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L'Érudit Saison 02: Reliques
L'Érudit Saison 02: Reliques
L'Érudit Saison 02: Reliques
Livre électronique375 pages5 heures

L'Érudit Saison 02: Reliques

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À propos de ce livre électronique

Les Érudits, une race dotée de superpouvoirs; source de savoir et d’une sagesse infinie. Autrefois, cette race si fière et si puissante vivait en harmonie avec les cinq autres races du monde de Serhadiez; Broniac, Lucas, Ferthux, Thermon et Wingos.

Mais suite à un effroyable fléau, la Larme Noire, cette race autrefois révérée, devint la cible de préjudices sanguinaires. Un à un, les Érudits tombèrent ; soit touchés par la maladie de la Larme Noire ; ou par la lame de ceux qu’ils considéraient compatriotes.

Nero, un jeune Érudit, se réveilla un jour, sans mémoire et seul dans un monde des plus dangereux. Contre toute attente, ce dernier se lia d’amitié avec une jeune femme de la race des Lucas avec qui il débuta une carrière à la Guilde des mercenaires.

Aujourd’hui…

Suite à une soudaine rencontre avec l’une de ses semblables, Lacrima, Nero se lance dans une folle aventure où il fit la rencontre de la plus guindée des Broniacs, Louise Arche, où il noua de nouveaux liens avec sa fidèle partenaire, Seven, et où il recouvrit quelques souvenirs dont il avait oublié l’existence.

Ayant fait la paix avec son passé, Nero poursuit sa route afin d’en apprendre davantage sur lui-même. Ce secret se cache derrière les viles intentions du grand général Judass de Mauve, qui semble étroitement lié avec cet Érudit.

Suite à un affrontement corsé avec son nouvel ennemi, Nero se retrouve à nouveau seul, et doit maintenant retrouver son chemin et se préparer à l’ultime bataille de laquelle dépendra la survie du monde !

Surveillé de toutes parts, encerclé par les sbires de son adversaire, de sombres secrets et d’intenses rebondissements attendent l’Érudit et ceux qui osent se joindre à sa cause. Quelles seront les répercussions de cette nouvelle aventure? Quelle partie l’emportera?

Un survivant du fléau de la Larme Noire? Où les machinations du mal dans ses plus sombres desseins?
LangueFrançais
Date de sortie16 avr. 2020
ISBN9782925014584
L'Érudit Saison 02: Reliques

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    Aperçu du livre

    L'Érudit Saison 02 - Alex Turcotte-Roy

    creationsatr.com

    Épisode 01

    Le chant lunaire

    Nero et Seven marchaient dans ce qui était la plus vaste forêt du continent de Narshen. Pour la centième fois, Seven récitait mot pour mot le message qu’avait laissé Lacrima à l’aubergiste. « Je prends les devants, retrouvez-moi à Kouel-ha, le village situé au pic des terres de Blue. » Après cent fois, elle se permettait de saucer le tout d’une touche de sarcasmes. Pourquoi et jusqu’à quel point cette Érudit pouvait-elle être aussi insouciante ? Seven balançait tout ce qui lui passait par la tête, agitant les bras dans tous les sens. Elle fit même si peur à Arco que le petit Ferthux changea d’épaule, pour celle de Nero. De son côté, l’Érudit demeurait silencieux. Lui aussi connaissait le message de Lacrima par cœur (en plus des reproches de sa jeune partenaire). Mais il ne partageait pas les mêmes impressions.

    Seven voyait le départ de Lacrima comme une insulte ainsi qu’un grand manque de respect. Nero et elle l’avaient sauvée d’une mort certaine à Blue. Elle ne les avait jamais remerciés. « C’est certain, elle était dans les pommes », la défendait Nero. « Ne me contredis pas », lui répondait alors Seven.

    — Mais sérieusement ! Devait-elle vraiment partir ainsi ? Tant qu’à y être, elle aurait pu dire « je prends les devants parce que vous n’êtes rien d’autre que des boulets » et ensuite partir avec un petit sourire en coin comme les personnes de son genre !

