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Convaincre: Protéger, #2
Convaincre: Protéger, #2
Convaincre: Protéger, #2
Livre électronique468 pages5 heuresProtéger

Convaincre: Protéger, #2

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À propos de ce livre électronique

Une scène de crime où plusieurs meurtres ont été commis se révèle particulièrement macabre, même aux yeux d'un vétéran tel que l'inspecteur Brian Clifton, qui est stupéfait de constater la ressemblance troublante entre l'une des victimes et son petit ami, James. Le nombre de corps s'amoncelle en même temps que les similitudes... et les preuves désignant James comme le meurtrier.

 

James n'est plus honnête avec lui depuis longtemps, bien avant la fusillade. Il se montre évasif, sans parler de ce tout petit détail qu'il a omis d'avouer à Brian concernant son occupation de dealer de drogue accro au jeu.

 

Il n'est certes pas le meilleur petit ami au monde, mais il supplie Brian de le croire quand il lui dit ne pas être le tueur. D'ailleurs, qui que soit le coupable, il est évident qu'il souhaite finir ce qu'il a commencé, et Brian est le seul en qui James ait confiance.

 

Mais jusqu'où Brian est-il prêt à aller pour protéger un homme qu'il ne connaît sans doute même pas ?

 

Deuxième édition.

LangueFrançais
ÉditeurGallagherWitt
Date de sortie8 mai 2023
ISBN9781642300017
Convaincre: Protéger, #2
Auteur

L. A. Witt

L.A. Witt is the author of Back Piece. She is a M/M romance writer who has finally been released from the purgatorial corn maze of Omaha, Nebraska, and now spends her time on the southwestern coast of Spain. In between wondering how she didn’t lose her mind in Omaha, she explores the country with her husband, several clairvoyant hamsters, and an ever-growing herd of rabid plot bunnies.

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    Aperçu du livre

    Convaincre - L. A. Witt

    Chapitre 1

    « Ici James, je ne peux pas vous répondre pour le moment, veuillez laisser un message et je vous rappellerai. » Bip.

    Je jurai tout bas et laissai tomber mon téléphone sans cérémonie dans le porte-gobelet. Il m’avait laissé un message ce matin en me proposant de sortir ce soir et m’avait demandé de le rappeler, mais il n’avait pas décroché son téléphone de la journée.

    Laissant ma tête retomber contre l’appui-tête, je soupirai. J’aurais voulu dire que cela ne lui ressemblait pas, mais dernièrement, si. Pendant les premiers mois où nous nous étions fréquentés, tout s’était bien passé. Au cours des trois derniers, toutefois, les choses avaient changé. Son téléphone restait éteint durant de longues périodes, à des heures bizarres du jour comme de la nuit. Des appels et des textos auxquels il répondait des heures après, s’il répondait tout court. Des propositions de sortie, invariablement annulées par autre chose. Des messages vocaux auxquels il n’avait évidemment jamais l’occasion de répondre, jusqu’à ce que je le recontacte, et alors, il soutenait toujours qu’il était sur le point de m’appeler.

    Je frottai mes yeux de mon pouce et de mon index. Ce n’était pas comme si je demandais beaucoup d’attention. Je ne m’attendais pas à ce qu’il m’obéisse au doigt et à l’œil. Mais quelque chose dans ses silences et ses explications cryptiques ne collait pas. La question était, est-ce que mes soupçons étaient dus au fait de m’être déjà fait avoir une fois, ou était-ce simplement l’habitude d’un inspecteur de la brigade criminelle, dont tout le travail dépendait des déductions tirées de menus détails afin de savoir si quelqu’un mentait ?

    Quoi qu’il en soit, rester assis dans ma voiture, sur le parking d’un diner avec l’estomac vide, n’allait pas m’aider à comprendre les transgressions de ma moitié. Je sortis de la voiture en marmonnant une série de jurons, puis entrai dans le restaurant.

    Mon partenaire, Max Kessler, avait déjà réquisitionné une table et commandé du café. Il poussa l’une des trois tasses vers moi.

    — Encore des problèmes avec ton petit ami ?

    — Ouais.

