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On flushe... pis on recommence ! (en théorie)
On flushe... pis on recommence ! (en théorie)
On flushe... pis on recommence ! (en théorie)
Livre électronique397 pages4 heuresOn flushe... pis on recommence !

On flushe... pis on recommence ! (en théorie)

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À propos de ce livre électronique

J'étais prise dans une relation qui battait de l'aile, en plus d'avoir une job aussi stimulante qu'un rendez-vous chez le dentiste. Dans un élan de pure folie et d'inconscience, je me suis inscrite à l'Université de Sherbrooke, à l'autre bout de la province. Jusque-là, c'était un projet en l'air, mais… j'ai été acceptée !!!

Est-ce qu'à trente ans, on peut encore se dire : on flushe pis on recommence ?

Je m'apprête donc à troquer mon chum, mon travail, ma meilleure amie et ma maison contre des activités d'initiation avec des jeunes dans le début de la vingtaine et des soirées entières passées à étudier. Tout un défi ! Et on oublie l'idée de fonder une famille dans les prochaines années…

Mais si c'était aussi l'occasion de vivre d'autres aventures ? De faire des rencontres ? De me « déniaiser » un peu ?

Pour repartir à zéro dans ma nouvelle vie, voici ce qu'il me faudra : un nouvel appartement, de nouveaux amis, et une nouvelle job pour payer tout ça.
Ça devrait bien aller… en théorie !
LangueFrançais
ÉditeurDe Mortagne
Date de sortie18 oct. 2017
ISBN9782896627455
On flushe... pis on recommence ! (en théorie)
Auteur

Marie-Millie Dessureault

Marie-Millie Dessureault s’est découvert une passion pour l’écriture après s’être retrouvée avec une paire de bas de laine aux pieds au mariage de sa jeune sœur. Après le succès de «Maudits bas jaunes !», elle a récidivé avec «On flushe… pis on recommence !» («en théorie» et «en pratique»), puis en écrivant «Laurence» de la série «Veuve de chasse». C’est en résidant enfin dans sa première maison que l’inspiration pour écrire la suite des aventures de Rosalie lui est venue... naturellement !

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    Aperçu du livre

    On flushe... pis on recommence ! (en théorie) - Marie-Millie Dessureault

    image-chapitre

    Grande annonce, grandes surprises !

    La décision s’avère étrangement plus facile à prendre qu’à annoncer. Je n’ai que deux semaines avant le début des cours pour laisser ma job, mon amoureux, mes parents, ma maison et Corine. Ça va être court !

    LA JOB

    Dernière pensée avant la grande annonce : je pourrais toujours démissionner et tenter de me trouver une job qui ne serait pas aussi monotone, ailleurs dans la région. Ce serait pas mal moins éreintant et surtout moins coûteux que de me taper trois ans et demi d’université !

    — Tu nous quittes ? Tu n’es pas heureuse ici ? s’étonne Marc, mon patron.

    Quoi ? Pas heureuse de remplir des déclarations de revenus jusqu’à la fin de mes jours dans mon petit bureau sans fenêtre ?

    — Non, au contraire, j’adore ce que je fais (menteuse !). À mon embauche, j’étais certaine de passer toute ma carrière ici (là, tu charries !), mais maintenant je veux essayer autre chose.

    En vérité, lorsque j’ai terminé ma technique en comptabilité et gestion, la firme comptable m’a rapidement embauchée. J’ai été soulagée de ne pas avoir à passer des entrevues où il aurait fallu que je me vende. Je me voyais grimper les échelons et devenir associée après quelques années, malgré que je ne sois qu’une technicienne (j’allais être la première¹ !). Belle illusion de jeunesse ! Depuis neuf ans, je remplis des déclarations fiscales du matin au soir et je sers de bonne à tout faire auprès des « vrais » comptables.

    — C’est vraiment dommage. Je pensais t’offrir le bureau près de la distributrice d’eau l’an prochain (merde, j’étais si près du but !). On appréciait beaucoup ton travail. Tu nous donnes deux semaines d’avis ?

    — En fait, c’est que mes cours commencent justement dans deux semaines. J’aurais voulu partir avant, que je me contente d’expliquer (je dois me trouver un logement !).

