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Les dessous d'une V.-P.
Les dessous d'une V.-P.
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Livre électronique208 pages3 heures

Les dessous d'une V.-P.

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À propos de ce livre électronique

Sonia Delisle a travaillé très fort pour arriver là où elle est, encore plus fort que quiconque peut imaginer. C'est une battante pour qui le travail passe avant tout. Il faut dire que le chemin pour arriver au niveau où elle se situe aujourd'hui a été parsemé de nombreuse embûches. V.-p. production dans sa vie professionnelle, elle est du genre tranchant. Sonia parle rarement de son passé. Trop douloureux, elle refuse de se livrer même à ses proches. Un jour pourtant, une page particulièrement noire refait surface bien malgré elle dans sa vie. Elle fait tout pour l'oublier, mais cette fois elle n'y arrive pas. Un autre jour, elle apprend une mauvaise nouvelle qui concerne son amie Charlotte. Alors qu'elle est déjà à fleur de peau, un autre événement vient la frapper de plein fouet. Sonia parviendra-t-elle à garder la tête hors de l'eau? Acceptera-t-elle enfin ce que la vie est prête à lui offrir?
LangueFrançais
ÉditeurClermont
Date de sortie27 mars 2014
ISBN9782923899343
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    Aperçu du livre

    Les dessous d'une V.-P. - Laberge Rosette

    peu.

    SONIA est debout près du comptoir. Elle lit La Presse du coin de l’œil, mord dans son croissant, avale son café à grandes gorgées entre deux bouchées et discute avec Robert, son conjoint.

    — C’est simple, je ne sais plus où donner de la tête. En fait, je suis vraiment découragée. C’est un vrai panier de crabes, cette entreprise. Je ne sais vraiment plus par quel bout la prendre. Si j’avais su tout ce que je sais aujourd’hui… j’aurais refusé leur offre.

    — Ne dis pas de bêtises ma chérie, dit Robert d’un ton doux. Tu es la reine des défis. Tu sais aussi bien que moi que peu importe ce que tu aurais su, tu l’aurais accepté.

    — Tu ne comprends pas, se plaint-elle. Cette fois, c’est différent. Si je ne me retenais pas, j’irais m’asseoir par terre au beau milieu de la rue, sur la ligne blanche, et je pleurerais toutes les larmes de mon corps tellement je suis à bout. Peux-tu seulement écouter ce que je te dis ?

    — Ne t’inquiète pas, la rassure-t-il, tu es forte. Tu vas passer à travers, comme d’habitude.

    — Pas cette fois, Robert, pas cette fois ! J’ai vraiment l’impression de perdre le contrôle sur tout. Pourquoi refuses-tu de comprendre ? J’ai l’impression de parler à un sourd.

    — Eh bien, je peux toujours te faire une proposition, histoire de te permettre de prendre un peu de recul, ajoute-t-il sur un ton enjoué.

    À ces mots, le visage de Sonia se rembrunit instantanément. Elle sait trop bien à quoi il pense.

    — Tu ne vas pas recommencer ! s’écrie-t-elle d’un ton exaspéré, je t’en prie ! Je ne suis pas d’humeur à discuter encore de cela. Je te l’ai dit cent fois déjà. Je ne peux pas ! Pas maintenant !

    — Attends, laisse-moi t’expliquer au moins ! Accorde-moi une seule minute !

    — Je sais très bien de quoi tu veux me parler et c’est non. Peu importe ce que tu vas me dire, je ne changerai pas d’idée. Tout a été dit sur la question et je n’ai pas du tout l’intention de revenir là-dessus.

    Ne se laissant pas décourager, Robert vient se placer devant elle et, sans crier gare, s’agenouille à ses pieds :

    — Une seule petite semaine ! Allez ! la supplie-t-il.

    Il pousse même la scène jusqu’à tirer sur la queue de son chemisier comme le ferait un petit enfant, mais Sonia est insensible à son jeu. Elle s’est barricadée derrière toutes les excuses possibles et impossibles qu’elle se répète dans sa tête depuis des semaines pour refuser son invitation à aller à Cuba. Alors qu’au fond, elle en meurt d’envie, elle reste sur ses positions au nom de sa foutue conscience professionnelle comme si la terre allait arrêter de tourner si elle se permettait une petite semaine de vacances. Cuba ? Ces quatre petites lettres à elles seules suffisent pour la faire rêver. Il y a si longtemps qu’elle ne s’est pas étendue au soleil sur le sable blanc. Elle n’a qu’à fermer les yeux pour entendre les vagues, sentir la mer, se laisser bercer par la musique latino. Il y a des mois qu’elle rêve de danser la salsa, elle a de la chance, Robert est un excellent danseur. Le corps en feu, ils fileraient ensuite à leur chambre et feraient l’amour jusqu’à ce que le sommeil les gagne. Et ce n’est que tard en soirée qu’ils se résoudraient enfin à aller manger. Depuis qu’elle est toute petite qu’elle se dit que si elle avait à choisir le pays de sa prochaine vie, elle choisirait Cuba, mais attention le Cuba cinq étoiles, on s’entend, parce que s’il en est une qui aime le luxe c’est bien elle.