    Je m’installai et récupérai quelques sachets de sucre du bol en céramique près du distributeur de serviettes.

    — Comment est-ce que tu as deviné ?

    Il rit.

    — Y a-t-il autre chose qui t’énerve et qui te donne envie de jeter ton téléphone par la fenêtre alors qu’on est censés profiter d’un bon dîner ?

    — Bien vu.

    Je serrai la mâchoire.

    — Ouais, toujours des problèmes avec lui.

    Max était l’un des rares hommes dans les forces de l’ordre à savoir que j’étais gay et cela ne le dérangeait pas le moins du monde. Il m’avait invité d’innombrables fois à des barbecues avec sa famille et la personne que je fréquentais alors avait toujours été la bienvenue. C’était pour ce genre de raison que nous travaillions si bien ensemble, depuis aussi longtemps.

    — Quand est-ce que tu vas le larguer ?

    Max m’observa par-dessus le rebord de sa tasse.

    — S’il te rend aussi malheureux…

    — À moins d’avoir une sacrée bonne excuse, dis-je en mélangeant de la crème dans mon café, il dégage ce soir. J’en ai assez.

    Max releva un sourcil mais ne dit rien. Je ne pouvais pas le blâmer pour son scepticisme. Combien de fois avais-je dit ça au cours des dernières semaines ? Même moi je n’y croyais plus.

    La porte du diner s’ouvrit et Max releva les yeux.

    — Ah, le voilà.

    Il agita la main et je n’eus pas besoin de regarder pour savoir qui nous rejoignait.

    Une seconde plus tard, Andrew Carmichael se glissa à table avec nous.

    — Désolé, je suis en retard. La physiothérapie a duré plus longtemps que prévu. Encore une fois.

    — Ne t’inquiète pas pour ça, répondis-je. Nous venons juste d’arriver aussi. Comment va ton bras ?

    Il fronça les sourcils en regardant son bras droit, qui était en écharpe.

    — Ça s’améliore lentement. Le mot-clé c’est « lentement », pas « améliore ».

    — Ça pourrait être pire.

    Max fit glisser la troisième tasse de café vers Andrew.

    — Ça pourrait, répondit celui-ci.

    — Je n’arrive pas à croire qu’on te force toujours à porter une écharpe après tout ce temps, par contre, dit Max.

    — Oh, c’est juste à cause de la chirurgie la semaine dernière. Ils ont dû ouvrir et…

    — Je ne veux pas en savoir plus avant de manger, répondit Max en relevant la main.

    Andrew se mit à rire.

    — Tu ne veux pas les détails sanglants ?

    — Non, merci.

    — Tu ne devrais pas avoir l’estomac vraiment bien accroché pour ton travail ?

    — Je peux le supporter, ce n’est juste pas un sujet de conversation appétissant avant un repas, merci beaucoup.

    Max indiqua le bras blessé d’Andrew.

    — Tu sais quand tu pourras t’en servir à nouveau ?

    Andrew haussa l’autre épaule.

    — Dans six mois ? Un an ? Qui sait ? Ça va mieux maintenant qu’ils ont retiré un peu de tissu cicatriciel, mais…

    Max frémit.

    — Beurk, mec, je ne t’envie pas.

    — Ah bon ? répondit Andrew en souriant. Allons, tout le monde veut une belle cicatrice à cause d’une blessure de guerre.

    — Les cicatrices de guerre, c’est bien, dit Max. Mais perdre l’usage de mon bras ? Non merci.

    — Tu n’imagines même pas, marmonna Andrew avant de se concentrer sur le sucre qu’il mélangeait dans son café.

    Il devenait de plus en plus habile de sa main gauche pour des tâches comme celle-ci, mais ce n’était pas encore une seconde nature. Déposant sa cuillère près de sa tasse, il reprit la parole.

    — Alors, quoi de neuf dans les rues, ces jours-ci ?

    — Les jours se suivent et c’est toujours la même merde, répondis-je.

    — Il a dit « dans les rues », pas dans ta vie amoureuse, dit Max.

    Andrew pencha la tête.

    — Bon sang, Brian, ne me dis pas que tu as encore des problèmes avec James.