    — Seven, soupira calmement Nero.

    — Quoi !

    — Nous sommes partis tout de suite après elle, voire quelques heures après son départ.

    — Et ? Où veux-tu en venir ?

    — Eh bien, ça fait deux semaines de cela et j’imagine que si nous étions rapides comme le vent, nous l’aurions rattrapée depuis belle lurette. Mais ce n’est pas le cas, alors… oui, nous sommes des boulets.

    Seven s’immobilisa, la mâchoire en branle. Son iris se resserra et la pâleur de sa peau s’empourpra. Grinçant des dents, elle tapa du pied puis ordonna à Nero de se retourner.

    Aucunement effrayé, Nero tourna les talons puis fit face au regard houleux de Seven. Il disait la vérité et elle le savait. C’était ce qui la choquait encore plus. Nero laissa alors tomber ses épaules puis murmura « mesdames et messieurs… mon équipière ».

    — Espèce de, explosa-t-elle, ce n’est pas parce que nous sommes lents que nous ne l’avons pas rattrapée ! C’est parce que…

    — Érudit !

    La jeune Lucas et l’Érudit tournèrent leur attention. Levant les yeux, ils aperçurent, en haut d’une pente à pique, un groupe de jeunes individus armés jusqu’aux dents. « D’autres mercenaires », laissa aller Arco d’un soupir. L’un d’eux tenait fermement dans sa main un parchemin qu’il déroula. Une fortune pesait à nouveau sur la tête de l’Érudit.

    — Ta tête est à nous, fit l’un des mercenaires de façon théâtrale.

    Loin d’être impressionné, un claquement de doigts se fit entendre puis la pente s’affala, emportant les imprudents Broniacs avec elle. Voyant qu’il n’y avait plus de danger, Nero remit ensuite ses mains dans ses poches puis lança son sourire habituel à Seven.

    — Que disais-tu ?

    Le dos courbé, les yeux mi-clos et la bouche entrouverte, Seven tourna doucement la tête sur l’Érudit qui retenait un fou rire. Elle ne fit que pointer le groupe de jeunes garçons (pris sous la terre) et soupira :

    — C’est à cause d’eux… que nous n’avons jamais rattrapé Lacrima. Ce sont les vingt-cinquièmes qui nous prennent par surprise, comme ça !

    — Eh bien, elle devait savoir que nous serions traqués par des mercenaires après la belle mise en scène que nous avons faite à la capitale de Blue. Et voilà pourquoi elle a pris les devants. Alors, au final, nous sommes… insista-t-il.

    — Des boulets, termina Seven. Mais… pourquoi est-elle aussi pressée de rattraper Judass ? Qu’a-t-il fait pour se l’attirer contre lui comme ça ? Le sais-tu ?

    — Aucune idée… mais nous ne tarderons pas à le savoir.

    Nero se retourna rapidement pour éviter que Seven ne remarque son embarras. Il ne savait pas plus qu’elle les intentions de Lacrima. Elle lui avait simplement dit que Judass constituait une menace pour le monde entier et rien d’autre.

    Enfin… comment un simple Broniac pouvait-il constituer une menace aussi imminente ? Allait-il faire un pacte avec un Démon ? Chose pratiquement impossible puisque cette race avait disparu depuis des milliers d’années. Pouvait-il avoir une arme de destruction massive ? Après tout, Serhadiez vivait justement une ère évolutive. Mais à part son cuirassé (l’Armada), Judass ne possédait rien de bien dangereux. Ce qui incita la question suivante : était-il vraiment un Broniac ?

    Cela expliquerait pourquoi son visage lui était si familier, sa vitesse irréelle ainsi que l’énergie qu’il dégageait. Judass était probablement un Érudit, unique en son genre. Et si c’était le cas, Nero se devait de garder le silence. Il n’y avait aucune raison d’inquiéter Seven et Arco davantage. (Surtout après les derniers événements.) Il redressa enfin la tête pour finalement s’apercevoir qu’ils étaient sortis de cette immense forêt. Enfin autre chose que des buissons à perte de vue (sans parler du terrain capricieux). 