    Perdue dans ses pensées, elle a presque oublié que Robert est à genoux à ses pieds.

    — SVP dis oui ! poursuit-il. Cela te fera le plus grand bien et moi je serai un homme comblé. Il y a si longtemps que nous n’avons pas voyagé ensemble. Toutes dépenses payées, ce n’est quand même pas rien… Allez, c’est mon cadeau et tu n’as pas le droit de le refuser !

    Chaque fois qu’ils abordent ce sujet, un ouragan se lève d’un seul coup dans la pièce où ils sont. « Il va pourtant falloir qu’il finisse par comprendre. » songe-t-elle, le regard meurtrier. Si elle avait des fusils à la place des yeux, Robert serait déjà mort depuis longtemps. Cela fait des semaines qu’elle repousse ses avances, sans être arrivée à lui faire comprendre qu’elle ne changera pas d’idée, pas cette fois.

    — Il n’en est pas question ! tranche-t-elle. Je ne peux pas, je te l’ai dit cent fois. Je ne veux plus en entendre parler !

    Robert adore Sonia. Il en prend le plus grand soin. Il a pour elle une franche admiration. Il reconnaît tout ce qu’elle a dû faire pour se tailler une place dans un monde où les hommes sont rois. Il est aussi très conscient qu’occuper le poste de vice-présidente à la production dans une entreprise familiale de six cents employés n’est pas une mince affaire, mais tout compréhensif qu’il soit, il y a une chose qui va à l’encontre de sa nature et c’est l’excès. Et là-dessus, Sonia est passée maître. Quand elle endosse une cause, elle la tient jusqu’au bout, négligeant trop souvent les gens qui sont près d’elle. Depuis qu’ils vivent ensemble, il a bien essayé de lui faire voir les choses autrement, mais sans grand succès. Leur relation au travail est opposée. Alors que Robert travaille pour vivre, Sonia vit pour travailler. Il y a bien eu quelques petits moments de répit, mais de façon générale elle fonce tête baissée et travaille sans relâche. Et cette fois, c’est encore pire. Même s’il est de nature très modérée, Robert se permet quelques écarts de caractère.

    — Dis plutôt que tu ne veux pas ! crie-t-il presque, ce serait plus juste ! Tu sais, la terre continuerait à tourner même si tu t’absentais une semaine, une toute petite semaine. Tu n’as pas remarqué que tout le monde autour de toi prend des vacances ? Tout le monde, sauf toi ! Si tu continues de cette façon, tu vas te taper un « burn out » ou mieux encore une crise cardiaque. Vraiment, ton entêtement à travailler tout le temps est pathétique.

    Sonia reste de glace. Elle ne doit absolument pas se laisser attendrir. Elle est payée pour faire son travail et elle le fera. D’ailleurs, comment Robert peut-il seulement penser qu’une simple petite semaine de vacances lui ferait du bien ? Elle devrait travailler encore plus fort pour pouvoir partir, il faut bien mériter ses vacances après tout. Au retour, elle devrait payer la pauvre petite semaine de plaisir qu’elle viendrait de s’offrir. Résultat : deux jours plus tard, le bronzage aura beaucoup pâli et les poches sous les yeux seront déjà de retour. « Comment peuvent-ils oser appeler cela des vacances ? » songe-t-elle. « Moi, j’appelle cela un piège à con. Ce n’est pas d’une semaine de vacances dont j’ai besoin, c’est d’une année, mais même dans mes rêves les plus fous cela tient de l’impossible. »

    Robert comprend qu’il vaudrait mieux qu’il change d’attitude. Quand Sonia agit de la sorte, il n’y a pas grand-chose à faire, mais c’est plus fort que lui. Contrairement à elle, il prend le temps de vivre. Pour lui, s’offrir des vacances est quelque chose de très normal et surtout de très sain. D’aussi loin qu’il se souvienne, jamais il n’a passé une année sans prendre au moins quelques semaines de vacances. Il préfère de loin gagner moins d’argent, mais avoir des vacances. Disons que sur ce plan, Sonia et lui sont totalement opposés. Au prix d’un grand effort, il poursuit sur un ton qu’il veut mielleux.