    — J’ai encore des problèmes avec James.

    Les sourcils d’Andrew se froncèrent d’un air compatissant.

    — Tu sais, je pense que tu as flairé quelque chose avec lui. Je veux dire, après tout ce que tu m’as dit, je serais surpris qu’il n’ait pas quelqu’un d’autre.

    — Ouais, je sais, répondis-je doucement.

    — Tu crois vraiment qu’il a un autre homme dans sa vie ? demanda Max.

    Je grimaçai.

    — Peut-être. Ou alors une femme.

    — Je ne savais pas qu’il aimait les deux, dit Max.

    — Je suis quasiment sûr que ce n’est pas le cas, mais honnêtement, je n’en suis plus certain.

    Je soupirai.

    — Mais si c’est le cas et qu’il s’en sert comme excuse pour me tromper…

    Andrew renifla.

    — S’il joue cette carte-là, je lancerai Nick à ses trousses. Rien ne l’énerve plus que les gens infidèles qui se servent de leur bisexualité comme excuse.

    — Sans blague.

    Le petit ami d’Andrew était bisexuel, mais aucun homme, ni aucune femme, n’aurait pu détourner l’attention de Nick d’Andrew. Malgré les tensions entre eux depuis leurs blessures respectives, je les enviais tous les deux. Je n’arrivais pas à savoir s’ils étaient simplement amoureux, ou s’ils refusaient de prendre quoi que ce soit pour acquis après avoir quasiment perdu l’autre, mais même s’ils se disputaient constamment, leur relation était une chose qui me faisait douloureusement envie, que ce soit avec James ou avec quelqu’un d’autre. Ils avaient mis leur vie en jeu pour l’autre, auparavant, et ils le referaient sans la moindre hésitation.

    — Bon, je ne sais même pas s’il me trompe ou pas. Peut-être que non. Mais je n’ai pas la moindre idée de ce qu’il fait, putain.

    Andrew secoua la tête.

    — Je ne plaisante pas, mec, s’il te prend autant la tête, laisse tomber.

    — Il a raison, Brian, dit Max. Tu as déjà assez de stress dans la vie. Tu es la dernière personne au monde à avoir besoin de ces conneries, surtout ces jours-ci.

    Je mélangeai distraitement mon café, mais je ne répondis rien. Ils avaient raison. Je savais qu’ils avaient raison. Dieu savait que j’avais discuté de cela avec eux des douzaines de fois le mois passé, et je commençais à être à court d’excuses pour garder James. Le fait qu’il n’ait même pas encore rencontré mes deux amis les plus proches après tout ce temps – aucun de nous deux n’avait rencontré la famille ou les amis de l’autre – était l’une des nombreuses failles dans notre relation. Je l’avais suggéré, il avait refusé, et chaque fois qu’il avait cédé assez pour que nous prévoyions quelque chose avec quelqu’un, il avait trouvé une raison de nous faire faux bond à la dernière minute.

    Oh, non, il ne me menait pas à la baguette.

    La seule raison pour laquelle je restais, dernièrement, c’était le sexe époustouflant, mais même cela se produisait de moins en moins. Pour moi, en tout cas. Si ça se trouve, il couchait toujours autant.

    — Eh bien, ce qui aiderait, ce serait d’arriver à le joindre.

    Je posai la cuillère près de ma tasse de café.

    — C’est difficile de larguer un mec si je n’arrive même pas à lui parler.

    Andrew haussa les épaules.

    — Arrête de l’appeler, alors. Arrête de retourner ses appels, bloque son numéro, fais ce qu’il faut.

    — Exactement, ajouta Max en penchant la tête. Je sais que je ne suis pas vraiment Dr. Phil ¹, et tu sais qu’en général je n’empiéterais pas sur ta vie privée, mais les petits jeux de ce type commencent vraiment à affecter ton travail. Il doit dégager.

    Je me frottai le front en plissant les lèvres.

    — Bon Dieu, je n’ai pas besoin de toute cette merde.

    — Non, effectivement, dit Andrew.