    Nero leva les yeux sur un paysage d’un vert uniforme, alors que Seven sautillait dans tous les sens.

    « Vive les paysages champêtres », s’était-elle extasiée, agitant les mains bien haut dans les airs. Nero la regarda un moment, quelque peu amusé. Ce simple paysage était suffisant pour lui changer les idées. « Je ne comprendrai jamais les femmes », avait-il murmuré.

    Seven fit semblant de ne pas entendre.

    Au loin s’étalait une route en pavé qui les conduirait à leur prochaine destination. La ville fortifiée. Le dernier arrêt, avant d’arriver à Kouel-ha. Même s’ils étaient encore à deux ou trois heures de leur destination finale, cela n’allait pas les empêcher de s’arrêter pour la nuit. Enfin, ils allaient profiter d’un bon bain et du confort d’un lit douillet. Nero respira l’air de la liberté puis prit les devants.

    — Si on s’active, nous devrions arriver à la ville avant la fin de la journée.

    À quelques kilomètres du Royaume de Mauve…

    Le soleil déploya à nouveau ses rayons sur Duhan (un petit village appartenant au Royaume de Mauve). Cet endroit avait plus de cinq cents ans. De plus, les Thermons qui y habitaient étaient tous des descendants de sang pur.

    Les Thermons… une race reconnue pour ses traits uniques et son caractère passif. On les reconnaissait surtout par leurs longues oreilles pointues ainsi que leur visage qui semblait si délicat et candide. Ils étaient souvent appelés « les enfants de Serhadiez » pour cette apparence angélique, sans compter la dévotion qu’ils éprouvaient envers leur Créatrice.

    À l’époque, Duhan était un village inconnu. Ils étaient loin de se douter que les choses allaient bientôt changer quand les premiers pionniers Broniacs firent leur apparition. Mais leur rencontre ne fut pas hostile. Au contraire. Les Thermons virent cette arrivée inattendue tel un message de la part de Serhadiez. Et comme cette race était l’une des plus rares et respectées de la planète, les Broniacs se montrèrent courtois et chaleureux.

    Une amitié se noua rapidement entre les deux peuples et ensemble, ils construisirent un empire qui allait être reconnu (200 ans plus tard) sous le nom de Mauve.

    Les habitants de Duhan demeurèrent proches des dirigeants Broniacs, comptant sur leur protection ainsi que leur aide en cas de crises. Les siècles défilèrent et de nouveaux aristocrates prirent le pouvoir. Certains suivaient l’exemple de leur père tandis que d’autres semblaient plus avides. De quatre familles différentes, les dirigeants de l’empire Broniac commencèrent à comploter entre eux, jusqu’à ce que le meurtre devienne une option afin de s’approprier le trône. Après quelques années sanglantes, les familles Ceres et Arche furent les dernières à tenir debout.

    Les Thermons ainsi que les Lucas furent les premiers à assister à la cruauté des Broniacs. Avec une main de fer, chaque empereur et impératrice s’appropria les terres de Mauve, une à une. Duhan devint une propriété et certains Lucas furent dépouillés de leurs forêts.

    Fort heureusement, le petit village des Thermons ne connut aucun sort tragique. Ils eurent la permission de rester là où ils étaient, sous certaines conditions. La moitié de leurs cultures alla à la famille impériale, à chaque fin d’été. Mais vint un temps où Duhan ne bénéficia plus de la protection de Mauve.

    Certains Thermons quittèrent les terres du Nord pour aller à Kûdary (le Royaume du Sud), tandis que d’autres veillaient à la survie de leur village.

    Les années passèrent et vint le jour où Julius De Mauve monta sur le trône. Souvent surnommé l’empereur dément, ce dernier fut le plus despotique de sa lignée.

    Narshen était un continent séparé en quatre îles immenses (chacune pourvue d’un ou deux royaumes). Julius s’était juré de régner sur chacune de ces îles… et ce, peu importe les méthodes employées.