    — Je vais être franc et tu ne m’aimeras sans doute pas, mais, si tu veux avoir ton quatre pour cent, il nous faut tes deux semaines. Cependant, compte tenu de tes excellents états de service, je te donne ton vendredi. Tu pourrais partir jeudi de la semaine prochaine.

    — D’accord, merci (sale con !), c’est gentil. Je vous envoie ma lettre de démission cet après-midi, que j’ajoute en quittant son bureau.

    Ces deux semaines vont être longues. Au moins, ça me conforte dans mon choix. Je n’aurais jamais pu me sentir complètement épanouie ici. Vu que c’est un homme froid et imbécile, je suis surprise que mon boss m’ait complimentée sur mon travail. Ça lui a semblé douloureux, mais c’était agréable à entendre. J’avais néanmoins beaucoup de plaisir avec certains de mes collègues et j’espère que l’université me permettra de rencontrer des gens avec qui j’aurai une aussi belle complicité.

    MA MÈRE ET MON PÈRE

    (que je suis parvenue à réunir l’instant d’un souper en leur promettant une importante nouvelle).

    Étant enfant unique, je culpabilise déjà à l’idée que mon départ inflige une syncope à mes parents. En célibataires endurcis qu’ils sont devenus, ils se retrouveront complètement seuls (bon, ils ont quand même des amis…).

    Dernière pensée : je n’aurai plus accès aussi souvent aux bons petits plats de ma mère ni aux talents manuels de mon père. Je serai laissée à moi-même dans cette ville bien connue, mais où je ne connais personne.

    — T’es sérieuse ? s’exclament-ils à l’unisson.

    Je prends le temps de respirer. Je ne sais pas trop quel ton adopter.

    — C’est un peu vexant de constater l’étonnement de ses géniteurs quand on est acceptée à l’université, que je réplique après avoir opté pour la défensive.

    — Désolée, ma choupinette, c’est juste que ce n’est pas tout à fait la nouvelle que j’attendais, s’excuse ma mère en me tendant une carte. La couverture est toujours bonne, mais tu comprendras en lisant l’intérieur.

    — « Félicitations ! Que ce petit être vous apporte joie et bonheur. » Ah, je vois. Non, je suis pas enceinte.

    Pour la première fois depuis leur séparation, mes parents affichent la même émotion – autre que la haine mutuelle, je veux dire. Ils doivent être déçus pour vrai. Lorsqu’ils apprendront qu’en plus je vais quitter Philippe, ils vont tomber de haut ! Leurs aspirations à devenir grands-parents vont être reportées de quelques années encore.

    — Tu vas vraiment apprendre à faire voler des objets par la pensée ? demande mon père.

    — Elle s’en va en kinésiologie, Joseph, pas en télékinésie, le corrige ma mère.

    — As-tu fini de toujours me reprendre, Marie² ? C’est la même affaire.

    Je me lance donc dans une explication sommaire de ce qui occupe les journées d’un kinésiologue. Je donnerais bien davantage de détails, mais je ne connais pas encore l’étendue du champ de compétence que j’aurai une fois diplômée. En fait, c’est Arnaud, le frère d’une de mes collègues, qui m’a donné le goût d’étudier dans ce domaine. Il vient souvent dîner au restaurant avec nous, puisque sa clinique se situe tout près du bureau. À force de l’écouter raconter ses histoires et de nous donner des conseils sur notre façon de nous entraîner, j’ai eu la piqûre. C’est la journée que j’ai passée avec lui comme « stagiaire d’un jour » qui m’a poussée à m’inscrire à l’université. Arnaud était d’ailleurs le seul à être au courant de mon projet. Je n’en ai même pas parlé à Corine, pour minimiser ma déception dans le cas où je ne serais pas acceptée.

    — Je ne savais pas que le cours se donnait à Val-d’Or, commente ma mère.

    — Euh… En fait, je pars pour Sherbrooke.

    — Ben voyons donc ! C’est bien trop loin, s’écrie mon père, qui doit être le dernier homme à n’avoir toujours pas traversé le parc de la Vérendrye (il ferait d’ailleurs une excellente caricature de ce que certains habitants de « la grande ville » pensent des Abitibiens).

