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Frères d'âme
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Livre électronique220 pages3 heures

Frères d'âme

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À propos de ce livre électronique

1946. La Seconde Guerre mondiale est terminée. Pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, un tribunal international a été instauré à Nuremberg pour juger les criminels de guerre nazis. Johann von Biehn est l'un d'eux.

 

Pourtant, Frank Hawthorne, capitaine de l'armée américaine, défiant les ordres de ses supérieurs, se rend au procès de Nuremberg pour témoigner en faveur de von Biehn et tenter de le sauver.

 

Trois ans plus tôt, lors d'une mission ultrasecrète, Frank était parachuté en plein cœur de l'Allemagne pour assassiner l'homme même qu'il défend maintenant. Son séjour forcé dans la propriété des von Biehn dans le Spreewald, avait fait découvrir à Frank, derrière la façade du glacial officier nazi que Johann cultivait, un homme tendre et plein d'humanité, désespéré de sauver sa bien-aimée Allemagne de l'horreur nazie.

 

Et auprès de Johann, Frank, le soldat sans attache, avait trouvé ce qu'il ne cherchait pas ni n'espérait : l'amour.

 

Empêché par sa hiérarchie de révéler le contenu de la mission lors du procès, Frank se retrouve bien démuni pour déconstruire l'image que tout dans la carrière de von Biehn a mise en évidence. Il se doit de trouver un stratagème qui puisse éviter à Johann une exécution certaine tout en respectant le secret qui lui a été imposé.

LangueFrançais
Date de sortie13 août 2020
ISBN9781393899631
Frères d'âme
Auteur

Osiris Brackhaus

Beryll and Osiris Brackhaus are a couple currently living their happily ever after in the very heart of Germany, under the stern but loving surveillance of their cat. Both are voracious but picky readers, love telling stories and drinking tea, good food and the occasional violent movie. Together, they write novels of adventure and romance, hoping to share a little of their happiness with their readers.An artist by heart, Beryll was writing stories even before she knew what letters were. As easily inspired as she is frustrated, her own work is never good enough (in her eyes). A perfectionist in the best and worst sense of the word at the same time and the driving creative force of the duo.An entertainer and craftsman in his approach to writing, Osiris is the down-to-earth, practical one. Broadly interested in almost every subject and skill, with a sunny mood and caring personality, he strives to bring the human nature into focus of each of his stories.

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    Aperçu du livre

    Frères d'âme - Osiris Brackhaus

    © 2020 by Osiris Brackhaus, Kassel, Germany

    Tous droits réservés.

    Toute reproduction, même partielle, de cet ouvrage est interdite sans la permission explicite des auteurs. Pour plus d'informations, merci de contacter osiris@brackhaus.com.

    Ce livre est une œuvre de fiction. Bien que situés dans une période historique réelle, les situations, lieux et personnages sont imaginaires ou utilisés de façon fictive. Les personnes historiques dont les noms apparaissent au fil du récit sont utilisées librement pour les besoins des aventures, et bien qu'un souci de véracité historique soutienne la description de cette période de l'histoire, des détails ont été volontairement changés pour s'adapter au roman. Ne pensez surtout pas pouvoir réussir à une épreuve d'histoire en vous basant sur cette épopée ! L'ouvrage contient, par ailleurs, des passages sexuels explicites et est, par conséquent, à réserver à un public adulte averti.

    ––––––––

    Conception de la couverture : D.M Atkins et Siolnatine

    Couverture : Natalia Nesterova

    Mise en page : Osiris Brackhaus | brackhaus.com

    Traduit par : Ash Ehukai | Twitter : @AshEhukai

    ISBN 9798655435278

    www.brackhaus.com

    ––––––––

    Le traducteur remercie Gillian pour son aide patiente dans la résolution de quelques situations délicates rencontrées dans les méandres de la langue française ;)

    À ma délicieuse épouse

    1946. La Seconde Guerre mondiale est terminée. Pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, un tribunal international a été instauré à Nuremberg pour juger les criminels de guerre nazis. Johann von Biehn est l'un d'eux.

    Pourtant, Frank Hawthorne, capitaine de l'armée américaine, défiant les ordres de ses supérieurs, se rend au procès de Nuremberg pour témoigner en faveur de von Biehn et tenter de le sauver.