    — Allez, tu le sais bien, personne n’est irremplaçable ! L’entreprise va continuer à opérer, même sans toi, alors que moi je ne peux pas partir sans toi. Que dois-je faire pour que tu changes d’idée ?

    Elle sait que Robert a raison, mais elle serait incapable de prendre des vacances pour l’instant. Le moment est trop mal choisi. Il faut qu’elle stabilise tellement de choses, et ce à très court terme. Depuis son arrivée au Groupe Lemelin, il n’y a que le changement qui soit permanent. L’entreprise gronde tel un volcan à la veille d’exploser. Il y règne un climat d’insatisfaction doublé d’un sentiment d’insécurité démesuré. Elle doit développer de nouveaux produits, des produits à valeur hautement ajoutée comme le demandent les clients, afin de reprendre sa place parmi les meilleurs fabricants de tissus techniques en Amérique du Nord. Évidemment, elle doit aussi élargir ses marchés. Groupe Lemelin a de nombreux projets tous plus ambitieux les uns que les autres. Malheureusement, tout cela se vit dans un contexte où la communication est pratiquement inexistante, sans compter qu’on est bien loin de l’amour fou entre la direction et le syndicat. Depuis l’entrée de ce dernier en 1990, le virage ne s’est jamais réellement fait. La direction de l’époque, Pierre et ses deux frères, s’est sentie trahie. Les employés, de leur côté, ont eu l’impression d’être tassés à bien des égards. Résultat : les affronts se multiplient jour après jour. Voilà la réalité quotidienne de Sonia depuis son arrivée au Groupe il y a près d’un an et demi, d’où l’importance de poursuivre ses travaux pour enfin avoir un meilleur climat de travail !

    Dans un ultime effort, elle tente encore d’expliquer ses raisons à Robert, d’un ton qu’elle veut calme.

    — Je sais que j’ai besoin de vacances. Crois-moi ! Je suis bien au courant. Mais pas maintenant. Je ne peux pas m’absenter. Dans un mois… ou deux peut-être… ou alors pour les Fêtes de fin d’année. L’usine fermera cette année entre Noël et le Jour de l’An. Tu peux bien m’attendre jusque là ?

    Mais Robert n’entend plus à rire question vacances. Il n’aime pas la tournure que prennent les événements entre eux depuis quelques temps, il est de plus en plus inquiet.

    — L’usine fermera et toi, tu travailleras. N’essaie pas de m’endormir, c’est toujours la même histoire. Depuis que tu as accepté ce poste, tu n’as de temps que pour ton travail. On ne se voit plus. Je te rappelle que j’ai pris mes vacances seul cet été et l’été dernier aussi, que je passe la plupart de mes fins de semaine seul aussi, que je suis presque toujours endormi quand tu viens te coucher et que je dois me lever aux aurores pour déjeuner avec toi. Cela ne peut pas durer comme cela, il faut que les choses changent.

    Sonia s’approche de Robert et tente de l’amadouer à nouveau.

    — Tu le sais bien mon amour, je t’ai tout expliqué, on traverse une période difficile à l’entreprise. Mais ce n’est qu’une question de temps. Sois patient un peu !

    — Patient, patient… Depuis qu’on vit ensemble que tu me demandes d’être patient à cause de ton travail. Tu sais, ces derniers temps j’ai l’impression de simplement partager les dépenses de la maison avec toi. On se croise, c’est tout. Moi, je veux plus que cela, je veux une vie de couple normale. Est-ce trop te demander ? Je veux avoir du temps avec toi. Je te le demande encore. Est-ce trop te demander ? Je veux te gâter, te sortir. Je veux te faire l’amour, longuement comme…

    — Comme avant… Je sais. Moi aussi, ces moments de folie me manquent, bien plus que tu le penses. Laisse-moi un peu de temps, je t’en prie.

    — Si tu ne viens pas, alors je partirai seul.

    Sonia sent une vague d’impatience la gagner. Pourquoi faut-il qu’il y ait toujours quelqu’un pour compliquer ce qui l’est déjà pourtant assez ? Elle se dit qu’elle a bien d’autres chats à fouetter cette semaine.

    — Fais comme tu veux, Robert ! Fais comme tu veux !

    Puis, elle plonge le nez dans son journal. Robert est très déçu de la tournure des événements. Certes, il ira seul à Cuba, il a besoin de faire un arrêt, mais pour le moment cette semaine de vacances a déjà un arrière-goût. Il faudra qu’il parvienne à changer son état d’esprit avant de partir parce qu’il n’a nullement l’intention de se laisser pourrir la vie par toutes ces discussions avec Sonia. « Tant pis pour elle ! » songe-t-il.