    — Ce ne sera pas facile pour ton couple. Qu’en dit Philippe ? Il va s’ennuyer, tout seul à la maison.

    « La maison » ; en fait, c’est la nouvelle maison que J’AI choisie, mais que PHILIPPE a payée avec l’incroyable héritage de son grand-père (avantage d’être l’unique petit-fils d’un vieil homme riche et économe !). Elle va me manquer.

    — Il le sait pas encore, je vais le lui annoncer ce soir.

    — Ça va vous coûter cher d’interurbains ! s’inquiète mon père. Quoique, maintenant, vous pouvez utiliser Spaille.

    — Ce n’est pas Spaille, Joseph, c’est Skype !

    — Arrêtez de vous obstiner ! De toute façon, je vais quitter Philippe. Ça fonctionne plus, lui et moi. On est au point mort depuis trop longtemps.

    Inutile de préciser qu’après le coup de foudre, les journées à s’envoyer des messages textes et les nuits à faire l’amour, les papillons ont commencé à s’en aller. Cela a coïncidé avec l’achat de la maison. Les disputes à propos des corvées (moment où j’ai compris l’origine de l’expression « chicane de ménage ») ont peu à peu remplacé les batailles d’oreillers et les petites vites sur le bord du comptoir.

    — J’aurais aimé un peu plus de soutien de votre part ! que j’ajoute, en beau fusil.

    — Tu quittes Philippe, répète mon père, encore sous le choc.

    Je me radoucis en voyant son expression. Avec le temps, il en était venu à considérer Philippe un peu comme son propre fils. Ils avaient une belle complicité et faisaient même parfois des activités sans moi. Je me suis toujours trouvée chanceuse d’avoir un chum qui s’entende aussi bien avec mon père. Je n’avais pas songé à la peine que mon papa pourrait avoir.

    — Ouin… Ça fait que c’était ça, ma grosse nouvelle, que je termine en me levant pour qu’ils ne voient pas les larmes qui menacent de couler.

    Je laisse mes parents en plan, la bouche encore ouverte d’étonnement. Je déteste les entendre se prendre la tête et ça ne manquera pas de se reproduire si j’étire la conversation. Je n’ai pas vraiment envie non plus de m’étendre davantage sur la dérive de ma vie de couple ou d’expliquer mon changement d’orientation (de carrière, je veux dire) en long et en large. Et, comme je risque d’être cassée pour les quatre prochaines années (mes maigres économies ne survivront pas longtemps), aussi bien commencer à épargner maintenant en les laissant régler mon addition !

    CORINE

    Je l’ai connue en deuxième année du primaire. Elle arrivait de la France, car son père avait trouvé un emploi comme professeur à l’université. Préposée aux nouveaux élèves, je m’étais autoproclamée sa meilleure amie dès sa première journée. Nous sommes inséparables depuis. Mis à part les fois où elle retourne visiter de la famille en Europe, il ne s’écoule jamais plus de trois jours sans qu’on se voie. Ensemble, nous avons traversé de nombreuses peines d’amour, la séparation de mes parents et le décès prématuré des siens.

    Dernière pensée : je suis capable d’envisager de quitter Philippe, mais ce n’est pas aussi évident dans le cas de Corine. Ça en dit long…

    — Il était temps ! s’exclame ma meilleure amie avec son petit accent français³.

    — Pardon ? que je fais, étonnée.

    — Il était temps, me répète-t-elle, plus posée.

    — J’avais entendu. Disons que je croyais que tu serais scandalisée et que tu me supplierais de pas partir.

    — Tu n’exagères pas un peu, là ? Écoute, je te connais comme si je t’avais tricotée. Tu n’es pas heureuse au boulot depuis belle lurette. Je me suis toujours demandé pourquoi tu ne cherchais pas un autre métier. Les fois où j’ai essayé de t’en parler, tu as plutôt changé de sujet.

    — Donc, tu penses que je prends la bonne décision ? que j’insiste en espérant son approbation.

    — Ça ne sera pas facile, ça va être long et je vais surtout beaucoup m’ennuyer, mais, au bout du compte, je crois que c’est la meilleure chose que tu puisses faire. Tu l’as dit à Philippe ?