    C’était un euphémisme. La ville subissait une vague de crimes macabres, de plus en plus rapprochés, et la dernière chose dont un inspecteur de la brigade criminelle avait besoin, c’était d’être distrait par un petit ami coureur de jupons alors qu’il essayait de résoudre ces satanées affaires.

    Je soupirai et secouai la tête.

    — Bon, je m’occuperai de lui après le travail. Pour l’instant, il faut que je mange avant de frapper quelque chose.

    Il était presque dix-huit heures et pour la première fois de la journée, nous avions quelques minutes pour manger un morceau.

    Max rit.

    — Tu as encore sauté le petit déjeuner ?

    — J’étais pressé.

    — Hm-hm.

    Il me regarda de haut en bas et rit de nouveau.

    — Est-ce que je dois envoyer Anna pour te surveiller comme elle le fait avec moi ?

    — Oh non, c’est toi qui as signé pour ça, pas moi, répondis-je en ricanant. C’est toi qui as épousé une femme avec une poigne de fer.

    — Allons, elle n’est pas si horrible.

    — Bien sûr que non.

    Je regardai Andrew.

    — Au fait, comment vont les choses avec ta moitié ?

    Il rit, sans enthousiasme.

    — Les jours se suivent et c’est toujours la même merde.

    Je fronçai les sourcils.

    — Tout va bien ?

    Il esquissa un geste de la main.

    — On essaye juste d’aplanir les choses. Ça fait déjà un moment.

    — Bon Dieu, dit Max avec un sourire désabusé. Chaque fois que je me dis que c’est plus facile pour les homosexuels, parce qu’ils n’ont pas à supporter les femmes, il me suffit de vous écouter tous les deux.

    Andrew se mit à rire.

    — Dit l’homme marié à un pit-bull.

    — Un toy pit-bull, ajoutai-je.

    Max ricana. Il allait ajouter autre chose, mais son téléphone se mit à sonner, l’interrompant, et il le récupéra.

    — Kessler.

    Une pause. Il se raidit et je connaissais bien ce changement de posture. Il me regarda et esquissa un léger signe de tête.

    Je grognai. Bon sang, je n’allais jamais manger aujourd’hui. Je m’adressai à Andrew :

    — On dirait qu’on va devoir y aller.

    — Ne t’inquiète pas. Je paierai le café.

    — Super. Je te rembourserai la prochaine fois qu’on se verra.

    — Laisse tomber. À plus tard, au poste.

    En chemin vers ma voiture, mon cœur se mit à battre plus fort. L’adrénaline inondait mes veines, comme toujours avant que nous arrivions sur une scène de crime. J’avais vu d’innombrables meurtres dans ma carrière, mais je ne savais jamais à quoi m’attendre. Ça pouvait être n’importe quoi, d’une maison avec un corps poignardé à une chambre froide remplie de corps mutilés. Je ne pouvais pas dire qu’il n’y avait pas de moments barbants dans ce travail – la quantité interminable de paperasse nous assurait d’en avoir tout un tas – mais nous n’étions jamais à court de chaos.

    — Nous sommes à dix minutes environ de la scène, dit Max à la personne à l’autre bout du fil. Nous sommes en chemin.

    Il fourra son téléphone dans sa poche.

    — Multiple homicide à Masontown. Un club sur Jackson et la Sixième.

    — Masontown, évidemment.

    Je sortis du parking et tournai. Ce quartier, de loin le coin le plus malfamé de la ville, était le théâtre d’un problème de drogue majeur. Au cours des trois derniers mois, il y avait eu plus de sang versé là-bas que dans toute la ville au cours de l’année passée. Un important cartel de la drogue avait été démantelé un an plus tôt, et une guerre de territoire faisait rage entre les trois cartels restants. Même si je n’étais pas impliqué dans les affaires liées aux stupéfiants, la brigade criminelle avait passé de plus en plus de temps dans le quartier récemment.