    Trois ans plus tôt, lors d'une mission ultrasecrète, Frank était parachuté en plein cœur de l'Allemagne pour assassiner l'homme même qu'il défend maintenant. Son séjour forcé dans la propriété des von Biehn dans le Spreewald, avait fait découvrir à Frank, derrière la façade du glacial officier nazi que Johann cultivait, un homme tendre et plein d'humanité, désespéré de sauver sa bien-aimée Allemagne de l'horreur nazie.

    Et auprès de Johann, Frank, le soldat sans attache, avait trouvé ce qu'il ne cherchait pas ni n'espérait : l'amour.

    Empêché par sa hiérarchie de révéler le contenu de la mission lors du procès, Frank se retrouve bien démuni pour déconstruire l'image que tout dans la carrière de von Biehn a mise en évidence. Il se doit de trouver un stratagème qui puisse éviter à Johann une exécution certaine tout en respectant le secret qui lui a été imposé.

    Chapitre 1 — Dans la gueule du lion

    Nuremberg, Allemagne. Septembre 1946.

    Descendre du train qui l'avait conduit à Nuremberg fut l'une des choses les plus difficiles que Frank ait vécues.

    Il avait sauté depuis des avions, accepté des missions secrètes, tué des gens simplement parce qu'on le lui avait ordonné et, cependant, rien ne lui avait jamais demandé autant de courage, autant de culot, que ce qu'il était venu faire cette fois.

    Ce fut finalement un autre voyageur – pressé de descendre du train – qui le débarqua sur le quai, et Frank se retrouva à nouveau sur le sol allemand. Ce fut bien moins terrible qu'il ne l'avait imaginé.

    La lumière grise du matin ne dissimulait aucune des cicatrices laissées par la guerre, ni les murs criblés de trous de balles, ni l'impeccable tas de décombres qui, seul, restait de la superbe aile ouest de la gare. À l'arrière, dans la brume matinale, la silhouette d'un château se dessinait, lugubre et vaguement menaçante, le château de Nuremberg, du nom de la ville même dans laquelle il avait à faire. Ici le monde décidait du sort de ce qui restait des têtes du régime nazi. Et Frank était appelé à témoigner dans l'un des vingt-cinq procès.

    Mais, contrairement aux autres fois où il s'était rendu dans ce pays, cette fois-ci Frank n'était pas là pour tuer ; il n'était pas là parce qu'on lui en avait donné l'ordre. Au contraire.

    Cette fois-ci, il était en Allemagne pour sauver l'homme qu'il aimait.

    ~~~ ~~~ ~~~

    Palais de justice. Salle 600. Nuremberg. Septembre 1946.

    — Je pense que chacun, ici, a conscience de la gravité de ce procès. Capitaine Hawthorne, jurez-vous de dire la vérité, rien que la vérité et toute la vérité ? demanda le Juge Lawrence sur un ton sévère.

    Frank entendait, en arrière-plan, derrière lui, le léger bourdonnement des voix des traducteurs.

    — Je le jure.

    Frank entendit son serment répété dans les langues officielles de la procédure à travers le murmure des traductions et, parlant lui-même couramment plusieurs d'entre elles, il eut l'impression d'un écho sinistre qui s'ajoutait à l'atmosphère déjà oppressante de la scène, comme si des fantômes du passé rapportaient ses mots à ceux qui ne pouvaient plus les entendre.

    — Accusation, le témoin est à vous.

    Frank, agacé, cligna des yeux. Il n'était pas d'usage que le procureur soit le premier à questionner un témoin de la défense. Mais il faut dire que cette situation n'avait guère de précédent. À sa gauche, le Procureur Général Robert H. Jackson remuait ses papiers avec beaucoup d'effet, lui donnant tout le loisir de détailler l'endroit, à son grand déplaisir.

    Le tribunal, qui n'était en fait rien d'autre qu'une immense salle, était bondé. Frank se trouvait face à quatre juges et quatre procureurs représentant les Alliés vainqueurs, États-Unis, Royaume-Uni, France et Union Soviétique, chacun accompagné de ses assistants.

