Les entrailles du volcan. Voyage au fond de l ́âme de Sade
Par Vann Fjernthav
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À propos de ce livre électronique
Roman historique sur le marquis de Sade. Déjà mourant, le marquis de Sade raconte à Charles Quesnet, le fils de son aimée Constance (personnages réels) le pourquoi de sa conduite sexuelle et sa littérature d ́horreur, et les vrais motifs par lesquels Sade a été condamné et maudit. Le coeur du récit est un roman (réel) de Sade ("Histoire de Sainville et Léonore"), dont la continuation est confiée (à la fiction) par le marquis à Charles. "Les Entrailles du Volcan" montre comment les données historiques sur Sade et sa littérature peuvent être interpretées de façon contraire aux préjugés qui dominent l ́opinion aussi des détracteurs que des admirateurs de Sade, et même des studieux neutres u objectifs. De lecture plus aisée et proche au lecteur moyen, "Les entrailles du Volcan " met dans la bouche de Sade les émotions suscitées par les faits analysés aux thèses de l ́essai de Vann Fjernthav "Le Grand Secret de Sade", qui explorent profondement la vie, la psychologie, la littérature et la philosophie du marquis.
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Aperçu du livre
Les entrailles du volcan. Voyage au fond de l ́âme de Sade - Vann Fjernthav
Chapter 1. UN LEGS FORT ÉTRANGE
Arrivée d´un colis contenant un livre manuscrit et une lettre pour l´artiste peintre Mr. Charles Quesnet, 4 rue Faubourg Montmartre, Paris.
Charenton, 20 janvier 1815
Monsieur,
Je vous envoie, mises au net, les dernières dictées de votre beau-père depuis l´interdiction. Je n´en ai dit rien à personne. Monsieur le Comte a brûlé devant la Police tous les écrits qu´il y avait dans la cellule lorsqu´il arriva. Heureusement, votre mère et moi, nous avions pu en sortir quelques un peu avant.
***
À present, il semble que les autorités voient moins blâmable qu´une blanchisseuse se prostitue avec un reclus, que de permettre que ce reclus peuve écrire. C´est pourquoi nous avons feint la première de ces choses pour en donner l´apparence à la dernière. Ma réputation ne s´est pas souillée hors d´ici. Ma mère, la vôtre et vous-même, vous êtes les témoins de ma vraie conduite.
Je regrette la perte de votre beau-père, qui était aussi mon ami, et j´espère que mes efforts peuvent aider, un jour, à lui faire justice.
Votre humble et obéissante servante,
M. L.
***
POUR UNE NOUVELLE HISTOIRE DE TAMOË
Je suis âgé, je suis aveugle, et on m´a interdit d´écrire. Je n´aurai pas, donc, le temps pour une autre histoire de Tamoë. Comme la
première t´a plu autant, je te laisse quelques éléments pour l´écrire toi-même, car je ne pourrai plus. Tu devras tâcher d´éviter que personne ne voie des liens entre toi et moi, ou l´on t´accusera de tout le pire du monde sans être vrai. Change des noms, modifie l´apparence. Ce qui est important sera le même.
Étant donné que les principes moraux de Tamoë sont contraires à ceux qui gouvernent le monde entier, je suis sûr que, si par hasard quelque chose de semblable arrivait à exister, elle serait bientôt détruite. Imagine cela, et aussi que les habitants de Tamoë le voient et qu´ils se préparent pour se disperser par tout le monde afin de se sauver. Avec cela tu auras l´argument pour une nouvelle histoire, si tu veux, un jour, l´écrire.
Fuis la tentation de publier tout ce qu´il y a ici. Quelques choses peuvent te coûter la vie ou la liberté, et on pourrait même te soumettre aux plus affreuses tortures. Peut-être, c´est mieux de ne pas publier rien. Je laisse à ton avis le choix de léguer ces idées à tes descendants —pour si, dans l´avenir, l´humanité change—, ou de brûler cet écrit. Je
suis content s´il a eté vu par toi, et que tu connaisses ainsi ma pensée et mes sentiments.
***
ÉLÉMENTS POUR UNE NOUVELLE HISTOIRE
Tiens compte que, si par hasard un lieu comme Tamoë pouvait jamais exister, il serait condamné à une prompte destruction, y étant nécessairement voué à cause de la reste du monde, de tous ceux qui pussent en désirer les richesses et en haïr les moeurs. Pour conserver la race et l´esprit de Tamoë, ses habitants devront se disperser sur le globe et se mêler avec toutes les nations. S´y mêler c´est fort difficile, encore que possible. Le plus difficile, presque impossible, c´est de conserver en quelque manière l´esprit de Tamoë pour le transmettre aux autres nations, ce qui est plus difficile encore.
