D'une vie à l'autre
Par Cyntia Girault
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Aperçu du livre
D'une vie à l'autre - Cyntia Girault
Préface
Ce témoignage prenant retrace les étapes du chemin vers Dieu et vers l’âge adulte d’une jeune femme confrontée, comme chacun, aux joies, aux difficultés et aux obstacles de la vie humaine.
Cyntia Girault évoque avec beaucoup de sensibilité les questions de l’enfance, du déracinement, de la séparation, de l’adolescence, de la maladie et de la guérison. De sa découverte de la foi, surtout, et de la construction de sa relation avec Dieu. Autant de thèmes qui font de son parcours une expérience unique digne d’être partagée. Un témoignage offert aux personnes qui s’interrogent sur leur rapport à Dieu et au monde, ou tout simplement aux lecteurs curieux.
Anne Fournier
Avertissement
Les évènements relatés ici s’étendent sur une dizaine d’années. Ayant une mémoire sélective, marquée par les sens (la vue, l’audition, le toucher, etc.), j’ai sélectionné ces expériences en sachant que tout ne peut être dévoilé.
Néanmoins, je souhaite rendre le lecteur attentif au fait que si tous les chrétiens ne vivent pas des évènements similaires, cela ne fait pas d’eux de moins bons chrétiens. Chaque enfant de Dieu a reçu des dons de Lui de par Son Esprit, comme Paul l’a si bien commenté dans son Épître aux Corinthiens, chapitre 12, versets 1-31.
Je tiens à rappeler que seul Dieu peut juger les cœurs.
Je veux également souligner que la majorité des prénoms utilisés sont fictifs.
Préambule
Ces pages reflètent ma vision de la conversion et de la relation personnelle que l’on peut entretenir avec Dieu. La conversion est l’histoire de l’amour d’un Dieu passionné à la recherche de son enfant. Cet enfant peut présenter différents caractères et, selon le moment de sa vie, il réagira d’une manière ou d’une autre à l’appel de ce Dieu qui attend. Pour moi, la conversion n’est pas la façon dont un être humain en arrive à croire. C’est plutôt la manière dont un Dieu d’Amour procède pour se faire comprendre, en espérant être aimé par des êtres aussi méfiants et peu réceptifs que nous le sommes.
Prendre connaissance d’un témoignage, c’est écouter ou lire l’histoire de Dieu dans la vie de l’autre. Pouvons-nous juger un tel récit ou prendre position à son propos ? Nous prononcer sur sa véracité ? Affirmer qu’il vient de l’imagination ou non ? Si tel est le cas, la question de la foi pourrait se poser. Ou celle d’un Dieu qui existe, mais avec des limites. Dieu a-t-il donc des limites ? Limitons-nous Dieu ? À l’écoute ou à la lecture des récits de conversion, se pourrait-il que, parfois, les remettre en question arrange notre inconfortable entendement ?
Lorsque des amoureux racontent l’histoire de leur rencontre, pouvons-nous les juger, émettre un avis ou même prétendre que nous aurions procédé différemment ? Leur histoire leur appartient pleinement. Pouvons-nous même nous prononcer sur l’expression de la manifestation de l’amour qu’ils se témoignent mutuellement si tout fonctionne bien, si le résultat est positif ?
La Bible est un ensemble de récits qui racontent l’histoire de Dieu à travers la vie de différents personnages. Elle présente ce Dieu invisible en relatant les expériences que des êtres humains ont vécues avec Lui, afin qu’à la lecture de ces textes nous puissions Le découvrir et développer notre propre vision de Lui. Ensuite, il appartient au lecteur de faire le choix de vivre, lui aussi, une expérience avec Dieu. Il reste libre de L’aimer à sa façon, selon la disposition de son cœur à être inspiré par l’Esprit saint.
Dieu a opéré et s’est manifesté de toutes sortes de manières dans ma vie. Des prières ont été exaucées. D’autres, non. Je ne saurais expliquer pourquoi certaines prières prennent plus de temps que d’autres, ou demeurent suspendues quelque part entre ciel et terre. Mais ce qui est sûr, c’est que Dieu m’a assuré de Sa sainte existence et de Sa fidèle présence à travers Son histoire dans ma vie, comme personne ne pourra le faire.
C’est pour cette raison que j’ai le désir de témoigner de Son histoire dans ma vie. Je veux vous faire découvrir la manière dont Il s’y est pris pour conquérir mon cœur. Parce qu’Il est Celui qui promet et qui tient Ses promesses. Il est celui pour qui, dans votre vie, il ne sera jamais trop tard. Celui qui prendra le temps de vous attendre, qui avancera à votre rythme de compréhension et selon vos capacités du moment. Celui qui ne vous rejettera jamais, qui aura toujours les bras ouverts pour vous recueillir. Celui qui n’aura jamais honte de vous, qui prendra soin de vous. Celui qui, bien qu’invisible, n’est séparé de vous ni par l’espace ni par le temps. Celui qui n’attend qu’une chose : vous aimer.