    Le fond de la salle était encombré d'un bataillon de reporters venus du monde entier, de conseillers juridiques, d'historiens et de toutes sortes de civils. Des traducteurs, une bonne douzaine, répétaient ses paroles presque instantanément dans toutes les langues souhaitées ; des câbles, rassemblés en un épais faisceau, couraient à travers la pièce depuis leurs microphones, transportant les mots jusqu'aux casques de tous ceux qui en avaient besoin.

    À sa droite, encadrés de soldats alliés lourdement armés, étaient assis un unique officier nazi et son avocat. Graf Johann von Biehn, Oberst – ou colonel – de la Wehrmacht, était identique au souvenir que Frank avait de lui, grand et mince, une raie impeccable séparant ses cheveux d'un blond foncé, sanglé dans un uniforme gris qui lui allait si parfaitement qu'on avait l'impression qu'il avait été taillé pour le rendre élégant. L'archétype même de l'Aryen pur sang, s'il en existait. Mais Johann paraissait fatigué, son visage aristocratique presque aussi gris que son uniforme, et, assis sur l'un des bancs sombres en bois verni qui encombraient la salle à l'excès, il semblait perdu.

    Ce même bois foncé couvrait l'ensemble des murs et ne faisait rien pour alléger l'atmosphère ; il soulignait seulement la blancheur des casques des gardes.

    Si seulement Johann ne semblait pas aussi abattu, se dit Frank, la poitrine oppressée par une tristesse soudaine qui le fit frémir intérieurement. Pourquoi ne me regarde-t-il même pas ? Il avait du mal à réconcilier l'image de l'homme rieur, à l'élégance nonchalante et l'esprit d'une vivacité épuisante, qu'il gardait dans sa mémoire avec le prisonnier qu'il voyait en face de lui.

    Le Procureur Général Jackson, décidant finalement qu'il n'avait besoin d'aucun document pour la circonstance, s'avança d'un pas décidé vers la barre située au beau milieu de l'espace central où Frank attendait. C'était un petit homme dont la voix, cependant, emplit sans effort l'immense salle.

    — Et bien, capitaine Hawthorne, j'espère que votre vol a été agréable, déclara-t-il sans que le sourire qui adoucissait son visage carré n'atteigne jamais ses petits yeux rusés.

    — Oui, Monsieur, merci.

    — Il semble que l'avocat de la Défense soit convaincu que vous puissiez apporter quelque chose d'utile à ce dossier sans espoir.

    — Objection, votre Honneur ! s'exclama une voix sur la droite, et Frank eut du mal à réprimer un sourire.

    La dernière fois que Frank avait vu l'homme qui agissait en tant qu'avocat dans l'un des procès les plus importants de tous les temps, il était assis à l'arrière d'une bétaillère en une tentative désespérée de quitter l'Allemagne nazie. À l'époque, Elias était un réfugié émacié mais, même aujourd'hui, dans son impeccable costume, sa voix conservait cette inflexion candide, un peu enfantine, à laquelle il ne fallait pas se fier.

    — Monsieur Jackson, bien que votre opinion personnelle soit tout à fait respectable, ne devrions-nous pas laisser cette appréciation aux juges ?

    Des ricanements étouffés parvenus du fond de la salle furent les seuls bruits audibles pendant quelques instants, puis le Juge Lawrence prit la parole :

    — Objection retenue. Veuillez rayer ce commentaire.

    La présence d'une Défense semblait en elle-même pour le moins audacieuse aux yeux de Jackson ; c'était écrit sur son visage. Qu'elle donne de la voix était encore pire, et il prit comme un affront personnel la réprimande implicite que lui adressait le juge.

    — Bien sûr ! dit-il, lissant vers l'arrière ses cheveux bruns clairsemés en prenant grand soin de redonner à sa physionomie l'impassibilité qu'il souhaitait. Bien ! Capitaine Hawthorne, quelles que soient les circonstances qui vous amènent à intervenir ici en tant que témoin pour l'Oberst Graf von Biehn, votre gouvernement a fait en sorte que nous n'en sachions rien, ce qui, de mon point de vue, ne fait pas de vous un témoin pertinent.