    Si j’avais dû classer toutes les scènes de crime que j’avais vues pendant ma carrière, la plupart de celles de mon « Top Dix » des plus macabres avaient eu lieu dans ce quartier. Trois d’entre elles avaient eu lieu au cours des derniers mois, et les équipes de nettoyage de scènes de crime devaient sans doute être encore en train de frotter les murs et le sol de l’une d’entre elles. Deux inspecteurs de la brigade criminelle et trois agents de police avaient démissionné ou demandé à être transféré. Un agent infiltré avait été assassiné. Un autre était toujours en arrêt après avoir reçu une blessure presque mortelle. Le chef avait presque mis fin à toutes les opérations d’infiltration pour préserver la sécurité de ses officiers, et ceux qui travaillaient toujours sous couverture avaient insisté pour rester. En dépit du risque, ils étaient à deux doigts de mettre fin à tout trafic de drogue et démanteler le réseau de haut en bas.

    J’espérais qu’ils avaient raison, pour leur propre bien.

    À quelques pâtés de maisons de la scène de crime, venant de la direction opposée, une ambulance passa en hurlant près de nous. Quelques instants plus tard, une autre passa, ses gyrophares se reflétant sur les innombrables panneaux « à vendre » ou « à louer » dans les devantures des magasins ou aux fenêtres des appartements. Je ne pouvais pas en vouloir aux résidents et aux propriétaires de ces magasins de vouloir déguerpir d’ici dans un camion de déménagement, plutôt que dans une ambulance comme celle qui disparaissait dans mon rétroviseur.

    — J’ai l’impression que ça ne va pas être beau à voir, dit Max.

    — C’est un multiple à Masontown et ils nous ont appelé, dis-je en jetant un nouveau coup d’œil à mon rétroviseur. Je serais prêt à parier la même chose.

    Il ne fut pas difficile de savoir que nous avions trouvé le bon club. Si la nuit était tombée, cela aurait fait un superbe spectacle de son et lumière. Il devait y avoir une douzaine de gyrophares devant le club, quelques bleus, et surtout des rouges.

    Les rares coins de la rue qui n’étaient pas occupés par les véhicules d’urgence étaient bondés de camionnettes de journalistes. Satanés vautours. Je ne les avais jamais aimés, mais j’étais devenu allergique aux médias depuis que leur insatiable besoin de gros titres sensationnels avait braqué les projecteurs sur le petit ami d’Andrew assez longtemps pour permettre à un harceleur de les trouver et de quasiment les tuer tous les deux.

    Je me garai à côté de l’une des camionnettes des informations, puis nous sortîmes et traversâmes la foule rassemblée à coups d’épaule. Nous étions des inspecteurs en civil, donc quelques badauds essayèrent de nous empêcher d’avancer et de leur bloquer les premiers rangs du carnage, mais un coup d’œil à nos insignes suffit à les écarter.

    Un périmètre de barricades et de rubans jaunes de la police divisait le trottoir à l’air étrangement banal et empêchait la foule de spectateurs de s’approcher. Plusieurs agents de patrouille rôdaient dehors pour empêcher les gens d’entrer et s’assurer que personne ne passait la ligne s’ils n’avaient pas une bonne raison de se trouver dans ce club.

    Après avoir vu nos insignes, un officier en uniforme souleva le ruban jaune pour nous laisser passer dessous. Une fois de l’autre côté et à l’abri des oreilles indiscrètes, il tendit la main.

    — Officier Rowland.

    — Inspecteurs Kessler et Clifton, dit Max. Que savons-nous jusqu’à présent ?

    — On dirait un coup monté qui a mal tourné, dit Rowland. Il y a des dealers et des agents infiltrés. Ce n’est pas beau à voir.

    Max et moi échangeâmes un regard.

    — Des pertes ? demandai-je.

    L’officier soupira.

    — Deux flics blessés, un mort. Quatre civils morts et des blessés divers.

    Mon estomac se souleva.

    — Bon Dieu.

    Nous avions vu des scènes de crime sanglantes récemment, mais celle-ci sentait mauvais.

    — Les flics, demanda Max en baissant la voix, vous avez leur nom ?

    L’officier plissa les lèvres et soupira longuement par le nez.

    — Ce sont tous des inspecteurs infiltrés.

    Il parcourut les pages d’un calepin qu’il tenait à la main.