Le commencement du récit pourrait être qu´un jour le roi Zamé s´aperçoit, à cause d´un assaut de pirates, que Tamoë se trouve en grand péril, car toutes les autres nations n´en peuvent être qu´ennemies. Une île si pétite,
mais riche en or, et dont les habitants ont des principes moraux qui seraient abhorrés par la reste du monde —et plus encore par les européens, encore qu´ils disent les adorer—, cette île, je disais, ne peut pas attendre que la destruction aussitôt qu´elle soit découverte. Le minuscule pouvoir militaire de Tamoë resulte inutile contre n´importe quelle armée, n´étant pas même capable de combattre, sans souffrir un grand dommage, un seul navire de filibustiers.
Le roi dresse un plan de survivance par colonisation pacifique, introduisant le principes de la morale de Tamoë dans les autres nations. Ainsi, si le pays original est détruit, ceux qui en sont sortis en porteront l´âme là où ils arriveront. Il faudra émigrer à tous les points du globe, et s´y mêler avec les habitants sans distinction de race ni de civilisation. Mais il sera extrêmement difficile de vivre parmi les ennemis, d´en prendre l´apparence sans en adopter les principes.
Le plan consiste, en réalité, à laisser l´île et son or à la voracité des scélérats qui, inéxorablement, y viendront pour conquérir le territoire. Il faut abandonner un lieu qui, de
toutes façons, serait envahi et dévasté, et la population locale en souffrirait les conséquences. Couardise, en diront quelques´uns, mais je dis que la couardise, dans un tel cas, serait de se nier à voir la réalité.
La dispersion devra être préparée suivant un plan bien étudié. Il faudra apprendre, avant la fuite, des langues différentes, des manières de s´adapter à des climats différents, et beaucoup d´autres choses. Chaque groupe, en plus de la langue, devra apprendre les moeurs du pays d´arrivée, et, comme beaucoup d´elles seront contraires aux principes moraux de Tamoë, il faudra apprendre, dans chaque cas, à en adopter l´apparence sans tomber aussi dans l´essence. Il faudra, apprendre, donc, un art inconnu à Tamoë: l´hypocrisie, seulement afin de preserver la vie et la liberté.
Partout on trouvera, en plus, sous des milliers de formes, le même grand obstacle, le même vénin, la superstition. Le deuxième grand obstacle, c´est le faux amour pour la patrie, qui porte à haïr les autres nations, comme si quelqu´un, pour aimer sa famille, devait assassiner celle du voisin.
Pour éviter la convoitise de ceux qui l´entourent, le peuple de Tamoë doit chercher, pour s´y établir, des lieux où il n´y ait rien que les autres peuvent désirer. Il faudra s´accoutumer aux régions les plus desertes et pauvres, à moins qu´on veuille entrer dans les plus hostiles: les cités, où tout étranger est mal reçu s´il n´est pas riche et puissant, et où l´or sans monnayer de Tamoë ne ferait qu´attirer plus d´ennemis encore. Tamoë doit se répandre au monde extérieur, mais non pas comme une secte, parti, religion ou nation envahissante, mais comme des individus ou des petits groupes épars, porteurs des valeurs de Tamoë dérivées toutes de l´amour comme fin et de la raison comme moyen.
Maintenant, tu peux imaginer tous les préparatifs pour la migration, comme l´envoi d´explorateurs. Tu peux imaginer le journal écrit par un d´eux ou par plusieurs, et montrer ainsi l´opposition entre Tamoë et la reste du monde. Je laisse la fin à ton choix : si tu en veux une de conforme à la réalité et à lanature, écris que plusieurs explorateurs sont tués, quelques par les tourments les plus horrifiants, et que d´autres ont subi des accidents et des maladies, sauf quelques qui
retournent, mais seulement pour voir leur île envahie par les Anglais, ou les Français, ou n´importe quels autres, car tous savent également spolier, asservir, torturer et tuer.
Si au lieu de toutes ces horreurs, tu prefères une fin de pure fantaisie, plus proche de ce que je voudrais, écris que le peuple de Tamoë s´établit enfin dans des lieux isolés et pauvres qui n´attirent point la convoitise des autres, et qu´ils envoyent après quelques hommes aux diverses villes du monde; ceux-ci ont une chance inégale, mais tous survivent, et, pétit à pétit, dans le transcours de plusieurs générations, ils transmettent quelques traits de la morale de Tamoë aux autres nations. Une fin spectaculaire, mais artificieuse, serait que les envahisseurs trouvassent l´île vide, déserte, et, étant encore là, le volcan éclatasse, mais cela serait trop demander à la nature.