Je veux vous livrer tout ce qu’Il a été pour moi pour qu’Il devienne vôtre.
Première partie
Enfance, ma première vie
En Haïti et aux États-Unis
Je ne me souviens de mon pays d’origine que de quelques paysages et des différents uniformes scolaires que j’ai dû y porter. Parmi les souvenirs les plus agréables, il y a l’odeur et les couleurs des fleurs. À Montagnes Noires, des fleurs rouge vif poussaient le long de la barrière de notre voisine. Un jour, après m’être faufilée chez elle pour examiner ces fleurs de plus près, j’ai décidé d’en cueillir une et de lui ôter tous ses pétales afin de comprendre de quoi elle était faite. J’ai découvert, au cœur de cette fleur, une substance qui ressemblait à du sucre. Je l’ai goûtée : c’était excellent ! Depuis ce jour, je piquais les fleurs de la voisine et me cachais pour les manger. Je finissais toujours avec des lèvres bien rouges. J’ignore le nom de cette fleur. À cette époque, j’avais six ans et demi et j’habitais depuis peu en Haïti, à Port-au-Prince, la ville qui m’a vu naître.
Ma mère était très jeune à ma naissance. D’autre part, la situation du côté de ma famille paternelle était compliquée. Lorsque j’ai eu 8 mois, il a été décidé que j’irai vivre avec ma grand-mère aux États-Unis. Ma tante Chantal, la deuxième sœur de ma mère, a fait le voyage de Port-au-Prince à New York avec moi. Là-bas, il arrivait que j’aille en crèche. Je considérais l’ami de ma grand-mère comme mon père et, en même temps, mon grand-père. C’était un homme de la même génération qu’elle, qui venait souvent à la maison. Mon grand-père, le mari de ma grand-mère, était décédé longtemps auparavant.
En revanche, j’étais loin d’imaginer que j’avais deux mères ! Un jour, alors que j’étais âgée de 3 ans, ma grand-mère m’a appris que ma vraie mère vivait à Haïti et que j’allais la retrouver quelques jours plus tard. Du haut de mes 3 ans, je n’ai pas réellement saisi l’ampleur de la situation. À mes yeux, ma grand-mère avait toujours été ma mère biologique.
Le jour où j’ai dû retourner en Haïti seule est arrivé. J’avais été confiée par ma grand-mère à une hôtesse de l’air qui me faisait de gentils sourires et m’a donné des crayons de couleur et un livre à colorier. Cette dame m’a installée dans mon siège passager, mais l’avion ne pouvait pas décoller tant je pleurais et criais. Le personnel de l’équipage n’avait jamais vu cela. Un membre de l’équipage m’a ramenée vers ma grand-mère et son ami. Ces derniers ont dû me raisonner afin que le vol puisse commencer. Pendant ce temps, l’avion attendait avec tous ses passagers. C’était mon premier voyage aller en Haïti. Par la suite, il est devenu habituel pour moi de prendre l’avion, seule ou avec ma tante, pour me rendre aux États-Unis et revenir en Haïti. Ma grand-mère et son ami me rendaient également visite.
Ma vraie mère était venue me récupérer à l’aéroport. Elle ne m’a pas tout de suite reconnue. Lorsque je l’ai vue, j’ai découvert une jeune femme âgée d’une vingtaine d’années. Elle vivait avec ma tante Maud, une de ses sœurs, qui était encore plus jeune qu’elle. Toutes deux étaient inséparables depuis leur enfance. À la maison, nous étions trois : ma mère, ma tante et moi.
Dans ma famille, plusieurs tendances chrétiennes étaient représentées. Cela s’est répercuté sur ma scolarité puisque des changements d’école ont eu lieu pour des motifs d’appartenance religieuse. J’ai fréquenté une école de Diquini. Je me souviens seulement de l’uniforme vert foncé – que je n’aimais pas – et, surtout, du parc situé près de l’école où il y avait un caïman. J’aimais beaucoup aller voir ce reptile. Je demandais toujours à la personne qui venait me chercher de passer par le parc pour que je puisse le voir. Je le trouvais vraiment impressionnant. Puis j’ai changé d’école. J’ai fréquenté l’école de Madame Durocher et, ensuite, le lycée français de Pétionville. Ma grand-mère, qui finançait ma scolarité et était une fervente chrétienne, veillait à ce que je fréquente les meilleures écoles de la capitale. À mon arrivée en Haïti, je comprenais le créole, mais ne parlais que l’anglais. J’ai appris à parler le créole et le français à l’école.
Nous avons d’abord vécu dans le même bâtiment que mon oncle, avant de déménager dans les environs. Nous avons ensuite habité Carrefour, puis Diquini et Delmas. Notre dernier domicile, en Haïti, était situé à Montagnes Noires.