    Mauve entra vite en guerre contre son rival éternel (Blue), et puis commença la guerre des deux royaumes. Duhan fut l’une des nombreuses victimes de l’avidité de Julius. Sans protection, les habitants furent harcelés par des brigands de tout genre, ainsi que par certains soldats corrompus venant des deux royaumes.

    Ils n’avaient jamais connu une telle misère et vint un temps où chacun pensa à abandonner leur terre ancestrale. La guerre venait avant eux et, même après la mort de Julius, le village de Duhan fut laissé à lui-même. Mauve allait bientôt couronner une nouvelle reine. Une femme d’une grande bonté et qui sortait du moule des anciens souverains. Mais avant son couronnement, les Thermons allaient devoir endurer la misère.

    Dame Hermina, le pivot de Duhan, cherchait par tous les moyens à convaincre ses habitants de tenir bon. « Serhadiez nous envoie un défi et nous le surmonterons », avait-elle proclamé.

    Le problème était qu’elle ne croyait même plus en ses propres paroles. Serhadiez les avait délaissés dans ce chaos et c’était à eux de se retrousser les manches. Mais comment faire comprendre cela à un peuple qui s’agenouillait face au moindre problème ?

    « Je peux peut-être vous aider », avait dit un noble.

    Lors d’une cérémonie matinale, un noble au regard fourbe et accoutré de rouge se présenta aux habitants Thermons. Il était Dordengoa, un riche personnage du Royaume de Mauve. Ce dernier étala chacune des misères de Duhan afin que les habitants perçoivent leurs problèmes d’un angle encore plus flagrant, pour finalement leur tendre la main.

    Avec sa fortune, il leur fit miroiter des jours meilleurs dont le prix venait avec une seule condition. « Nommez-moi maire de Duhan », avait-il dit, d’un sourire factice. Affaiblis par l’indigence de Mauve (et voyant l’arrivée de ce noble comme une intervention divine), les habitants de Duhan se sentirent enfin sauvés. Mais Hermina n’était pas dupe. Elle voyait le mal gronder dans le cœur de cet homme. Mais ses habitants avaient déjà fait leur choix et elle ne pouvait anéantir leur espoir.

    Dondengoa s’installa dans son manoir, non loin du village, puis tint parole en sortant les habitants de la misère. Les choses semblaient revenir à la normale, mais, comme Hermina l’avait présagé, le jour vint où Dordengoa montra ses vraies couleurs. Il se monta une petite infanterie constituée de mercenaires, puis fit creuser des mines tout autour de Duhan, à la recherche d’or. Les terres des Thermons étaient (selon la rumeur) une vraie source de cristaux ainsi que d’autres minéraux pouvant rapporter une fortune inestimable.

    Là était la raison de cette bonté.

    Mais Dordengoa ignorait que la plus vaste source d’or était située juste en dessous du village de Duhan. Ses plans changèrent pour le pire. Il ne pouvait châtier les habitants, de peur que la princesse de Mauve l’apprenne. Il ne pouvait pas non plus tous les éliminer. Il ne pouvait que les obliger à partir. (Mais ce n’était pas chose simple.)

    Il ordonna à ses hommes de maltraiter la communauté Thermon, afin de la pousser à bout. Ils devaient partir ! Il devait s’enrichir davantage !

    Ce matin-là, Hermina prit un moment de réflexion avant de quitter sa demeure. Allait-elle vraiment franchir son seuil de porte pour s’aventurer dans une autre journée de maltraitance ? Elle avait souvent songé à quitter les terres de ses ancêtres. Mais un tel acte n’allait rien changer. Où irait-elle ? Que deviendrait-elle ? Elle n’osait même pas y penser. Avec tant de cruauté acharnée sur elle et Duhan, Hermina cessa de croire en Serhadiez. À quoi bon ? Pourquoi prier une déesse qui ne lui venait pas en aide ?