    S'il s'attendait à une réponse, il fut déçu, car Frank n'était pas prêt à entrer dans ce jeu. Au contraire, il était là, debout, les mains croisées derrière le dos, attendant poliment qu'une véritable question lui soit posée. Les deux hommes se fixèrent pendant quelques instants, chacun se demandant ce qui faisait que l'autre avait l'air si sûr de bien agir alors que manifestement il ne le faisait pas. Frank voyait quasiment le reflet de ses pensées dans le regard de Jackson. Aux yeux de celui-ci, Frank, avec son allure athlétique, ses larges épaules, ses cheveux châtain foncé coupés en brosse et son uniforme impeccablement repassé, devait incarner l'image même du soldat américain. Son visage était anguleux, d'une beauté masculine, avec des yeux sombres, sérieux et quelque peu méfiants. Une récente cicatrice sur l'une de ses pommettes lui donnait un charme dangereux qui lui seyait.

    Il n'était pas étonnant que Jackson se demande comment Frank avait pu atterrir du mauvais côté, au moins apparemment, de cette affaire. Il n'avait pas l'air d'un traître. Ni, d'ailleurs, d'un pervers.

    — Capitaine Hawthorne, vous considérez-vous comme patriote ? demanda finalement Jackson. Je précise : est-ce que vous feriez volontairement une chose dont vous savez qu'elle puisse nuire à votre pays ?

    — Non, Monsieur.

    Une nuance de sincère mépris émaillait la voix de Frank lorsqu'il continua.

    — Je me considère comme un patriote, un soldat et un bon chrétien. Ma carrière militaire le prouve, sans aucun doute.

    — Je ne vais pas vous contredire sur ce point, que ce soit clair ! assura Jackson en souriant comme un serpent prêt à frapper. Est-il exact que vous ayez séjourné au manoir de l'Oberst von Biehn pendant environ deux semaines en août 1943 ?

    — Oui, Monsieur.

    — Travaillait-il avec les forces Alliées ?

    — Non, Monsieur.

    — Étiez-vous là pour amorcer une telle collaboration ?

    — Je ne suis pas habilité à divulguer cette information.

    — Bien sûr, agréa Jackson en se grattant pensivement la tête. Y avait-il eu, à un moment quelconque, une indication permettant de penser que l'Oberst von Biehn pourrait consentir à une telle collaboration ?

    — Non, Monsieur.

    — Est-il aussi exact qu'il était considéré comme l'un des stratèges les plus habiles de l'armée allemande, la Wehrmacht ?

    — Oui, Monsieur.

    — Un ami proche du ministre du Reich Goebbels dont Hitler lui-même a fait plusieurs fois l'éloge pour l'adresse de ses manœuvres militaires et politiques ?

    — Oui.

    — Un membre réputé et de confiance de l'élite nazie ?

    — Oui.

    — Et, est-il exact, qu'après quelques jours en sa présence, vous avez abandonné votre mystérieuse mission ?

    À cette question qui ressemblait au moins autant à une accusation qu'à tout autre chose, un grand calme envahit la salle. Frank cherchait désespérément une réponse appropriée mais son silence prolongé en disait déjà trop.

    — Veuillez répondre à la question, s’il vous plaît, Capitaine.

    — J'ai, de mon propre chef, changé l'objectif de ma mission, c'est vrai, Monsieur. Et j'ai reçu une distinction pour conduite exceptionnelle par la suite.

    — Bien sûr, acquiesça Jackson en souriant comme si Frank venait délibérément de pointer un fusil sur sa propre poitrine. Et, qu'en pensez-vous, Monsieur Hawthorne, que devons-nous retenir de votre présence ici ? Sinon que cet homme non seulement était au courant de tous les crimes militaires et humanitaires du Troisième Reich pour lesquels il comparait ici, mais a aussi joué un rôle vital dans leur élaboration ? Et que ses talents de persuasion étaient suffisamment puissants pour influencer même un esprit patriotique aussi ardent que le vôtre ?

    — Objection, votre Honneur ! coupa la voix d'Elias, désamorçant la tension. Le témoin est conduit à faire des suppositions.