    — Pas encore. Je sais pas trop comment le lui annoncer.

    — Utilise des mots, ça va mieux, me taquine Corine.

    — C’est pas drôle, que je réplique avant de rire à mon tour. Je crois que je vais le quitter. Non, en fait, je VAIS le quitter.

    — Je m’en doutais. Ça s’en allait vers ça depuis longtemps. Là, tu as l’excuse parfaite pour le faire. À ce sujet-là aussi, tu étais plutôt fermée et je n’ai pas osé insister.

    — C’est pas fatigant, à la longue, de tout savoir comme ça ? que je plaisante.

    — On s’habitue, ne t’inquiète pas pour moi, réplique-t-elle avec un clin d’œil.

    — Mais, même si je suis en paix (pas tant que ça !) avec l’idée de le quitter, ça me rend triste. J’avais toujours imaginé qu’on se marierait et qu’on élèverait nos quatre enfants dans notre belle maison.

    — C’est normal, ma chérie. Vous avez vécu plein de beaux moments. Ce n’est pas parce que c’est toi qui le laisses que tu y prends plaisir. Ça reste un deuil.

    — Je pars dans deux semaines, mais il faut que je le lui dise dès ce soir. Mon boss et mes parents sont déjà au courant. Je veux pas qu’il l’apprenne de quelqu’un d’autre.

    — J’espère bien ! Tu lui dois au moins ça. En tout cas, ma chambre d’amis est libre si tu veux. Je vais laisser une clé à la même place que d’habitude, dans le cabanon.

    — Merci. Je vais voir comment ça se passe, mais je risque effectivement de débarquer chez toi. Ah, tu vas tellement me manquer, là-bas !

    — Et toi donc ! Dans trois ans et demi, je vais te demander si tu crois avoir fait le bon choix et, tu verras, tu vas rire en repensant à aujourd’hui.

    — Prions le ciel que t’aies raison encore une fois !

    PHILIPPE

    J’étais tellement sous le charme quand on s’est rencontrés, et avec raison. Il m’arrivait souvent d’ouvrir ma boîte à lunch au travail et d’y découvrir un petit mot d’amour accompagné d’une surprise. Pendant les rushs des déclarations de revenus, j’arrivais à l’appartement et le souper était toujours prêt. Chaque fin de semaine, on essayait une nouvelle activité. Eh my God qu’on faisait toujours l’amour ! Bien sûr, je l’aime encore (peut-être ?), mais je ne crois plus qu’il soit l’homme de ma vie.

    Dernière pensée avant de tout foutre en l’air : et si je me trompais ?

    — Wow ! Combien de fois as-tu répété ton beau discours ? me crie celui que je devrai désormais appeler « mon ex ».

    — Écoute, je suis sincèrement désolée. Je suis plus heureuse, ni ici ni au bureau. Toi aussi, tu dois t’être rendu compte que ça fonctionnait plus très bien, toi et moi, que je reprends calmement.

    — Ah, parce qu’en plus tu voudrais que ça se fasse d’un commun accord pour que tu te sentes moins cheap ? J’ai des petites nouvelles pour toi, Samuelle Villeneuve-St-Jean : tu vas être la seule responsable de tout ce gâchis ! On parlait même de commencer à s’essayer pour un bébé, ciboire !

    — Je sais, dis-je, les larmes aux yeux.

    Pour la première fois depuis que j’ai pris ma décision, je me sens moins confiante. C’est vrai que j’avais hâte d’avoir un bébé. Je devais même arrêter la pilule le mois prochain. Je sais très bien qu’un enfant est loin d’être la solution aux problèmes de couple, mais j’étais rendue à cette étape de ma vie et je m’étais convaincue que tout irait mieux. Maintenant, je réalise pleinement que je vais devoir mettre mon rêve de côté pour les quatre ou cinq prochaines années. Trente-cinq ans : l’âge que je risque d’avoir à mon premier enfant. On oublie l’idée d’en avoir quatre !

    — T’as rencontré quelqu’un d’autre, c’est ça ? rage Philippe, me sortant du même coup de ma torpeur.