    Elle ouvrit finalement la porte puis vit déjà deux soldats de Dordengoa marcher tout bonnement dans son village. Ils ne faisaient rien de mal par contre. Elle tourna ensuite la tête vers la sortie qui était gardée. (Dordengoa les avait barricadés, afin de les empêcher d’aller se plaindre à Mauve.) Il était vil comme un forban et rusé comme un renard.

    Elle garda tout de même la tête haute, puis se dirigea au centre du village, là où les habitants se rassemblaient pour prier Serhadiez. Hermina les observa. Tous terrifiés, rompus par la peur. Est-ce que cette misère allait prendre fin un jour ?

    Elle débuta.

    — Mes amis, prions notre Créatrice pour…

    — Dame Hermina, la coupa un homme, est-ce que Serhadiez nous a abandonnés ?

    La pauvre ferma les yeux, incapable de répondre.

    — La nuit dernière, continua une jeune femme, ils sont entrés dans notre maison et ont volé le collier de ma mère ! Ils ont même pillé nos provisions pour la semaine !

    — L’autre jour, ils ont dénudé ma fille et ses amies sous les yeux de tous ! Elle s’est cloîtrée dans sa chambre depuis ! Qu’est-ce que Serhadiez attend pour punir ces monstres ?

    — Calmez-vous mes amis, demanda sagement Hermina.

    — Vous savez déjà la réponse pour fuir cette misère !

    La foule se tourna. Une dizaine de soldats se fraya un chemin, éveillant quelques lamentations. L’un d’eux agrippa Hermina par l’épaule puis la rua au sol, prenant sa place.

    Il s’éclaircit la voix et prit parole.

    — Voulez-vous vraiment savoir comment vous sauver de cette misère ? Quelqu’un ? Je vais vous le dire ! Partez ! Et vous serez sauvés du pillage et de la cruauté physique…

    — Mais où irons-nous ?

    — Où ? On s’en fout ! Tant que vous n’êtes plus dans nos jambes. Mais comprenez une chose, si vous restez, nous vous ferons châtier, d’une manière ou d’une autre !

    — Nos enfants sont venus au monde ici, tonna un vieil homme, et ils grandiront là où leurs ancêtres ont grandi !

    — Il est là le problème ! Arrêtez de faire des enfants, bon sang ! Vous ne faites que nous compliquer la tâche. Si ça continue, nous serons forcés d’employer des solutions… drastiques.

    — Vous… vous ne feriez pas ça, fit une mère terrifiée, serrant son nourrisson contre sa poitrine.

    — Non ? Je vais vous montrer !

    L’homme s’approcha de la jeune mère qui poussa un cri de terreur quand il l’agrippa par le bras. Certains habitants tentèrent de lui venir en aide, mais les compagnons du capitaine s’en mêlèrent aussitôt. Celui-ci empoigna violemment l’enfant nouveau-né puis l’éleva bien haut dans les airs comme s’il n’était qu’une vulgaire poupée de chiffon. Hermina se redressa d’un bond puis tenta de le lui reprendre, mais ce dernier la repoussa d’une force qui lui parut surnaturelle.

    Étendue au sol, elle se roulait sur le côté quand elle crut entendre une lame se dégainer. Sans état d’âme, le capitaine pointa son poignard au-dessus du visage de l’enfant en pleurs. Sous les rires de ses hommes, il força la mère à regarder. « Mon bébé, mon bébé », s’affolait-elle.

    — Regardez bien parce que ce sera une seule représentation !

    Toutefois, il n’eut le temps de ne rien faire. Tout en brandissant sa lame, le capitaine se sentit brusquement soulevé dans les airs. Ne réalisant pas ce qui lui arrivait, ce dernier alla s’écraser quelques mètres plus loin, échappant le nourrisson en plein vol.

    — Mon fils, s’étrangla la mère.

    Arrivant de nulle part, un jeune homme bondit dans l’action puis attrapa l’enfant avant d’atterrir sur ses deux pieds. « Quel drôle d’idée pour prouver sa valeur… s’attaquer à un être sans défense… vous les Broniacs », grinça le nouvel arrivant.