    Un sentiment d'effroi glaça Frank et il se demanda si sa venue ici allait, en définitive, aider Johann. C'est sûr que, pour l'instant, ça n'en avait pas l'air.

    Comparé à cela, sauter d'un avion en territoire ennemi ressemblait à un jeu d'enfant.

    ~~~ ~~~ ~~~

    Espace aérien au-dessus de Lübbenau. Allemagne. Août 1943.

    Sauter d'un avion en territoire ennemi, la nuit, devenait non pas vraiment un jeu d'enfant mais quelque chose de quasiment normal si on le faisait assez souvent.

    — Capitaine ? cria une voix venue de l'ombre quelque part près du cockpit au bout du petit avion. Vous êtes prêt ? Nous approchons de Lübbenau.

    Plutôt que d'essayer de se faire entendre par-dessus le bruit des moteurs, Frank leva le pouce en direction du soldat et ajusta son parachute. Il avait rapidement fait les vérifications d'usage et le reste de son équipement était sanglé dans un autre sac sur sa poitrine.

    Étrange que des trucs pareils puissent devenir des exercices de routine, se dit-il en avançant vers l'ouverture béante à travers laquelle il était supposé sauter. L'obscurité s'étendait de tous côtés, masse informe d'un noir compact que seuls perçaient quelques minuscules lueurs venues du sol et le timide rougeoiement qui menaçait à l'horizon.

    Il avait vu sur la carte que sa mission allait le conduire à quelque quatre-vingts kilomètres de Berlin, mais que cela soit aussi près, jamais Frank ne l'avait imaginé. Au-dessous de lui, le Spreewald s'étalait dans la nuit, une large forêt couvrant cette partie unique de la rivière Spree qui, un peu plus loin, s'en irait courir en plein cœur du Troisième Reich.

    Dans cette forêt, l'Oberst Johann Graf von Biehn possédait un manoir où il allait accueillir le plus important rassemblement d'attachés militaires d'Allemagne depuis le début de la guerre. Et la tâche que le capitaine Hawthorne devait accomplir était de se rendre là-bas, de trouver le manoir puis de se cacher dans les marais et la forêt le temps nécessaire pour assassiner von Biehn et deux de ses invités. Et si, au cas où la rumeur fût vraie, Goebbels venait en personne en cette occasion propice, il deviendrait alors la cible numéro un de Frank.

    Le côté comique de l'histoire était que rester en vie et revenir ne faisaient pas partie des ordres explicites que Frank avait reçus.

    Il y aurait, comme à chaque fois, certains arrangements faits pour s'assurer qu'il puisse rentrer. Au moins théoriquement.

    Frank sourit en pensant que parmi ses huit dernières missions, aucune n'avait mérité d'autre estimation que probabilité de retour nulle. Le fait qu'il soit ici aujourd'hui prouvait que même les grosses têtes du QG n'étaient pas infaillibles. Il avait survécu au désert algérien, à la Sibérie, à Paris occupé et à plusieurs missions en Allemagne. Cette nuit serait la sixième fois qu'il allait s'enfoncer dans le fief de l'ennemi pour en éliminer quelques-uns de leurs précieux cerveaux aryens.

    Il fallait reconnaître que cette mission était plus dangereuse que les précédentes. Mais, en fait, chaque nouvelle mission dans laquelle il s'engageait semblait plus dangereuse que la précédente. La pire chose qui pouvait arriver était qu'il soit tué. Ce ne serait pas une grosse perte.

    — Capitaine Hawthorne ? appela une tête coiffée d'un énorme casque d'aviation surgie du ventre noir de l'avion. Nous arrivons sur la zone de largage. Dernière chance de faire demi-tour.

    Frank se contenta de rire à cette suggestion.

    Il n'avait pas mis en péril la vie de l'équipage de cet avion pour se dégonfler au dernier moment. Personne ne pouvait dire combien de temps la fenêtre dans la couverture radar de la Mer Baltique resterait ouverte et il leur fallait faire le meilleur usage de tous les avions qu'ils parvenaient à faire passer incognito.

    Le jeune soldat qui se trouvait à côté de lui acquiesça silencieusement ; son visage indiquait qu'il ne s'attendait pas à une réponse. Il sourit,

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