    — Rick Paulson a quelques blessures mineures et John Kelly est dans un état grave. Vince Gray était mort quand nous sommes arrivés.

    Max tressaillit. Je serrai doucement son épaule, lui offrant une grimace compatissante. Gray et lui étaient amis depuis plus longtemps que Max et moi.

    Après un moment, il prit une profonde inspiration et croisa mon regard. Il acquiesça légèrement, le geste classique de Max Kessler pour dire qu’il allait bien, et je relâchai son épaule.

    — Des témoins ? demanda-t-il à Rowland.

    — Aucun témoin oculaire vivant, dit-il. La fusillade s’est déroulée dans le salon VIP. Apparemment, il y avait une sorte de réunion en cours et quelque chose a mal tourné. Des tierces personnes ont été touchées lorsqu’un tireur a traversé la cuisine pour poursuivre quelqu’un. À part ça, tous ceux qui ont vu quoi que ce soit sont partis, blessés ou morts. Plusieurs inspecteurs étaient à l’extérieur de la salle quand ça a commencé, mais n’ont pas vu grand-chose. Ils sont entrés juste à temps pour tirer des coups de feu et voir le tireur et un témoin s’enfuir par la porte arrière.

    — Allons voir, dit Max.

    Sans un mot, je le suivis à l’intérieur.

    Chapitre 2

    Le club était plus luxueux que la plupart des endroits du quartier et c’était un repère connu pour les dealers, les proxénètes et toute personne pouvant se permettre de passer la barrière en velours, dans ce quartier où les chaînes et les barbelés prédominaient. L’alcool d’excellente qualité coulait à flots parmi les tables. Sous celles-ci, des liasses de billets et des sacs de poudre blanche changeaient de main. Avec le bon montant en espèces et un clin d’œil, une serveuse pouvait être persuadée de retrouver un client aux toilettes ou dans l’allée derrière le club. Cet endroit avait beau être fastueux et élégant, l’illusion n’était qu’un vernis sur la surface.

    Le salon VIP était une pièce à part, séparée du club par un couloir étroit, et le mur perpendiculaire à ce couloir était longé par un autre, séparant le salon de la cuisine. La pièce était faiblement éclairée pour donner une atmosphère intime et les quelques chaises et les banquettes étaient recouvertes de cuir rouge. J’avais entendu les agents infiltrés raconter toutes sortes de choses sur ce qui se passait ici. En partageant quelques bières, un soir, un ancien infiltré m’avait raconté qu’en moins d’une heure, il avait assisté à une demande en mariage et à une négociation pour un braquage.

    Et maintenant ? L’endroit ressemblait à un putain de champ de bataille. Il devait s’agir d’une fusillade, ou d’un satané massacre. Mais puisqu’il y avait des impacts de balles et des traces de sang sur tous les murs, ainsi que du verre brisé dans toute la pièce, c’était sans doute la première option.

    L’air était chargé de l’odeur cuivreuse et trop familière du sang. Beaucoup de sang. L’odeur dominait celle de la graisse, du pain et des épices provenant de la porte ouverte entre le salon et la cuisine, ainsi que les traces persistantes de poudre à canon et de métal chaud.

    Trois photographes de la police scientifique faisaient le tour de la pièce, documentant chaque détail qui pourrait s’avérer important. De affichettes en plastique numérotées avaient été placées près des douilles, des éclaboussures de sang, du verre brisé et des meubles renversés. Les morts restaient là où ils étaient tombés, créant des formes macabres sous des draps ensanglantés en attendant le médecin légiste. Un pistolet était posé près d’une main inerte dépassant de sous un drap. Près d’une autre banquette, à quelques centimètres de la jambe d’un cadavre, un chargeur vide me hérissa les poils de la nuque. Quoi qu’il se soit passé ici, quelqu’un était tombé à court de munitions et avait pris le temps – avait eu le temps – de recharger.

    Le sang recouvrait un sandwich à moitié entamé et une bière abandonnée près d’un corps affaissé recouvert d’un autre drap. C’était une chose qui me dégoûtait toujours – la nourriture sur les scènes de crime. C’était l’un de ces rappels étranges que la vie avait été presque normale avant que l’enfer se déchaîne. Pour la personne affalée sous ce drap taché de sang, la journée avait probablement commencé comme toutes les autres. La plupart des gens ne commandaient pas un sandwich quand ils savaient qu’ils étaient sur le point d’être assassinés.