    Le temps semblait s’être figé. Hermina, ainsi que son peuple, dévisagea le jeune homme avec stupeur et satisfaction, alors que les soldats tremblaient dans leur armure.

    L’un d’eux dégaina son épée, mais encaissa le même sort que son maître. Le silence tomba à nouveau et le jeune défenseur n’avait pas bougé. Il était un Érudit. « Qui est le prochain ? », avait-il demandé d’un ton glacial. Sans attendre, les soldats s’enfuirent un à un sans regarder derrière.

    Trop impressionnés pour dire quoi que ce soit, les habitants demeurèrent là, muets…

    Le jeune Érudit s’approcha de la mère puis lui rendit son enfant. Celle-ci s’écroula sur ses genoux, le remerciant sans relâche.

    Hermina se releva puis fixa l’homme, le cœur battant.

    — Qui êtes-vous ? laissa-t-elle aller enfin.

    L’Érudit se retourna.

    — Je suis Ken…

    — Ah ! Enfin le confort d’un lit, s’exclama Seven, en se laissant tomber sur le matelas à ressorts.

    Elle se laissa rebondir un moment puis tourna la tête en direction de la fenêtre où s’était posté Nero. Il était silencieux… encore. Depuis les événements de Blue, Nero semblait préoccupé par ses souvenirs et Lacrima. Mais cet Érudit était trop orgueilleux et arrogant pour l’admettre.

    Seven se roula sur le dos et fit les premiers pas.

    — Elle va bien, ne t’en fais pas, fit-elle. C’est une fille intelligente ! Pas comme cette Broniac qui s’embarque d’un problème à l’autre.

    — De quoi parles-tu ?

    — Nero… t’es sérieux ?

    Le silence voulait tout dire.

    — Toi, Lacrima ! Lacrima, partie ! Toi inquiet pour Lacrima !

    — Oh ! Ça ? Non… moi inquiet ? Ça ne me ressemble tellement pas.

    … Et le silence de Seven voulait tout dire.

    — Je me disais, comme la lune est belle cette nuit, se moqua l’Érudit, pensant que ça allait le sauver.

    — Toi, Nero l’Érudit… contempler la lune ?

    Il soupira enfin.

    — Tu me connais trop bien, partenaire.

    — Et rappelle-t’en ! Bon, ce n’est pas tout. On va devoir se laver si on ne veut pas s’asphyxier avec notre belle odeur, cette nuit. Tu y vas en premier ?

    — Je te laisse la place.

    La jeune Lucas bondit du lit puis, d’un pas enthousiaste, elle s’orienta vers la salle de bain. En ouvrant la porte, elle vit Arco qui essayait de se cacher dans la chute à linge. « Cet espèce de Ferthux me tape vraiment sur les nerfs », explosa-t-elle. Seven l’agrippa par le cou et d’un élan de Goliath, elle le balança hors de la salle de bain puis hurla :

    « Interdit aux Ferthux » !

    (Arco eut même le temps d’entendre la porte se refermer avant d’atterrir au sol.) Il n’y pouvait rien… cette Lucas trop… trop !

    Dans son coin, Nero était beaucoup trop distrait par ses pensées pour avoir été témoin de la scène. Comme Seven l’avait vu, Lacrima le hantait de plus en plus. Il se remémorait davantage de souvenirs. Et chacun d’eux lui nouait le cœur d’une drôle de sensation.

    Arco vint bondir à ses côtés.

    — Alors, comment va ? Tu es dans la lune depuis qu’on est arrivés.

    Nero sursauta.

    — Arco ? Qu’est-ce que tu fais là toi ?

    — Quoi ? On est arrivés ici ensemble alors… c’est un peu normal que je sois ici avec toi, non ?

    — Non, je voulais dire, qu’est-ce que tu fais là… en ce moment. Seven est sous la douche. Normalement, tu traverses désert et mer pour profiter de l’occasion.