Tu dois savoir que Tamoë n´est qu´une nation illusoire. Les nations naturelles et réelles, à la différence de Tamoë, ont toujours, d´une manière ou d´une autre, leurs prisons, échafauds d´exécution, maisons de fous, églises, bordels et salles de torture, et aussi des superstitions, hypocrisies et cafarderie, religieuse
ou athée —la Raison, la Patrie, la Liberté, ou n´importe quelle excuse—, et jamais n´y manquent les violateurs d´enfants. Une nation sans ces choses, ni les ayant toutes moins une, ne peut pas appartenir à la réalité, ne pouvant être que de la fantaisie. Il faut être vraiement le marquis de Sade pour imaginer un lieu comme Tamoë, où il n´y a pas une seule de ces choses-là.
***
LES ENTRAILLES DU VOLCAN
***
Chapter 2. LE PARADIS EST NÉ DANS L´ENFER
On m´a interdit d´écrire. On a interdit que tout matériau d´écriture arrive à ma cellule, afin d´empêcher qu´un autre peuve m´aider. Et je suis aveugle. Et je vais mourir dans cette maison de fous. C´est déjà l´heure, donc, que tu saches qui est-ce l´homme que tu aimes comme à un père, pour juger toi-même si je mérite ou non ce qu´on me fait.
On a supposé que, étant produit de mon imagination, et non pas de celle d´un autre, ta chère île de Tamoë ne fut conçue que pour corrompre, pour apprendre à tuer, à torturer, ou, pire encore, pour attirer des imprudents vers l´athéisme et l´obscénité sans leur provoquer aucune répugnance. Tu as pu juger un de mes ouvrages pour lui-même, et, à présent, tu ne sais pas pourquoi est-ce qu´on en parle ainsi, pourquoi est-ce qu´on parle ainsi de moi. C´est, donc, pour toi, le moment de connaître ma vie, afin que tu saches quoi m´a porté à écrire cette histoire qui te remplit de joie —si ce motif n´est pas celui qui semble à ceux qui l´ont lue ignorant qu´elle est mienne—, et pourquoi est-ce qu´elle suscite les réactions que tu as pu observer.
Mon fils aîné est mort, assassiné, sans que jamais lui ni moi n´ayons tué personne. Mais le monde feint s´horrifier en entendant mon nom, et on me tient ici, dit-on, pour préserver la vertu de la société. Mon fils cadet a peur de se voir souillé par ma vie, comme si la sienne n´en était pas un produit, et il brûle mes pensées avant que de les connaître. C´est pourquoi, Charles, il ne me reste que toi; tu es le seul à qui je peux dire la vérité. Cela ne
me sert plus à rien, mais, peut-être, un jour, on pourra en faire quelque chose de bon. J´espère que la vérité t´aide à te défendre de tous ceux qui t´insultent pour m´avoir aimé.
***
Chapter 3. AU PAYS DES MASQUES
Tu connais mieux que personne, mon fils, mon amour pour le théâtre comme moyen d´expression de pensées et d´émotions, et aussi comme manière d´étudier les différents caractères des personnages, les situations auxquelles ils réagissent et les façons de représenter ces situations.
Tu as lu et mis au net mes oeuvres dramatiques, et tu m´as vu même jouer le rôle de Fabrice à la représentation de mon oeuvre Oxtiern au théâtre Molière, et aussi ici, à Charenton, pendant qu´il fut possible. Ta mère a été actrice, ce qui est une des choses qui m´ont attiré d´elle. Je t´ai dit aussi que, lorsque j´étais jeune, j´avais deux petits théâtres dans les châteaux de La Coste et Mazan, où je jouai parfois des rôles, et pour
lesquels j´engageai souvent des acteurs et des troupes de théâtre.
Mais il y a une autre sorte de théâtre, une autre espèce de jeu et de masques, qui ne cherche pas exprimer ni analyser rien, maisseulement tromper, mentir. Il ne s´agit pas d´offrir une illusion afin que les spectateurs peuvent imaginer une histoire, et ainsi comprendre des faits, idées et sentiments, mais il s´agit de convaincre qu´il montre la vérité, et cela seulement pour nuire.
Ce mauvais théâtre, c´est l´hypocrisie, et je ne veux pas dire feindre pour sauver la liberté ou la vie, mais pour commettre impunément toute sorte de méchancetés. Je veux dire aussi les rôles stupides et ridicules créés par la vie sociale en se combinant les jeux des différentes hypocrisies, rôles qui permettent à des simples acteurs d´écrire les rôles que d´autres sont obligés de jouer. Voilà l´espèce de théâtre que j´abhorre et qui gouverne la vie du monde entier.
J´ai toujours tâché de fuir ce théâtre pervers, encore que j´ai été obligé, parfois, de jouer le rôle qui m´avait été assigné dans la grande farce de la vie, ce qui est très dangéreux si
on ne comprend pas le jeu, et plus encore si on l´abhorre, comme moi, de tout son coeur, même y étant né au milieu et l´ayant vu présenté comme la vérité.
Je suis né, entouré de luxe et de splendeur, au palais d´un prince. Rien