    Max s’agenouilla près de l’un des corps pour le regarder de plus près. Je suivis l’écho d’une conversation à l’extérieur de la salle, espérant trouver un témoin qui pourrait me raconter les événements de la soirée qui avaient transformé le salon en bain de sang.

    Mon partenaire et moi nous séparions souvent sur les scènes de meurtre. L’un de nous inspectait la scène de crime immédiate, tandis que l’autre vérifiait les endroits moins évidents, pour y trouver des signes de ce qui avait pu se passer avant et après – des armes abandonnées, des vêtements ensanglantés cachés dans les placards, des taches de sang dans la baignoire et dans la bonde du lavabo.

    Dans la cuisine, je croisai le petit ami d’Andrew, Nick Swain. Il travaillait comme ambulancier et la caserne de pompiers dont il dépendait était malheureusement en sous-effectif, ce n’était donc jamais une surprise de le croiser quand il y avait des survivants sur une scène de crime. Il était appuyé contre une porte, un calepin à la main. Les sourcils froncés, il écrivait de temps à autre sur son bloc-notes tout en gardant un œil sur son collègue, qui aidait quelqu’un avec des blessures mineures.

    — Hey.

    Il leva les yeux.

    — Oh salut, Brian.

    — J’aurais peut-être besoin de lui quand vous aurez terminé.

    Je hochai la tête vers le patient.

    — Nous n’avons pas l’air d’avoir beaucoup de témoins.

    — Il ne te sera pas d’une grande aide. Ce n’était qu’un passant. Il s’est blessé avec du verre brisé en se cachant quand un flic a poursuivi le tireur par la cuisine. Il n’a pas vu ou entendu grand-chose.

    — J’ai quand même besoin de tout ce que je peux trouver, répondis-je. Même si c’est juste le nombre de coups de feu qu’il a entendus.

    Nick acquiesça.

    — Leon en a presque fini avec lui. Les blessures sont mineures, donc nous ne l’emmènerons pas.

    — Quelle est la gravité des autres blessés ? Est-ce que tu as pu les examiner ?

    — Paulson était conscient et cohérent. Les saignements étaient légers et sous contrôle, mais il montrait quelques signes de choc. Je pense qu’il ira bien, cependant.

    — Donc j’ai peut-être au moins un témoin fiable toujours vivant.

    — Deux, si Kelly s’en sort, dit Nick tranquillement. Et je dis bien « si ».

    Il grimaça.

    — Il est vraiment en mauvais état.

    Je lui indiquai de s’éloigner de Leon et de son patient, afin d’être hors de portée de voix.

    — À quel point ?

    — Importants traumatismes thoraciques. Je n’ai pu jeter qu’un coup d’œil en triant la scène, donc je ne connais pas l’ampleur réelle de ses blessures, mais…

    Il secoua la tête de nouveau.

    — À en juger par ses signes vitaux et la perte de sang, ça ne sent pas bon.

    — Bon Dieu. Il ne portait pas de gilet pare-balles ?

    — Ça ne lui a servi à rien.

    — Balles anti-blindage ?

    Nick acquiesça.

    — Il était encore vivant en partant, toutefois. Donc tout est possible.

    — C’est bon à savoir.

    Mon propre gilet pare-balles me donnait la chair de poule. Parfois, ces choses étaient vraiment inutiles.

    — Je te laisse retourner au travail.

    — Ouais, idem.

    Je lui tapotai l’épaule puis continuai à traverser le club. En faisant le tour, je trouvai l’inspecteur Kent Avery, adossé au bar désert. Il travaillait sous couverture depuis quelques mois, mais je l’avais déjà vu au poste de police avant. Néanmoins, il avait l’air sacrément différent maintenant, avec tout ce sang étalé sur sa chemise.