    — Ah oui… mais il y a une porte qui m’empêche d’aller au paradis.

    — Oh… tu abandonnes vite, ce soir. Enfin, c’est peut-être pour le mieux. Seven ne te tuera pas cette nuit.

    — Tu as raison… il y a une fenêtre qui donne sur cette salle de bain !

    Sans attendre, Arco s’agrippa à la gouttière puis se fraya un chemin vers la toiture. Nero le regarda aller puis soupira d’un sourire complice.

    « Désolé Seven… c’était nullement mon intention de te l’envoyer… juré », rigola-t-il.

    Nero ferma les yeux tout en s’appuyant sur le rebord de la fenêtre. Il présageait l’arrivée d’un ouragan qui allait sans doute porter le nom de Seven. Un sourire en coin, il tendit l’oreille n’entendant que la pomme de douche, pour l’instant. « Voilà la pluie qui commence », se moquait-il.

    Il encourageait rarement Arco à succomber à la tentation. Un de ces jours, Seven le tuera probablement pour de bon… (Ce petit Ferthux avait toutefois déjoué la mort à maintes reprises.) Tout en gardant une oreille attentive sur la salle de bain, quelque chose vint embarrasser sa concentration. Une voix… un chant.

    Nero ouvrit promptement les yeux. « Quelle voix », se dit-il. Une voix sublime (voire presque enchanteresse) vint renchérir l’ambiance nocturne. Sous un clair de lune, le chant parut presque féerique.

    — Allez, dis-moi où tu es, s’exclama Nero, qui s’accroupit sur le rebord de la fenêtre.

    Mais soudainement, un cri de surprise (suivi d’un bruit sourd) vint l’extirper de ses recherches. La mélodie disparut au même moment…

    Nero se retourna sur lui-même, faisant face à la salle de bain. « J’ai condamné cet imbécile », soupira-t-il. Mais le manque de cris de rage qu’il avait l’habitude d’entendre en ce genre de situation commença à l’inquiéter. « Non… j’ai tué Seven. »

    L’Érudit s’approcha de la porte puis à voix haute, il appela :

    — Seven? Je t’ai entendue tomber, tout va bien ?

    Aucune réponse… Il baissa d’un ton.

    — Seven?

    Toujours rien. Nero s’imaginait déjà le pire des scénarios possibles. La jeune Lucas surprise par Arco… d’un élan de rage, tente de l’attraper, mais perd pied et se cogne violemment la tête contre la baignoire. « Si tu ne réponds pas, j’entre… je suis sérieux Seven », avertit l’Érudit trempé d’inquiétude.

    Il compta dix secondes puis, d’un claquement de doigts, il fit sauter la serrure de la poignée. N’attendant pas un moment de plus, Nero s’élança dans la salle de bain pour finalement surprendre Seven en train d’étrangler (avec vigueur) le petit Ferthux qui bleuissait à vue d’œil.

    Mais cela n’était pas un problème… Arco était habitué à la grippe monstrueuse de Seven.

    Non… 

    Nero était davantage désorienté par la nudité de cette dernière. Pas même une chaussette lui recouvrait les orteils (qui nécessitaient une bonne coupe d’ongles). Elle était « dans toute sa splendeur », comme l’aurait si bien dit Arco. Sur le fait, Seven s’aperçut de la présence de Nero puis figea sur place. Ruisselante, nue et face à l’Érudit, la jeune Lucas bouillit d’embarras.

    Ne sachant plus où donner de l’œil, Nero sourit bêtement puis dit :

    — Seven… eh bien, il faut voir ça du bon côté. Maintenant, je sais que tu n’es pas blessée et je sais aussi que ce que j’ai entendu dire sur les roux s’avère être vrai.

    — Qui… est ? rougit Seven.

    — Les roux sont… roux partout.

    Le reste de la scène pouvait se décrire en peu de mots. Nero eut à peine le temps de voir Seven lui lancer Arco en pleine figure, qu’ils furent propulsés hors de la salle de bain.

    — Vous n’êtes que deux imbéciles ! rabroua la jeune Lucas, cachée derrière la porte.

