Pensées épistolaires: Les lettres que je n'enverrai jamais
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À propos de ce livre électronique
Lecteur, bonjour !
Tu viens de consulter cette fiche pour t’informer du contenu de ce livre. Je profite de ce geste qui va entamer tes dernières économies pour t’exprimer ma solidarité littéraire. Car, nous en sommes tous là : passer du temps à écumer des fiches d'application ou de livres pour deviner ce qu’ils contiennent. On lit quelques lignes, on hésite, on se dit qu’on ne connait pas le développeur ou l'auteur, qu’avec le coût des vacances on ne peut pas prendre ce risque et on passe à autre chose.
Sur de grands et petits sujets, j’ai écrit une trentaine de lettres à des personnages qui ont mérité que je leur exprime mon attention puisqu’ils ont traversé ma vie en y semant plus ou moins de bonheur.
Ils ne recevront jamais mes textes, soit parce que ces personnes sont imaginaires, soit parce que j’ignore leurs adresses. Mais il est dans le destin d’un courrier d’être lu, je compte donc sur ton indiscrétion.
Ton auteur.
Une trentaine de lettres sous la forme d'anecdotes humoristiques, à savourer sans modération !
EXTRAIT
Lettre à ceux qui ne s’entendent pas
Compagnons de galère,
Parfois, tout comme vous, je ne comprends rien. Des êtres, dotés d’une tête, de deux bras et de deux jambes, émettent autour de moi des sons que j’entends de manière confuse, mais je n’ai aucune idée claire sur le sens de ce tintouin. Certes, je suis un déficient auditif léger, mais le malentendu ne provient pas seulement du manque d’acuité de mon oreille.
J’ai une réforme à proposer que nous pourrions soumettre collectivement. Il est admis, depuis l’école primaire, que l’homme bénéficie de cinq sens : l’odorat, le toucher, la vue, le goût et l’ouïe. Moi je veux bien, sauf que cet être est muet. J’y ajoute le parler. Je ne désigne pas la faculté de verbaliser une pensée, mais la capacité physique de s’exprimer de manière audible. Parfois, lorsque des galimatias de paroles indistinctes m’assaillent les pavillons auditifs, j’ai des doutes et même des craintes : le langage articulé survivra-t-il longtemps ?
À PROPOS DE L'AUTEUR
Philippe Laperrouse, 68 ans et père divorcé de deux filles. Fonctionnaire à la retraite, il vit dans la banlieue lyonnaise, sa région de naissance. Il a publié trois recueils de nouvelles, deux romans, un essai. Il s’adonne aussi à l’écriture théâtrale, au dessin d’humour et entretient un blog littéraire. Il s’intéresse à la BD, au jardinage et au foot. Toutes ses productions littéraires et graphiques sont accessibles à partir de son site.
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Avis sur Pensées épistolaires
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Aperçu du livre
Pensées épistolaires - Philippe Laperrouse
Préambule
Un jour, le monde constatera mon décès. J’espère avoir une longue vie, mais, en plusieurs dizaines d’années, je n’aurai pas connu beaucoup de mes semblables. Tout au plus une pincée d’êtres humains parmi les sept milliards qui s’agitent sur Terre. Et je ne me serai sérieusement entretenu qu’avec une minorité d’entre eux.
Pourtant, sans me vanter, j’ai des choses à dire dont beaucoup d’hommes et de femmes auraient pu tirer profit. Inversement, je n’ai pas bénéficié de l’expérience de millions d’individus qui – eux aussi – auraient pu m’adresser une parole experte et ne l’ont pas fait par paresse ou par dédain.
C’est un gâchis consternant.
J’ai donc décidé de prendre la plume. J’ai opté pour la formule « lettres à… ». Je sais : depuis la Marquise, on n’écrit plus à qui que ce soit, on « mail ». C’est bien dommage, si la belle Marie Rabutin-Chantal n’avait pas manié la plume avec talent, nous ne saurions pas grand-chose de la vie de son époque.
J’aurais aimé parler à tous les individus qui vivent les mêmes temps que moi. À une grande majorité, j’aurais eu peu à dire, mais au moins aurais-je pu exprimer mon regret de notre méconnaissance réciproque. J’ai donc dû choisir quelques destinataires privilégiés, sélectionnés par la proximité de nos préoccupations respectives.