    Ses mains étaient remarquablement calmes, tandis qu’il faisait défiler quelque chose sur l’écran de son téléphone, et il respirait lentement, régulièrement. De l’extérieur, il semblait parfaitement tranquille, mais je me doutais qu’il était secoué, il ne le montrait simplement pas. Je fus surpris de voir que personne ne se trouvait avec lui, pour lui poser des questions ou s’assurer qu’il allait bien.

    Je m’approchai avec précaution.

    — Avery ?

    Il me regarda et une lueur de reconnaissance se manifesta dans son vague signe de tête.

    — Clifton. Ça fait longtemps.

    — J’aurais préféré que ce soit dans de meilleures circonstances, dis-je en lui tendant la main. Tu tiens le coup ?

    — J’ai vu des jours meilleurs.

    Ignorant ma poignée de main, il s’écarta du bar.

    — Si tu as des questions, j’y ai déjà répondu.

    Je retirai ma main.

    — Hé, je voulais juste m’assurer que tu allais bien.

    — Mon partenaire est en route vers l’hôpital avec trois balles dans le corps. Comment penses-tu que je vais ?

    Sur ces mots, il se détourna et s’en alla. En le regardant descendre le couloir et disparaître dans l’allée derrière le club, je fus à la fois surpris par son hostilité et compréhensif envers son humeur. Son partenaire et lui étaient aussi proches que Max et moi. Être sur le point de perdre quelqu’un qui vous couvrait depuis si longtemps vous faisait forcément perdre la tête.

    Je me demandais alors pourquoi il était toujours là, mais bon, il ne pouvait rien faire d’autre pour John de toute façon. Peut-être qu’il avait besoin de se rabattre sur son travail. Nous étions tous connus pour nous jeter à corps perdu dans nos enquêtes afin d’échapper au stress et aux traumatismes, même si je n’étais pas certain que je serais resté si j’avais été à sa place. Mais bon, si ça l’aidait à traverser ça.

    Je frissonnai et retournai dans le salon. Pendant un moment, je me contentai de regarder la scène de crime, en essayant de comprendre ce qu’il s’était passé.

    Un impact de balle, une éclaboussure de sang et une trace qui s’étirait le long d’un mur entraînèrent mon regard vers l’un des corps. Un autre était étendu sur une banquette. À quelques pas de là se trouvait encore un autre, celui-ci avachi entre une banquette et une porte, sous un miroir Johnnie Walker qui arborait deux fissures ensanglantées autour d’impacts de balles séparés d’environ trente centimètres.

    Les balles avaient visiblement volé dans toutes les directions, donc il faudrait que j’attende le rapport balistique pour qu’il me fournisse un diagramme des trajectoires et des impacts afin de pouvoir en déduire ce qu’il s’était vraiment passé. Les déclarations de témoins seraient utiles. Pour le moment, nous n’en avions qu’un seul de potentiellement fiable. Si le partenaire d’Avery avait été touché, il y avait de grandes chances que celui-ci se soit trouvé non loin, ou même dans la salle. Je ne savais pas comment il avait réussi à éviter de se prendre une balle lui aussi, mais Dieu merci, au moins quelqu’un s’en était sorti indemne.

    Cela expliquait peut-être aussi son hostilité. La culpabilité du survivant était une chose étrange, et il ne voulait probablement pas que quelqu’un d’autre lui demande de revivre les événements durant lesquels son partenaire s’était pris trois balles alors qu’il s’en était sorti indemne. Il faudrait malgré tout que je lui pose quelques questions et il le savait probablement, mais je n’avais aucune raison de ne pas lui laisser le temps de reprendre son souffle d’abord. Après quelques cigarettes, quand Max et moi l’aurions peut-être emmené ailleurs que dans cette salle dont le sol était barbouillé du sang de l’inspecteur Kelly, je pourrais essayer de nouveau.

    Pour l’instant, je devais vérifier la scène de crime.

    — Tu as trouvé quelque chose ? demanda Max en relevant les yeux de l’un des deux corps près d’une banquette, tandis que je traversais le salon.

    — Pas pour l’instant, répondis-je en enfilant une paire de gants. Avery est assez secoué. Il est sorti par l’arrière, donc je pense que j’essaierai de lui parler de

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