    — T’es complètement dans le champ ! que je m’insurge. Je veux juste changer de vie et je m’en veux terriblement de te faire souffrir. Tu mérites pas ça.

    — Je pense que tu devrais t’en aller, Samuelle, se contente-t-il de répondre. Je vais sortir marcher et, à mon retour, t’es mieux d’être partie. Oublie rien, sinon ça risque de finir dans le poêle à bois.

    Je le laisse partir, sans même une dernière caresse ou un dernier baiser. Je n’ai jamais vu Philippe comme ça. Je croyais qu’il me hurlerait après (encore plus, je veux dire) ou qu’il me supplierait de rester, mais là, je n’ai ressenti qu’une profonde tristesse et une grande déception. Je suis plus bouleversée que je ne l’aurais cru.

    Je commence par mettre ma garde-robe dans ma voiture, puis remplis mes boîtes en passant chaque pièce au peigne fin. Je ne sais pas trop quoi faire des nombreuses photos de nous qui trônent un peu partout. J’emporte ma préférée : celle de nos vacances en Grèce. Lors d’un souper auquel nous avions été invités par les propriétaires de l’auberge, Philippe avait réussi à me faire mettre ma timidité de côté pour participer à la danse traditionnelle, le sirtaki⁴. Ce sera mon seul souvenir. Je laisse ma clé sur la table de la cuisine et fais mes adieux à la maison.

    image-chapitre

    Future locataire en détresse !

    Neuf heures de route, dont une de trop à cause de mon foutu GPS, et me voilà dans ma nouvelle ville. Plus que trois dodos avant lundi, jour de mon entrée officielle à l’université. Trois jours pour me trouver un appartement, faire un peu de magasinage pour regarnir ma garde-robe en vêtements de sport, rassembler le plus d’éléments possible sur la liste que les deuxième année de ma faculté m’ont fait parvenir et trouver un charmant déguisement de schtroumpfette.

    Lorsque j’ai confirmé mon adhésion comme étudiante libre, j’avais complètement oublié ces satanées initiations. À mon entrée en technique de comptabilité, j’avais dû vendre des condoms à une intersection. Ça semble anodin dit comme ça, mais, quand tu habites à Val-d’Or, les risques que tu connaisses les personnes à qui tu dois faire la promotion de la santé sexuelle, et que tu les recroises par la suite, sont exponentielles. J’étais tombée sur la grand-mère de Corine, mon père, ma prof de cinquième année et mon chum de l’époque… avec une autre fille ! Pas mes plus beaux souvenirs collégiaux !

    J’ai pensé ne pas participer cette fois-ci, mais, déjà que je vais détonner du reste du groupe avec mes trente ans, je m’y suis résignée. J’essaie de voir ça du bon côté en me disant que ce sera l’occasion idéale pour me faire de nouveaux amis et découvrir les meilleurs endroits où sortir en ville. Qui sait si une party animal ne se cache pas en moi ? Je suis déjà venue à Sherbrooke pour un congrès en comptabilité, mais j’étais avec Philippe et nous avions davantage profité de la chambre d’hôtel que des charmes que la ville pouvait nous offrir.

    Philippe. Je ne l’ai pas revu depuis que j’ai quitté la maison. Corine m’a informée qu’il avait pris congé du travail et qu’il était parti voir des amis au Saguenay… du moins, c’est ce que lui a dit la caissière du supermarché la dernière fois qu’elle est allée faire ses courses.

    En attendant de trouver mon appartement, j’ai réservé un lit « chez l’habitant ». C’est ce qui revenait le moins cher, et je me suis dit que l’habitant en question pourrait peut-être m’aider dans mes différentes recherches. Une fois arrivée, je sors tranquillement de ma voiture, complètement ankylosée. Je sonne au 31A, comme c’est indiqué sur la confirmation que j’ai imprimée avant mon départ. Un gars qui doit être dans la mi-vingtaine vient m’ouvrir.

    — Salut, moi, c’est François. Tu dois être Samuelle.

    — Oui, que j’acquiesce en lui serrant la main.

    — Wouah ! Tu déménages ou quoi ? me demande-t-il en apercevant de loin l’intérieur de ma voiture.