    Au moment où elle va prendre sa dernière gorgée de café, la sonnerie de son téléphone cellulaire retentit. Robert lève les yeux au ciel et soupire. Une fois de plus, le travail de madame vient perturber son petit déjeuner. « Quel imbécile que celui qui a inventé ces appareils ! », pense-t-il. « Le jour où on vous offre un cellulaire, sauvez-vous en courant parce que c’est un piège. Si vous l’acceptez, vous n’aurez plus jamais de répit. Le travail vous rejoindra où que vous soyez. Certains diront qu’il suffit de le fermer, mais essayez d’expliquer cela à votre patron qui tente de vous joindre en plein samedi après-midi et vous m’en reparlerez. Sincèrement, si on vous offre un cellulaire, c’est pour qu’il soit ouvert jour et nuit et pour moi c’est inhumain. »

    — Sonia ! s’écrie Patrick. Il faut que tu viennes et vite. Nous avons un pépin.

    — Quel genre de pépin ? demande Sonia d’un ton rempli d’impatience.

    — Assez grave pour que je te dérange chez toi et que tu viennes de toute urgence.

    — Sois plus précis ! Des pépins, j’en ai à la tonne, et ce, tous les jours alors…

    À l’autre bout du fil, Patrick prend une grande respiration et dit :

    — J’aurais préféré te l’annoncer de vive voix, mais tu l’auras voulu… un de nos gars s’est suicidé.

    À l’écoute de ces quelques mots, Sonia sent ses jambes se dérober.

    — Tu te souviens de Marc Laprise, le grand blond qui travaillait à l’expédition, poursuit Patrick.

    Sonia n’en croit pas ses oreilles. Elle demeure muette au bout du fil. Elle a sûrement mal compris.

    — Sonia, tu es toujours là ?

    — Oui, je suis là. Je me disais que je devais sûrement avoir mal compris.

    — Tu as très bien compris.

    — Quand est-ce que c’est arrivé ? parvient-elle à demander. Je veux tout savoir.

    — Je t’expliquerai quand tu arriveras. Je t’attends à mon bureau. Dépêche-toi, je t’en prie, tu sais à quel point les mauvaises nouvelles vont vite…

    Sonia éteint son cellulaire et le range dans son sac à main. Elle met son veston, prend ses clés et se dirige vers la porte.

    — C’est grave ? demande Robert.

    — Dans le contexte actuel, c’est une catastrophe ! Un de nos gars s’est suicidé. Pour l’instant, c’est tout ce que je sais.

    — Si tu as besoin d’aide, appelle-moi !

    Sonia ne prend pas la peine de répondre. Elle attrape son porte-documents et sort sans se retourner… le temps presse.

    Robert, l’homme de sa vie. Elle en est tombée amoureuse dès l’instant où elle l’a aperçu. Elle s’en souvient comme si c’était hier et pourtant c’était il y a déjà 7 ans. Il était installé seul à une table au restaurant « Les plaisirs oubliés », un de ses restaurants préférés. En entrant, elle avait tout de suite remarqué le grand brun au regard ténébreux. Elle avait dit à Charlotte, sa grande amie et complice de toujours :

    — C’est un gars comme celui-là que je voudrais à mon bras.

    — Eh bien alors, qu’est-ce que tu attends ? Va lui parler !

    — Tu es malade ou quoi ? Je ne le connais pas !

    — C’est une façon comme une autre de le connaître. Allez, un peu de courage ! Invite-le à se joindre à nous si tu veux !

    Sans réfléchir plus longtemps, elle s’était levée, s’était dirigée à sa table et avait pris place en face de lui. De but en blanc, elle lui avait dit :

    — Bonsoir ! Je m’appelle Sonia Delisle. Êtes-vous seul pour manger ?

    — Pardon ? avait-t-il demandé, surpris par cette apparition soudaine.

    Elle avait alors répété mot pour mot lentement, en souriant.

    — Oui, je suis seul ! avait-il répondu en souriant. Et vous ?

    — Je suis avec mon amie Charlotte, mais vous pouvez vous joindre à nous si le cœur vous en dit.

    — Avec plaisir ! Je m’appelle Robert Brassard.

    Moins d’une semaine après avoir fait sa connaissance, Robert emménageait chez elle et c’était bien ainsi. Ils avaient l’impression de se connaître depuis toujours. Ils étaient bien ensemble. Les choses coulaient d’office, ils étaient heureux et profitaient de

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