Mon problème, c’est qu’il n’y a aucune raison que ceux à qui j’ai quelque chose à dire reçoivent mon courrier. Par défaut d’adresse, souvent. Mais aussi parce que j’interpelle des hommes ou des femmes que je ne connais pas ou qui n’existent pas. Je ne me suis pas privé d’inventer les individus avec lesquels j’aurais aimé discuter de vive voix.
Par conséquent, cet exercice littéraire restera un dialogue univoque. Néanmoins, je fais l’hypothèse qu’un jour, un vieillard chenu, passionné d’archéologie informatique, découvrira mes pensées au coin d’un ordinateur suffisamment puissant pour explorer le passé et m’enverra des réponses circonstanciées à titre posthume.
Pour satisfaire mon envie de création littéraire, il fallait que je combine mon souhait d’entretenir mes interlocuteurs de nos problèmes communs et la nécessité d’inscrire mes réflexions sur le support numérique de manière à ce qu’elles me survivent jusqu’à leur découverte.
Voilà pourquoi, j’ai rédigé une trentaine de missives. Que ceux qui les ouvrent ne respectent pas le secret de la correspondance privée !
Lettre à ceux qui ne s’entendent pas
Compagnons de galère,
Parfois, tout comme vous, je ne comprends rien. Des êtres, dotés d’une tête, de deux bras et de deux jambes, émettent autour de moi des sons que j’entends de manière confuse, mais je n’ai aucune idée claire sur le sens de ce tintouin. Certes, je suis un déficient auditif léger, mais le malentendu ne provient pas seulement du manque d’acuité de mon oreille.
J’ai une réforme à proposer que nous pourrions soumettre collectivement. Il est admis, depuis l’école primaire, que l’homme bénéficie de cinq sens : l’odorat, le toucher, la vue, le goût et l’ouïe. Moi je veux bien, sauf que cet être est muet. J’y ajoute le parler. Je ne désigne pas la faculté de verbaliser une pensée, mais la capacité physique de s’exprimer de manière audible. Parfois, lorsque des galimatias de paroles indistinctes m’assaillent les pavillons auditifs, j’ai des doutes et même des craintes : le langage articulé survivra-t-il longtemps ?
Vénérons donc les comédiens ou comédiennes, présentateurs ou présentatrices de télé ou de radio qui font profession de s’adresser aux autres avec clarté. Oui, il existe encore des hommes ou des femmes qui parlent à leurs prochains de manière audible. Ce sont les derniers des Mohicans, les résistants, les vaillants qui extériorisent des paroles intelligibles par n’importe quel être humain doté d’une connaissance honorable du vocabulaire et de la construction grammaticale. Plût au ciel que leurs métiers ne disparaissent pas dans les poubelles du « progrès » !
La phrase, ils la prennent par un bout et ils la prononcent jusqu’à la dernière syllabe sans trébucher, d’un ton lisse, mesuré, coulé. Le timbre est limpide et chaud, en un mot sensuel. Ce qu’ils émettent, c’est beau comme un ruisseau d’eau joyeuse qui jaillit de la roche. Après eux, on n’ose plus articuler une parole. Je le répète : le parler fait partie des six sens dont la nature nous a dotés, mais ce sixième sens, nous l’avons cochonné.
Cette poignée d’hommes et ces femmes qui se font comprendre de leurs contemporains nous laissent dans un autre monde, nous, pauvres hères, qui vivons dans un univers où il devient nécessaire de communiquer par bouts de mots, onomatopées, borborygmes.
Je salue au passage tous ceux qui se sont adressés à moi et dont le discours haché, torturé, marmonné n’a jamais franchi l’épreuve de mon nerf auditif. Amitiés à tous ceux qui ont cru que je me fichais de leur visage en ne répondant pas à leur charabia oral auquel je n’ai rien compris. Mille excuses aux interlocuteurs auxquels j’ai adressé un hochement de tête sympathique pour singer mon accord avec leur intervention bafouillée dont le sens et l’intérêt m’ont complètement échappé.
Malgré tout, miracle de la modification de l’ouïe, certains êtres s’adaptent mieux que vous et moi aux nouveaux défis oratoires. Ce sont des mutants. Le système qui leur permet de parler et d’entendre n’est pas comme le nôtre. Il faut les féliciter, ce sont eux qui resteront dans les mémoires.
Admiration à ceux qui entretiennent des discussions dans une foule de boîtes de nuit composée de noctambules, souriants, ivres d’alcool, pressés par l’ombre