    — Exactement ! Mais t’inquiète pas, j’ai besoin que d’un petit sac pour ce soir, que je réponds en souriant.

    — Ouf ! Bon, alors, donne-le-moi, je vais le transporter.

    François me conduit donc dans son appartement. Ce n’est pas très grand, mais tout y est et c’est très propre pour un logement de gars. Ma chambre est douillette et entièrement meublée. J’installe les quelques affaires que j’ai apportées, puis le rejoins au salon.

    — Tu loges souvent « chez l’habitant » ? me demande mon hôte.

    — Non, c’est la première fois. J’avais un peu peur de me faire avoir, mais je dois avouer que, jusqu’à maintenant, je suis agréablement surprise. Et toi, tu héberges souvent des gens ?

    — J’ai commencé cet été. Mon ancien coloc m’a laissé tomber à la fin de la dernière session d’université et je peux pas me permettre de payer l’appartement tout seul. Comme j’avais pas envie de revivre une mauvaise expérience avec un autre coloc, je prends des voyageurs quand je suis à court d’argent. Et puis, ça me fait de la compagnie. Et toi, pourquoi tu déménages ici ? Le boulot ?

    Je me lance donc dans le récit des trois dernières semaines. François m’écoute et hoche la tête de temps à autre. Tout y passe : ma lettre d’acceptation, mon ancienne job, mes parents, Corine et, finalement, Philippe (petites larmes ici).

    — Oh, Seigneur ! Pardonne-moi, ça fait une heure que je te raconte ma vie et je suis pratiquement étendue sur ton sofa ! Je t’autorise à mettre ça sur ma facture de location. J’espère que t’étais pas attendu quelque part.

    — Aucun souci. J’aime ça, écouter les histoires des gens.

    — En tout cas, t’es vraiment très bon. Ça me coûterait probablement deux cents dollars pour obtenir la même chose dans le bureau d’un psy.

    — Ouais, ben, j’étudie justement dans cette branche. J’entame mon doctorat cette année. Je pense faire ma thèse sur l’impact psychologique des études universitaires tardives chez les femmes des régions, me taquine-t-il.

    — Super ! Dans ce cas, je me porte volontaire comme « patiente à l’étude », dis-je en riant. En échange, tu pourrais m’aider à me dénicher un appartement.

    — Ça va pas être facile de trouver quelque chose de potable aussi près de la rentrée. Il aurait fallu que tu viennes en juin.

    — Je m’en doute, mais je suis une adepte de la procrastination, donc j’ai pas d’autre choix si je veux pas dormir sur un banc de parc. J’ai effectué quelques recherches avant de partir et j’ai noté des numéros pour des appartements ou des chambres à louer. J’ai pas vraiment de meubles ni d’électros, alors ça me prend quelque chose d’entièrement meublé. Si ça te dit, tu pourrais venir en visiter avec moi et me donner ton avis, ajouté-je en croisant les doigts.

    Un appartement, c’est plus sérieux qu’une paire de jeans ! J’ai besoin de renfort si je ne veux pas angoisser toutes les nuits du premier mois en me demandant si j’ai bien fait de signer un bail.

    — Parfait, on s’occupera de ça demain matin (fiou !). Appelle et prends les rendez-vous. Faut que je te laisse, j’ai une date ce soir. Je t’ai sorti une serviette dans la salle de bain si tu veux prendre une douche. Attention, le pommeau gicle un peu partout et il faut beaucoup de patience pour régler la température de l’eau.

    Une fois François sorti, je m’ouvre une bière de la caisse que Corine a mise dans ma voiture quand je suis partie. « Tu en déboucheras une quand tu seras installée dans ton nouveau chez-toi », m’a-t-elle suggéré. Je triche, mais j’en ai vraiment besoin en ce moment. Les dernières semaines se sont déroulées dans un certain flou. J’avais tellement de choses à préparer pour mon départ que je n’ai pas tout à fait pris le temps de mesurer les implications de ma nouvelle aventure. Là, c’est vrai. Ma vie se résume à quelques boîtes entassées dans ma voiture. Je suis de nouveau célibataire et bientôt pauvre. Ça mérite même une deuxième bière, je crois.