Ma mère et moi étions très complices. Elle jouait beaucoup avec moi. Elle aimait fabriquer elle-même, avec les matériaux, dont elle disposait des jouets, comme des robes de poupées et de petits meubles : armoire, coiffeuse, meubles de chambre à coucher ou de salle à manger. Je me souviens qu’à Montagnes Noires je disposais d’une salle de jeu pour moi seule ; j’avais vraiment beaucoup de jouets. Ma préférence allait à ceux que ma mère fabriquait pour moi, en suivant son imagination. Dans ce domaine, j’étais vraiment gâtée. Mes grands-parents, les amis de ma mère et de ma tante et les autres membres de la famille m’offraient toujours des jouets, que je recevais dans des paquets s’ils vivaient loin de nous. Ma mère et moi jouions souvent à la dînette. Elle passait beaucoup de temps avec moi quand elle ne travaillait pas.
Un arbre – dont on appelle le fruit « kenèp » en Haïti – se dressait dans la cour. Il était vraiment haut et possédait un énorme tronc ; ses branches s’élevaient jusqu’à la terrasse située sur le toit de la maison. Je jouais souvent avec ses fruits, que je lançais et faisais tomber de l’arbre. Ils étaient vraiment bons, c’était un régal ! Parmi les autres occupations que j’affectionnais, je courais souvent après les poules.
Je me souviens des marchands qui, tôt le matin, montaient de Pétionville jusqu’à Montagnes Noires pour vendre leurs produits agricoles. J’observais toujours la scène depuis la terrasse. Je me disais qu’ils étaient très gentils de venir chez nous, car j’aimais les produits frais qu’ils nous amenaient.
Ma santé était fragile. Un jour, je suis tombée très gravement malade. Ni les médicaments ni les plantes prescrites par une guérisseuse ne parvenaient à me guérir. Ma mère avait essayé tous les traitements et tous les moyens disponibles pour me soigner, sans résultat. Mon état était si grave que j’étais proche de la mort. Je toussais terriblement. Ma mère, ne sachant plus quoi faire pour favoriser ma guérison, se mit à prier. Elle s’est adressée à Dieu en lui disant que s’Il me sauvait, ma vie Lui serait consacrée. Peu de temps après, j’ai guéri, sans soins médicaux.
Lorsque j’ai eu 4 ans, je suis retournée chez ma grand-mère aux États-Unis, où je suis restée jusqu’à mes 6 ans. Mon père biologique vivait également aux États-Unis, avec sa femme. Il me rendait visite de temps à autre. Je suis ensuite revenue en Haïti, où j’ai séjourné avec ma mère et ma tante pendant un an et demi.
*
La rencontre de ma mère avec un Suisse, Bernard, a provoqué un tournant dans l’histoire familiale. Ma mère était liée d’amitié avec le directeur d’un organisme pour lequel Bernard travaillait en tant que chef de projet. Ma mère a demandé à cet ami s’il était possible que ma tante trouve un emploi dans cet organisme. L’ami a accepté et ma tante a été engagée au titre de secrétaire de direction. Ma tante et Bernard se sont rencontrés sur leur lieu de travail et ont noué des liens. Bernard, ma mère, ma tante et moi faisions très souvent des sorties ensemble. Il semblait beaucoup apprécier les moments passés en notre compagnie. Cela a été le début d’une longue et grande amitié.
Bernard était une personne gentille et généreuse, qui avait le cœur sur la main. Il venait me chercher à l’école. Sur la banquette arrière de sa voiture, une plaque de bon chocolat suisse m’attendait presque à chaque sortie d’école. Parfois, c’était un cadeau, souvent en rapport avec la Suisse. Il se montrait patient et prenait le temps de répondre à mes nombreuses questions. Dans mes raisonnements d’enfant de 6 ans, je pensais que New York et Haïti étaient les seuls pays au monde. Je n’avais pas compris que la terre était ronde et qu’elle était composée de nombreux pays. C’est Bernard qui a commencé à me faire prendre conscience de cela. Il me racontait quelques-unes des expériences qu’il avait faites lors de ses voyages. J’aimais beaucoup entendre ses histoires.
La mission de Bernard touchait à sa fin. Durant sa dernière semaine en Haïti, ma mère l’a questionné sur son pays. Cela a éveillé son intérêt pour la culture suisse. Elle a demandé à Bernard si, un jour, elle pourrait visiter Genève. Elle ignorait que cette simple question, motivée par une curiosité désintéressée, aurait une importante répercussion sur l’avenir d’une grande partie des membres de la famille. Bernard lui a envoyé un billet d’avion depuis New York, où il faisait escale avant de rejoindre la Suisse. Le billet reçu, ma grand-mère – depuis les États-Unis –, ma tante et ma mère ont entrepris les démarches administratives liées au départ de ma mère pour la Suisse. Ma mère m’a annoncé qu’elle se rendrait en Suisse et que ma tante s’occuperait de moi durant son absence. Cela a été une terrible nouvelle pour moi. Nous étions ensemble depuis peu de temps, et elle allait déjà me quitter ! Peu de temps après, elle est