    Nero et Arco restèrent couchés au sol. Le petit Ferthux montra finalement un signe de vie, remuant faiblement des oreilles. Il tourna sa tête vers celle de Nero et lui demanda d’une voix étouffée :

    — Si on meurt, as-tu des regrets ?

    — Plus maintenant, non… répondit Nero, feignant être au bord de l’agonie. Mais je crois qu’on va avoir droit à une douche froide, tout à l’heure.

    Une chose était certaine… elle n’en avait pas fini avec eux.

    Épisode 02

    La ville fortifiée

    Il n’y eut aucune douche froide ni aucun autre coup, pas la moindre engueulade après que Seven soit sortie de la douche, la nuit dernière. Elle en sortit la tête haute, et ne fit que dévisager ses deux crétins de partenaires, sagement assis sur le canapé. Bien qu’il était soulagé de cette trêve de colère, Nero aurait préféré qu’elle lui dise quelque chose du genre : tu n’es qu’un imbécile, ça va me prendre du temps avant de te le pardonner, tu vas voir… mais non. (Ce silence l’avait encore plus effrayé que la mort elle-même.)

    — Dis quelque chose au moins, s’était exclamé l’Érudit.

    Seven l’avait ensuite ciblé du regard avant de laisser tomber un long soupir. Elle n’allait pas lui en vouloir toute la soirée. Nero avait fait irruption dans la salle de bain, certes, mais uniquement parce qu’il s’était inquiété pour elle. Oui, il l’avait vue toute nue… et oui, son comportement anodin avait fait plus de mal que de bien… mais il n’était pas entièrement coupable.

    — Toi, je te pardonne, marmonna-t-elle. Mais toi…

    Elle toisa ensuite Arco d’un regard débordant de mépris. Le petit Ferthux baissa les oreilles vers l’arrière avant de ravaler sa salive.

    Seven reprit.

    — Les créatures dorment dehors !

    Elle l’agrippa par le collet et d’une force herculéenne, elle le balança par la fenêtre. Reconnu pour son caractère flegmatique, Nero ne put s’empêcher d’exhiber un regard ahuri.

    — Tu… tu n’y es pas allée de main morte, bredouilla-t-il la mâchoire en branle.

    — Ne t’inquiète pas pour lui, il sait comment atterrir sur ses pattes. Et il trouvera bien un coin pour la nuit.

    Arco n’en était pas à sa première bêtise. Seven perdit rapidement le compte des fois où il les avait mis dans l’embarras. Comme celle où il s’était camouflé en éponge lorsqu’elle prenait sa douche, ou encore, celle où on l’avait retrouvé dans la garde-robe d’une jeune dame de la noblesse.

    Combien de fois avaient-ils été châtiés d’un village par sa faute ? Plus enrageant encore, c’était qu’il donnait toujours les mêmes excuses.

    « Je marchais et cette culotte est tombée de nulle part… »

    « Il pleuvait, alors je me suis abrité avec… »

    Ou la pire.

    « Je ne savais pas que c’était la fille du maire ! »

    — Il n’a pas le choix, ce soir, il dort dehors ! grinça-t-elle.

    Nero n’eut pas son mot à dire. D’autant plus qu’il était dangereux de contredire cette chère Lucas, dans une telle situation.

    Suite à cette mise en scène enflammée, la nuit se termina dans le silence et la sérénité. Après plusieurs jours de marche éreintante, Seven pouvait enfin profiter d’un lit tout douillet et d’un vrai oreiller.

    Nero pouvait sentir son cœur se calmer. Il la préférait douce plutôt qu’enragée. Et suite aux récents événements, l’Érudit pouvait enfin trouver la paix dans son sommeil. Ils allaient tous deux passer une nuit reposante et demain serait un autre jour. (Enfin, c’est ce qui était prévu au programme.)

    Nero ne ferma les yeux que quelques heures pour se réveiller entre les cuisses de Seven. Toujours aussi agitée (même dans son

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