ma propre humeur.

    Mes deux vieilles, qui m’avaient saoulé avec leurs commentaires incessants, s’étaient installées à une autre table. Madame Marchand et Madame Délatte. Sans surprise, je vis qu’elles étaient toujours en train de jacasser tout en étudiant leur environnement d’un regard inquisiteur. Les deux verres d’ouzo devant elles étaient déjà bien entamés.

    Je fis rapidement le tour de la piscine, passai devant des tables de ping-pong et descendis un escalier en pierre. En bas s’étendait une vaste plage de galets avec des transats et des parasols striés. Il n’y avait pas foule, non plus.

    Je traversai la plage et m’aventurai sur la longue jetée en béton. La mer, ondulant de façon lasse, léchait la plage et bougeait les galets. Ça glougloutait, ça clapotait, et Clic, et Clac… L’eau se frisait, des petites couronnes d’écume scintillaient çà et là.

    Sur la rive d’en face se dressaient les montagnes continentales, sauvages et indomptées. Une vue tellement belle qu’elle en était presque surréelle. Des pics, des crêtes, des ravins profonds, des presqu’îles dentelées se dessinaient en teintes délavées. Un de ces sommets lointains était d’ailleurs le Mont Parnasse. Le siège des Muses.

    J’enlevai mon T-shirt, inconfortablement conscient de ma maigreur, me le drapai sur les épaules et m’assis sur la jetée. L’air chaud et iodé caressait ma peau. Les vagues faisaient leurs mouvements selon une logique qui me paraissait aléatoire, sans vrai sens. Tiens, ça me rappelait quelque chose. Ma vie, en fait.

    Des voix et des rires éclatèrent soudain dans mon dos. Je me retournai et aperçus un groupe de gens, qui étaient en train de se rassembler bruyamment autour des tables de ping-pong. Parmi eux, je reconnus le type qui avait sorti sa fine blague sur les chatons de Lesbos. Il était venu avec un groupe d’amis. Tous d’un humour plus que douteux, avais-je observé. Et tous assez remarquablement vilains.

    Qu’est-ce que ce rassemblement signifiait ?

    Ciel ! Le tournoi de ping-pong ! Si Cindy me voyait en bas, tout seul, elle allait sûrement essayer de me recruter de force pour sa compète à la con. Et ça – plutôt mourir !

    3 | Ma fuite me ramenait au grand

    Ma fuite me ramenait au grand portail à l’entrée de l’hôtel-club. J’entraperçus un parking à ma droite, caché derrière une rangée de peupliers. À côté, un grand bâtiment rond s’avançait vers la route. Le panneau peint à la main qui pendait au-dessus de sa porte révélait la raison d’être de cette construction : White Beach Bar & Disco.

    À ma gauche, il y avait une dizaine de petits bungalows. Ils avaient l’air très simples – des logements pour le personnel ?

    Soudain, j’entendis une femme s’énerver. Dans le dernier bungalow. J’arrivais même à comprendre ce qu’elle disait, puisque la porte avait été laissée entrouverte. « Putain, mais vous faites chier ! »

    Ah. Cindy. Indéniablement. Ce timbre m’avait cassé les oreilles pendant trois heures, après tout.

    Elle haussa encore le ton : « Il est , alors ? »

    Une autre fille répondit d’une voix passablement irritée : « Qu’est-ce que j’en sais, moi ? Je ne suis pas sa mère !

    — Et personne ne sait où il est ?

    — Ben non. On n’est pas de la police. Et arrête de gueuler !

    — Je gueule si je veux !

    — Va chier ! Y a ton tournoi de ping-pong qui t’attend, en plus !

    — Je t’emmerde ! »

    Sur cet échange poétique, Cindy sortit du bungalow en flèche. Elle faillit me renverser, ne s’excusa même pas et partit en courant vers la piscine.

    Je m’en étais déjà douté, mais là, je venais d’avoir la confirmation : on n’allait pas devenir copain-copain, la Cindy et moi. Vraiment pas.

    Heureusement, les trois jeunes jardiniers qui étaient en train de nettoyer la grande pelouse à côté du bungalow m’aidèrent à oublier la jeune femme. Ils travaillaient de façon méticuleuse, leurs torses nus brillant de sueur, leurs muscles se tendant avec l’effort.

    C’était plaisant à voir. En passant, je les observais du coin de l’œil.

    Non pas que je sois obsédé. Je suis juste esthète.

    °°°

    Une fois le portail franchi, je retrouvais la pampa que nous avions traversée tout à l’heure. De part et d’autre de la route, il y avait des jardins potagers et fruitiers, tous clôturés par des grillages métalliques rouillés. Un fossé d’irrigation les séparait de la route. Citronniers, orangers et figuiers exhalaient des parfums entêtants.

    Le bruit ininterrompu des cigales s’élevait comme un nuage sonore au-dessus de la campagne. Csss ! Csss ! Csss ! Csss !

    Csss ! Csss ! Csss ! Csss ! Csss ! Csss ! Csss ! Csss !

    Ça avait un côté déstressant, envoûtant, presque soporifique. Je me sentais moins tendu. Prêt à me laisser charmer par la beauté rurale des lieux. La végétation dépassait partout les clôtures de façon anarchique. Des branches se pliaient sous le poids des fruits, se tendant vers moi comme pour me défier de cueillir un de leurs cadeaux juteux.

    Un Citron dansa dans l’air avant de se lasser de moi. Puis, un gros bourdon passa par-dessus mon épaule avec un vrombissement qui me fit sursauter. L’air chaud, lourd et immobile était comme figé au-dessus de l’asphalte noir.

    La route tournait à gauche, puis à droite, puis encore à gauche. Je marchais sans me presser, et les minutes s’envolaient dans la chaleur de l’après-midi.

    Après un énième virage, j’arrivai à hauteur d’un cimetière, qui se cachait derrière un mur en pierres grises, haut d’au moins deux mètres. Les cyprès qui s’élevaient sur tout son long nappaient la route de fragrances résineuses merveilleusement méditerranéennes. Une petite chapelle, à peine visible, se dressait au milieu du cimetière.

    Devant moi, la route faisait encore quelques méandres avant d’atteindre les premières maisons. La coupole rouge de l’église du village se dressait derrière leurs toits.

    Avec un soupir, je m’arrêtai en bord de route pour remettre mon T-shirt.

    Mais. Facile en théorie, ardu en pratique. Je collais de sueur ; du coup, le T-shirt faisait de la résistance.

    Au début, ça se goupillait pourtant bien. Comme d’habitude, je glissai une main par le trou de la première manche, la deuxième main par l’autre. Mais quand j’essayai de passer la tête dans le grand trou au milieu, je restai coincé dans cette position. Mes deux bras pendouillaient des emmanchures, la tête était à moitié engagée dans le grand trou. Et plus rien n’avança.

    Je tirai sur le tissu. Argh ! Rien à faire. Plus je me débattis, plus je transpirai, plus je collai. Je gémis, je râlai, je poussai des jurons à faire pâlir un marin. Je dois avoir l’air d’un pauvre con ! pensai-je. Vivement que personne ne m’observe, là !

    Ma tête avança enfin doucement dans le trou, centimètre après centimètre. Je lorgnai vers la sortie.

    Et que découvris-je ?

    Un mec, assis sur la terrasse de la maison la plus proche. Un type jeune et mignon. Enfin, il m’avait l’air mignon. Il devait être en train d’écosser des petits pois. Devant le spectacle que j’offrais, il s’était arrêté, bien sûr. C’eût été dommage de rater mon combat élégant avec le T-shirt.

    Il arborait un sourire d’une oreille à

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