    Il ne faudrait quand même pas que je vire une brosse dans l’appartement de quelqu’un que je ne connais pas, en son absence ! D’ailleurs, il est loin d’être laid, ce François. Juste assez musclé, juste assez grand et juste assez beau pour que j’aie envie de finir dans son lit. Calme tes hormones, Samuelle, t’as plein de coups de fil à passer !

    Cinq rendez-vous planifiés et quatre bières (ou est-ce plutôt huit ?) plus tard, je vais me coucher un peu (très !) pompette. Je laisse un message à François l’avisant que la première visite est prévue à dix heures et que je l’invite à déjeuner avant pour le remercier de m’accompagner. J’appelle aussi brièvement ma meilleure amie pour lui assurer que je suis arrivée saine et sauve.

    — Oublie pas : pour ne pas paniquer, ne pense pas au fait que ça va durer trois ans et demi. On va prendre ça une année et un objectif à la fois. C’est quoi, ton but pour cette année ?

    — Pas me sentir comme une vieille matante ?

    — Parfait ! Ça devrait être réalisable, approuve Corine.

    C’est un étrange mouvement du matelas qui me réveille vers trois heures du matin. En sursaut, je me sors la tête de sous les draps (je sais, j’ai une drôle de façon de dormir) et j’aperçois une paire de fesses poilues… suivie d’une deuxième paire de fesses poilues !

    — Argh ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! que je gueule.

    — Samuelle ! Mais qu’est-ce que tu fais là ? crie à son tour François en essayant de se couvrir de son mieux.

    — Je t’ai loué une chambre. T’as oublié ?

    — Je sais, mais c’est pour la chambre d’amis que tu paies. Là, t’es dans la mienne !

    — Oh, merde !

    La main sur les yeux, je me lève en vitesse.

    — Aaaaaaoutch ! que je hurle en me cognant trois orteils sur la maudite patte du lit.

    — Ça va ? s’informe François. Tu peux ouvrir les yeux, tu sais. On est sous les draps.

    — C’est bon, ça va aller. Je suis désolée à l’infini ! Bonne nuit, dis-je en quittant enfin la pièce, morte de honte.

    Je regagne ma chambre complètement dégrisée. Comme première impression, j’aurais difficilement pu faire pire ! Incapable de fermer l’œil et ayant besoin de penser à autre chose que ce qui est en train de se passer dans la chambre d’à côté (pas parce que ce sont deux hommes, mais parce que ça commence à faire un bout qu’il ne s’est rien passé de mon côté…), je sors mes écouteurs et me mets un peu de musique. Tant qu’à faire de l’insomnie, aussi bien en profiter pour rassurer Corine sur le fait que mon hôte est loin d’être un dangereux prédateur sexuel. J’organise aussi mon horaire des prochains jours. Demain est déjà complètement rempli avec les visites d’appartements ainsi que les courses. Dimanche, c’est la journée des tests physiques. Mon admission officielle dans le programme l’an prochain est conditionnelle à la réussite de ces tests et au maintien d’une certaine moyenne dans tous mes cours. Même si je considère que je suis en bonne forme, j’appréhende la journée.

    Au matin, je prends l’initiative de préparer le café pour François et son invité. Dire que je suis mal à l’aise par rapport à cette nuit est un euphémisme. Si je m’écoutais, j’appellerais un chef à domicile pour nous cuisiner le meilleur déjeuner qui soit tellement j’ai honte. Heureusement, mon nouvel ami chasse le malaise dès sa sortie de la chambre.

    — Ouais, ben, je me demandais si je devais te dire que j’étais gai ; là, c’est plus un problème ! rigole-t-il. Laisse-moi te présenter officiellement ma date d’hier, Antoine.

    — Salut, dit l’autre gars en sortant de la chambre à son tour.

    — En tout cas, t’es la première Abitibienne que j’ai dans mon lit !

    — Arrête de la niaiser, tu vois bien qu’elle essaie de se cacher dans tes armoires, tente de me sauver Antoine.

    — Je me suis permis de fouiller un peu et de faire du café. En voulez-vous ? que je propose pour faire diversion.

    Les deux

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